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13/12/2001 | BéNIN | N°62/CA

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 13 décembre 2001, 62/CA


N° 62/CA du Répertoire Arrêt du 13 décembre 2001

NASCIMENTO Euloge
C/
Préfet de l'Atlantique
La Cour,
Vu la requête en date à Cotonou du 17 mai 1996 enregistrée au Greffe de la Cour le 21 mai 1996 sous le n° 214/GCS par laquelle Monsieur NASCIMENTO Euloge, fonctionnaire à la retraite, carré n° 289 Scoa Gbéto B. P. 2644 Cotonou a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre l'arrêté préfectoral n° 2/730 bis/DEP-ATL/SG/SAD du 15 septembre 1995 portant dédommagement de parcelles par lequel le Préfet du département de l'Atlantiqu

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N° 62/CA du Répertoire Arrêt du 13 décembre 2001

NASCIMENTO Euloge
C/
Préfet de l'Atlantique
La Cour,
Vu la requête en date à Cotonou du 17 mai 1996 enregistrée au Greffe de la Cour le 21 mai 1996 sous le n° 214/GCS par laquelle Monsieur NASCIMENTO Euloge, fonctionnaire à la retraite, carré n° 289 Scoa Gbéto B. P. 2644 Cotonou a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre l'arrêté préfectoral n° 2/730 bis/DEP-ATL/SG/SAD du 15 septembre 1995 portant dédommagement de parcelles par lequel le Préfet du département de l'Atlantique a procédé au retrait de la parcelle «T» du lot 1321 tranche K Sainte Rita lui appartenant;
Vu la requête additive en date à Cotonou du 03 février 1997 par laquelle Monsieur NASCIMENTO Euloge sollicite de la Cour l'annulation également de l'arrêté préfectoral n° 2/766/DEP-ATL/SG/SAD du 18 septembre 1995 portant retrait, attribution et déguerpissement des parcelles, par lequel le Préfet de l'Atlantique a retiré au requérant la parcelle «T» du lot 1321 tranche K;
Vu la communication faite pour ses observations au Préfet du département de l'Atlantique desdites requêtes, du mémoire ampliatif ainsi que de toutes les pièces y annexées par lettre n° 215/GCS du 24 février 1997;
Vu la mise en demeure n° 703/GCS du 20 mai 1997, adressée au Préfet de l'Atlantique;
Vu la lettre n° 2/619/DEP-ATL/SG/SAD du 30 juin 1998 par laquelle le Préfet du département de l'Atlantique a envoyé à la Cour, ses observations;
Vu la consignation constatée par reçu n° 458 du 18 mars 1993;
Vu l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour Suprême, remise en vigueur par la Loi n° 90-012 du 1er juin 1990;
Les parties ayant été régulièrement informées du jour de l'audience;
Vu toutes les pièces du dossier;
Ouï le Conseiller Samson DOSSOUMON en son rapport;
Ouï l'Avocat Général Norbert KASSA en ses conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
EN LA FORME
Sur la recevabilité
Concernant le requérant Monsieur NASCIMENTO Euloge.
Considérant qu'il ressort de l'analyse des pièces du dossier que Monsieur NASCIMENTO Euloge a formulé son recours gracieux le 14 mars 1986 et que ce recours a été déposé le 15 mars 1996 à la Préfecture du Département de l'Atlantique;
Que la saisine de la Cour suprême a été faite en date à Cotonou du 17 mai 1996, enregistrée au Greffe de ladite Cour le 21 mai 1996;
Qu'il est à remarquer que la connaissance acquise par le requérant d'une décision lui portant grief, en l'absence de notification ou publication, ne fait courir le délai de recours à son encontre que dans le cas où un acte accompli par lui révélerait indiscutablement la réalité de cette connaissance;
Qu'une personne qui forme un recours gracieux ou hiérarchique contre une décision reconnaît par là même qu'elle a eu connaissance de cet acte au plus tard le jour où elle a formé ce recours;
Qu'il résulte de tout ce qui précède que le recours de Monsieur NASCIMENTO Euloge est recevable pour avoir été introduit dans les forme et délai de la loi;
Concernant les intervenants MARCOS Gilbert, MARCOS Jules, MARCOS Francine et MARCOS Maxime
