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08/06/2017 | BéNIN | N°54

Bénin | Bénin, Cour suprême, 08 juin 2017, 54


Texte (pseudonymisé)
N°54/CA du Répertoire


Arrêt du 08 juin 2017

L'International de Négoce et de Distribution
Commerciale (INDICO SA)

Etat béninois représenté par l'A.JT

CI


REPUBLIQUE DU BENIN

AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

COUR SUPREME

CHAMBRE ADMINISTRATIVE


Vu la requête en date à Porto-Novo du 31 décembre 2012
enregistrée au greffe de la Cour le 23 janvier 2013 sous n0069/GCS, par
laquelle la société « L'International de Négoce et de Distribution
Commerciale (INDICO SA) », immatr

iculée au Registre de Commerce et
de Crédit Mobilier (RCCM) sous le numéro 2003 B 503, ayant pour
conseil, Maître Saïdou AGBANTOU, a...

N°54/CA du Répertoire

Arrêt du 08 juin 2017

L'International de Négoce et de Distribution
Commerciale (INDICO SA)

Etat béninois représenté par l'A.JT

CI

REPUBLIQUE DU BENIN

AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

COUR SUPREME

CHAMBRE ADMINISTRATIVE

Vu la requête en date à Porto-Novo du 31 décembre 2012
enregistrée au greffe de la Cour le 23 janvier 2013 sous n0069/GCS, par
laquelle la société « L'International de Négoce et de Distribution
Commerciale (INDICO SA) », immatriculée au Registre de Commerce et
de Crédit Mobilier (RCCM) sous le numéro 2003 B 503, ayant pour
conseil, Maître Saïdou AGBANTOU, avocat à la Cour, a saisi la Cour
d'un recours de plein contentieux en condamnation de l'Etat béninois au
paiement d'une somme de quinze milliards (15 000000000) de francs à
titre de dommage-intérêts pour toutes causes de préjudices confondues;

Vu la loi n? 2004-07 du 23 octobre 2007 portant Composition,

Organisation, Fonctionnement et Attributions de la Cour suprême;

Vu la loi n? 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures

applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême;

Vu les pièces du dossier;

Ouï le Président Victor D. ADOSSOU en son rapport ;

Ouï le Procureur Général Aa A en ses conclusions;

Après en avoir délibéré conformément à la loi;

2

EN LA FORME

Sur l'irrecevabilité tirée de l'autorité de la chose iugée

Considérant que la requérante, par l'organe de son conseil

expose:

Qu'elle importe et commercialise, depuis le mois de juillet 2004,
de l'huile alimentaire « DUOR», produite par la Société NIOTO du
Togo, laquelle huile est reconnue comme un produit communautaire
aussi bien par la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest (l'Ouest (CEDEAO) que par l'Union Economique et Monétaire Ouest
Africaine (UEMOA), par divers agréments et dispositions des traités de
ces dernières ;

Qu'en vertu desdits agréments et dispositions des traités desdites
communautés signés et ratifiés par le Bénin, elle importe l'huile
alimentaire « DUOR» produite à Lomé (Togo) par voie terrestre;

Que contre toute attente et suivant arrêté interministériel
n01115 IMOEFIMICIDC/SGIDGDDIIDGCIIDGCE en date du 08
novembre 2006 portant interdiction temporaire de l'importation au Bénin
des huiles alimentaires par voie terrestre, les ministres en charge
respectivement des finances et du commerce, ont conjointement interdit
l'importation au Bénin, des huiles alimentaires par voie terrestre;

Qu'ainsi, l'importation de l'huile alimentaire «DUOR» produite
au Togo, bien que bénéficiant des agréments communautaires, s'est
trouvée interdite de commercialisation par voie terrestre;

Qu'elle a dû, par l'organe de son Conseil, saisir les ministres
signataires dudit arrêté, par correspondance en date à Cotonou du 12
décembre 2006 portant recours gracieux les invitant à rapporter l'arrêté
interministériel querellé ;

Que ledit recours a été également porté à la connaissance du
Président de la République suivant correspondance en date du 13
décembre 2006 ;

Que ce n'est que le 18 décembre 2007, soit plus d'un (01) an
après, que ledit arrêté querellé a été rapporté par l'arrêté conjoint
n00087/MTCIMEFIDC/SGIDGDDlIDGCPDGCT portant interdiction
temporaire de l'importation au Bénin des huiles alimentaires non
originaires de l'lffiMOA et de la CEDEAO par voie terrestre par les
ministres en charge des finances et celui du commerce;

