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23/01/2015 | BéNIN | N°2012-11

Bénin | Bénin, Cour suprême, 23 janvier 2015, 2012-11


Texte (pseudonymisé)
N° 001/CJ-P du répertoire REPUBLIQUE DU BENIN

SBO



N° 2012-11/CJ-P du greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS



Arrêt du 23 janvier 2015 COUR SUPREME



Affaire :- A X CHAMBRE JUDICIAIRE


C/ ...

N° 001/CJ-P du répertoire REPUBLIQUE DU BENIN

SBO

N° 2012-11/CJ-P du greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

Arrêt du 23 janvier 2015 COUR SUPREME

Affaire :- A X CHAMBRE JUDICIAIRE

C/ (Pénal)

-MINISTERE PUBLIC

-SOCIETE YASMIN SARL

La Cour,

Vu l’acte n°005/2012 du 20 janvier 2012 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Nestor NINKO, conseil de X A, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°020/12 rendu le même jour par la chambre correctionnelle de cette cour ;

Vu l’acte n°006/2012 du 23 janvier 2012 de ce greffe par lequel maître Filbert BEHANZIN, substituant maître Gervais C. HOUEDETE, conseil de X A, a également formé pourvoi en cassation contre les dispositions du même arrêt ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;

Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la Loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ; 

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 23 janvier 2015, le président Gilbert Comlan AHOUANDJINOU en son rapport ;

Ouï l’avocat général Onésime G. MADODE en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n°005/2012 du 20 janvier 2012 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Nestor NINKO, conseil de X A, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°020/12 rendu le même jour par la chambre correctionnelle de cette cour ;

Que suivant l’acte n°006/2012 du 23 janvier 2012 de ce greffe, maître Filbert BEHANZIN substituant maître Gervais C. HOUEDETE, conseil de X A, a également formé pourvoi en cassation contre les dispositions du même arrêt ;

Que par lettres n°s 1568/GCS et 1569/GCS du 14 juin 2012, maîtres Nestor NINKO et Gervais C. HOUEDETE ont été mis en demeure de consigner dans le délai de quinze (15) jours et de produire leurs mémoires ampliatifs dans le délai d’un (01) mois, conformément aux articles 3 et 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Que les mémoires ampliatifs et en défense ont été produits par maîtres Nestor NINKO, Gervais C. HOUEDETE et le procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;

Que la défenderesse au pourvoi, la société YASMIN Sarl représentée par Ab B, qui selon les éléments au dossier, aurait déménagé sans laisser d’adresse, n’a pas produit de mémoire en défense malgré deux (02) mises en demeure par lettres n°3024/GCS du 03 août 2012 et n°0118/GCS du 16 janvier 2013 du greffe de la Cour suprême ;

Qu’en revanche, à l’audience du 06 juin 2014, maître Robert HOUNKPATIN substituant maître Sévérin QUENUM a sollicité que soit notifié le mémoire ampliatif à maître QUENUM pour compte de la société YASMIN SARL, défenderesse, aux fins de production de son mémoire en défense ;

Que suite aux observations conformes du ministère public, la Cour de céans a procédé au renvoi sine die du dossier pour notification avec mise en demeure, du mémoire ampliatif à maître Maxime QUENUM, conseil de la société YASMIN, pour production de son mémoire en défense ;

Attendu que la société YASMIN par l’organe de son avocat, maître Sévérin QUENUM, a produit son mémoire en défense suite aux diligences du greffe central ;

Que la procédure est dès lors en l’état ;

EN LA FORME

Sur le pourvoi n°006/2012 du 23 janvier 2012 du greffe de la cour d’appel de Cotonou élevé par maître Filbert BEHANZIN substituant maître Gervais C. HOUEDETE, conseil de A X

Attendu que le pourvoi n°005/2012 du 20 janvier 2012 ayant été régulièrement formé par maître Nestor NINKO, conseil de A X, le demandeur a ainsi épuisé son droit au recours en cassation ;

