La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/05/2002 | BéNIN | N°22/CA

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 02 mai 2002, 22/CA


TOFFOHOSSOU C. Armand
C/
Ministre du Développement Rural
N° 22/CA 02 mai 2002
La Cour,
Vu la requête en date à Cotonou du 17 juillet 1989 enregistrée au Greffe de la Cour le 19 juillet 1989 sous n° 123, par laquelle TOFFOHOSSOU Codjo Armand, ex-Responsable du Développement Rural CARDER-KETOU, par l'organe de son conseil, Maître Rafikou ALABI, Avocat à la Cour, a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre la Décision du Conseil Exécutif National du 22 septembre 1988, objet du Relevé n° 39/SGCEN/REL du 23 septembre 1988 le révoquant de la

Fonction Publique avec perte de tous les droits et mis en débet pour la somm...

TOFFOHOSSOU C. Armand
C/
Ministre du Développement Rural
N° 22/CA 02 mai 2002
La Cour,
Vu la requête en date à Cotonou du 17 juillet 1989 enregistrée au Greffe de la Cour le 19 juillet 1989 sous n° 123, par laquelle TOFFOHOSSOU Codjo Armand, ex-Responsable du Développement Rural CARDER-KETOU, par l'organe de son conseil, Maître Rafikou ALABI, Avocat à la Cour, a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre la Décision du Conseil Exécutif National du 22 septembre 1988, objet du Relevé n° 39/SGCEN/REL du 23 septembre 1988 le révoquant de la Fonction Publique avec perte de tous les droits et mis en débet pour la somme de Un million quatre vingt quatre mille deux cent soixante quinze (1.084.275) francs CFA ;
Vu les lettres n°s 60 et 61/GCS du 19 novembre 1990 invitant le conseil du requérant à apposer les timbres fiscaux sur la requête, à produire les copies de certaines pièces et à consigner;
Vu le mémoire ampliatif du conseil du requérant en date du 03 juillet 1991 enregistré au Greffe de la Cour le 12 juillet 1991 sous n° 0077;
Vu la communication n° 17/GCS du 17 janvier 1992 transmettant au Ministre du Développement Rural la requête introductive d'instance et le mémoire ampliatif pour ses observations, et la réponse adressée à la Cour par lettre n° 240/MDRAC/D.CAB/CC/CP du 12 mars 1992;
Vu les communications faites au conseil du requérant pour son mémoire en réplique et à l'Administration pour ses observations éventuelles respectivement par lettres n° 332/GCS du 28 juillet 1992 et 237/GCS du 17 juin 1993;
Vu les correspondances n°s 1834/GCS du 14 octobre 1999 et 2008/GCS du 20 août 2001 invitant l'Administration à produire à la Cour le Rapport complet de la Commission ad'hoc de répression disciplinaire créée par Décret n° 86-290 du 17 juillet 1986, objet de la communication n° 603/86 demeurées sans effet;
Vu l'Ordonnance n° 80-6 du 11 février 1980 édictant les dispositions en vue de la répression disciplinaire des détournements et de certaines infractions commis par les Agents de l'Etat et les Employés des Collectivités locales;