JI

2

3

Que l'arrêté nOll15/MDEF/MIC/DCISG/DGDDUDGCI/DGCE

portant interdiction temporaire de l'importation au Bénin des huiles
alimentaires par voie terrestre en date du 08 novembre 2006 qui a
manifestement violé les dispositions des traités communautaires, lui
ayant causé d'énormes préjudices commerciaux, elle a saisi la chambre
administrative de la Cour suprême, par requête introductive d'instance
valant mémoire ampliatif en date du 25 mars 2011, aux fins de
réparation;

Que ce recours s'est soldé par line décision d'irrecevabilité pour

défaut de liaison du contentieux;

Que c'est ainsi que pour régulariser, elle a, par l'organe de son
conseil, saisi l'administration d'un recours amiable préalable par
correspondance en date du 14 septembre 2012, réceptionné le 18
septembre 2012 ;

Que ledit recours étant resté sans suite, ce qui est la preuve d'un
rejet implicite, elle a saisi, à nouveau, la haute juridiction pour statuer sur
sa demande en réparation de préjudices;

Considérant que la requête introductive d'instance valant
mémoire ampliatif en date du 31 décembre 2012 ainsi que les pièces y
annexées de la requérante, ont été communiquées à l'administration
représentée par l'Agent Judiciaire du Trésor;

Considérant que l'Agent Judiciaire du Trésor (AJT) a, par
correspondance n01038/PRJ'CC/BGCiSA du 09 septembre 2013, produit
ses observations par lesquelles, il soutient au principal, l'irrecevabilité du
recours de plein contentieux de la requérante tirée de l'autorité de la
chose jugée;

Que l'administration, représentée par l'Agent judiciaire du trésor,
conclut, en effet, à l'irrecevabilité du recours de la requérante au motif
que la chambre administrative a déjà connu par le passé dudit recours et a
rendu le 19 juillet 2012 l'arrêt par lequel, elle a déclaré la requérante
irrecevable en son recours de plein contentieux tendant à voir l'Etat
béninois condamné au paiement de la somme de quinze milliards
(15 000 000 000) de francs;

Que dans ces conditions, la requérante ne peut efficacement

soumettre à nouveau la même demande à la même juridiction;

Que l'irrecevabilité induite par la sanction du non respect du
principe de la décision préalable tirée de la fin de non recevoir proposée

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par l'Etat béninois, bénéficie irrémédiablement de l'autorité de la chose
jugée;

Que le requérant qui avait déjà saisi, il y a quelques années la

Cour, a vu son recours déclaré irrecevable;

Mais considérant que la chambre administrative, effectivement
saisie d'une telle requête de la part de la requérante, a eu à la déclarer
irrecevable pour défaut de liaison du plein contentieux ;

Que l'arrêt nOI06/CA du 19 juillet 2012 rendu relativement à

cette requête n'a point vidé le dossier au fond ;

Que l'exigence légale de liaison du contentieux est de celles qui

sont régularisables ;

Qu'en effet, la doctrine et la jurisprudence sont unanimes sur le
principe selon lequel seuls les jugements définitifs, c'est-à-dire les
jugements sur le fond, ceux qui tranchent le principal après un débat
entre les parties, revêtent l'autorité de la chose jugée;

Que comme le soutient le Conseil de la requérante dans son
mémoire en contre réplique, chaque fois qu'une demande est déclarée
irrecevable pour défaut d'accomplissement d'une formalité ou pour
exception de procédure, le demandeur est admis à réintroduire sa
demande après avoir accompli ladite formalité si son action n'est pas
atteinte par la prescription;

Considérant que conformément aux textes de lois régissant la
procédure devant la haute juridiction, en matière de plein contentieux, il
ne peut être opposé au demandeur d'autres forclusions que celles tirées
de la forclusion trentenaire;

Considérant que la requérante a repris la formalité de la décision

préalable et satisfait aux exigences de délai prévues par la loi ;

Que c'est à bon droit qu'elle soutient la recevabilité de son

recours en date du 31 décembre 2012 ;

Que par conséquent, l'irrecevabilité tirée de l'autorité de la chose

jugée soutenue par l'AJT en la présente cause, ne saurait prospérer;

Qu'il y a lieu de déclarer recevable le recours introduit par la
société "L'International de Négoce et de Distribution Commerciale
(TNDTCO SA)" ;

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5

AU FOND

Sur la violation de la légalité communautai.'c
interministériel

querellé

par l'an'êté

Considérant ainsi que le soutient la requérante que le Traité révisé
de la Communauté Economique
des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO) en date du 24 juillet 1993 en son article 3 point 2 (d) iii incite
les Etats de la communauté à « La création d'un marché commun à
travers:

