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23/01/2015 | BéNIN | N°001/CJ-CM

Bénin | Bénin, Cour suprême, 23 janvier 2015, 001/CJ-CM


Texte (pseudonymisé)
ARRÊTS DE REJET
N°001/CJ-CM DU REPERTOIRE ; N°2012-40/CJ-CM DU GREFFE ; ARRET DU 23 JANVIER 2015 ; AFFAIRE : SOCIETE FAGBOHOUN ET FILS SARL CONTRE AGENCE POUR LA SECURITE DE LA NAVIGATION AERIENNE EN AFRIQUE ET A MADAGASCAR (ASECNA).
Procédure civile — Liquidation d’astreintes — Défaut de grief relatif à l’application ou à l’interprétation d’un acte uniforme devant les juges du fond —- Compétence de la Cour suprême (oui) —- Compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (non)
Procédure civile — Pourvoi en cassation — Dénaturation d’un éc

rit (non) — Contrat d’exploitation d’un fonds de commerce — Contrats en cours — Subrogation — ...

ARRÊTS DE REJET
N°001/CJ-CM DU REPERTOIRE ; N°2012-40/CJ-CM DU GREFFE ; ARRET DU 23 JANVIER 2015 ; AFFAIRE : SOCIETE FAGBOHOUN ET FILS SARL CONTRE AGENCE POUR LA SECURITE DE LA NAVIGATION AERIENNE EN AFRIQUE ET A MADAGASCAR (ASECNA).
Procédure civile — Liquidation d’astreintes — Défaut de grief relatif à l’application ou à l’interprétation d’un acte uniforme devant les juges du fond —- Compétence de la Cour suprême (oui) —- Compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (non)
Procédure civile — Pourvoi en cassation — Dénaturation d’un écrit (non) — Contrat d’exploitation d’un fonds de commerce — Contrats en cours — Subrogation — Transfert au nouveau titulaire du fonds
Procédure civile — Pourvoi en cassation — Défaut de base légale — Constatations et énonciations — Justification légale de la décision (oui)
Droit civil — Interdiction de prononcer par voie de dispositions générales et réglementaires _ Evocation de décisions antérieures — Evocation de circonstances et éléments de fait propres au litige
La liquidation d’astreinte pour résistance abusive à l’exécution d’une décision de justice n’a pas un caractère commercial, pour déterminer l’incompétence de la Cour Suprême.
N’ont pas méconnu le sens clair et précis d’un écrit (dénaturation), les juges d’appel qui, relativement à un contrat d’exploitation d’un fond de commerce attribué par l’Etat à un acheteur, qui stipule que ledit acheteur sera subrogé dans les droits et obligations des titulaires des contrats d’exploitation en cours sur ce fond de commerce, ont conclu d’une part que lesdits contrats devront être respectés jusqu’à expiration ou faire l’objet de renégociations quant aux modalités de poursuite des exploitations, et constaté d’autre part que ces contrats particuliers ont été, notamment, transférés à l’acheteur.
N'est pas fondé, le moyen tiré du défaut de base légale lorsque les juges d’appel, par leurs constatations et énonciations, ont justifié leur décision.
N’ont pas méconnu les dispositions de l’article 5 du code civil interdisant de prononcer par voie de dispositions générales et réglementaires, les juges d’appel qui ont évoqué des décisions antérieures, dès lors qu’ils se sont déterminés d’après les circonstances particulières de l’affaire pendante devant eux et au vu des éléments de fait propres au litige qui leur est soumis.
