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01/12/2017 | BéNIN | N°33/CJ-DF

Bénin | Bénin, Cour suprême, 01 décembre 2017, 33/CJ-DF


Texte (pseudonymisé)
N° 33/CJ-DF du répertoire ; N° 2011-13/CJ-CT du greffe ; Arrêt du 1° décembre 2017 ; Affaire: AG AI B X A AG Ae C/ AH HOUNKPATIN.
Droit foncier — Droit de propriété — Décision fondée sur le statut d’esclave — Violation de la loi — Violation des principes fondamentaux de non-discrimination et d’égalité — Cassation.
Encourt cassation pour violation de la loi et violation des principes fondamentaux de non-discrimination et d’égalité entre les Hommes, l’arrêt rendu en matière de droit de propriété foncière, fondé sur le statut d’esclave d’une partie.


La Cour,
Vu l’acte n°32/2009 du 08 décembre 2009 du greffe de la cour d'appel de Cotonou par...

N° 33/CJ-DF du répertoire ; N° 2011-13/CJ-CT du greffe ; Arrêt du 1° décembre 2017 ; Affaire: AG AI B X A AG Ae C/ AH HOUNKPATIN.
Droit foncier — Droit de propriété — Décision fondée sur le statut d’esclave — Violation de la loi — Violation des principes fondamentaux de non-discrimination et d’égalité — Cassation.
Encourt cassation pour violation de la loi et violation des principes fondamentaux de non-discrimination et d’égalité entre les Hommes, l’arrêt rendu en matière de droit de propriété foncière, fondé sur le statut d’esclave d’une partie.
La Cour,
Vu l’acte n°32/2009 du 08 décembre 2009 du greffe de la cour d'appel de Cotonou par lequel maître Elie VLAVONOU, avocat, conseil de B AG AI, représenté par Ae AG a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°65/09 rendu le 03 novembre 2009 par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, administrative, sociale et des comptes ;
Vu les pièces du dossier ;
Oui à l’audience publique du vendredi premier décembre deux mille dix-sept, le conseiller Magloire MITCHAÏ en son rapport ;
Ouï l'avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°32/2009 du 08 décembre 2009 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Elie VLAVONOU,
avocat, conseil de B AG AI, représenté par Ae AG a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°65/09 rendu le 03 novembre 2009 par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;
Que par lettre n°1106/GCS du 22 juin 2011 du greffe de la Cour suprême, le demandeur au pourvoi a été mis en demeure de consigner dans un délai de quinze (15) jours et de produire son mémoire ampliatif dans un délai d’un (01) mois, le tout conformément aux dispositions des articles 3, 6 et 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédure applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Que la consignation a été payée suivant reçu n°4116 du 12 juillet 2011 ;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ;
Que le parquet général a produit ses conclusions en date du 05 juillet 2017, lesquelles ont été communiquées aux parties conformément à l’article 937 du code de procédure civile, commerciale, administrative, sociale et des comptes pour leurs observations ;
EN LA FORME
Attendu que le pourvoi ayant été élevé dans les forme et délai de la loi, il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête du 17 août 2000, les héritiers B AG AI, représentés par Ae AG, ont attrait AI AH devant le tribunal de première instance de Cotonou statuant en matière de droit traditionnel en confirmation de droit de propriété sur un domaine de quatre (04) hectares sis au village de Z à Aa dans la commune d’Abomey-Calavi ;
Que ce tribunal a, par jugement n°14/1CB/06 du 16 mars 2006, constaté que l'attestation de vente du 1°" mars 1936 lie les cocontractants et n’est pas entachée de faux, constaté cependant que cette attestation de vente n’a pas été authentifiée tel que l’exige le décret organique du 02 mai 1906 et n’a donc pas date certaine,
qu’elle n’est pas opposable aux tiers et peut être combattue par preuve testimoniale, constaté que plusieurs témoignages indiquent que le domaine en cause appartient à la collectivité AH et plus particulièrement à GBEKPO, grand-père en ligne directe du défendeur AH AI Ac, constaté que la vente intervenue entre Y Ag Af C Z et AG AI B porte sur la chose d’autrui et est donc nulle ; débouté les hoirs KPOYE de leurs prétentions et confirmé le droit de propriété de AH AI Ac sur le domaine querellé de forme irrégulière sis à Aa Z, commune d’Abomey-Calavi, et dit et jugé que la présente décision servira de titre de propriété au nommé AH AI Ac ;
Que, sur appels des héritiers AI AG et de Ad Ab AG, la cour d'appel de Cotonou a rendu l’arrêt n°65/09 du 03 novembre 2009 ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION DES MOYENS
Premier moyen tiré de la violation de la loi
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué la violation de la loi en ce que, pour annuler le jugement entrepris, la cour d’appel de Cotonou a retenu que le statut social de Ag Af Y ne lui permettait pas de poser un acte de disposition, en l’occurrence la vente du domaine exploité et a ainsi tiré du statut d’esclavage d’une personne humaine le motif déterminant de sa décision ; que de même, en énonçant que dans la plupart des coutumes, les esclaves étaient astreints à travailler la terre pour leur maître, et que les esclaves ne pouvaient hériter que dans le cas où leur maître mourrait sans postérité, il est indiscutable que le juge d'appel a ainsi fait du statut d’esclave de TAKPANOU Akowé le motif déterminant de sa décision, alors que, selon le moyen, aux termes des dispositions de l’article 5 de la Charte africaine des droits de l’homme et de l’article 4 de la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 :
- « Tout individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine et, à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d'exploitation et d’avilissement de l'homme notamment l’esclavage, la traite des personnes, la torture physique ou morale, et les peines ou traitements cruels innumains ou dégradants sont interdits » ;
- « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude : l'esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes… » ; Qu’en décidant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges d’appel ont violé la loi, notamment la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 portant constitution de la république du Bénin, et les articles 5 de la Charte africaine des droits de l'homme et 4 de la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 qui font partie intégrante de ladite loi ;
Attendu en effet, que pour annuler le jugement entrepris et confirmer le droit de propriété de AI Ac AH sur le domaine litigieux, les juges d'appel, se sont bornés à énoncer qu’il n’est pas contesté au dossier que Ag Y était membre d’une famille d'esclaves au service du véritable propriétaire du domaine litigieux.…, que les esclaves ne pouvaient hériter que dans le cas où leur maître (chef de famille) mourrait sans postérité ; que …Ie statut social de Ag Af Y ne lui permettait pas de poser un acte de disposition, en l’occurrence la vente du domaine exploité ;
Qu'’en se décidant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges de la cour d'appel ont violé la loi et les principes fondamentaux de la non discrimination et de l’égalité entre les hommes ;
Que dès lors l’arrêt encourt cassation sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens évoqués ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Au fond, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés, casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt n°65/09 du 03 novembre 2009 rendu par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou ;
Renvoie l'affaire devant la cour d’appel de Cotonou autrement composée ;
Met les frais à la charge du Trésor public.
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la cour d'appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :
Magloire MITCHAÏ, conseiller à la chambre judiciaire,
PRESIDENT ; Michèle CARRENA-ADOSSOU
Et CONSEILLERS ; Antoine GOUHOUEDE
Et prononcé à l’audience publique du vendredi premier décembre deux mille dix-sept, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Saturnin AFATON, avocat général ;
MINISTERE PUBLIC ; Mongadji Henri YAÏ,
GREFFIER ; Et ont signé
Le président-rapporteur, Le greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 33/CJ-DF
Date de la décision : 01/12/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2017-12-01;33.cj.df ?
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