La suppression

entre les Etats Membres, des obstacles à la
libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux
ainsi qu'aux droits de résidence et d'établissement ... »

Qu'abondant dans le même sens, l'article 4 du traité modifié de
l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) en date du
29 janvier 2003, énumérant les objectifs de J'Union, dispose au point Cc) :

« Sans préjudice des objectifs définis dans le Traité de
l'UEMOA, l'Union poursuit, dans les conditions établies par le
présent traité, la réalisation des objectifs ci après:

c) créer entre les Etats membres un marché commun basé sur
la libre circulation des personnes, des biens, des services, des
capitaux et le droit d'établissement des personnes exerçant une
activité indépendante ou salariée, ainsi que sur un tarif extérieur
commun et une politique commerciale commune» ;

Qu'il apparaît ainsi, à la lecture combinée des articles sus visés,
que les biens et les personnes doivent pouvoir circuler librement dans les
espaces communautaires (CEDEAO et UEMOA), tant par voies
maritime, aérienne que terrestre et ce, sans aucune restriction ou
limitation;

toutefois

Considérant

ces dispositions
communautaires, les Etats membres de la Communauté, pour des raisons
d'intérêt national, peuvent prendre des mesures d'interdiction temporaire
de circulation de tels ou tels produits par telle ou telle voie;

que nonobstant

Considérant que les restrictions ainsi autorisées par les normes

communautaires restent toutefois encadrées par lesdites normes;

Que c'est en ce sens que, les articles 78,79 et 86 du traité de
l'UEMOA indiquent clairement la procédure à suivre par les Etats

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membres, qui se trouvent être obligés de prendre des mesures de
sauvegarde, par des interdictions ou des restrictions, des mesures
d'importation et de transit et disposent respectivement:

Article 78:
Sur proposition de la Commission, le Conseil, statuant à la
majorité des deux tiers (2/3) de ses membres, détermine conformément
aux dispositions de l'article 5 du présent traité, le rythme et les modalités
d'élimination, sur les échanges entre les pays membres, des droits de
douane, des restrictions quantitatives et de toutes autres mesures d'effet
équivalent. Il arrête les règlements nécessaires.

Le conseil tient compte des incidences de l'unification des
marchés sur l'économie et les finances publiques des Etats membres en
créant des fonds de compensations et de développement.

Article 79:
Sous réserve des mesures d'harmonisation des législations
nationales mises en œuvre par l'union, les Etats membres conservent la
faculté de maintenir et d'édicter des interdictions ou restrictions
d'importation, d'exportation et de transit, justifiées par des raisons de
moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de
la santé ou de la vie des personnes et des animaux , de préservation de
l'environnement, de protection des trésors d'animaux ayant une valeur
artistique, historique ou archéologique et de protection de la propriété
industrielle et commerciale;

Les interdictions ou restrictions appliquées en vertu de l'alinéa
précédent, ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire
ni une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres;

Les Etats membres notifient à la Commission toutes les
restrictions maintenues en vertu de l'alinéa premier du présent article. La
Commission procède à une revue annuelle de ees restrictions en vue de
proposer leur harmonisation ou leur élimination progressive.

Article 86 :
Le conseil statuant à la majorité des deux tiers (213) de ses
membres sur proposition de la Commission, fixe par voie de règlement,
les modalités selon lesquelles les Etats membres sont autorisés à pendre,
par dérogation à la politique générale de l'Union douanière et de la
politique commerciale commune, des mesures de protection destinées à
faire face à des difficultés graves dans un ou plusieurs secteurs de leurs

économies.

Les mesures de sauvegarde en vertu des règlements pris en
application de l'alinéa précédent ne peuvent excéder une période de six
(6) mois éventuellement rcnouvelablc ;

Elles doivent être autorisées par la Commission, tant dans leur

durée que dans leur contenu, avant leur entrée en vigueur;

Que l'article 12 alinéa 3 et l'article 44 du traité de la CEDEAO

abondent dans le même sens et disposent:

Article 12 alinéa 3 :
Les règlements du Conseil ont de plein droit force obligatoire à
l'égard des institutions relevant de son autorité. Ils sont obligatoires à
l'égard des Etats membres après leur approbation par la Conférence;
toutefois, les règlements ont d'office force obligatoire en cas de
délégation de pouvoir, conformément aux dispositions du paragraphe 3
(f) de l'article 7 du présent traité.

Article 44:
Les Etats membres s'engagent à ne pas adopter des textes
législatifs qui impliquent une discrimination directe ou indirecte à l'égard
des produits identiques ou similaires des autres Etats.