La Cour,
Vu l’acte n° 003 du 07 mars 2012 du greffe de la cour d'appel de Cotonou par lequel maître Gilbert HOUEDAN, substituant maître Bastien SALAMI, conseil de la société FAGBOHOUN et Fils, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°183/11 rendu le 29 décembre 2011 par la chambre civile moderne de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°90-012 du 1“ juin 1990 portant remise en vigueur et modification des ordonnances n°8 21/PR du 26 avril 1966 et 70- 16 du 14 mars 1970 organisant la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 23 janvier 2015, le conseiller Ginette AFANWOUBO-HOUNSA en son rapport ;
Ouï l’avocat général Lucien Aristide DEGUENON en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n° 003 du 07 mars 2012 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, maître Gilbert HOUEDAN, substituant maître Bastien SALAMI, conseil de la société FAGBOHOUN et Fils, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°183/11 rendu le 29 décembre 2011 par la chambre civile moderne de cette cour;
Que par lettre n°3523/GCS du 05 novembre 2012 du greffe de la Cour suprême, maître Bastien Rafiou SALAMI a été mis en demeure d’avoir à consigner dans un délai de quinze (15) jours et à produire ses moyens de cassation dans un délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 et 933 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes;
Attendu que la consignation a été payée;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits par les parties ;
Que les conclusions du procureur général près la Cour suprême ont été produites puis communiquées aux parties qui ont préalablement produit leur mémoire ;
Que maître Maximin CAKPO-ASSOGBA, conseil de ASECNA-Bénin, par correspondance du 07 octobre 2013, a pris acte de ce que le Ministère Public a conclu à l’incompétence de la Cour suprême par application des dispositions des articles 14 et 15 du Traité relatif à l'Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) et s'en remet à la sagacité de la Cour ;
Que maître Bastien SALAMI, conseil de la société FAGBOHOUN et Fils, a conclu en réplique à la compétence de la Haute juridiction aux motifs que la qualification faite par les parties litigantes ne lie point la juridiction saisie, encore moins la seule évocation par elles d’une disposition légale ;
EN LA FORME
Sur la compétence de la Cour suprême
Attendu que dans ses conclusions du 10 septembre 2013, le procureur général près la Cour suprême a conclu à l’incompétence de ladite Cour en se fondant sur les articles 14 et 15 du Traité relatif à l’OHADA, au principal motif que le présent litige relève du contentieux commercial ;
Qu'il énonce en substance que ce caractère commercial n’est pas contesté par la demanderesse au pourvoi en ce qu’elle invoque dans ses moyens l'application des articles 135, 136 et 137 de l’Acte Uniforme de l’OHADA relatif au Droit Commercial Général ;
Mais attendu d’une part, que l’invocation dans un contentieux, de l’application des dispositions des Actes Uniformes de l'OHADA ne suffit pas à rendre incompétente la juridiction nationale saisie ;
Qu'il est nécessaire que les dispositions invoquées soient, en outre, applicables et que la juridiction ait omis d’en faire application ou en a fait une application erronée ou une mauvaise interprétation ;
Que par ailleurs, il faut que l’application desdites dispositions ait déjà été invoquée, soit devant les juges d’instance, soit devant les juges d’appel, soit devant les deux (02) ordres de juridictions21u fond et que ces derniers aient omis d’en faire application ou en ont fait une application erronée ou une mauvaise interprétation ;
