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29/09/2017 | BéNIN | N°28/CJ-CT

Bénin | Bénin, Cour suprême, 29 septembre 2017, 28/CJ-CT


Texte (pseudonymisé)
N° 28/CJ-CT du Répertoire ; N° 2000-24/CJ-CT du greffe ; Arrêt du 29 septembre 2017 ; Affaire : JEAN Z C C/ AL X AG REPRESENTEE PAR ALOOUTADE AHOUANSE DANIEL.
Procédure civile — Pourvoi en cassation — Moyen tiré de la violation de la loi par refus d’application — Mention de la coutume — Non spécification par la loi de la partie dédiée à la mention de la coutume des parties — Pluralité des modes de preuves — Rejet.
Procédure civile — Pourvoi en cassation — Moyen tiré de la dénaturation des faits — Rejet.
Encourt rejet, le moyen tiré de la violation p

ar refus d’application, de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931, pour avoir...

N° 28/CJ-CT du Répertoire ; N° 2000-24/CJ-CT du greffe ; Arrêt du 29 septembre 2017 ; Affaire : JEAN Z C C/ AL X AG REPRESENTEE PAR ALOOUTADE AHOUANSE DANIEL.
Procédure civile — Pourvoi en cassation — Moyen tiré de la violation de la loi par refus d’application — Mention de la coutume — Non spécification par la loi de la partie dédiée à la mention de la coutume des parties — Pluralité des modes de preuves — Rejet.
Procédure civile — Pourvoi en cassation — Moyen tiré de la dénaturation des faits — Rejet.
Encourt rejet, le moyen tiré de la violation par refus d’application, de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931, pour avoir énoncé la coutume des parties dans le dispositif, dès lors que cette disposition n’a pas spécifié la partie précise de la décision où elle doit figurer. Par ailleurs, le juge dispose de la faculté d’exploiter plusieurs modes de preuve pour établir la vérité des faits.
Encourt rejet, le moyen tiré de la dénaturation des faits, celle- ci ne constituant pas un cas d’ouverture à cassation.
La Cour,
Vu l’acte n°8/2000 du 2 février 2000 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, par lequel Al Ai AJ, représentant Ag Z C, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°07/2000 rendu le 1° février 2000 par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, administrative, sociale et des comptes ;
Vu la loi n°2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi vingt-neuf septembre deux mille dix-sept, le conseiller Antoine GOUHOUEDE en son rapport ;
Ouï l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°8/2000 du 2 février 2000 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, Al Ai AJ, représentant Ag Z C, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°07/2000 rendu le 1° février 2000 par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou ;
Que par lettre n°1641/GCS du 30 juin 2000 du greffe de la Cour suprême, maîtres Ac A et Ah AI, conseils de Ag Z C, ont été mis en demeure de consigner dans le délai d’un (01) mois, le tout conformément aux dispositions des articles 42, 45 et 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour suprême ;
Attendu que la consignation a été payée;
Attendu que maîtres Gabriel et Ab Y ont, par lettre n°0066/2001/GRD/JM du 24 janvier 2001, annoncé leur constitution aux intérêts de Ag Z C et produit le mémoire ampliatif daté du 1°" mars 2001 ;
Que le mémoire en défense daté du 5 avril 2001 a été produit par maître Augustin COVI ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi ayant été élevé dans les forme et délai de la loi, il convient de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et procédure Attendu que par requête du 06 juillet 1995, la collectivité FOFO DJAKA a saisi le tribunal de première instance de Porto-Novo aux fins de revendication de la propriété d’une parcelle de terrain sise à AK (Porto-Novo contre Aj Ak AH, Ad B et Ag Z C ;
Que le tribunal a, notamment décidé, par jugement n°46/B/96 du 07 mai 1996 ce qui suit :