Qu'il ressort des articles sus cités qu'aucune mesure de restriction
ou d'interdiction relative à la libre circulation des biens entre les Etats
membres (UEMOA et CEDEAO) ne doit être prise de façon
discriminatoire et arbitraire;

Que l'article 49 du même traité dispose:

« Dans le cas où des perturbations sérieuses se produisent dans
l'économie d'un Etat membre par suite de l'application des dispositions
du présent chapitre, l'Etat membre concerné peut prendre, après en avoir
informé le secrétaire exécutif et les Etats membres, des mesures de
sauvegarde appropriées en attendant que le Conseil statue» ;

Qu'il s'en suit que même pour prendre des mesures de
sauvegarde, pour une raison ou une autre, l'Etat concerné, signataire du
traité de la CEDEAO qui entend prendre des mesures de sauvegarde, doit
saisir au préalable le conseil des ministres de la CEDEAO ;

Considérant que cette obligation n'a pas été observée par l'Etat
béninois, ce qui constitue une violation manifeste des traités ci-dessus
indiqués et confère à l'arrêté ministériel querellé, un caractère
absolument illégal ;

Que ledit arrêté n'a d'ailleurs pas précisé les raisons sérieuses à

son fondement;

Que c'est pourquoi te président de la Commission de l'UEMOA a
adressé au ministre de l'Economie et des Finances du Bénin, la lettre
référencée 09066/PCIDMRCIDMRUD en date du 26 juillet 2007 dont la
substance suit :

« ... l'interdiction d'utiliser 10. voie terrestre pour l'importation ou
l'exportation d'huile raffinée produite dans un Etat membre s'analyse
comme une entrave non tarifaire aux échanges intercommunautaires,
même si l'Etat d'exportation dispose d'une façade maritime;

Au demeurant, cette mesure se traduit par l'impossibilité absolue
pour les Etats membres de l'Union, et qui sont sans littoral, d'exporter de
l'huile raffinée au Bé.J.În ;

Par conséquent, je vous saurais gré des dispositions qu'il vous
plaira de prendre aux fins de l'abrogation de l'arrêté mis en cause. Par
ailleurs, je vous invite à bien vouloir donner les instructions nécessaires
afin qu'un texte de même nature ne soit plus adopté;

En effet, cette mesure constitue une violation de l'article 3 de
l'acte additionnel n° 04/96 du 10 mai 1996 instituant un régime tarifaire
préférentiel des échanges au sein de l'UEMOA et son mode de
financement qui dispose: «dans les échanges entre les Etats membres,
les restrictions quantitatives, les entraves non tarifaires, les prohibitions
ou les exportations de produits originaires ou fabriqués dans les Etats
membres sont levées» ;

Considérant que le 18 décembre 2007, l'arrêté querellé a été

abrogé par les autorités du Bénin;

Considérant que l'Etat béninois représenté par l'Agent Judiciaire
du Trésor dans son mémoire en défense, ne conteste point l'illégalité de
J'arrêté interministériel querellé;

Qu'il s'est contenté d'écrire qu'il n'existe aucun lien de causalité
entre J'interdiction temporaire d'importation et les prétendus préjudices
allégués par la requérante;

Considérant au total que le caractère illégal de l'arrêté querellé est

avéré;

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Sur les préjudices commcl'ciaux subis par la .·cguérantc ct le

quantum des dommages et intérêts

Considérant que la requérante soutient que la prise de l'arrêté
querellé lui a causé d'énormes préjudices commerciaux comme en
attestent les dégâts financiers relatifs à l'importation de l'huile
« DUOR» de 2004 à 2008 et l'état récapitulatif des chiffres d'affaires
relatifs à l'importation de l'huile « DUOR » de 2004 à 2008 en date du
21 mai 2010;

Qu'il ressort de la lecture de l'état récapitulatif deux contestations

importantes ;

Que d'une part, le montant global des chiffres d'affaires réalisés
par la Société INDICO SA de 2004 à 2006 s'élève à la somme de
25.114.740.168 FCFA et que d'autre part, après la levée de l'arrêté de
2007 à 2009, une baisse significative des chiffres d'affaires dont le
montant global s'élève à la somme de 1.785.558.936 F CFA a été
enregistrée;

Considérant que la requérante indique aussi qu'au titre des
préjudices commerciaux, elle n'a pas pu exécuter d'importants marchés
du fait de l'interdiction d'importation de l'huile « DUOR» et qu'elle a
même été obligée de dédommager certains de ses clients de crainte de
faire l'objet de poursuites judiciaires;

Qu'après l'abrogation de l'arrêté querellé, clic n'a pu recouvrer la
confiance de sa clientèle d'où la baisse drastique de son chiffre
d'affaires;

