La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2004 | BéNIN | N°68/CA

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 08 juillet 2004, 68/CA


N°68/CA du Répertoire Arrêt du 08 juillet 2004


DOSSOU-YOVO Yvette
C/
Préfet Atlantique et 1 autre
La Cour,
Vu la requête introductive d'instance en date à Cotonou du 04 septembre 1997 enregistrée le 11 septembre 1997 sous le n° 621/GCS du greffe de la Cour suprême, par laquelle Madame DOSSOU-YOVO Yvette demeurant et domiciliée à Cotonou carré n° 155, Avenue Steinmetz, a, par l'organe de son avocat Maître Hélène KEKE-AHOLOU, introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre le permis d'habiter n° 2/017 du 07 mars 1997 délivré aux h

éritiers COCO About Dominique représentés par Monsieur COCO About Pierre en remplacement...

N°68/CA du Répertoire Arrêt du 08 juillet 2004


DOSSOU-YOVO Yvette
C/
Préfet Atlantique et 1 autre
La Cour,
Vu la requête introductive d'instance en date à Cotonou du 04 septembre 1997 enregistrée le 11 septembre 1997 sous le n° 621/GCS du greffe de la Cour suprême, par laquelle Madame DOSSOU-YOVO Yvette demeurant et domiciliée à Cotonou carré n° 155, Avenue Steinmetz, a, par l'organe de son avocat Maître Hélène KEKE-AHOLOU, introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre le permis d'habiter n° 2/017 du 07 mars 1997 délivré aux héritiers COCO About Dominique représentés par Monsieur COCO About Pierre en remplacement d'un précédent Permis d'habiter n° 161 du 07 mai 1946 établi au nom de COCO Assiata Francisca;
Vu le mémoire ampliatif de la requérante en date du 14 janvier 1998 enregistré sous le n° 078/GCS du 05 février 1998 au greffe de la Haute Juridiction;
Vu les communications n°s 601/GCS et 602/GCS du 05 mai 1998 faites respectivement au préfet de l'Atlantique, aux héritiers COCO About Dominique représentés par COCO About Pierre, pour leurs observations, de la requête introductive, du mémoire ampliatif ainsi que de toutes les pièces du dossier;
Vu le mémoire en défense en date du 07 juillet 1998 des héritiers COCO About Dominique assistés de Maîtres François AMORIN et Bernard PARAÏSO et enregistré le 13 juillet 1998 sous le n° 644/GCS du greffe de la Cour suprême;
Vu le mémoire en réplique de la requérante en date du 14 octobre 1998 enregistré au greffe de la Cour le 29 octobre 1998 sous le n° 1034/GCS;
Vu la consignation légale constatée par reçu n° 1088 du 26 septembre 1997;
Vu toutes les pièces du dossier;
Vu l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour suprême, remise en vigueur par la loi n° 90-012 du 1er juin 1990;
Vu la loi n° 60-20 du 13 juillet 1960 fixant le régime des Permis d'Habiter au Dahomey;
Vu le décret n° 64-276/PC/WAEP/EDT du 02 décembre 1964 fixant le régime des Permis d'Habiter au Dahomey;
Ouï le Conseiller Eliane R. G. PADONOU en son rapport;
Ouï l'Avocat Général Clémence DANSOU néeYIMBERE en ses conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
A - En la forme
Sur la recevabilité
Considérant que dans leur mémoire en défense, les héritiers de feu Dominique About COCO représentés par Pierre About COCO soulèvent par l'organe de leurs conseils Maîtres François AMORIN et Bernard PARAÏSO, l'irrecevabilité du recours pour défaut de qualité et d'intérêt et défaut de recours gracieux;
1- Sur l'exception d'irrecevabilité tirée du défaut de qualité et d'intérêt à agir de la requérante DOSSOU-YOVO Yvette.
Considérant que les héritiers de feu Dominique About COCO excipent de l'irrecevabilité pour défaut de qualité et d'intérêt de la requérante au motif que la requérante se prévalant d'un droit successoral réservataire qui leur est opposable, devrait préalablement à toute revendication, faire établir sa qualité et son droit prétendu en rapportant la preuve de l'annulation du testament;
Considérant que les susnommés font valoir en outre que Madame EKAGNON Coffi Romana fille unique de Francisca Assiata COCO qui est décédée le 28 décembre 1988 n'a jamais contesté le testament, ni entrepris de muter le permis d'habiter en son nom et que partant elle n'a pas pu transmettre à ses enfants dont DOSSOU YOVO Yvette la requérante, des biens dont elle n'a pas hérité et qui n'étaient jamais entrés dans son patrimoine;
Considérant qu'en matière de recours pour excès de pouvoir, l'intérêt direct et personnel résulte «de la violation prétendue, par un acte administratif, d'un élément de la légalité que protège la situation juridique du plaideur»;
Qu'ainsi, l'intérêt à agir découle de deux conditions à savoir que le requérant doit se trouver dans une situation juridique particulière et que l'acte administratif doit par son objet concerner cette situation;