Attendu qu’en la présente cause pendante devant la Cour de céans, il est constant comme résultant de l’examen des pièces du dossier de la procédure que l’ordonnance de référé n°20/01 du ''" février 2001 ayant ordonné l’astreinte définitive, le jugement n°30/02-1#e Cciv du 30 octobre 2002 ayant liquidé l’astreinte, tout comme l’arrêt n°183/11 rendu le 29 décembre 2011 par la chambre civile moderne de la cour d’appel, objet du présent pourvoi, ne sont pas fondés sur les articles 135, 136 et 137 de l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général de l’OHADA ;
Qu’en effet, aucun grief ni moyen tiré de la violation ou de l’erreur dans l’application ou l'interprétation d’un Acte Uniforme ou règlement prévu au Traité de l'OHADA n’a été invoqué ni devant le premier juge ni devant les juges d’appel par l’une ou l’autre des parties ;
Que l’invocation par la demanderesse au pourvoi des articles 135, 136 et 137 de l’Acte Uniforme OHADA portant Droit Commercial Général dans l’argumentaire accompagnant l’exposé de son moyen en cassation tiré du défaut de base légale ne saurait changer ni le sens, ni la motivation de l’arrêt attaqué, lesdites dispositions légales invoquées n’ayant pas déterminé les juges dans la liquidation des astreintes prononcées ;
Et attendu, qu'il résulte des dispositions de l’article 772 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, qu’un contentieux n’a le caractère commercial que lorsqu’il porte, entre autres, sur les différends relatifs aux commerçants et intermédiaires de commerce pour les actes accomplis à l’occasion ou pour les besoins de leur commerce et les différends qui concernent leurs relations commerciales, les contestations relatives aux actes de commerce entre toutes personnes, aux sociétés commerciales et groupement d'intérêt économique,
Qu'en l’espèce, c’est suivant un exploit du 28 novembre 2001 que la société FAGBOHOUN et Fils à attrait devant le tribunal de première instance de Cotonou statuant en matière civile moderne, l'ASECNA pour, au principal, liquider l’astreinte définitive à laquelle celle-ci a été condamnée par ordonnance de référé n°20/01 du 1“ février 2001, elle-même rendue en matière civile ;
Que par suite de cette saisine, le tribunal statuant en matière civile, a rendu le jugement n°30/02-1%° CCiv du 30 octobre 2002 pour liquider l’astreinte à neuf milliards six cent quatre vingt millions (9 680 000 000) de FCFA pour quatre cent quatre vingt quatre (484) jours de résistance ;
Que c'est sur appel de ce jugement civil que l’arrêt querellé a été rendu par la cour d'appel de Cotonou statuant en sa formation civile ;
Qu'il ne ressort pas des énonciations de ces différentes décisions que les parties ont contesté la nature civile de l’affaire ou ont convenu, même tacitement, de lui donner un caractère commercial ;
Qu'’en conséquence, le présent contentieux dont l’objet est la liquidation d’astreintes pour résistance abusive à l’exécution d’une décision de justice, n’a pas un caractère commercial ;
Qu'il s'ensuit que les conditions de compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) telles que précisées par l’article 14 du Traité susvisé, ne sont pas réunies ;
Qu'il y a lieu, dès lors, de se déclarer compétente pour connaître du pourvoi en cassation élevé par la société FAGBOHOUN et Fils SARL ;
Sur la recevabilité du pourvoi
Attendu que le présent pourvoi a été introduit dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il convient de le déclarer recevable ;
AU FOND
FAITS ET PROCEDURE
Attendu que, se fondant, d’une part, sur un contrat du 08 août 1994 par lequel l'Etat béninois l’a agréé comme seul et unique exploitant du fonds de commerce dénommé «Relais de l’Aéroport de Cotonou », d’autre part, sur le décret n°96-002 du 04 janvier 1996 portant fermeture des magasins en exploitation dans la zone du Relais de l’Aéroport par des sociétés non agréées par l’Etat et vendues par l’'ASECNA, enfin sur la décision de la Cour Constitutionnelle n°96-088 des 12 et 13 août et 06 décembre 1996, la société FAGBOHOUN et Fils a attrait l'ASECNA devant le juge des référés du tribunal de première instance de première classe de Cotonou, à l’effet d'obtenir l’expulsion de tous occupants de son chef, du fonds de commerce dénommé Relais de l’Aéroport de Cotonou, sous astreinte comminatoire ;
