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02/06/2017 | BéNIN | N°24/CJ-DF

Bénin | Bénin, Cour suprême, 02 juin 2017, 24/CJ-DF


Texte (pseudonymisé)
N° 24/CJ-DF du Répertoire ; N° 2010-15/CJ/CT
du 02 juin 2017 ; Affaire : AI AG
Z AG et Aj AG ET
JANVIER ELEGBEDE.
du greffe ; Arrêt
AJ, TOFFA
02 AUTRES CI/ Procédure civile — Droit foncier — Non mention de la composition du tribunal, de l’énoncé de la coutume, des déclarations et des conclusions des parties — Cassation (Oui).
Encourt cassation pour violation des dispositions de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931, l’arrêt qui omet de mentionner la composition du tribunal, l’énoncé de la coutume applicable, les déclarations des p

arties ou leurs conclusions et demandes.
La Cour,
Vu l’acte n°19/2009 du 06 juillet 2009 du gr...

N° 24/CJ-DF du Répertoire ; N° 2010-15/CJ/CT
du 02 juin 2017 ; Affaire : AI AG
Z AG et Aj AG ET
JANVIER ELEGBEDE.
du greffe ; Arrêt
AJ, TOFFA
02 AUTRES CI/ Procédure civile — Droit foncier — Non mention de la composition du tribunal, de l’énoncé de la coutume, des déclarations et des conclusions des parties — Cassation (Oui).
Encourt cassation pour violation des dispositions de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931, l’arrêt qui omet de mentionner la composition du tribunal, l’énoncé de la coutume applicable, les déclarations des parties ou leurs conclusions et demandes.
La Cour,
Vu l’acte n°19/2009 du 06 juillet 2009 du greffe de la cour d'appel de Cotonou par lequel maître Mohamed A. TOKO, avocat, conseil de Vodounon AG AJ et autres, représentés par AG Ae AJ, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°41/09 du 16 juin 2009 rendu par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, administrative, sociale et des comptes ;
Vu les pièces du dossier ;
Oui à l’audience publique du vendredi deux juin deux mille dix- sept, le conseiller Michèle CARRENA-ADOSSOU en son rapport ; Ouï l'avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°19/2009 du 06 juillet 2009 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Mohamed A. TOKO, avocat, conseil de Vodounon AG AJ et autres, représentés par AG Ae AJ, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°41/09 du 16 juin 2009 rendu par la chambre de droit traditionnel de cette cour ;
Que par lettre n°696/GCS du 03 août 2010 du greffe de la Cour suprême, maître Mohamed A. TOKO a été mis en demeure de consigner dans un délai de quinze (15) jours sous peine de déchéance et de produire ses moyens de cassation dans un délai d’un (01) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 6 et 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Que la consignation a été payée ;
Que les mémoire ampliatif et en défense ont été produits ;
En la forme
Attendu que le présent pourvoi ayant été élevé dans les forme et délai de la loi, il y a lieu de le recevoir ;
Au fond
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que suivant convention de vente en date du 23 juillet 1973, Janvier ELEGBEDE a acquis, dans un premier temps, un champ sis au village Glo-Djitin, arrondissement de Tangbo-Djèvié, commune d'Abomey-Calavi, auprès de Ah Am Y, qui l’avait lui-même acquis auprès de AI AJ, et dans un deuxième temps, en complément du premier champ, un autre auprès de Ac C suivant convention de vente du 10 mai 1973 ;
Que face aux prétentions de Z Ad AG, fils de AI AJ, à qui se sont joints An AG, Aj AG et Aq AG, Janvier ELEGBEDE a saisi le tribunal de première instance de Cotonou qui, par jugement n°019/2CB/2003 du 03 juin 2003, a confirmé son droit de propriété sur le domaine composé des deux champs ;
Que, sur appel de AI AJ, Z AG, An AG, Aj AG et Aq AG, la cour d'appel de Cotonou a, par arrêt n°41/09 du 16 juin 2009, annulé le jugement n°019/2CB/2003 du 03 juin 2003, confirmé le droit de propriété de Janvier ELEGBEDE sur le domaine de 6ha 1a 37ca situé à Glo-Djitin, limité au nord par Ac C et DOSSOU-YOVO, au sud par Ar AG, Af Ai, Aa AG et Ak B, à l’est par Ab X et à l’ouest par Aa AG et Ap A.
Que c'est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION DES MOYENS
Premier moyen de cassation pris en ses deux branches :
violation de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931 :
Première branche du premier moyen de cassation : violation des dispositions de l’article 85 du décret organique du 03
décembre 1931 pour composition irrégulière de la juridiction d’appel
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt attaqué, la violation de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931 pour composition irrégulière, en ce que ne figure pas dans la décision la mention de la présence des assesseurs représentants la coutume des parties au procès, alors que, selon le moyen, l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 prescrit : « les jugements ou arrêts des juridictions de droit local doivent mentionner les noms des membres du tribunal… » ; que le défaut de ces mentions entraîne la nullité de la décision ;