Considérant que les intervenants sollicitent de la Cour Suprême l'annulation de l'arrêté n° 2/766/DEP-ATL/SG/SAD du 15 septembre 1996 qui leur porte grief, notamment le retrait à MARCOS Augustin de la parcelle D du lot 1338 de la tranche K;
Considérant que les intervenants ne viennent pas appuyer le requérant, mais sollicitent de la Cour Suprême l'annulation d'un acte administratif qui leur porte aussi grief;
Considérant que la requête en intervention doit contenir des conclusions, et celles-ci ne peuvent que s'associer aux conclusions de l'une des parties et non tendre à une fin différente propre à l'intervenant;
Considérant que le sieur NASCIMENTO Euloge sollicite de la Cour Suprême l'annulation de l'arrêté n° 2/730bis/DEP-ATL/SG/SAD du 15 septembre 1995 portant dédommagement de parcelles et l'annulation de l'arrêté n° 2/766/DEP-ATL/SG/SAD du 18 septembre 1995 portant retrait, attribution et déguerpissement des parcelles;
Considérant que le recours de Monsieur NASCIMENTO Euloge concerne la parcelle «T» du lot 1321 de la tranche K du lotissement de Sainte Rita;
Que le recours des intervenants MARCOS Gilbert, MARCOS Jules, MARCOS Francine et MARCOS Maxime concerne la parcelle D du lot 1338 de la tranche K du lotissement de Sainte Rita;
Considérant que les alinéas 1 et 2 de l'article 68 de l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour suprême, remise en vigueur par la Loi n° 90-012 du 1er juin 1990 disposent que:
«Le délai de recours pour excès de pouvoir est de deux mois. Ce délai court de la date de la décision attaquée ou de la date de la notification.
Avant de se pourvoir contre une décision individuelle, les intéressés doivent présenter un recours hiérarchique ou gracieux tendant à faire rapporter ladite décision»;
Considérant que les intervenants n'ont ni satisfait aux dispositions de la loi précitée, ni à l'une des conditions qui sont mises à la recevabilité d'une intervention;
Que leur recours, bien que concernant le même acte administratif, ne concerne pas la même parcelle que le requérant;
Qu'il résulte de tout ce qui précède que l'intervention volontaire des intervenants n'est en réalité qu'un recours, lequel recours est irrecevable pour avoir violé les alinéas 1 et 2 de l'article 68 de l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour Suprême, remise en vigueur par la Loi n° 90-012 du 1er juin 1990;
AU FOND
Sur le premier moyen du requérant tiré de la violation du principe des droits acquis en ce que la décision d'attribution de la parcelle «T» du lot 1321 du lotissement du quartier Sainte Rita à Monsieur NASCIMENTO Euloge avait déjà conféré des droits dont le respect s'oppose, le cas échéant à une mesure de retrait de ladite parcelle pour un autre citoyen.
Considérant qu'il ressort de l'instruction du dossier:
Que par convention de vente datée à Cotonou du 21 septembre 1962, Monsieur NASCIMENTO Euloge Honoré a acquis une parcelle de 500 m² chez Monsieur TOSSE Houssou Adjignon, pêcheur à Ahouansori;
Que le 03 août 1983, le règlement des frais de lotissement d'un montant de trente mille (30.000) francs a été fait au nom de Monsieur NASCIMENTO Euloge;
Que le 17 mars 1986, Monsieur NASCIMENTO Euloge a été recasé au lot 1327, parcelle E;
Que la parcelle originelle de Monsieur NASCIMENTO Euloge a été relevée à l'état des lieux n° 664 dans le lot 1327;
Qu'en 1990, les parcelles A, B, C, D, E, G, U, V, W, X du lot 1327 ont été expropriées au profit de la création d'une Ecole de Base non prévue par le projet de lotissement;
Que le 12 juin 1990, Monsieur NASCIMENTO Euloge a été à nouveau recasé sur la parcelle «T» du lot 1321;
Qu'il a été recasé en dehors de son lot d'origine en tant que sinistré, sur la parcelle «T» du lot 1321 précédemment retirée à Monsieur Gué DJOGBENOU et rendue disponible suivant rapport de synthèse n° 85.84-75/01-C/CSLOTI du 12 février 1985 de la Commission Spéciale chargée de faire la lumière sur tous les lotissements de la ville de Cotonou, laquelle Commission a été créée par décret n° 84-75 du 08 février 1984;