« Dit et juge au regard des vestiges et des témoignages des premiers propriétaires originaires d’Ekpè, des sages, des limitrophes et du nommé B Ad, Chef féticheur et membre de la collectivité demanderesse que le domaine querellé est la propriété du sieur AH Ak pour l’avoir acquis par dévolution successorale de son feu père AH Aj ;
-confirme son droit de propriété sur le domaine litigieux s'étendant de la terre ferme à la lagune et mesurant 14a15ca de superficie ;
-Dit que le sieur AH Ak a transféré tous les démembrements de son droit de propriété à son acquéreur le sieur Z Ag C ;
-En conséquence, confirme le nouvel acquéreur Ag Z C dans son droit de propriété sur le domaine sis à AK d’une contenance de 14a 15ca ;
-Déboute la collectivité FOFO DJAKA de ses moyens et lui fait défense d’avoir à mettre pieds désormais sur la parcelle querellée et d’avoir à troubler le sieur Ag Z C dans la jouissance paisible de son bien » ;
A la suite de l’appel relevé par maître COVI Augustin, la cour d'appel de Cotonou a, quant à elle, infirmé ledit jugement par son arrêt n°07/2000 du 02/02/2000 et décidé notamment ainsi qu’il suit : « Dit que le premier juge a statué ultra petita ;
Infirme en conséquence le jugement entrepris ;
Dit que le terrain sis à Af Aa Ae d’une superficie de 09 ares 15 centiares est la propriété exclusive de la collectivité FOFO DJAKA ;
Confirme en conséquence le droit de propriété de ladite collectivité sur le domaine ;
Dit que le domaine de AH Ak qui jouxte celui de la collectivité FOFO DJAKA est d’une superficie de 500 m? ;
Annule la vente consentie à Z C Ag par AH Ak ;
Fait défense à AH Ak et Z C Ag de troubler la collectivité FOFO DJAKA dans la jouissance de son droit ; »
C’est contre cet arrêt que le présent pourvoi est élevé ;
DISCUSSIONS
Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi par refus
d’application de la coutume « goun » et de l’article 85 du
décret du 03 décembre 1931 ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt déféré d’avoir violé l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 qui prescrit à tout jugement et arrêt en matière de droit traditionnel les mentions relatives aux dépositions des témoins.
Que malgré le transport judiciaire effectué le 22 octobre 1998 et le procès-verbal y relatif, l’arrêt de la cour d'appel ne comporte aucune déclaration des parties, ni des témoins, alors qu’il s’agit d’une formalité substantielle dont l’omission constitue une cause de nullité d’ordre public ;
Que par ailleurs, la chambre d’annulation se montre très rigoureuse en ce qui concerne l’énoncé de la coutume qui est le seul moyen qui permet d’en contrôler l’exacte application ;
Que la jurisprudence établie est que l’énoncé doit porter sur tous les points de la coutume intéressant le procès et que l’absence de l’énoncé de la coutume applicable est considérée comme une cause de nullité du jugement ou de l’arrêt ;
Que l'arrêt attaqué n’a énoncé la coutume « goun » qui est celle des parties que dans son dispositif ;
Que dans cette coutume la preuve se fait par témoins, ce qui n’a pas été le cas dans l’arrêt déféré ;
Que la cour d’appel a statué en équité et n’a pas fait une rigoureuse application de la loi ;
Mais attendu que l’article 85 du décret organique prescrivant que « les jugements et arrêts des juridictions de droit local doivent mentionner l'énoncé complet de la coutume appliquée « n’a pas indiqué la partie précise du jugement ou de l’arrêt où elle doit être mentionnée ;
Que l’arrêt déféré comporte au début de son dispositif « statuant publiquement, contradictoirement, en matière de droit traditionnel, en appel et en dernier ressort avec l’assesseur Goun de la coutume des parties » ;
Qu’en inscrivant la mention de la coutume goun, celle des parties, au dispositif, partie finale d’une décision judiciaire contenant la solution du litige et à laquelle est attachée l’autorité de la chose jugée, les juges d'appel n’ont pas violé la loi ;
Que par conséquent ce moyen ne saurait être accueilli ;