Vu la consignation légale constatée par reçu n° 304 du 27 novembre 1990;
Vu l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour Suprême, remise en vigueur par la Loi n° 90-012 du 1er juin 1990;
Vu toutes les pièces du dossier;
Ouï le Conseiller Joachim G. AKPAKA en son rapport;
Ouï l'Avocat Général Raoul Hector OUENDO en ses conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
EN LA FORME
Considérant que le recours du requérant, pour avoir été introduit dans les forme et délai de la loi, est recevable.
AU FOND
Considérant que le conseil du requérant expose:
- Que dans le cadre des campagnes de commercialisation des produits agricoles menées par le CARDER-OUEME pendant la période du 20 février au 31 mai 1985, Monsieur TOFFOHOSSOU C. Armand, ex-Responsable du Développement Rural secteur Kétou et les agents TOSSA Albert, Chef sous-secteur Adakplamé; Michel PAPIAS, KENALI Benjamin, GBADAMASSI Sikirou, Chefs des sous-secteurs Kpankou, Okpomèta, ont eu à utiliser des fonds mis à leur disposition par la Direction Générale;
- Que le secteur Kétou CARDER-OUEME ayant connu pendant cette période plusieurs ruptures de fonds, seul TOSSA Albert avait pu continuer les achats à crédits pour un montant de 1.335.650 francs CFA, ce qui amena la Direction Générale à décaisser la somme de 1.375.750 francs CFA y compris les frais sur achat d'un montant de 40.100 francs CFA, qui a été versée à monsieur TOSSA Albert contre reçu.
- Mais que contre toute attente des paysans de Kétou sont venus réclamer à la Direction Générale du CARDER le montant des achats effectués à crédit auprès d'eux et déjà payé par cette Direction;
- Que cette situation déclencha une série de Commissions d'enquête dont la Commission ad'hoc de Répression Disciplinaire qui, suite à son rapport, amena le Conseil Exécutif National en sa séance du 09 septembre 1988, à décider, après examen dudit rapport, la révocation du requérant de la Fonction Publique avec perte de tous ses droits et sa mise en débet pour la somme de un million quatre vingt quatre mille deux cent soixante quinze (1.084.275) francs CFA du fait de la mauvaise organisation dont il a fait preuve dans la commercialisation, ayant délibérément encouragé les achats à crédit qui ont conduit à la confusion au niveau des fonds et à la réaction des paysans.
- Que par lettre en date du 12 avril 1989 il a saisi le Président de la République d'un recours gracieux à cet effet, recours auquel le Président a fait suite en l'informant de la transmission de son dossier à la Haute Juridiction.
Sur le moyen unique du requérant tiré de l'inexactitude des motifs de faits en ce que la décision querellée est fondée sur des faits matériellement inexacts
Considérant qu'il ressort des conclusions du Rapport de la Commission ad'hoc de Répression Disciplinaire:
«Que le camarade TOSSA Albert n'a pas commis de détournement de fonds au préjudice du CARDER-OUEME.
«Que la Communication n° 603/86 rendant compte des plaintes des paysans ayant vendu du maïs au CARDER-OUEME dans le secteur de Kétou n'avait pas, de l'avis de la Commission ad'hoc, pris le temps de bien fouiller le dossier pour faire la part des choses et avait conclu trop hâtivement au fait de détournement par TOSSA Albert.
«Que ce n'est pas au camarade TOSSA que la Direction du CARDER a remis la somme de 7.875.750 francs mais à TOFFOHOSSOU qui, à son niveau, a réparti le montant reçu aux acheteurs ayant à leur tête les Chefs sous-secteurs dont le camarade TOSSA Albert.
«Qu'il est symptomatique;
«Qu'alors même qu'il se disait débordé par les tâches politico-administratives, il ait voulu commercialiser lui-même le maïs bien que ceci ne rentre pas dans ses attributions;
«qu'il ait écarté son adjoint des opérations d'achat de maïs;
«qu'il ait déclenché le processus d'achat à crédit alors qu'il détenait encore des fonds;
«qu'il soit revenu le 22 juillet 1985 remettre 1.375.000 francs au camarade TOSSA Albert, alors que depuis le 26 juin 1985, il avait passé service au nouveau Responsable du Développement Rural, le camarade TOCLOE Richard.
«que la Commission a constaté que la commercialisation a été très mal organisée et que le camarade TOFFOHOSSOU a, de façon délibérée, encouragé les achats à crédits qui ont conduit à la confusion au niveau des fonds et à la réaction des paysans.»
Considérant que sur tous ces griefs articulés contre lui par la Commission ad'hoc, le requérant par l'organe de son Conseil, ne réfute que quelques uns en dépit des auditions et confrontations dont il a été l'objet et des justificatifs apportés par lui devant ladite Commission.
Qu'ainsi les points ci-après, considérés comme des faits dénaturés par la Commission ad'hoc seront examinés.
1.- Sur la signature de la reconnaissance de dettes par TOSSA Albert:
Considérant que le conseil du requérant soutient que «une rencontre fut organisée et présidée par le Directeur Général du CARDER-OUEME, Monsieur KAKANAKOU Prosper, le 07 octobre 1985 afin de situer les responsabilités; qu'à cette réunion de vérité, Monsieur TOSSA Albert reconnut les faits et demanda de faire une reconnaissance de dette au CARDER-OUEME pour un règlement à l'amiable;
Qu'il précise que «le mis en cause avait signé sans aucune pression une reconnaissance de dette d'un montant de 910.000 F CFA au cours d'une séance de travail présidée par le Directeur Général du CARDER-OUEME et a sollicité le concours personnel du Directeur Général du CARDER-OUEME sur le règlement amiable du problème»;