Que le 15 septembre 1995, par arrêté préfectoral n° 2/730bis/DEP-ATL/SG/SAD portant dédommagement de parcelles, la parcelle «T» du lot 1321 a été retirée à Monsieur NASCIMENTO Euloge;
Que le 18 septembre 1995, par arrêté n° 2/766/DEP-ATL/SG/SAD portant retrait, attribution et déguerpissement des parcelles, il a été «retiré pour fraude» au requérant ladite parcelle et «rétrocédée à titre de dédommagement à l'union des propriétaires terriens des tranches K et J représentée par Monsieur TOSSE L. Luc, Séraphin SOKENOU et Pascal D. TOSSE»;
Considérant que, lorsqu'une décision ayant créée des droits est entachée d'une illégalité de nature à entraîner l'annulation, l'autorité ne peut la faire que dans les délais du recours contentieux;
Considérant que dans le cas d'espèce, l'analyse des pièces du dossier montre que Monsieur NASCIMENTO Euloge a été relevé à l'état des lieux n° 664ème;
Qu'il a été recasé sur une parcelle, laquelle parcelle a été engloutie par une Ecole;
Que l'autorité préfectorale lui attribue une nouvelle parcelle, la parcelle «T» du lot 1321 du lotissement de Sainte Rita le 12 juin 1990;
Que par lettre n° 1676/MISAT/DC/CNAD du 08 septembre 1995, le Ministre de l'Intérieur, de la Sécurité et de l'Administration Territoriale a ordonné l'expulsion de Monsieur NASCIMENTO Euloge de la parcelle «T» du lot 1321 du lotissement de Cotonou-Nord tranche K pour fraude et usage de faux;
Que la Préfecture du département de l'Atlantique, sans avoir vraiment statué sur le vrai propriétaire de ladite parcelle n'a pas le droit ni le privilège de l'attribuer à quelqu'un d'autre au motif que les héritiers des sieurs TOSSE Houssou Adjignon et Seagbè Hounyè TOSSE ne le reconnaissent pas comme acheteur de la parcelle querellée;
Qu'autrement dit, le Préfet du département de l'Atlantique sans avoir éclairci la situation réelle de la parcelle sur laquelle le requérant a été relevé à l'état des lieux c'est-à-dire la parcelle «E» de l'état des lieux 664ème, ensuite la parcelle de remplacement après que la première soit engloutie par une Ecole c'est-à-dire la parcelle «T» du lot 1321 auparavant attribuée à Monsieur NASCIMENTO d'après les pièces versées au dossier, n'est plus fondé à attribuer la même parcelle par les arrêtés querellés à quelqu'un d'autre;
Qu'aussi les allégations du Préfet du Département de l'Atlantique sont-elles des propos dilatoires qui n'éclairent pas la religion de la Cour sur le bien fondé de l'attribution de la même parcelle à un autre citoyen alors que les pièces versées au dossier montrent que cette parcelle a été attribuée de façon régulière à Monsieur NASCIMENTO Euloge et que cette attribution a déjà conféré des droits;
Qu'en conséquence, les arrêtés querellés encourent annulation;
Sur le deuxième moyen du requérant tiré du détournement de pouvoir, violation du principe de l'égalité du citoyen devant la loi en ce que la parcelle «T» du lot 1321 de la tranche K du lotissement de Sainte Rita, Cotonou-Nord a été attribuée de façon régulière à Monsieur NASCIMENTO Euloge;
Considérant que le détournement de pouvoir résulte de ce qu'une décision a été prise non dans un but d'intérêt général, mais pour favoriser un intérêt particulier, l'autorité trahissant ainsi l'esprit de la mission qui lui a été confiée;
Considérant que le principe d'égalité des citoyens devant la loi consiste en ce que les individus placés dans la même situation au même moment soient traités de la même façon;
Considérant que l'analyse du dossier montre que le 03 août 1983, un règlement de trente mille (30.000) francs relatifs aux frais de lotissement de Cotonou-Nord a été fait au nom de Monsieur NASCIMENTO Euloge;
Qu'aucune contestation n'a été faite jusqu'au 08 septembre 1995;
