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27/06/1997 | BéNIN | N°9

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre judiciaire, 27 juin 1997, 9


Texte (pseudonymisé)
Civil Traditionnel

Litige foncier - Conflit d'attribution - critères de répartition de compétence entre le juge administratif et le juge judiciaire -

Est de la compétence des tribunaux judiciaires un conflit foncier, né d'un lotissement, portant non sur l'acte de recasement administratif, mais sur le droit de propriété .
N° 9

AÏTCHEME CELESTIN C/ Z M. Ac
N° 010/CJ-CT 27 Juin 1997

REDJET
LA COUR,
Vu la déclaration enregistrée le 6 Décembre 1995 au Greffe de la Cour d'Appel de Cotonou par laquelle Maître TOLI Simon, Conseil de AÏTCHEM

E Célestin, s'est pourvu en cassation contre l'arrêt n°40 du 26 Juillet 1995 de la Chambre Civile ...

Civil Traditionnel

Litige foncier - Conflit d'attribution - critères de répartition de compétence entre le juge administratif et le juge judiciaire -

Est de la compétence des tribunaux judiciaires un conflit foncier, né d'un lotissement, portant non sur l'acte de recasement administratif, mais sur le droit de propriété .
N° 9

AÏTCHEME CELESTIN C/ Z M. Ac
N° 010/CJ-CT 27 Juin 1997

REDJET
LA COUR,
Vu la déclaration enregistrée le 6 Décembre 1995 au Greffe de la Cour d'Appel de Cotonou par laquelle Maître TOLI Simon, Conseil de AÏTCHEME Célestin, s'est pourvu en cassation contre l'arrêt n°40 du 26 Juillet 1995 de la Chambre Civile de droit Traditionnel de la Cour d'Appel de Cotonou ;
Vu la transmission du dossier au Greffe de la Cour Suprême ;
Vu l'arrêt attaqué ;
Vu l'Ordonnance n°70-16/MJL du 26 Avril 1966 ;
Vu l'Ordonnance n° 70-16/MJL du14 Mars 1970 portant modification de l'article 93 de l'Ordonnances n°21/PR du 26 Avril 1966 ;
Vu la Loi n°70-16/MJL du 14 Mars 1970 définissant la composition, l'Organisation, les attributions et le fonctionnement de la Cour Suprême ;
Vu les pièces figurant au dossier ;
Ouï à l'audience du Vendredi 27 Juin 1997, le Président Maxime- Philippe TCHEDJI en son rapport ;
Ouï l'Avocat Général Nestor DAKO en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que par acte n°31 enregistré le 6 Décembre 1995 au Greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, Maître TOLI Simon, conseil de C Aa, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°40 rendu le 26 Juillet 1995 par la Chambre Civile de droit Traditionnel de la Cour d'Appel dans l'affaire : AÏTCHEME Célestin Contre Z M. Ac.c.
Attendu que le dossier de la procédure, transmis par lettre n°006/PG-CS du Procureur Général près la Cour Suprême, a été enregistré au Greffe de la Chambre Judiciaire sous le N°96-01/CJ-CT;
Attendu que mis en demeure par lettre n°116/GCS du 31 Janvier 1996, Maître TOLI Simon, l'Auteur Matériel du pourvoi, a aussitôt payé le montant de la consignation comme en atteste le reçu annexé au dossier avant de produire son mémoire ampliatif le 29 Février 1996 ;
Attendu que convoqué au Greffe de la Cour Suprême où il a comparu, Z M. Ac, après avoir obtenu communication de la copie de ce mémoire ampliatif, a été mis en demeure de produire ses moyens de défense soit par lui-même soit par un conseil de son choix
Que remis en demeure par lettre n°783/GCS du 12 Juin 1996, il a choisi pour conseil Maître Alphonse ADANDEDJAN qui a produit son mémoire en défense parvenu le 1er Juillet 1996 à la Cour Suprême ;
- Qu'il y a lieu de procéder à l'examen du dossier ainsi mis en état qui pose d'ailleurs un problème de recevabilité.
EN LA FORME
Attendu en effet que le présent pourvoi a été élevé le 6 Décembre 1995 alors que l'arrêt a été rendu contradictoirement le 25 Juillet 1995 ;
Qu'il apparaît qu'à compter de l'arrêt attaqué, un délai de cinq (5) mois environ s'est écoulé avant l'introduction du pourvoi ;
Or entendu que l'article 93 de l'Ordonnance n°21/PR du 26 Avril 1966 prescrit qu'en matière civile, commerciale est de deux (2) mois à compter de la signification de l'arrêt ou du jugement à personne ou à domicile" ;
Qu' en application de cette disposition, le présent pourvoi paraît à première vue irrecevable.
Mais qu'il y a lieu de constater que ce même article 93 de l'Ordonnance 21/PR du 26 Avril a été modifié par l'Ordonnance n°70-16/MJL du 14 Mars 1970 ;
- Qu'il a alors stipulé que "le délai pour se pourvoir en cassation est de cinq (5) mois à compter de l'arrêt ou du jugement contradictoire" ;
- Qu'au regard de cette nouvelle stipulation, il ne fait alors l'ombre d'aucun doute que le même pourvoi est recevable en la forme.