Attendu, par ailleurs, sur le grief que l'arrêt attaqué ne comporte nulle part les dépositions des témoins, que les juges ont la faculté d’exploiter plusieurs modes de preuve mis à leur disposition par la loi pour établir la vérité dans le procès ;
Qu'’en l’espèce la cour d'appel a affirmé, « qu’eu égard aux circonstances du procès, il y a lieu de s'en tenir au procès-verbal du 06 mai 1994 dressé par les autorités administratives et signé par les intimés et aux constatations faites par la cour lors du transport judiciaire, pour dire que la parcelle de AH Ak a une superficie de 500 m° au lieu de 598 m° qu’il a toujours revendiqués » Que le moyen selon lequel la cour d’appel n’a pas respecté l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 en ne se référant pas de façon explicite aux dépositions de témoins n’est pas fondé ;
Qu'il y a lieu de rejeter ce moyen ;
Sur le deuxième moyen de cassation tiré de la dénaturation des faits et de l’insuffisance de motifs.
Attendu qu’il est reproché à la cour d'appel de Cotonou d’avoir, en plus d’autres moyens de preuve, fondé sa décision sur la visualisation d’une cassette vidéo produite par des membres de la collectivité FOFO DJAKA, enregistrée lors d’une cérémonie appelée « Hounhouè » qui aurait montré « des membres de la collectivité FOFO DJAKA sacrifiant à la tradition de leur fétiche sur le domaine querellé » et « lors du déroulement de la cassette, la cour aurait même vu la fille de B Ad avec le fétiche » alors que les images de ladite cassette peuvent être manipulées ;
Que ce mode de preuve n’offre pas la garantie nécessaire à la manifestation de la vérité et n’est pas non plus prévu par la coutume des parties ;
Que le principe selon lequel nul n’est admis à se forger sa propre preuve et celui du contradictoire, a été violé ;
Que le juge d’appel a dénaturé les faits en ne remplaçant pas le débat dans son contexte réel ;
Que pour qu’une décision soit réputée suffisamment motivée, il faut des motifs explicites, qui ne doivent pas être en termes généraux ;
Que la décision de la cour d’appel n’est pas suffisamment motivé ;
Que la dénaturation des faits et l'insuffisance de motifs constituent des causes de cassation ;
Que l'arrêt attaqué encourt cassation ;
Mais attendu que la dénaturation des faits n’est pas un cas d'ouverture à cassation ; et que, seul un écrit peut faire l’objet du grief de dénaturation ;
Attendu par ailleurs que la cour d'appel, pour décider, s’est fondée entre autres éléments de preuve, sur le transport judiciaire du 22 octobre 1998, ses constatations sur les lieux et sur le procès- verbal de séance de travail du 06 mai 1994 dressé par les autorités administratives et signé par les intimés ;
Que la visualisation de la cassette vidéo produite par la collectivité FOFO DJAKA à titre de moyen de preuve quoique ne présentant pas suffisamment de garantie ou de fiabilité, n'altère pas la valeur des autres éléments de preuve ;
Qu’en tout état de cause, la cour d’appel a suffisamment motivé sa décision ;
Que par conséquent, ce moyen ne peut prospérer ;
PAR CES MOTIFS
En la forme reçoit le pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge de Jean Z C représenté par Al Ai AJ.
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la cour d'appel de Cotonou ainsi qu'aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judicaire) composée de :
Magloire MITCHAÏ, conseiller à la chambre judiciaire, PRESIDENT
Antoine GOUHOUEDE
Et CONSEILLERS ; Thérèse KOSSOU
Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-neuf septembre deux mille dix-sept, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Saturnin AFATON, avocat général, MINISTERE PUBLIC ;
Hortense LOGOSSOU-MAHMA, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président le rapporteur,
Magloire MITCHAÏ Antoine GOUHOUEDE
Le greffier.
Hortense LOGOSSOU-MAHMA


Synthèse
Numéro d'arrêt : 28/CJ-CT
Date de la décision : 29/09/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2017-09-29;28.cj.ct ?
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