Que bien qu’il ait été mentionné dans l’arrêt attaqué : « Statuant publiquement contradictoirement en matière civile de droit traditionnel (Biens) avec le concours des assesseurs Yoruba et Aïzo, représentant les coutumes des parties, en appel et en dernier ressort», cela n'était pas suffisant puisqu'il s'agit de mentions substantielles ne pouvant être supplées par aucune pièce de procédure ; que cette indication faisant défaut sur la copie de l'arrêt attaqué en possession des parties, la violation de la loi est constituée et l’arrêt encourt cassation ;
Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 85 du décret organique de 1931 « Les jugements ou arrêts des juridictions de droit local doivent mentionner les noms des membres du tribunal et la coutume de ceux qui sont citoyens de statut personnel particulier ; le nom et la qualité de l’interprète ou des interprètes, le nom, le sexe, l’âge, la profession, le domicile et la coutume des parties avec leurs déclarations ou conclusions, l’exposé sommaire de la demande et éventuellement des constatations faites par le tribunal ; le nom, le sexe, l’âge, la profession et le domicile de chacun des témoins, ainsi que le degré de sa parenté avec les parties et la mention du serment qu’il a prêté si la coutume le prévoit, sa déposition et enfin l'énoncé complet de la coutume appliquée » ;
Qu'’en application de ces dispositions de l’article 85 précité, la jurisprudence de la Cour suprême admet comme formalités substantielles : « les mentions relatives à la composition du tribunal, à l’énoncé de la coutume applicable, à la mention des déclarations des parties ou de leurs conclusions et demandes » (arrêt n°003/CJ- T du 29 mars 1996, affaire KPASSENON MEDJUE contre collectivité
Attendu que le fait, pour la cour d’appel de Cotonou, de ne pas mentionner les noms des assesseurs ayant composé la cour dans l'arrêt attaqué, est une omission substantielle qui, au regard de la jurisprudence de la Cour suprême, constitue une violation des dispositions de l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 ;
Que l'arrêt attaqué encourt la cassation ;
Deuxième branche du premier moyen de cassation tiré de la violation de l’article 85 du décret organique du 03 décembre 1931 pour défaut de mentions relatives à la déclaration des
parties et aux dépositions des témoins
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt attaqué d’avoir méconnu les dispositions de l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 en confirmant le droit de propriété de Janvier ELEGBEDE sur le domaine querellé, en ce que cet arrêt a décidé que « la portion objet du litige fait partie du bloc de Gha 1a 37ca sur lequel a été réalisé le levé topographique le 11 novembre 1999 ;
Attendu qu'il ressort par ailleurs de plusieurs témoignages, que le terrain a été complanté de tecks par Janvier AH qui en a joui paisiblement pendant plus d’une vingtaine d’années ;
Que les déclarations du seul témoin produit par AJ AI et ses enfants manquent de précision et ne sauraient emporter quelque conviction ;
Que les appelants ne prouvent pas davantage leur droit de propriété sur le domaine querellé ;
Qu'’en conséquence, il y a lieu de dire et juger que la portion de 2ha revendiquée par AJ AI fait partie du bloc de 6ha 1a 37ca objet du levé topographique du 11 novembre 1999, est la propriété de Janvier ELEGBEDE », alors que, selon le moyen, les mentions exigées par l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 n’y figurent pas ; que relativement aux dépositions des témoins, l’arrêt a indiqué à la page 3 et 3°© paragraphe intitulé « Sur l'infirmation du jugement...de la cause » que : « Attendu qu’il ressort des témoignages du géomètre et de l’ancien délégué X Al que AJ AI et plusieurs de ses enfants ont participé à la délimitation du terrain de Janvier ELEGBEDE lors du levé topographique et n’ont élevé aucune contestation ;
Que AJ AI n’a pas pu rapporter la preuve contraire de sa présence lors du levé topographique » ; qu’à la page 4 du même arrêt, il est relevé que « les déclarations du seul témoin produit par AJ AI et ses enfants manquent de précision et ne sauraient emporter quelque conviction » ;
Que le jugement rendu par le tribunal indiquait seulement ce qui suit au titre des dépositions des témoins : « Attendu que de plus il ressort des témoignages que c'est AJ AI lui-même qui indiquera les limites du terrain qu’il a vendu à KIKI lors du levé du terrain total par le géomètre », que ce jugement annulé par l’arrêt attaqué, ne contient rien en ce qui concerne les dépositions alors que les parties ont produit des témoins qui ont déposé, que l’arrêt attaqué ne contient pas non plus les déclarations et conclusions des parties, les dépositions des témoins, qu’il y a lieu de constater que cet arrêt viole le texte suscité et doit être cassé ;
Attendu que suivant la jurisprudence de la Cour suprême, est considérée comme formalité substantielle dans tout jugement ou arrêt rendu par une juridiction de droit civil traditionnel, la mention des déclarations des parties et dépositions des témoins prescrites par l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 ;