Considérant que l'analyse des pièces du dossier montre que le requérant a été relevé à l'état des lieux n° 664ème du lot 1327;
Qu'il a été recasé à la fin des travaux de lotissement sur la parcelle «E» du lot 1327, le 17 mars 1986;
Que sinistré, le requérant a été de nouveau recasé sur la parcelle «T» du lot 1321 le 12 juin 1990;
Que le 15 septembre 1995, l'administration revient sur la décision d'attribution de ladite parcelle;
Qu'en la retirant, l'administration l'attribue à un autre citoyen, notamment l'union des propriétaires terriens des tranches K et J représentée par Monsieur TOSSE D. Pascal, TOSSE Luc et SOKENOU Séraphin, motif pris de ce que c'est de façon frauduleuse que ladite parcelle a été attribuée au requérant;
Considérant que l'administration n'apporte pas vraiment de preuves pour soutenir ses allégations;
Que les arrêtés querellés ont été pris sur injonction de la Commission Nationale des Affaires Domaniales du Ministère de l'Intérieur, de la Sécurité et de l'Administration Territoriale en date du 08 septembre 1995;
Qu'il en résulte que l'administration, voire la Préfecture de l'Atlantique sans faire des investigations ne doit en aucun cas attribuer la parcelle querellée à un autre citoyen alors que la même parcelle était précédemment attribuée au requérant;
Que dans le cas d'espèce, l'analyse des pièces du dossier montre que la parcelle «T» du lot 1321 du lotissement de Cotonou-Nord de la tranche K a été attribuée de façon régulière à Monsieur NASCIMENTO Euloge;
Considérant qu'il est manifeste que le Préfet du Département de l'Atlantique n'a pas pris cet arrêté dans un but d'intérêt général, mais plutôt en vue de favoriser un intérêt particulier;
Qu'il s'ensuit que le Préfet du Département de l'Atlantique a non seulement utilisé son pouvoir à d'autres fins mais aussi a-t-il violé le principe de l'égalité des citoyens devant la loi;
Qu'il échet donc au total d'accueillir comme valable et fondé le deuxième moyen du requérant tiré du détournement de pouvoir et de la violation du principe de l'égalité du citoyen devant la loi en ce que la parcelle «T» du lot 1321 du lotissement de Sainte Rita, Cotonou-Nord a été attribuée de façon régulière à Monsieur NASCIMENTO Euloge;
PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :
Article 1er : Le recours en annulation pour excès de pouvoir contre l'arrêté n° 2/730bis/DEP-ATL/SG/SAD du 15 septembre 1995 et contre l'arrêté n° 2/766/DEP-ATL/SG/SAD du 18 septembre 1995 est recevable.
Article 2: L'intervention volontaire des consorts MARCOS Gilbert, MARCOS Jules, MARCOS Francine et MARCOS Maxime qui est en réalité un véritable recours est irrecevable.
Article 3: Les arrêtés n° 2/730bis/DEP-ATL/SG/SAD du 15 septembre 1995 et n° 2/766/DEP-ATL/SG/SAD du 18 septembre 1995 sont annulés en ce qui concerne NASCIMENTO Euloge.
Article 4: Les dépens sont mis à la charge du Trésor Public.
Article 5: Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur Général près la Cour Suprême et sera publié au Journal Officiel.
Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de Messieurs:
Samson DOSSOUMON, conseiller à la Chambre Administrative,
PRESIDENT;
Grégoire ALAYE }
et } CONSEILLERS.
Joachim AKPAKA }
Et prononcé à l'audience publique du jeudi treize décembre deux mille un, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:
Norbert KASSA,
MINISTERE PUBLIC;
Et de Maître Irène Olga AÏTCHEDJI,
GREFFIER.


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 62/CA
Date de la décision : 13/12/2001
2e section contentieuse
Sens de l'arrêt : Recevabilité

Parties
Demandeurs : NASCIMENTO Euloge
Défendeurs : Préfet de l'Atlantique

Références :

Décision attaquée : Préfet de l'Atlantique, 15 septembre 1995


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2001-12-13;62.ca ?
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