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04/12/1998 | BéNIN | N°16

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 04 décembre 1998, 16


Fin prématurée d'un acte de nature contractuelle - Non respect de la procédure.
Le contrat de travail régulièrement conclu par un gouvernement avec un agent public doit être respecté par un nouveau gouvernement.

N°16

KOUYAMI FRANCOIS C/ ETAT BENINOIS

N° 43/CA du 04 /12/98
La Cour,

Vu la requête de son Conseil, Maître Augustin M. COVI, enregistrée au Greffe de la Cour le 10 Décembre 1996 sous n° 491, par laquelle sieur KOUYAMI François a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre le décret n° 96-143 du 24 Avril 199

6 par lequel le Président de la République a suspendu l'application du décret n° 96-87 du 02 Av...

Fin prématurée d'un acte de nature contractuelle - Non respect de la procédure.
Le contrat de travail régulièrement conclu par un gouvernement avec un agent public doit être respecté par un nouveau gouvernement.

N°16

KOUYAMI FRANCOIS C/ ETAT BENINOIS

N° 43/CA du 04 /12/98
La Cour,

Vu la requête de son Conseil, Maître Augustin M. COVI, enregistrée au Greffe de la Cour le 10 Décembre 1996 sous n° 491, par laquelle sieur KOUYAMI François a introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre le décret n° 96-143 du 24 Avril 1996 par lequel le Président de la République a suspendu l'application du décret n° 96-87 du 02 Avril 1996 portant son maintien en activité pour une période de deux (02) ans renouvelables à compter du 1er Octobre 1995 et ce, conformément aux dispositions de l'article 66 nouveau de la Loi n° 88-006 du 26 Avril 1966 portant Statut Général des personnels militaires des Forces armées Béninoises;

Vu les communications faites pour ses observations par lettre n° 502/GCS du 15 Avril 1997 de ladite requête et du mémoire ampliatif, au Ministre délégué auprès du Président de la République, chargé de la Défense Nationale;

Vu le mémoire en défense, du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme chargé par le Gouvernement de présenter les observations de l'Etat dans ce dossier;

Vu la consignation constatée par reçu n° 961 du 23 Janvier 1997;

Vu l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour Suprême, remise en vigueur par la Loi n° 90-012 du 1er Juin 1990;

Vu toutes les pièces du dossier;

Ouï le Conseiller Samson DOSSOUMON en son rapport;

Ouï l'Avocat Général KPADE Jocelyne en ses conclusions;

Après en avoir délibéré conformément à la Loi;
EN LA FORME

Considérant que le recours du requérant a été introduit dans les forme et délai de la loi; qu'il y a lieu de le recevoir;

AU FOND

Sur le moyen tiré de l'obligation nouvelle créée par décret n° 96-87 du 02 avril 1996 portant maintien en activité du Général de Brigade François KOUYAMI.

Considérant que le décret de maintien en service vise, comme base juridique, la loi n° 81-014 du 10 Octobre 1981, portant Statut Général des Personnels Militaires des Forces Armées Béninoises et la Loi n° 88-006 du 26 Avril 1988 qui l'a modifiée et complétée;

Considérant que dans sa forme, le décret de maintien en activité du Général de Brigade François KOUYAMI est un acte unilatéral mais par son contenu, il recèle une nature contractuelle;

Considérant qu'ainsi, le Général KOUYAMI François passe du Statut d'Agent Public nommé à celui d'Agent Public Contractuel;

Que les conditions des nouveaux rapports qui lient le requérant à l'Administration y sont clairement déterminées à savoir le maintien en activité de service pour une durée de deux (02) ans renouvelables à compter du 1er Octobre 1995;

Considérant que le décret de maintien en service suit le régime juridique des actes unilatéraux qui ne peut être suspendu sauf dans le cas de la tutelle;

Considérant que la suspension est une mesure conservatoire, généralement préalable à la mise en ouvre d'une procédure disciplinaire;

Considérant que dans le cadre d'un rapport contractuel entre un Agent Public et l'Administration une suspension régulière et légale arrête l'exécution du contrat, mais laisse demeurer le lien contractuel;

Considérant que la suspension ne saurait donc avoir les mêmes effets que ceux qu'entraîne la fin d'un acte administratif unilatéral ou d'un acte administratif à contenu contractuel;

Qu'il y a lieu de constater, dans le cas d'espèce que la suspension du Général François KOUYAMI n'est pas régulière, car elle ne constitue en aucune manière une mesure conservatoire précédant une procédure disciplinaire;

Sur le moyen de l'Administration tiré de la question du Gouvernement démissionnaire.

Considérant que l'Administration soutient la thèse du Gouvernement démissionnaire en se fondant sur la proclamation des résultats définitifs de l'élection présidentielle du 18 Mars 1996 par la Cour Constitutionnelle le 1er Avril 1996;

Considérant que l'on peut lire dans ladite proclamation ce qui suit: «conformément à l'article 41 alinéa 2 de la Constitution, le mandat de Monsieur Mathieu KEREKOU prendra effet le 04 Avril 1996 à 00 H»;

Considérant qu'au terme de l'article 42 de la Constitution, le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour cinq (05) ans;

Considérant que la Constitution dispose en son article 47 alinéa 2 que: «le mandat du nouveau Président de la République prend effet pour compter de la date d'expiration du mandat de son prédécesseur»;

Par conséquent il y a lieu de constater que le Gouvernement qui était en place jusqu'à la date du 02 avril 1996 était encore dans la plénitude de ses pouvoirs et ne saurait être qualifié de démissionnaire;

Qu'il y a lieu de déclarer inopérant, le moyen du Gouvernement fondant sa défense sur la thèse du «Gouvernement démissionnaire»;

PAR CES MOTIFS

DECIDE

ARTICLE 1ER: est recevable le recours pour excès du Général François KOUYAMI.

ARTICLE 2: Le décret n° 96-143 du 24 Avril 1996 portant suspension de l'application du décret n° 96-87 du 02 Avril 1996 portant maintien en activité du Général François KOUYAMI est annulé.
ARTICLE 3: Les dépens sont mis à la charge du Trésor Public.

ARTICLE 4: Notification du présent arrêt sera faite au Général François KOUYAMI, au Chef de l'Etat, Chef du Gouvernement, Président de la République et au Procureur Général près la Cour Suprême.

Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de Messieurs:
Samson DOSSSOUMON, Conseiller à la Chambre Administrative, PRESIDENT;Grégoire ALAYE et Saroukou AMOUSSA, CONSEILLERS;
Et prononcé à l'audience publique du Vendredi Quatre Décembre Mil Neuf Cent Quatre Vingt Dix Huit, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus de Madame:

KPADE Jocelyne, AVOCAT GENERAL.

Et de Maître Irène Olga AÏTCHEDJI, GREFFIER.

Et ont signé

Le Président Le Greffier



Références :

Origine de la décision
Formation : Chambre administrative
Date de la décision : 04/12/1998
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : 16
Numéro NOR : 173864 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1998-12-04;16 ?
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