La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/01/2016 | BéNIN | N°01/CJ-CT

Bénin | Bénin, Cour suprême, 08 janvier 2016, 01/CJ-CT


Texte (pseudonymisé)
N°01/CJ-CT DU RÉPERTOIRE ; N° 2011-34/CJ-CT DU GREFFE ; ARRÊT DU 08 JANVIER 2016; AFFAIRE HOUNKPEVI GLADJA ATCHI CONTRE B X, B FRANÇOIS ET YEHOUE THÉODORE.
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Motifs hypothétiques — Motifs dubitatifs - Cassation (Oui).
Droit foncier — Droit civil traditionnel — Pourvoi en cassation — Propriété consacrée sur la base exclusive du lieu d’inhumation — Défaut de base légale — Cassation (Oui).
Exposent leur arrêt à cassation, les juges de la cour d’appel qui se sont déterminés par des motifs à la fois hypothétiques

et dubitatifs omettant par conséquent de satisfaire aux exigences de motivation et privant ain...

N°01/CJ-CT DU RÉPERTOIRE ; N° 2011-34/CJ-CT DU GREFFE ; ARRÊT DU 08 JANVIER 2016; AFFAIRE HOUNKPEVI GLADJA ATCHI CONTRE B X, B FRANÇOIS ET YEHOUE THÉODORE.
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Motifs hypothétiques — Motifs dubitatifs - Cassation (Oui).
Droit foncier — Droit civil traditionnel — Pourvoi en cassation — Propriété consacrée sur la base exclusive du lieu d’inhumation — Défaut de base légale — Cassation (Oui).
Exposent leur arrêt à cassation, les juges de la cour d’appel qui se sont déterminés par des motifs à la fois hypothétiques et dubitatifs omettant par conséquent de satisfaire aux exigences de motivation et privant ainsi leur décision de base légale.
Encourt cassation, pour défaut de base légale, l’arrêt de la cour d’appel qui, statuant en matière de droit civil traditionnel consacre le droit de propriété exclusivement sur la base du lieu d’inhumation.
La Cour,
Vu l’acte n° 10/2011 du 04 mai 2011 du greffe de la Cour d’appel de Cotonou, par lequel maître Julien TOGBAGJA, substituant maître Gilbert ATINDEHOU, conseil de Aa
C A, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°36/11 rendu le 03 mai 2011 par la chambre de droit civil traditionnel de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la
Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 08 janvier 2016, le conseiller Michèle CARRENA-ADOSSOU en son rapport ;
Ouï l’avocat général Solange A. E. THOGNON- BEHANZIN en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°10/2011 du 04 mai 2011 du greffe de la Cour d'appel de Cotonou, maître Julien TOGBAGJA, substituant maître Gilbert ATINDEHOU, conseil de Aa C A, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°36/1 1 rendu le 03 mai 2011 par la chambre de droit civil traditionnel de cette cour ;
Que par lettres n°s 2157 et 2182/GCS des 25 et 29 novembre 2011 du greffe de la Cour suprême, maître Gilbert ATINDEHOU et maître Bonaventure ES S OU ont, respectivement, été mis en demeure de consigner dans un délai de quinze (15) jours et de produire leur mémoire ampliatif dans un délai d’un (01) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 3, 6 et 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Que la consignation a été payée ;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits par les parties ;
Que le dossier est en état.
EN LA FORME
Attendu que le pourvoi est recevable pour avoir été introduit dans les forme et délai de la loi.
AU FOND
Fait et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le tribunal de première instance de Cotonou a été saisi, par un procès-verbal de non conciliation n°21/026/TCAC du 24 octobre 1995 du tribunal de conciliation d’Abomey-Calavi, d’une contestation de droit de propriété foncière entre Aa A C d'une part, X B et Ab B d'autre part ;
Que par jugement n°62/1CB/2000 du 03 août 2000, le tribunal de Cotonou a confirmé le droit de propriété de Aa A C sur le domaine litigieux de superficie 2ha 72a 83ca sis à Zogbadjè à Abomey-Calavi ;
Que sur appel de X B et Ab B, la cour d'appel de Cotonou, par arrêt n°36/1 1 du 03 mai 2011, a infirmé le jugement incriminé puis, évoquant et statuant à nouveau, confirmé le droit de propriété de la collectivité YEHOUE sur l'immeuble litigieux ;
Que c'est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION DES MOYENS
Sur le premier moyen tiré des motifs hypothétiques
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, d’avoir confirmé le droit de propriété de la collectivité YEHOUE sur le domaine litigieux, en se déterminant par des motifs hypothétiques et dubitatifs, en ce que les juges d'appel, après avoir rapporté les déclarations de témoins de l’appelant selon lesquelles le père de la demanderesse au pourvoi, C A, décédé dans les années 1962, serait enterré à Agassa-Godomey, ont soutenu :
« Qu'il s'en déduit qu’en agissant comme ils l’ont fait, les parents de HOUNKPEVI GLADJA n'ont pas entendu enterrer leur enfant en terre étrangère ; que si le domaine était à l’origine la propriété de HOUNGNISSODE, comme le prétend Aa A C, son père HOUNKPEVI devrait y être enterré à son décès » ; que l'expression « n’ont pas entendu » exprime la supposition, l'hypothèse, le doute, alors que, selon le moyen, le juge ne peut pas rendre une décision fondée sur le doute et des hypothèses, mais sur des faits réels, prouvés et non équivoques ;