Considérant qu'en l'espèce, la requérante prétend être héritière de Madame Francisca A. About COCO par représentation de sa mère feue EKAGNON Coffi R. fille unique de Francisca Assiata A. COCO dont le seul bien qu'elle a laissé, en l'occurrence l'immeuble sis sur le ¿ Nord-Est du lot 155 ATIKANMEY et muni du Permis d'Habiter n° 161 du 07 mai 1946 qui a été muté au nom des héritiers de feu Dominique About COCO;
Qu'il en résulte que la requérante DOSSOU-YOVO Yvette a un intérêt direct et personnel à former un recours pour excès de pouvoir contre le nouveau Permis d'Habiter n° 2/017 du 07 mars 1997 qui crée à son égard une situation juridique particulière;
Que justifiant ainsi d'un intérêt à l'annulation de l'acte entrepris et ayant capacité à agir en justice, Madame DOSSOU-YOVO Yvette a parfaitement qualité à agir en la présente cause;
Qu'en conséquence, il y a lieu de rejeter l'exception d'irrecevabilité pour défaut d'intérêt et de qualité de la requérante
2- Sur le défaut de recours gracieux
considérant que les héritiers de feu Dominique ABOU COCO soulèvent l'irrecevabilité du recours pour défaut de recours gracieux en violation de l'article 68-2è de l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966;
Considérant en effet que l'article 68-2è de l'ordonnance précitée dispose:
«Avant de se pourvoir contre une décision individuelle, les intéressés doivent présenter un recours hiérarchique ou gracieux tendant à faire rapporter ladite décision»;
Mais considérant que l'article 68-2è précité a fait du recours administratif préalable une obligation, il n'a nulle part indiqué que la preuve de ce recours doit être faite à la production de la requête introductive;
Que de fait, cette preuve peut être présentée au cours des mesures d'instruction ordonnées par le conseiller rapporteur;
Qu'en l'espèce, le requérant a produit au dossier la copie du recours gracieux daté du 14 mai 1997 adressé au préfet par l'organe de son avocat ainsi que la photocopie de l'avis de réception daté du 22 mai 1997;
Qu'il faut en conclure qu'il y a bien eu recours gracieux préalable et partant dire que l'exception d'irrecevabilité pour défaut de recours gracieux soulevée par les héritiers de feu Dominique About COCO n'est pas fondée et doit être rejetée;
B - Sur le fond du recours
Considérant que Madame DOSSOU-YOVO Yvette expose que feue Francisca A. COCO est propriétaire d'un immeuble sis sur le ¿ Nord-Est du lot 155 à ATINKANMEY et qui fait l'objet du Permis d'Habiter n° 161 du 07 mai 1946 et dont a hérité sa fille unique EKAGNON Coffi Romana qui décéda le 28 décembre 1988;
Que s'estimant héritière de cet immeuble, elle fut surprise de constater que les héritiers de feu Dominique About COCO, neveux de Francisca About Assiata COCO représentés par Pierre About COCO se sont faits délivrer par le préfet du département de l'atlantique, et suivant un prétendu testament authentique en date du 05 avril 1971 reçu par Maître Philippe QUENUM, notaire à Cotonou, le Permis d'Habiter n° 2/017 en date du 07 mars 1997 en remplacement du Permis d'Habiter n° 161 du 07 mai 1946;
Que c'est alors qu'elle a, par requête en date du 14 mai 1997, demandé à monsieur le préfet du département de l'Atlantique d'annuler le Permis d'Habiter n° 2/017 du 07 mars 1997;
Que face au silence observé par l'autorité préfectorale, elle a saisi la haute Juridiction d'un recours en annulation pour excès de pouvoir contre ledit Permis d'Habiter;
Considérant que la requérante fonde son recours sur le moyen unique tiré de la violation de l'article 7 du décret n° 64-276PC/MFAEP/EDT du 02 décembre 1964 fixant le régime des Permis d'Habiter du Dahomey en ce que le prétendu testament qui a justifié la délivrance du nouveau Permis d'Habiter n'a jamais pu attribuer aux héritiers de feu Dominique About COCO, la totalité de l'unique bien laissé par le testateur puisque «la loi ne permet pas en effet de disposer de la totalité de ses biens au profit de tiers lorsqu'il existe des héritiers réservataires»;
Que la requérante ajoute par ailleurs que le droit de propriété dont se prévalent lesdits héritiers est contesté devant le tribunal de première instance de Cotonou où se trouve pendante une action par elle initiée;
Considérant que pour leur part, outre l'exception d'irrecevabilité tirée du défaut de qualité et d'intérêt d'une part puis du défaut de recours gracieux d'autre part, les héritiers de feu Dominique About COCO soulèvent le caractère authentique du testament qui fait foi jusqu'à inscription du faux dont la requérante ne rapporte pas la preuve, pas plus qu'elle ne rapporte la preuve du droit de réserve héréditaire dont elle bénéficierait légalement ;
