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07/08/2015 | BéNIN | N°23/CJ-CT

Bénin | Bénin, Cour suprême, 07 août 2015, 23/CJ-CT


Texte (pseudonymisé)
N°23/CJ-CT DU RÉPERTOIRE ; N°2013-002/CJ-CT DU GREFFE ; ARRÊT DU 07 AOÛT 2015 ; AFFAIRE :
AI CYR DENIS CONTRE COLLECTIVITÉ A X REPRÉSENTÉE PAR A VINCENT, A CLAVER, A EMMANUEL ET A INNOCENT
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Dénaturation des faits — Irrecevabilité (Oui).
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Violation de la loi — Exception au principe de la prescription extinctive de l’action — Prescription acquisitive — Cassation (Non).
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Violation de la loi n°2013- 01 du 14 août 2013 _ Arrêt ren

du antérieurement _ Irrecevabilité (Oui).
Le grief de dénaturation ne saurait porter sur l’int...

N°23/CJ-CT DU RÉPERTOIRE ; N°2013-002/CJ-CT DU GREFFE ; ARRÊT DU 07 AOÛT 2015 ; AFFAIRE :
AI CYR DENIS CONTRE COLLECTIVITÉ A X REPRÉSENTÉE PAR A VINCENT, A CLAVER, A EMMANUEL ET A INNOCENT
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Dénaturation des faits — Irrecevabilité (Oui).
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Violation de la loi — Exception au principe de la prescription extinctive de l’action — Prescription acquisitive — Cassation (Non).
Droit foncier — Pourvoi en cassation — Violation de la loi n°2013- 01 du 14 août 2013 _ Arrêt rendu antérieurement _ Irrecevabilité (Oui).
Le grief de dénaturation ne saurait porter sur l’interprétation d’un fait matériel et de sa portée, mais seulement sur un écrit.
N’est pas fondé, le moyen tiré de la violation de la loi par refus d’application des exceptions au principe de la prescription extinctive de l’action, dès lors que les juges d’appel ont constaté que la confirmation du droit de propriété faite à la suite de la constatation de la prescription extinctive en la cause ne peut être remise en cause par quiconque, même s’il est tiers à la décision en ce sens que cette prescription est corollaire de la prescription acquisitive qui consacre le droit de propriété.
Est irrecevable, le moyen tiré de la violation des dispositions de la loi n°2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial pour demander la cassation d’un arrêt rendu antérieurement à : ladite loi, celle-ci n’ayant pas eu effet rétroactif et ne disposant que pour l’avenir.
La Cour,
Vu les actes n° 69/12 et n° 72/12 du 03 août 2012 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, par lesquels maître Aboubakar BAPARAPE substituant maître Alphonse ADANDEDJAN et maître Magloire YANSUNU, conseils de la collectivité AI, représentée par AI Cyr Denis ont élevé pourvoi contre toutes les disposions de l’arrêt n° 54/12 du 06 juin 2012 rendu par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 07 août 2015, le conseiller Honoré AKPOMEY en son rapport ;
Ouï l’avocat général Solange A. E. THOGNON-BEHANZIN en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que par actes n° 69/12 et n° 72/12 du 03 août 2012, du greffe de la cour d'appel de Cotonou, maître Aboubakar BAPARAPE substituant maître Alphonse ADANDEDJAN et maître Magloire YANSUNU, conseils de la collectivité AI, représentée par AI Cyr Denis ont élevé pourvoi contre toutes les disposions de l’arrêt n° 54/12 du 06 juin 2012 rendu par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou ;
Attendu que par lettres n°1032/GCS du 03 avril 2013, n°2063/GCS du 22 juillet 2013 et n° 2064/GCS de la même date, la collectivité AMOUSOUHOUI représentée par AI Cyr Dénis et ses conseils, maîtres Alphonse ADANDEDJAN et Magloire YANSUNU ont été mis en demeure de consigner dans le délai de quinze (15) jours, de produire leurs moyens de cassation dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 921, 931 et 933 de la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, administrative, sociale et des comptes ;