Que par ordonnance n°20/01 du 1°" février 2001, le juge des référés a confirmé la société FAGBOHOUN et Fils dans l’exclusivité de l’exploitation de son fonds de commerce puis a ordonné l’expulsion des occupants de l'ASECNA sous astreinte comminatoire de vingt millions (20 000 000) de francs par jour de résistance ;
Que par jugement n°30/02-18° CCiv du 30 octobre 2002, le tribunal saisi a liquidé les astreintes mises à la charge de l’'ASECNA pour quatre cent quatre vingt quatre (484) jours, à la somme de neuf milliards six cent quatre vingt millions (9 680 000 000) de FCFA à raison de vingt millions (20 000 000) de FCFA par jour de résistance à l’ordonnance d'exécution;
Que sur appel de l'ASECNA, la cour d'appel de Cotonou, par arrêt n°183/11 du 29 décembre 2011, a infirmé le jugement incriminé aux motifs que c'est à tort que le premier juge a retenu la résistance de l’'ASECNA à l’exécution de l’ordonnance de référé du 1°" février 2001 ;
Que c'est cet arrêt infirmatif qui fait l’objet du présent pourvoi introduit par la société FAGBOHOUN et Fils SARL ;
DISCUSSION DES MOYENS
Premier moyen tiré de la dénaturation d’un écrit
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir infirmé le jugement n°30/01-18° CCiv du 30 octobre 2002 aux motifs que c’est à tort que le premier juge a retenu la résistance de l’'ASECNA à l’exécution de l’ordonnance de référé n°20/01 du 1“ février 2001 et l’a condamnée au paiement d’astreintes liquidées à la somme de neuf milliards six cent quatre vingt millions (9 680 000 000) de FCFA par le jugement du 30 octobre 2002;
Alors que, selon le moyen, l'ASECNA n’a pas cru devoir assurer à la société FAGBOHOUN et Fils SARL l’exclusivité de l’exploitation de son fonds de commerce dénommé Relais de l’Aéroport de Cotonou, en dépit du contrat d'acquisition signé entre elle et l'Etat béninois de ce fonds de commerce, de la prise du décret n°96-002 du 04 janvier 1996 et de l’avenant n°1 du 21 juin 1999, ainsi que d’autres décisions tant administratives que judiciaires, notamment l’ordonnance n°20/01 rendue le 1° février 2001 par le juge des référés du tribunal de première instance de Cotonou ;
Qu’en l'espèce, au moment de la concession du Relais de l’Aéroport de Cotonou à la société FAGBOHOUN et Fils SARL, l'intention des parties était d’assurer à cette dernière, l’exclusivité de l'exploitation de son fonds de commerce ;
Que même si, conformément aux dispositions de l’article 2.1 de l’avenant n°1 du 21 juin 1999, l'ASECNA a transmis à la société FAGBOHOUN et FILS SARL, sept (07) contrats de concession qu’elle a conclus avec les exploitants de l’espace Relais de l’Aéroport, cette transmission est loin d'assurer à la société FAGBOHOUN et FILS qui n’est pas partie à ces contrats de concession, l’exclusivité du fonds de commerce ;
Qu'il ressort d’ailleurs de l’article 2.1 de l’avenant n°1 du 21 juin 1999 que : « l’acheteur ne sera pas subrogé à l'ASECNA dans tous les droits et obligations des titulaires desdits contrats particuliers jusqu’à leur expiration… » ;
Qu'’en conséquence, le fait pour l'ASECNA de n’avoir pas fait déguerpir les concessionnaires, en dépit de l’ordonnance n°20/01 du 1° février 2001, constitue la résistance sanctionnée par le jugement entrepris ;
Qu'il s’infère de tout ce qui précède que les juges d’appel ont méconnu le sens clair et précis du contrat liant les parties et ont, dès lors, violé les dispositions des articles 1134 et 1156 du code civil ainsi que la théorie de la dénaturation dégagée par la doctrine dominante qui exige des juges du fond de rechercher la commune intention des parties plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes, lorsque l’acte est ambigu et appelle une interprétation ;