Qu'en revanche, il ressort du rapport de la Commission ad'hoc que cette signature résulte de manouvres dolosives et que cette reconnaissance de dette doit être purement et simplement écartée, TOSSA ayant refusé de l'établir lors de l'interrogation réponse de la Commission d'Enquête le 30 octobre 1985;
Mais considérant qu'il est constant au dossier que suite aux investigations et confrontations menées, des éléments de preuve ont été établis à la décharge de TOSSA eu égard à la justification des fonds mis à sa disposition et sa concordance avec le tonnage de maïs acheté; que, dès lors il y a lieu de rejeter ce moyen comme étant mal fondé;
2.- Sur la méconnaissance par la Commission ad'hoc de la prise en compte des fiches hebdomadaires ou mensuelles.
Considérant que le conseil du requérant écrit dans son mémoire en réplique à la page 2 que: «. ladite Commission s'est servie d'un état récapitulatif des divers achats opérés dans la période des faits dont elle a attribué l'établissement à l'Intendant du Secteur pour imputer la responsabilité du détournement de la somme de 475.975 francs CFA au requérant. C'est sur la base de cet état récapitulatif (pièces n°s 1 et 4) que la Commission a conclu qu'une somme de 1.282.535 francs avait été dépensée pour l'achat de 18,916 tonnes de maïs y compris indistinctement les frais sur achat»;
Considérant cependant qu'il est établi que les déclarations contradictoires du requérant et surtout la confusion qu'il a voulu semer en s'abstenant de tenir une comptabilité personnelle de ses dépenses ont amené la Commission ad'hoc qui s'est trouvée en présence de trois (03) chiffres à considérer le document de travail non pas de l'Intendant du Secteur comme il est écrit mais bien celui de TOSSA qui reflète mieux la situation détaillée;
Qu'il convient d'observer en considérant l'état récapitulatif élaboré par TOSSA au lieu de l'Intendant comme il est écrit, que la Commission ad'hoc ne niait pas l'existence des frais sur achat effectués par TOFFOHOSSOU, mais qu'il appartenait à ce dernier d'apporter les justificatifs nécessaires, ce qu'il n'a pu faire s'agissant des 597.465 francs devant ladite Commission, n'ayant reconnu à l'époque que la somme de 246.003 francs, ce qui est en contradiction avec le somme de 475.975 francs dont font état les fiches mensuelles produites par le requérant;
Que n'ayant pu faire les justifications nécessaires sur la base de ces fiches, en ce qui concerne les frais de marché engagés par lui sur ces fonds, le requérant se doit de reconnaître son entière responsabilité dans la situation ainsi créée et ne s'en prendre qu'à lui-même pour avoir voulu commercialiser du maïs alors que ceci ne rentrait pas dans ses attributions d'une part, et d'autre part en écartant purement et simplement son adjoint dès le départ de l'opération alors qu'il se disait déborder par les tâches politico-administratives;
Que dès lors, il échet d'écarter aussi ce grief.
3.- Sur les reversements effectués par les acheteurs
Considérant que le requérant, a prétendu n'avoir reçu en réalité contre décharge le 29 mai 1985 que la somme de 1.840 francs (pièces n° 2) et que la Commission ad'hoc a dénaturé les faits en affirmant faussement que les sommes suivantes: (Michel PAPIAS = 50.840 F; un autre agent = 20.100 F; Marie = 28.860 F) ont été reversées au requérant;
Qu'ainsi, il apparaît que le requérant reconnaît implicitement avoir reçu la somme de 22.010 francs reversée par Benjamin KENALI et qu'il n'a point évoqué; que néanmoins, s'agissant du reversement opéré par Michel PAPIAS, il y a lieu de relever que celui-ci n'avait, à la date du 29 mai 1985 que la somme de 1.840 francs comme reliquat en caisse qu'il aurait dû reverser au lieu de 50.840 francs que la Commission ad'hoc a inscrit à son compte (cf. pièce n° 7 COTE III, A);
Que s'agissant de l'acheteur dénommé «MARIE» qui fait l'objet de contestation de sa part et des autres reversements contestés, le juge ne peut en l'absence de preuves concordantes apprécier lesdites allégations;
Que, dans le cas d'espèce, quand bien même les reversements contestés par le requérant viendraient en déduction de la somme mise en débet soit un montant total de 97.960 F sur 1.084.275 F, la qualification des faits incriminés ainsi que la sanction subséquente resteraient les mêmes et par conséquent seraient sans influence sur la décision de révocation prise par le Conseil Exécutif National eu égard aux dispositions de l'Ordonnance n° 80-6 du 11 février 1980;
4.- Sur le déclenchement unilatéral des achats à crédit alors que les fonds mis à sa disposition n'étaient pas épuisés.
Considérant que le requérant soutient avoir saisi verbalement le responsable des achats du CARDER-OUEME qui l'avait autorisé à le faire à condition que les producteurs l'acceptent, et ce, après la rupture des fonds, ainsi que la Direction par la fiche mensuelle de commercialisation du mois d'avril 1985;
Mais considérant qu'il n'indique pas à dessein les précisions nécessaires pouvant justifier qu'il ne disposait plus effectivement de fonds et se contente de simples allégations;
Qu'ainsi, eu égard à tout ce qui précède, le requérant n'a pu rapporter la preuve de ses allégations en ce que la Commission ad'hoc a dénaturé la réalité des faits pour donner raison à TOSSA Albert;
Qu'en outre, il n'a pu réfuter les griefs précis articulés contre lui notamment:
- l'absence d'une comptabilité de l'utilisation des fonds faite par lui-même;
- son implication personnelle dans la commercialisation du maïs alors que ceci ne rentre pas dans ses attributions;
- le fait qu'il ait écarté son adjoint des opérations d'achat alors qu'il se disait déborder par les tâches politico-administratives;