Attendu que pour rejeter la demande de HOUNKPEVI GLADJA Atchi, la cour d’appel a eu recours hors le cas d’une alternative, à l'emploi de verbes au mode conditionnel, qui confère à la décision un caractère hypothétique, outre l’usage des vocables « n’ont pas entendu » qui exprime une hésitation, en tout cas un doute, en lieu et place d’une affirmation catégorique ;
Qu’en se déterminant par les motifs sus-indiqués, qui sont à la fois hypothétiques et dubitatifs, la cour d'appel n’a pas satisfait aux exigences de motivation, privant ainsi sa décision de base légale ;
Qu'il s'ensuit que ce moyen est fondé ;
Sur les troisième et quatrième moyens tirés du défaut de base légale et de l'insuffisance des motifs, moyens réunis
Attendu qu’il est reproché aux juges de la cour d’appel d’avoir, d’une part, confirmé le droit de propriété de la collectivité YEHOUE sur l'immeuble litigieux, sans exposer les moyens et preuves produits par Aa A C, en l’occurrence les déclarations de ses témoins, ni discuter et confronter ces moyens et preuves avec ceux des appelants et d’autre part, insuffisamment motivé sa décision en faisant du lieu de naissance ou d’enterrement de A C, le seul attribut de droit de propriété, alors que, selon les moyens, d’une part, l'examen des divers moyens et preuves rapportés par le demandeur au pourvoi aurait pu conduire à une solution différente de celle retenue par l’arrêt attaqué, d’autre part, les éléments du reste hypothétiques, tirés du lieu de naissance ou d’enterrement, s'ils peuvent constituer quelque indice de rattachement, ne peuvent à eux seuls, constituer des attributs de droit de propriété ou des éléments fondamentaux d'attribution ou de rejet du droit de propriété ; qu’en se prononçant fondamentalement par rapport à l'élément tenant au lieu de naissance et d’enterrement de C A pour rejeter la demande de Aa A C, sans égard aux déclarations de ses témoins selon lesquelles HOUNKPEVI GLADA est né à …, aux actes d’amélioration et de disposition posés par C A avant sa mort, tels les plantations d'espèces pérennes (palmiers, rôniers et cocotiers), les dons de portions du domaine, lesquels témoignages et éléments confirment le droit de propriété de feu C A sur l'immeuble en cause et enfin, sans dire comment le métayer AGUESSY a pu devenir propriétaire d’une portion du domaine et en être limitrophe tandis que le droit de propriété de l’autre métayer, C A n’a été reconnu sur aucune parcelle, l’arrêt attaqué ne s’est pas suffisamment expliqué dans ses motifs ;
Attendu que l’arrêt attaqué énonce par ailleurs : « Que lorsque C A est décédé dans les années 1962, ses parents sont venus d’Agassa-Godomey pour emporter le corps pour la simple raison qu’il n’est pas de Calavi ;
Qu'il s’en déduit qu’en agissant comme ils l’ont fait, les parents de C A n’ont pas entendu enterrer leur enfant en terre étrangère ;
Que si le domaine était à l’origine la propriété de HOUNGNISSODE, comme prétend Aa A C, son père HOUNKPEVI devrait y être enterré à son décès. » ;
Attendu qu’à l’analyse, si en matière de droit civil traditionnel et plus particulièrement dans les coutumes fon et aïzo qui sont celles des parties, les lieux de naissance ou d’inhumation, la présence de puits, la plantation d’essences pérennes peuvent laisser présumer du droit de propriété, en revanche, le seul fait de l’innumation à son décès d’une personne, hors le domaine qu’elle a habité de son vivant, ne peut être exclusif du droit de propriété sur ce domaine ; qu’entre plusieurs lieux d’innumation possibles, les parents du défunt peuvent choisir un endroit sur la base de dispositions coutumières qui ne sont pas obligatoirement liées au droit de propriété, mais qui est, soit désigné par l’oracle, soit qui facilite les rites funéraires, soit encore le premier lieu d'implantation du lignage ou de l’un de ses principaux segments ;
Qu'en consacrant le droit de propriété exclusivement sur base du lieu d’inhumation, les juges de la cour d’appel de Cotonou n’ont pas donné une base légale à leur décision qui encourt sanction ;
Qu’en conséquence de tout ce qui précède, il y a lieu de casser et d’annuler en toutes ses dispositions l’arrêt n°36/1 1 rendu le O3 mai 2011 par la chambre de droit civil traditionnel de la Cour d’appel de Cotonou ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt n°36/1 1
rendu le 03 mai 2011 par la chambre de droit civil traditionnel de la cour d’appel de Cotonou ;
Renvoie la cause et les parties devant la même cour d’appel autrement composée ;
Met les frais à la charge du Trésor public.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre
judiciaire) composée de :
Honoré AKPOMEY, conseiller à la chambre judiciaire,
PRESIDENT ;
Magloire MITCHAÏ Et Thérèse KOSSOU, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l'audience publique du vendredi huit janvier
deux mille seize, la Cour étant composée comme il est dit ci-
dessus en présence de :
Nicolas ASSOGBA, AVOCAT GENERAL ;
Hortense LOGOSSOU-MAHMA, GREFFIER ;
Et ont signé :
Le président-rapporteur, Le greffier,
Honoré AKPOMEY Hortense LOGOSSOU-MAHMA


Synthèse
Numéro d'arrêt : 01/CJ-CT
Date de la décision : 08/01/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2016-01-08;01.cj.ct ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award