Qu'au regard de tout ce qui précède, elle sollicite

la
condamnation de l'Etat béninois à lui payer à titre de dommages et
intérêts toutes causes de préjudices confondues, la somme de
15.000.000.000 de francs;

Considérant que s'il est indéniable que la prise de l'arrêté querellé
et subséquemment l'interdiction de l'importation par voie terrestre des
huiles alimentaires « DUOR» a causé des préjudices i1
la société
INDICO SA qui importait et commercialisait lesdites huiles produites par
la société NIOTO du Togo, il n'en demeure pas moins vrai que les
préjudices supposés subis tels que présentés par la requérante ne
sauraient emporter la religion de la Cour ;

Qu'en effet, la requérante n'apporte aucune preuve quant à
l'inexécution par elle, de certains marchés du fait de la situation créée par
l'arrêté querellé;

Que les liens directs de cause à effet, de l'ampleur de la baisse du
chiffre d'affaires indiquée, entre l'interdiction temporaire et la nouvelle
situation de la requérante, n'ont non plus été établis;

Considérant YUt si l'importation

et la commercialisation des
huiles alimentaires « DUOR» constituaient l'assiette exclusive des
activités commerciales de la requérante, il importe de faire observer que
l'arrêté querellé n'a point proscrit lesdites importations et
commercialisation par elle ;

Que la restriction portée par l'arrêté ne visait que l'importation

par voie terrestre ;

Qu'il était, dans ces conditions, loisible à la requérante ainsi que
le soutient d'ailleurs l'Etat Béninois, d'emprunter d'autres voies de
transport ;

Considérant par conséquent que les préjudices causés par la prise
de l'arrêté querellé ne devraient pas être aussi dommageables que le
décrit ou l'indique la requérante;

Que la constance ou l'évidence des préjudices doit être appréciée
à sa juste proportion et l'évaluation du montant de la réparation doit se
faire à l'aune de repères objectifs tenant au montant des impôts, taxes et
droits payés, au titre de l'activité et sa durée d'exercice (2004 à 2006)
ainsi qu'à la durée de l'interdiction de l'importation;

Considérant que l'évaluation des dommages ou du montant de la
réparation devra toutefois être pondérée par la prise en compte du
préjudice lié à la perte, par la requérante, de ses clients, contraints de
rechercher d'autres sources d'approvisionnement et à la difficulté de
retrouver leur confiance à la levée de la mesure d'interdiction qui s'est
traduite par la baisse du chiffre d'affaire de 2007 à 2009 ;

Considérant qu'au regard des pièces du dossier non contestées par
l'Etat béninois, la société INDICO SA aura payé de juillet 2004 au 31
décembre 2006, au titre d'impôts, taxes et droits, un montant de trois
milliards six cent six millions huit cent vingt six mille trois cent vint cinq
(3.606.826.325) francs sur un chiffre d'affaires de vint cinq milliards cent
quatorze millions sept cent quarante mille cent soixante huit
(25.114.740.168) Francs sur la même période;

Qu'il y a lieu au total de ramener à de justes proportions le

montant de la demande en réparation;

PAR CES MOTIFS.

DECIDE:

Article 1er: Le recours en date à Porto-Novo du 31 décembre
2012 de la société « L'International de Négoce et de Distribution
Commerciale (INDICO SA») tendant à la condamnation de l'Etat au
paiement de quinze milliards (15.000.000.000) de francs à titre de
dommages-intérêts pour toutes causes de préjudices confondues, est
recevable;

Article 2: Ledit recours est fondé;

Article 3: L'Etat béninois est condamné à payer à la société
« L'International de Négoce et de Distribution Commerciale (INDICO
SA») à titre de dommages-intérêts pour toutes causes de préjudices
confondues, la somme de six cent millions (600.000.000) de francs;

Article 4 : Les dépens sont mis à la charge du trésor public;

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur

général près la Cour suprême.

Ainsi fait el délibéré
Administrative) composée de:

par la Cour suprême (Chambre

Victor D. ADOSSOU, Président de la Chambre Administrative,

Rémy Yawo KOnO

et

Etienne AHOUANKA

PRESIDENT;

CONSEILLERS;

Et prononcé à l'audience publique du jeudi huit juin deux mille
dix sept, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en
présence de :

Nicolas ASSOGBA, Procureur Général,

MINISTERE PUBLIC;

Philippe AHOMADEGBF.,

Greffier;


Synthèse
Numéro d'arrêt : 54
Date de la décision : 08/06/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 24/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2017-06-08;54 ?
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