Attendu que la consignation a été payée suivant récépissé n° 4507 du 03 juillet 2013 ;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ;
Que les conclusions du parquet général ont été aussi produites et communiquées aux parties par lettres n°0610/GCS et 0611/GCS du 27 mars 2015 ;
Que maître Magloire YANSUNU, quoiqu’ayant reçu copie desdites conclusions, le 17 avril 2015, n’a pas produit de nouvelles observations ;
Que maître Montand AÏKPON a déclaré ne pas avoir de nouvelles observations à faire mais a confirmé les termes de son mémoire en défense ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi ayant été élevé dans les forme et délai, il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date à Cotonou du 14 novembre 2000, les collectivités X
AK représentées respectivement par A Aa, A Af, A Emmanuel et A Innocent 525 ont saisi le tribunal de première instance de Cotonou d’une action aux fins de compte rendu et de partage successoral d’un domaine indivis de trente et un hectares dix neuf ares six centiares (31 ha 19 a 6 ca) sis à Ag Ah contre X A Vincent ; que par une requête du 02 mai 2001, celui-ci a saisi la même juridiction d’une action en partage succes-soral contre les collectivités X B, X Daanon et X AK ;
Que par une requête sans date, AI Denis Cyr a, quant à lui, saisi la même juridiction aux fins de confirmation de droit de propriété contre A X Ab, GNANSOUNOU Honorat et consorts ;
Que le tribunal saisi a procédé le 27 décembre 2001 à une jonction de toutes ces procédures, et rendu ensuite, le jugement n° 005/1CB/08 du 28 février 2008 par lequel il décide notamment : « Déclare irrecevable l'intervention volontaire formulée par le sieur Ac Ai AI représentant la collectivité AI ;
Reçoit, par contre, la demande d'intervention volontaire des nommés C Ae, ACAKPOVI Hortense, AMOUSSOU Emile et Y Aj Ad ;
Déboute également A X Ab de toutes ses prétentions ;
Confirme, en conséquence, le droit de propriété de la collectivité A X sur le domaine d’environ 31 ha 19 a 6 ca sis à Ah Ag
Dit et juge que le domaine sera partagé entre les trois branches d'héritiers de la collectivité NOBIME X de la manière suivante :
Branche B AL X A : 5 ha 37 a O3ca ;
Branche AJ X A : 5 ha 37 a 03 Branche AK X A : 5 ha 37 a 03ca;
Réserve pour dépenses effectuées et honoraires d'avocats et autres dépenses effectuées par la famille : 2 ha
Réserve pour dépense effectuées par A X Ab : 2 ha 00 a 26 ca ;
Réserve familiale : 3 ha 60 a 55 ca :
Domaine AG Emmanuel : 9 ha 12 a 19 ca ;
Déclare nulles et de nul effet toutes les ventes effectuées par A X Ab sur le domaine ;
Dit et juge que les nommés C Ae, ACAKPOVI Hortense, AMOUSSOU Emile et Y Aj Ad, intervenants volontaires, auront leur part sur celle successorale qui reviendrait à A X Ab ;
Dit et juge qu’en raison de leur investissement sur lesdits domaines, il y a lieu d’en tenir compte dans la part successorale qui reviendrait à A X Ab et les maintenir à leur emplacement respectif ;
Déboute les parties du surplus de leur demande ;
Dit n’y avoir lieu à dommages-intérêts et à exécution provisoire » ;
Que par l’arrêt n° 54/2012 du 26 juin 2012, la cour d'appel de Cotonou saisie a donné acte à Ab A X de son désistement d’appel et confirmé le jugement n° 005/1CB/08 rendu le 28 février 2008 par la première chambre civile de droit traditionnel (biens) du tribunal de première instance de Cotonou en toutes ses dispositions ;
Que c'est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Premier moyen tiré de la dénaturation Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la dénaturation des faits en ce qu’en confirmant le jugement n° 005/1CB/08 rendu le 28 février 2008 par la première chambre de droit traditionnel du tribunal de première instance de Cotonou, la cour d’appel de Cotonou a fait sienne la dénaturation des faits commise par le tribunal et a, ainsi violé la loi par cette dénaturation alors que selon le moyen, le jugement n° 09 du 03 avril 1911 est devenu définitif en ce qu'aucun appel n’avait été interjeté en son temps ; que le jugement de 1911 a « décidé qu’'AGBODRANFO laissera à la femme YONNOUVI, une partie de la palmeraie d'AMOUSSOUHOUI dont il était détenteur », qu’aussi bien dans le jugement que dans l'arrêt querellé, il n’est pas fait état du caractère précaire de la détention de A X, ni de la violence qui a caractérisé son occupation ;