Que concluant au rejet du recours au fond, ils affirment que feue AKAGNON Coffi Romana mère de la requérante n'a jamais été titulaire de Permis d'Habiter sur l'immeuble dont s'agit et que ses enfants ne sauraient revendiquer comme biens successoraux les installations qui y sont édifiées qu'en établissant que lesdites installations avaient été recueillies par leur mère dans son patrimoine;
Considérant qu'en réplique, la requérante estime que le droit successoral n'est pas subordonné à l'accomplissement de la formalité de la mutation et que la qualité d'héritière suffit à lui faire recueillir l'immeuble qui fut la propriété de sa mère;
Qu'elle évoque les dispositions des articles 913 alinéa 1er du code civil et 258 du coutumier du Dahomey et soutient qu'une action en annulation du testament n'est pas nécessaire et ne saurait être préalable à la saisine du juge administratif;
Qu'elle conclut qu'en présence de l'héritier réservataire, les héritiers Dominique ABOU COCO ne disposent d'aucun droit exclusif sur l'immeuble querellé;
Considérant en effet, quant au fond du recours, que l'article 7 du décret n° 64-276/PC/MFAEP/EDT du 2 décembre 1964 fixant le régime des permis d'habiter au Dahomey dispose: «si le titulaire d'un permis d'habiter vient à décéder, un nouveau permis est délivré dans le délai de déclaration de succession au bureau de l'enregistrement, au nom des héritiers intéressés sur leur demande appuyée de l'un des documents suivants:
1- Certificat d'hérédité
2- Jugement d'hérédité s'il y a des héritiers mineurs
3- Acte de notoriété constatant la qualité des héritiers si le de cujus est de nationalité étrangère
En cas de partage successoral ou attribution selon la coutume ou la loi civile du défunt, le nouveau permis pourra être établi au nom du seul attributaire, sur dépôt des actes ou pièces établissant cette attribution»;
Considérant que les héritiers de feu Dominique About COCO ont fait procéder à la mutation querellée en produisant à l'autorité administrative le testament authentique en date du 05 avril 1971 reçu par devant Maître Philippe QUENUM, notaire à Cotonou;
Considérant qu'à l'analyse ledit testament a valeur de certificat d'hérédité;
Qu'il s'en suit que les héritiers de feu Dominique About COCO se sont conformés aux prescriptions de l'article 07 du décret ci-dessus cité;
Considérant que le testament est par surcroît un acte authentique dont l'appréciation échappe au préfet de département;
Qu'en effet, le rôle de ce dernier dans l'établissement du nouveau permis d'habiter après le décès du titulaire est, en vertu de l'article 7 du décret n° 64-276 précité, de constater le dépôt des actes ou pièces établissant l'attribution de la succession;
Que le préfet est donc incompétent à juger de la validité du testament au regard des articles 913 alinéa 1er du code civil français cité par le requérant et 258 du coutumier du Dahomey, cette mission ressortissant à la compétence du juge civil qui seul peut dire si le testament qui a servi de fondement à la mutation du permis d'habiter est conforme à la loi;
Que dès lors, on ne saurait judicieusement reprocher au préfet du département de l'atlantique d'avoir ignoré les droits de l'héritier réservataire;
Qu'il y a lieu en conséquence de rejeter le recours en annulation pour excès de pouvoir formé par dame DOSSOU-YOVO Yvette contre le permis d'habiter n° 2/017 du 7 mars 1997;
Par ces motifs
Décide:
Article 1er: Le recours en annulation pour excès de pouvoir en date du 04 septembre 1997 introduit par Madame DOSSOU-YOVO Yvette contre le Permis d'Habiter n° 2/017 du 07 mars 1997 délivré aux héritiers COCO About Dominique représentés par Monsieur COCO About Pierre est recevable.
Article 2: ledit recours est rejeté.
Article 3: Les dépens sont mis à la charge de la requérante.
Article 4: Notification du présent arrêt sera faite aux parties et au Procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre administrative) composée de:
Jérôme O. ASSOGBA, Conseiller à la chambre administrative
PRESIDENT;
Joachim G. AKPAKA }
ET { CONSEILLERS;
Eliane PADONOU }
Et prononcé à l'audience publique du jeudi huit juillet deux mille quatre, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:
Clemence YIMBERE-DANSOU,
MINISTERE PUBLIC;
Et de Geneviève GBEDO,
GREFFIER;


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 68/CA
Date de la décision : 08/07/2004
2e section contentieuse
Sens de l'arrêt : Recevabilité

Parties
Demandeurs : DOSSOU-YOVO Yvette
Défendeurs : Préfet Atlantique et 1 autre

Références :

Décision attaquée : Préfet Atlantique et 1 autre, 04 septembre 1997


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2004-07-08;68.ca ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award