Attendu qu'il résulte de l’arrêt attaqué, qu’après avoir annulé le jugement n°019/2CB/05 du 03 juin 2003 du tribunal de première instance de Cotonou, lequel de ce fait est inexistant, les juges de la cour d’appel n’ont pas mentionné dans cet arrêt les déclarations des parties et les dépositions des témoins comme le prévoit l’article 85 du décret du 03 décembre 1931 ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d’appel a violé la loi ;
Qu'il y a lieu de casser l’arrêt attaqué ;
Deuxième moyen de cassation tiré de la violation ou
mauvaise interprétation de la loi, notamment, l’article 288 du coutumier du Dahomey, les articles 1134 et 1599 du code civil Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté les prétentions de AJ AI AG et autres et, confirmé le droit de propriété de Janvier ELEGBEDE sur le domaine de 6ha 1a 37ca alors même que 2ha de terrain de ce domaine lui sont contestés, en ce que « Pour justifier son droit de propriété, il (Janvier ELEGBEDE) a produit les conventions par lesquelles il a acquis ledit terrain en occurrence ;
-la convention en date du 23 juillet 1973 par laquelle Y Ah lui a cédé une parcelle de superficie 5ha ;
- la convention en date du 05 septembre 1973 qui matérialise la vente à lui consentie par Ap C et portant sur un terrain d’un (01) hectare ; qu’une portion de 2ha lui est contestée par AJ AI et ses enfants ; mais que la portion, objet du litige fait partie du bloc de Gha 1a 37ca sur lequel a été réalisé le levé topographique le 11 novembre 1999... » ; alors, d’une part, qu’il n’est pas contesté que dans le bloc de Gha 1a 37ca, se trouve la propriété des demandeurs d’une superficie de 3ha et qu’ils n’ont vendu qu’un (01) ha à Ah Y, vendeur du défendeur Janvier ELEGBEDE au prix de cinquante mille (50 000) francs CFA suivant convention de vente en date du 17 juin 1972 pour se réserver pour leur usage les 2ha restants ;
Que pour que l'acheteur d’un (01) hectare de terrain auprès des demandeurs au pourvoi, le nommé Ah Y, revende à son tour au sieur Janvier ELEGBEDE S5ha suivant convention de vente du 23 juin 1973, il aurait fallu acquérir chez d’autres propriétaires 4ha de terrain en dehors de l’hectare acheté chez les demandeurs, ce qui n’est pas le cas puisqu'il est constant comme résultant des débats et des faits de la cause que Ah Y ou Tokpahossou à l’époque chef de village de Glo Ao n’était propriétaire d’aucune parcelle de terrain de culture dans la zone de situation du domaine querellé et qu’il n'avait acheté en plus qu’un (01) ha de terrain auprès de Ac C au prix de cinquante mille (50 000) francs CFA suivant convention de vente en date du 10 mai 1973 ; qu’en application des dispositions des articles 288 du coutumier du Dahomey et 1134 du code civil, ces conventions légalement formées, parce que régulièrement visées par le sous-préfet d’Ag, tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ont été exécutées de bonne foi par les parties contractantes ; alors d'autre part qu’en application des mêmes dispositions légales, le sieur Ah Y en décidant de revendre les parcelles acquises, la vente projetée ne pouvait porter que sur la superficie de 2ha dont il était devenu propriétaire à titre onéreux aux termes des deux conventions de vente susvisées ;
Que pour les juges du fond, il suffit qu’un plaideur réalise un relevé topographique incluant un ensemble de parcelles et sans produire les titres de propriété détenus par les propriétaires successifs pour qu’il en devienne propriétaire, alors même qu’un simple levé topographique ne saurait constituer un titre de propriété opposable aux autres parties ; qu’en décidant comme elle l’a fait, la cour d’appel a méconnu la maxime juridique suivant laquelle « une personne ne peut transférer à autrui plus de droit qu’elle en a elle- même » ; alors surtout que la vente d’un bien d'autrui est nulle en application des dispositions de l’article 1599 du code civil cité ici à titre de raison écrite ;
Mais attendu que ce moyen porte sur l'appréciation souveraine des faits par les juges du fond ; qu’il convient de le déclarer irrecevable ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Au fond, casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt n°41/09 rendu le 16 juin 2009 par la chambre de droit traditionnel de la cour d'appel de Cotonou ;
Renvoie la cause et les parties devant la cour d’appel de Cotonou autrement composée ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :
Magloire MITCHAÏ, conseiller à la chambre judiciaire,
PRESIDENT ; Michèle CARRENA-ADOSSOU
Et CONSEILLERS ; Antoine GOUHOUEDE
Et prononcé à l’audience publique du vendredi deux juin deux mille dix-sept, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Saturnin AFATON, avocat général,
MINISTERE PUBLIC ; Mongadji Henri YAÏ,
GREFFIER ;
Et ont signé
Le président, Le rapporteur,
Magloire MITCHAÏ Michèle CARRENA-ADOSSOU


Synthèse
Numéro d'arrêt : 24/CJ-DF
Date de la décision : 02/06/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2017-06-02;24.cj.df ?
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