Qu’en conséquence, le pourvoi n°006/2012 du 23 janvier 2012 de ce greffe, élevé par maître Filbert BEHANZIN substituant maître Gervais C. HOUEDETE, conseil de A X, est irrecevable ;

Sur le pourvoi n°005/2012 du 20 janvier 2012 de ce greffe, élevé par maître Nestor NINKO, conseil de A X

Attendu que ce pourvoi ayant été élevé dans les forme et délai de la loi, il y a lieu de le recevoir ;

AU FOND

FAITS ET PROCEDURE

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que statuant dans l’instance d’escroquerie à jugement initiée par le ministère public contre X A, le tribunal de première instance de première classe de Cotonou a, par jugement n°430/2CD/10 du 15 décembre 2010, constaté que la société YASMIN n’a pas produit au dossier les pièces supposées fausses et altérées dont le prévenu s’est servi pour surprendre la religion du juge de la 4ème chambre civile moderne qui a rendu le jugement n°006-4è Civ du 12 janvier 2009, constaté en outre qu’il n’a pas versé aux débats judiciaires la preuve du règlement amiable évoqué, dit qu’en l’état, les faits d’escroquerie à jugement ne sont pas constitués, renvoyé en conséquence X A des fins de la poursuite, reçu en la forme la société à responsabilité limitée Ac en sa constitution de partie civile, dit qu’au fond, le tribunal n’a pas qualité pour statuer sur les dommages-intérêts réclamés par la société YASMIN SARL, constaté que la société YASMIN SARL a abusé de la constitution de partie civile et l’a, en conséquence, condamnée à payer à X A, la somme de francs CFA cinq cent mille (500.000) à titre de dommages-intérêts ;

Que sur appels des 17 décembre et 21 décembre 2010 du Ministère public et de maître Sévérin QUENUM, conseil de la société YASMIN, la cour d’appel de Cotonou a, par arrêt n°020/12 du 20 janvier 2012, infirmé le jugement incriminé, en toutes ses dispositions, puis, évoquant et statuant à nouveau, a retenu X A dans les liens de la prévention d’escroquerie à jugement, l’a condamné à douze (12) mois d’emprisonnement assorti de sursis, reçu la constitution de partie civile de la société YASMIN et condamné X A à lui payer la somme de trois cent millions (300.000.000) de francs CFA à titre de dommages-intérêts ;

Que cet arrêt fait l’objet du présent pourvoi ;

DISCUSSION

Sur la demande de renvoi de la défense

Attendu qu’à l’audience, maître Sévérin Maxime QUENUM a, dans ses observations, sollicité le renvoi du dossier pour apporter à la Cour prétend-il, des références plus précises sur une décision qu’il a évoquée et qui aurait reconnu l’existence de l’infraction dite « escroquerie au jugement » ;

Mais attendu que conformément à l’article 2 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême, la procédure est écrite ;

Que sur sa demande présentée à l’audience du 06 juin 2014 par maître Robert HOUNKPATIN qui l’a substitué, la Haute Cour, Ministère public entendu, a déjà accordé un renvoi sine die à maître QUENUM pour production de son mémoire en défense ;

Que ledit mémoire ayant été produit après plusieurs mois, le dossier a été enrôlé à nouveau à cette audience du 23 janvier 2015 ;

Que le respect du délai raisonnable de la procédure est une exigence fondamentale du procès équitable ;

Que cette exigence fondamentale s’impose aux parties, au Ministère public et au juge ;

Que maître QUENUM a eu largement le temps, près de sept (07) mois, pour produire ses moyens écrits en défense, et à l’audience de ce jour, il a suffisamment développé ses observations orales comme les autres conseils ;

Que dans ces conditions, il n’y a plus lieu à nouveau renvoi, le dossier étant en état d’être examiné dans tous ses aspects ;

Sur le moyen d’ordre public relevé d’office et tiré de la violation du principe fondamental de la légalité des délits et des peines

Attendu que l’infraction dite « escroquerie au jugement » est une construction jurisprudentielle largement critiquée par la doctrine ;