- qu'il soit revenu remettre 1.375.000 francs à TOSSA le 22 juillet 1985 alors que depuis le 26 juin 1985, il avait déjà passé service;
- les insuffisances organisationnelles et administratives dont il a fait preuve dans le cadre de cette opération;
Que dans ces conditions, lesdites allégations sont tenues pour exactes par le requérant et c'est donc à bon droit que la décision du Conseil Exécutif National querellées a été prise;
Qu'il en résulte que le moyen du requérant tiré de l'inexactitude des motifs de fait en ce que la décision contestée reposait sur des faits matériellement inexacts, n'est pas fondé; qu'en conséquence, il doit être rejeté.
PAR CES MOTIFS
D E C I D E
Article 1er : Le recours en annulation pour excès de pouvoir de TOFFOHOSSOU Codjo Armand, ex-Responsable du Développement Rural CARDER-KETOU en date du 17 juillet 1989 contre la décision du Conseil Exécutif National du 22 septembre 1988, objet du Relevé n° 39/SGCEN/REL du 23 septembre 1989 le révoquant de la Fonction Publique avec perte de tous ses droits et mis en débet pour la somme de UN million quatre vingt quatre mille deux cent soixante quinze (1.084.275) francs CFA, est recevable.
Article 2: Ledit recours est rejeté.
Article 3: Notification du présent arrêt sera faite au requérant, au Président de la République, au Ministre de l'Agriculture, de l'Elevage et de la Pêche ainsi qu'au Procureur Général près la Cour Suprême.
Article 4: Les dépens sont à la charge du requérant.
Ainsi fait et
délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de Messieurs:
Samson DOSSOUMON, Conseiller à la Chambre Administrative,
PRESIDENT ;
Grégoire ALAYE }
et } CONSEILLERS.
Joachim G. AKPAKA }
Et prononcé à l'audience publique du jeudi deux mai deux mille deux, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:
Raoul Hector OUENDO,
MINISTERE PUBLIC;
Et de Maître Irène Olga AÏTCHEDJI
GREFFIER.
Et ont signé
Le Président, Le Rapporteur, Le Greffier,


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 22/CA
Date de la décision : 02/05/2002
2e section contentieuse

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2002-05-02;22.ca ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award