Que, par ailleurs, l’arrêt se fonde sur le dispositif de l'arrêt n° 17 du 07 avril 1998 auquel la collectivité AI n’est pas partie et qui dit que le jugement n° 09 du 03 avril 1911 a confirmé X propriétaire du domaine sis à Ah Ag alors que ce jugement ne l’a reconnu que comme détenteur ; que la cour d’appel a ainsi dénaturé les faits exposés dans le jugement n° 09 du 03 avril 1911 en confondant à dessein les effets juridiques de la détention et ceux de la propriété pour pouvoir aboutir à une prescription extinctive ; que l’arrêt querellé mérite cassation de ce seul chef ;
Mais attendu qu’un grief de dénaturation ne saurait porter sur l'interprétation d’un fait matériel et de sa portée, que seul un écrit peut faire l’objet d’un grief de dénaturation ;
Qu'il s'ensuit que ce moyen est irrecevable ;
Deuxième moyen tiré de la violation de la loi par refus d’application des exceptions au principe de prescription extinctive de l’action
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi par refus d'application des exceptions au principe de prescription extinctive de l’action en ce que l’article 17 du décret du 03 décembre 1931 ne prévoit la prescription extinctive que pour celui qui a détenu le bien sans violence et à titre de propriétaire pendant plus de dix (10) ans alors que selon le moyen, YONNOUVI a affirmé que c’est par violence que A père s’est emparé du domaine ; que quel soit le laps de temps qu’a duré la détention du domaine par A X, elle ne peut être source de prescription extinctive ; que l’abandon du terrain pour cause de violence ne peut être frappé par la prescription extinctive ; que l’impossibilité d'agir d’une personne à cause de la coutume ou du cas de force majeure ou de la violence, comme dans le cas d'espèce, la violence de A père, ne peut faire courir contre elle la prescription ; que l’article 32 de la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant Code foncier et domanial en République du Bénin dispose respectivement en ses alinéas 2, 4, 5 et 6 :
alinéa 2 : « L’occupation d’un immeuble soutenue par des actes de violence ne peut fonder sa prescription » ;
alinéa 4: « Ceux qui possèdent pour autrui ne peuvent prescrire » ;
alinéas 5 : « En tout état de cause, le fermier, le gardien, le garagiste, le locataire, le dépositaire ou occupant qui détiennent précairement la chose du propriétaire, ne peuvent la prescrire » ;
alinéas 6 : « Les ascendants, les descendants et les collatéraux des exploitants ou des occupants à titre précaire ne peuvent pas non plus prescrire » ;
Que l’arrêt de la cour d’appel, en ne constatant pas les causes d’empêchement par la violence provoquées par l’ascendant des A, a violé la loi et mérite cassation ;
Mais attendu que pour confirmer le droit de propriété des X sur le domaine litigieux, la cour d'appel a motivé « qu’aux termes de l'arrêt n° 17 du 04 février 1998, la collectivité AI n’est fondée à prétendre à aucun droit sur le domaine en cause ;
Qu'il est aisé de constater que dans l'arrêt n° 17 du 04 février 1998, avant de confirmer le droit de propriété des intimés, les sages de la Cour n’ont pas manqué de rappeler le jugement n° 9 du 03 avril 1911 ;
Que pour arriver à la confirmation du droit de propriété des X sur le domaine, la Cour d'appel de Cotonou a relevé, à bon droit, une prescription extinctive à leur profit ;
Qu'il a été dit dans cet arrêt que le jugement n° 9 du 03 avril 1911 avait déjà constaté que le domaine a été abandonné pendant longtemps et que le nommé X l’occupe depuis plus de vingt-cinq (25) ans sans réclamation de personne ;
