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06/03/1998 | BéNIN | N°98-12bis/CAgreffe

Bénin | Bénin, Cour suprême, Assemblée plénière, 06 mars 1998, 98-12bis/CAgreffe


La Cour,
Vu la requête n° /PCS/DC/CAB/SA en date du 02 mars 1998 du président de la Cour suprême convoquant l'assemblée plénière de la Cour suprême aux fins de statuer sur la contrariété de décisions causée par la solution des affaires A...B... c/ C...D..., arrêt de cassation du 24 novembre 1995 et E...F... c/ G...H... arrêt du 27 juin 1997, ainsi que sur celle susceptible d'être causée par la connaissance de nombreuses autres affaires soumises à la chambre administrative à la suite de l'arrêt du 24 novembre 1995 rendu par la chambre judiciaires dans l'affaire A... ;
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u l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisati...

La Cour,
Vu la requête n° /PCS/DC/CAB/SA en date du 02 mars 1998 du président de la Cour suprême convoquant l'assemblée plénière de la Cour suprême aux fins de statuer sur la contrariété de décisions causée par la solution des affaires A...B... c/ C...D..., arrêt de cassation du 24 novembre 1995 et E...F... c/ G...H... arrêt du 27 juin 1997, ainsi que sur celle susceptible d'être causée par la connaissance de nombreuses autres affaires soumises à la chambre administrative à la suite de l'arrêt du 24 novembre 1995 rendu par la chambre judiciaires dans l'affaire A... ;
Vu l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement de la Cour suprême, remise en vigueur par la Loi n°90-012 du 1er juin 1990, notamment en ses articles 19,21,22 et 29 ;
Ouï à la séance du vendredi 06 mars 1998 le Conseiller Y. ALAYE en son rapport ;
Ouï tous les autres membres de l'Assemblée plénière.

En la forme :
Considérant que la requête susvisée du Président de la Cour suprême est recevable, pour avoir été présentée dans les formes de la loi .

Au fond :

Considérant que par lettre n° 121/PCS/DC/CAB/SA du président de la Cour suprême en date du 02 mars 1998, sur proposition du président par intérim de la chambre administrative (lettre n°001/98/CS/CA di 16 janvier 1998) et après avis du Conseiller rapporteur en date du 05 mars 1998, l'Assemblée plénière de la Cour suprême a été saisie aux fins de statuer sur la contrariété de décisions causée par la solution des affaires A...B... C/ C...D.., E...F... C/ G...H..., ainsi que sur celle susceptible d'être causée par la connaissance de nombreuses autres affaires soumises à la chambre administrative à la suite de l'arrêt de cassation de la chambre judiciaire du 24 novembre 1995 dans l'affaire A...

Considérant qu'il est notamment sollicité de l'Assemblée plénière, qu'il lui plaise préciser :
- d'une part, que la présence d'un acte administratif dans un contentieux judiciaire ne suffit pas toujours pour déterminer la compétence du juge administratif :surtout lorsqu'il s'agit d'un conflit relatif au droit de propriété ;
- d'autre part, que dans les cas d'espèce actuellement soumis à la chambre administrative de la Cour suprême, il s'agit bel et bien d'un différend de droit purement privé dont le règlement relève de la compétence du juge du judiciaire.
Qu'enfin il est sollicité de l'Assemblée plénière qu'elle confirme dans chacun de ces dossiers soumis à la chambre administrative, la compétence du juge du fond.

Considérant que le 24 novembre 1995, la chambre judiciaire de la Cour suprême a rendu un arrêt de cassation dans l'affaire A... B... C/ C... D... ; que dans le dispositif de cet arrêt, l'on peut lire :
-"... Constate que la parcelle dont s'agit fait l'objet du Permis d'Habiter n°1/11 délivré le 8 juin 1964 ;
- Dit que les contestations du droit de propriété concernant les parcelles de terrain nanties de permis d'habiter sont de la compétence exclusive de la juridiction administrative ;
- Déclare que les Tribunaux de l'ordre judiciaire sont donc incompétents pour connaître de tels litiges"
-Considérant que suite à cette décision, la défenderesse au pourvoi, dame C... D..., a introduit le 10 décembre 1995 devant la chambre administrative de la Cour suprême, un recours ayant pour objet : "Plainte et contestation immobilière dont les consorts A... B..." ; qu'elle a en outre demandé à ladite juridiction d'annuler le permis d'habiter n° 41/11 du 08 juin 1964 de l'ancien sous-préfet d'Abomey ; que depuis lors, la chambre administrative a reçu et continue de recevoir de nombreux dossiers de revendication de droit de propriété suite à des décisions d'incompétence du juge des référés ou du juge du fond, au motif que le dossier à eux soumis, contient un permis d'habiter ou des actes relatifs à des travaux de recasement, tous actes d'administration du domaine de l'Etat ; qu'il s'agit notamment des dossiers :
1°- n° 96-02/CA du 18 janvier 1996 : C... D... C/ Préfet du Zou et I...J...;
2°- n° 96-41/CA du 18 juillet 1996 ! K... L... C/ Préfet de Kandi et M...N...;
3°- n° 96-58/CA du 24 octobre 1996 : O...P... C/ Préfet de l'Atlantique et K... R...;
4°- n° 96-64/CA du 30 octobre 1996 : O...P... C/ Préfet de l'Atlantique et S...T ...;
5°- n° 97-22/CA du 03 avril 1977 : U...V... C/ Préfet de l'Atlantique et W... X...;
6°- n° 93-10/CA du 02 mars 1993 : Y... Z... C/ Préfet de l'Atlantique et n° 97-23/CA du 09 avril 1997 : AA... BB...