Mais attendu que l’arrêt attaqué a justement relevé que l’avenant n°1 du 21 juin 1999 stipule en son article 2.1 : « …l’acheteur sera subrogé vis-à-vis de l'ASECNA dans tous les droits et obligations des titulaires desdits contrats particuliers jusqu’à leur expiration. » ;
Qu’en premier lieu, en déduisant de ces stipulations contractuelles que, d’une part « contrairement à ce qu’elle soutient, à savoir, ne pas être cessionnaire des contrats conclus par l'ASECNA, le transfert des contrats des exploitants de boutiques et autres installations commerciales relevant du « RELAIS DE L’'AEROPORT DE COTONOU » à la date de signature de l’avenant et à respecter lesdits contrats jusqu’à leur expiration, d’autre part, « à négocier avec ceux-ci les modalités de la poursuite de leurs exploitations. », les juges d'appel n’ont pas dénaturé le contrat liant les parties ;
Qu’en second lieu, en énonçant que l’'ASECNA a exécuté aussi bien l’ordonnance de référé n°20/01 du 1“ février 2001 que les stipulations contractuelles contenues dans les articles 2.1 et 3.1 de l’avenant n°1 du 21 juin 1999 pour avoir transféré effectivement à la société FAGBOHOUN et FILS SARL, les sept (07) contrats de gré à gré conclus par elle avec les exploitants commerciaux non agréés par l’Etat béninois, pour avoir délaissé commandement de déguerpir du 31 janvier 1996 et sommation de déguerpir du 28 janvier 2000 auxdits exploitants et pour leur avoir demandé de se rapprocher de la société FAGBOHOUN et FILS SARL pour négocier les modalités de poursuite de leurs exploitations, les juges d'appel ont fait l’exacte application des stipulations contractuelles invoquées par le moyen ;
D’où il suit que ce premier moyen n’est pas fondé ;
Deuxième moyen pris du défaut de base légale
Attendu qu’il est reproché aux juges d’appel d’avoir infirmé le jugement n°30/02 du 30 octobre 2002 en se limitant à énoncer que la société FAGBOHOUN et FILS ne peut avoir plus de droit qu’elle n’en a acquis ;
Alors que, selon le moyen, il ressort des articles 135, 136 et 137 de l’Acte Uniforme OHADA relatif au Droit Commercial Général qu’en décidant que l’'ASECNA devrait assurer à la société FAGBOHOUN et FILS SARL l’exclusivité du fonds de commerce dénommé Relais de l’Aéroport, le juge des référés a entendu voir l’espace débarrassé de tout autre exploitant ;
Qu’ainsi, au lieu de se limiter à une concession des contrats conclus avec les tiers, l'ASECNA devait, à défaut d’obtenir l’expulsion des exploitants commerciaux avec qui elle avait conclu lesdits contrats, les sommer de quitter les lieux ;
Qu’en affirmant que la société FAGBOHOUN et FILS SARL ne peut avoir plus de droit qu’elle n’en a acquis, les juges du fond n’ont pas suffisamment motivé leur décision ;
Mais attendu qu’il y a défaut de base légale lorsque les motifs de la décision attaquée ne permettent pas de vérifier si les éléments nécessaires pour justifier l'application qui a été faite de la loi se rencontraient bien dans la cause ;
Qu'’en l'espèce, pour conclure à l’infirmation du jugement entrepris pour non résistance de l’'ASECNA, les juges d’appel n’ont pas fait application des articles 135, 136 et 137 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur le Droit Commercial Général, mais ont plutôt retenu, en se fondant sur le droit commun applicable à l’astreinte :
- en premier lieu, que l'ASECNA a exécuté aussi bien l’ordonnance de référé n°20/01 du 1“ février 2001 que les stipulations contenues dans les articles 2.1 et 3.1 de l’avenant n°1 du 21 juin 1999 en transférant à la société FAGBOHOUN et FILS SARL les sept (07) contrats de gré à gré conclus par elle avec les exploitants commerciaux non agréés par l'Etat béninois ; en délaissant commandement de déguerpir du 31 janvier 1996 et sommation de déguerpir du 28 janvier 2000 auxdits exploitants et en leur demandant de se rapprocher de la société FAGBOHOUN et FILS SARL pour négocier les modalités de poursuite de leurs exploitations ;
- en second lieu, que l'ASECNA a fait la preuve au dossier de ce qu’elle ne perçoit plus les loyers auprès de ces exploitants illégaux et qu’elle a mis fin à leurs rapports commerciaux ;