Qu’en droit positif béninois « l’escroquerie au jugement » ne figure pas au code pénal (Bouvenet pénal) en vigueur ;

Qu’au demeurant, l’article 16 alinéa 1 de la Constitution du Bénin du 11 décembre 1990 dispose : « Nul ne peut être arrêté ou inculpé qu’en vertu d’une loi promulguée antérieurement aux faits qui lui sont reprochés » ;

Que l’article 17 alinéa 2 de cette Constitution prescrit : « Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui, au moment où elles ont été commises, ne constituent pas une infraction d’après le droit national… »

Qu’il résulte de ces dispositions combinées, le principe et la règle constitutionnelle de la légalité pénale ou de la légalité des délits et des peines ;

Que ce principe ou règle constitutionnelle de la légalité des délits et des peines implique que nul ne peut et ne doit être poursuivi ou inculpé et condamné par les juridictions pénales nationales du chef d’une infraction qui, au moment des faits, n’est pas expressément prévue (qualification, éléments constitutifs) et punie (peine) par le code pénal applicable ;

Et attendu que l’arrêt attaqué a retenu l’infraction dite « escroquerie au jugement » et a condamné le demandeur au pourvoi à une sanction pénale ;

Qu’en conséquence, cet arrêt a violé le principe et la règle fondamentale de la légalité des délits et des peines ;

Que dès lors, ledit arrêt déféré à la censure doit être cassé et annulé en toutes ses dispositions et sans renvoi ;

Que le premier jugement n°430/2CD/10 rendu le 15 décembre 2010 par le tribunal de première instance de première classe de Cotonou qui a relaxé le demandeur au pourvoi des fins de la poursuite pour délit non constitué, faute de preuves, mais sur le fondement de l’infraction dite « escroquerie au jugement », infraction inexistante au code pénal (Bouvenet pénal) en vigueur au Bénin, doit également être annulé en toutes ses dispositions ;

PAR CES MOTIFS

Et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi ;

Déclare irrecevable en la forme le pourvoi n°006/2012 du 23 janvier 2012 du greffe de la cour d’appel de Cotonou élevé par maître Filbert BEHANZIN substituant maître Gervais C. HOUEDETE ;

Reçoit en revanche, le pourvoi n°005/2012 du 20 janvier 2012 du greffe de cette cour élevé par maître Nestor NINKO ;

Casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt n°020/12 rendu le 20 janvier 2012 par la cour d’appel de Cotonou ;

Annule également en toutes ses dispositions le premier jugement n°430/2CD-10 rendu le 15 décembre 2010 par le tribunal de première instance de première classe de Cotonou ;

Dit qu’il n’y a pas lieu à renvoi de l’arrêt attaqué, cassé et annulé ;

Ordonne qu’à la diligence du procureur général près la Cour suprême, du procureur général près la cour d’appel de Cotonou et du procureur de la République près le tribunal de première instance de première classe de Cotonou, le présent arrêt de la Haute Cour sera transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt attaqué et annulé au registre des arrêts de la cour d’appel de Cotonou, et qu’il en sera fait de même au registre des jugements du tribunal de première instance de première classe de Cotonou, en ce qui concerne le premier jugement également annulé ;

Met les frais à la charge du Trésor public ;

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de :

Gilbert Comlan AHOUANDJINOU, président de la chambre judiciaire,

PRESIDENT;

Ginette AFANWOUBO-HOUNSA

Aa AG Y

Z C’ANNA

Magloire MITCHAÏ

CONSEILLERS ;

Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt trois janvier deux mille quinze, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :

Onésime G. MADODE,

AVOCAT GENERAL;

Osséni SEIDOU BAGUIRI,

GREFFIER;

Et ont signé

Le président-rapporteur Le greffier.

Gilbert Comlan AHOUANDJINOU Osséni SEIDOU BAGUIRI


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2012-11
Date de la décision : 23/01/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2015-01-23;2012.11 ?
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