Que face à ces constances mentionnées dans une décision de justice devenue définitive et irrévocable, la collectivité AI est mal venue en ses prétentions ;
Que la cour d'appel actuellement saisie ne peut plus revenir en arrière et dire le contraire de l’arrêt n° 17 du 04 février 1998 ;
Que la confirmation du droit de propriété des X faite à la suite de la constatation de la prescription extinctive en la cause au profit de ces derniers, ne peut être remise en cause par quiconque, quand bien même il se prétendrait tiers à la décision en ce sens qu'il s’agit d’une prescription extinctive corollaire de la prescription acquisitive qui consacre le droit de propriété des intimés pour leur possession continue et à titre de propriété sur le domaine pendant si longtemps, sans jamais être inquiétés par quiconque ;
Qu'à l'égard de la collectivité AI, les X occupent le domaine depuis plus d’un centenaire sans aucune revendication de la part des AI ;
Qu'en tout état de cause, il échet de débouter la collectivité AI, frappée non seulement de la prescription extinctive pour être restée inactive pendant plus d’un centenaire mais encore en raison de l’arrêt n° 17 du 04 février 1998 de la cour d'appel de Cotonou ;
Qu'il y a lieu de confirmer le jugement dont est appel en tous ses points » ;
Que par ces énonciations la cour d’appel a fait une exacte application de la loi ;
Qu'il s'ensuit que ce moyen n’est pas fondé ;
Troisième moyen tiré de la violation de la loi par refus d’application de l’article 377 de la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant Code foncier et domanial en République du Bénin
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi par refus d’application de l’article 377 de la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant Code foncier et domanial en République du Bénin en ce qu’il dispose que « La décision de justice passée en force de chose jugée a la même force probante que le certificat de propriété foncière ; toutefois, elle ne produit effet qu’entre les parties au procès. Les ayants-droit et les ayants-cause des parties sont assimilables aux parties au procès » alors que selon le moyen, l’arrêt n° 17 du 04 février 1998 intervenu dans le procès qui a confirmé le droit de propriété de A AGBO-DRANFO r'’est pas opposable à la collectivité AI qui n’était pas partie au procès ; que l’arrêt querellé s’est fondé à tort sur l’arrêt de 1998 et sur son caractère définitif pour rejeter la demande de la collectivité AI ;
Mais attendu que le moyen, évoquant la violation des dispositions de la loi 2013-01 du 14 août 2013 portant Code foncier et domanial en République du Bénin, pour demander la cassation de l’arrêt n° 54/2012 du 26 juin 2012 antérieur à cette loi, viole le principe de la non rétroactivité des lois, la loi ne disposant que pour l’avenir, et n’a point d’effet rétroactif ; que cette règle est, d’ailleurs, d'ordre public ;
Qu'il s'ensuit que ce moyen est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit, en la forme, le présent pourvoi ;
Le rejette, quant au fond ;
Met les frais à la charge de la collectivité AI représentée par AI Cyr Ac.
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :
Honoré AKPOMEY, conseiller à la chambre judiciaire, PRESIDENT ;
Magloire MITCHAÏ et Thérèse KOSSOU, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l'audience publique du vendredi sept août deux mille quinze, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Solange A. E. THOGNON-BEHANZIN, AVOCAT GENERAL ;
Mongadji Henri YAÏ, GREFFIER ;
Et ont signé :
Le président-rapporteur, Le greffier,
Honoré AKPOMEY Mongadji Henri YAÏ


Synthèse
Numéro d'arrêt : 23/CJ-CT
Date de la décision : 07/08/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2015-08-07;23.cj.ct ?
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