Considérant que c'est dans ces conditions que lesdites dossiers ont été transmis au Président de la Cour suprême en vue de leur examen par l'Assemble plénière et de la confirmation par cette dernière, de la compétence du juge judiciaire dans chacun d'eux, cela, à la suite du tout dernier arrêt de la chambre judiciaire de la Cour suprême, rendu en cette même matière le 27 juin 1997 dans l'affaire E... F... C/ G... H... et dont l'un des motifs précise notamment :
"Attendu qu'en définitive, il s'agit d'un différend de droit purement privé dont le règlement ne peut que relever de la compétence exclusive du juge judiciaire..."
Considérant que la question du droit qui se pose en ces espèces à l'Assemblée plénière est la suivante :
Quelle doit être la conduite du juge judiciaire lorsqu'il est saisi d'un litige relatif à la contestation du droit de propriété d'un immeuble nanti d'un permis d'habiter ou de tout autre acte d'administration du domaine de l'Etat ?
En d'autres termes, la présence d'un acte administratif dans un contentieux judiciaire suffit-il toujours à déterminer définitivement la compétence du juge administratif, surtout lorsqu'il s'agit, comme c'est le cas dans les dossiers ci-dessus énumérés, d'un conflit ayant trait au droit de propriété ?
Considérant qu'à cet égard, deux arrêts contradictoires de la même chambre judiciaire de la Cour suprême sont en présence ; que pour l'un, à savoir l'arrêt de cassation du 24 novembre 1995 rendu dans l'affaire A... B... C/ C... D..., "les contestations de droit de propriété concernant les parcelles de terrain nanties de permis d'habiter sont de la compétence exclusive de la Juridiction administrative" ; que pour l'autre, à savoir l'arrêt du 27 juin 1997 rendu dans l'affaire E... F... C/ G... H.., "...il s'agit d'un différend de droit purement privé dont le règlement ne peut que relever de la compétence exclusive du juge judiciaire";
Considérant que le problème posé par ces différents dossiers n'est en réalité pas un problème de validité d'un permis d'habiter ou de tout autre acte d'administration du domaine de l'Etat, mais un problème de droit de propriété ; qu'il s'agit dans ces espèces, de litiges ayant pour nature d'être des conflits entre particuliers, ne mettant a priori pas en cause l'administration et ne portant véritablement pas sur la confirmation ou l'annulation d'une décision administrative d'attribution de parcelle ; que leur objet portant essentiellement sur le droit de propriété, il en résulte que leur connaissance relève de la compétence des juges judiciaires et non de celle du juge administratif.
Considérant que même si, au cours du procès portant sur le droit de propriété, une question préjudicielle était soulevée à propos de la validité d'un permis d'habiter ou de tout autre acte d'administration du domaine de l'Etat, cette question ne suffirait pas à elle seule à valablement conduire le juge judiciaire à se déclarer radicalement incompétent ; que dans cette hypothèse, celui-ci doit surseoir à statuer et renvoyer les parties devant la juridiction administrative compétente ;
Considérant qu'en tout état de cause, c'est le juge judiciaire qui reste compétent pour trancher les litiges portant sur le droit de propriété ;

PAR CES MOTIFS :
DECIDE

Article 1er : Est recevable en la forme, la requête susvisée du Président de la Cour suprême en date du 02 mars 1998.
Article 2 : Dit quel a présence d'un acte administratif dans un contentieux judiciaire ne suffit pas toujours pour déterminer la compétence du juge administratif, surtout lorsqu'il s'agit, comme dans tous les dossiers d'espèce ci-dessus énumérés, d'un conflit ayant trait au droit de propriété ; que c'est l'objet de l'instance, plus précisément la demande du requérant qui permet de déterminer le juge compétent.
Article 3 : Dit et confirme que dans chacun des cas d'espèce, il s'agit bel et bien de différends de droit purement privé dont le règlement relève de la compétence du juge judiciaire.
Article 4 : Ordonne notification du présent arrêt au Président de la Cour d'appel de Cotonou, au Procureur général près la Cour d'appel ainsi qu'à toutes les parties.
Article 5 : Met les frais à la charge du Trésor Public.

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême siégeant en Assemblée plénière composée de :
Maître Abraham ZINZINDOHOUE, président de la Cour suprême, Président
Samson DOSSOUMON, président de la chambre administrative par intérim, Membre
Grégoire ALAYE, André LOKOSSOU, Saroukou AMOUSSA, Joachim AKPAKA, Conseillers à la chambre administrative, Membres
Firmin DJIMENOU, président de la chambre des comptes par intérim, Membre
FernanDe QUENUM, Edwige BOUSSARI, Clotilde MEDEGAN-NOUGBODE, Conseillers à la chambre judiciaire, Membres
Henri OUSSOU, Conseiller à la chambre des comptes, Membre
Alexis NOUKOUMIANTAKIN, Procureur général, membre
NestoR DAKO, Jocelyne ABOH-KPADE, Norbert KASSA, Antoine BANKOLE, avocats généraux, Membres

Et prononcé en Assemblée plénière le vendredi six mars mil neuf cent quatre vingt dix-huit en présence de Justin TOUMATOU, greffier

et ont signé :
Le président : Me Abraham ZINZINDOHOUE - Le rapporteur : M. Grégoire Y ALAYE - Le greffier : M. Justin TOUMATOU


Synthèse
Formation : Assemblée plénière
Numéro d'arrêt : 98-12bis/CAgreffe
Date de la décision : 06/03/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1998-03-06;98.12bis.cagreffe ?
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