Qu'en l’état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Qu'’en conséquence, ce deuxième moyen n’est pas fondé ;
Troisième moyen tiré de la violation de la loi
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 5 du code civil en faisant référence à l'arrêt n°135/2002 rendu le 26 décembre 2002 par la chambre civile de la même cour d’appel de Cotonou dans l’affaire ayant opposé la société FAGBOHOUN et FILS SARL, les sociétés la Boutique et LOKA et FILS d’une part, à la Société Africaine de Distribution (SADIV) SARL d'autre part, pour retenir que les droits exclusifs qui échoient à la société FAGBOHOUN et FILS SARL aux termes du contrat de cession du Relais de l’Aéroport de Cotonou, comportent des limites qui résultent de l’avenant n°1 signé le 21 juin 1999 ;
Alors que, selon le moyen, en vertu de l’article 5 du code civil, la jurisprudence ainsi que la doctrine dominantes interdisent aux juges de se prononcer par voie de disposition générale et règlementaire sur les causes qui leur sont soumises, de se référer à une décision de justice rendue dans un litige différent de celui soumis à leur juridiction et qui servira de fondement à la décision de cette dernière, de se référer à des décisions antérieures en les considérant comme des précédents jurisprudentiels ;
Mais attendu que l’article 5 du code civil dispose qu'il est défendu aux juges de prononcer par voie de disposition générale et règlementaire ;
Qu'il en résulte que pour motiver sa décision, le juge doit se déterminer d’après les circonstances particulières du procès et non par seule référence à des causes déjà jugées ou à une autre décision rendue concomitamment, fût-ce dans une affaire absolument identique, ou encore à une décision antérieure, même rendue entre les parties en cause ;
Qu'’en revanche, le juge qui, non seulement s’est déterminé d’après les circonstances particulières de l’affaire pendante devant lui, au vu des éléments de faits propres au litige qui lui était soumis, par une appréciation des circonstances propres à l’espèce, mais s’est également référé à des motifs pris d’autres causes pour motiver sa décision, n’a pas violé l’article 5 du code civil ;
Et attendu qu’en l’espèce, les juges d’appel, faisant recours à des décisions antérieures produites à leur dossier, ont, à bon droit, tiré de ces causes, des motifs de fait selon lesquels les stipulations contractuelles contenues dans les articles 2.1 et 3.1 de l'avenant n°1 du 21 juin 1999 engagent la société FAGBOHOUN et FILS SARL à recevoir de l'ASECNA les contrats des exploitants commerciaux non agréés de l’espace du Relais de l’Aéroport, à respecter lesdits contrats jusqu’à leur terme ou à négocier éventuellement avec ceux-ci les modalités de poursuite de leurs activités ;
Qu'il en résulte que les juges d'appel n’ont pas méconnu le sens et la portée des dispositions de l’article 5 du code civil invoqué ;
Que dès lors, ce troisième moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS EN LA FORME
Se déclare compétente ;
Reçoit le présent pourvoi ;
AU FOND
Le rejette ;
Met les frais à la charge de la société FAGBOHOUN et FILS SARL ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judicaire) composée de :
Gilbert Comlan AHOUANDJINOU, Président de la Chambre
Ginette AFANWOUBO épouse A Et Magloire MITCHAÏ CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-trois janvier deux mille quinze, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Lucien Aristide DEGUENON, AVOCAT GENERAL ;
Djièwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président, Le
rapporteur,
Gilbert Comlan AHOUANDJINOU Ginette AFANWOUBO épouse A
Le greffier.
Djièwekpégo Paul ASSOGBA


Synthèse
Numéro d'arrêt : 001/CJ-CM
Date de la décision : 23/01/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2015-01-23;001.cj.cm ?
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