AU FOND
Faits et Procédure
Attendu que par requête en date du 20 Février 1991, Z M. Ac a saisi le Tribunal de Première Instance de Cotonou, statuant en matière civile de droit traditionnel pour solliciter le déguerpissement de AÏTCHEME Célestin de la parcelle "H" du lot 1528 sise au quartier Ab Ad, c'est parce qu'il y a été recasé à la fin des travaux de lotissements alors que ces travaux n'ont pas été effectués dans les conditions requises par la loi ;
Que le respect de ces conditions dont notamment le coefficient de réduction permet l'attribution à lui non seulement de la parcelle "H" mais encore de la parcelle "G" du même lot ;
Mais attendu que des pièces et des débats, il ressort que depuis le 5 Août 1974, Z M. Ac était propriétaire au quartier Vèdoko d'une parcelle de terrain dont les dimensions demeurent imprécises et qu'il avait acquise pour le prix de 150.000 Francs alors qu'en vertu d'une convention de vente à lui consentie le 13 Mars 1984 pour le prix de 2.000.000 Francs, AÏTCHEME Célestin était devenu également propriétaire d'une parcelle de terrain de 25 m de long sur 25 m de large sise au quartier Ab Ad à Cotonou ;
Qu'au commencement des travaux de lotissement de la zone-Nord de Cotonou, le premier a été relevé sur sa propre parcelle a l'état des lieux 776 D de la tranche "N" et le second également sur la sienne à l'état des lieux 1680 de la tranche "O" ;
Qu'à l'issue desdits travaux, le défendeur au pourvoi est devenu un sinistré ;
Qu'en effet, sa parcelle de la tranche "N" a été occupée par un Centre de santé ,
Qu'il a été alors déplacé de cette tranche "N" pour être recasé dans la tranche "O" au lot 1528 sur la parcelle "H" et à côté du demandeur au pourvoi qui, non déplacé, a été recasé sur sa propre parcelle devenue parcelle "G" du même lot ;
Que chacune de ces deux parcelles ainsi attribuées est d'une superficie de trois cents mètres carrés (300 m² ) ;
Que le sieur Ae B, Agent du service des Affaires Domaniales de la Préfecture de Cotonou, a précisé à l'attention du premier juge qu'au regard du coefficient de réduction retenu à l'occasion de ces travaux de lotissement :
- le défendeur au pourvoi a été sus-recassé de 06,24 m² sur la parcelle "H" ;
- le demandeur au pourvoi qui avant lesdits travaux occupait une portion de la parcelle "H" sur laquelle il exploitait même une baraque de vente de cahier a perdu 27,70 m² dans l'attribution à lui de la parcelle "G"
Que pour obtenir la réparation de la perte qu'il a subie d'une partie de la superficie que doit avoir cette parcelle "G" , AÏTCHEME a édifié en matériaux définitifs un mur de clôture qui englobe à la fois les parcelles G et H de la tranche ;
Pour mettre fin à une telle situation, Z a saisi le Tribunal de Première Instance de Cotonou statuant en matière civile de droit traditionnel en sollicitant :
- la démolition de la clôture édifiée sur la parcelle H ;
- le déguerpissement de son adversaire de cette parcelle.
Qu'après avoir examiné les faits ci-dessus et estimé surtout :
"que Z M. Ac, relevé lors des travaux, a été déclaré sinistré ;
" que la parcelle à l'instar de celle d'un certain nombre de propriétaires a été retenue pour la construction de Complexe Communal de Santé déclaré sinistré ;
" qu'ainsi qu'il est de règle, il a été recasé dans la même tranche ;
" qu'il lui a été attribué en conséquence la parcelle "H" du lot 1528 ;
"que les dimensions de la parcelle retenue à AÏTCHEME sont dues à l'application du coefficient de réduction ;
qu'en effet, chaque propriétaire doit participer à la construction des infrastructures communautaires ;
"qu'à ce titre, par le jeu du coefficient de réduction, les propriétaires dont les parcelles sont requises pour ces constructions sont en même temps recasés dans les tranches concernées" ;
Cette juridiction a rendu le jugement n°06/94 du 18 Janvier 1994 dont le dispositif est ainsi libellé :
En LA FORME
Reçoit Z M. Ac en son action ;
AU FOND
" Confirme son droit de propreté sur la parcelle H du lot 1528 d'une superficie de 300 m² ;
Ordonne la démolition de la clôture érigée autour de ladite parcelle le déguerpissement de AÏTCHEME Célestin de cette portion ;
"Déboute Z M. Aa de ses demandes fins et conclusions".
Attendu qu'évidemment , le défendeur à cette première action a aussitôt relevé appel de cette décision ;
Et la Cour d'Appel, statuant également en matière civile de droit traditionnel a rendu le 26 Juillet 1995 l'arrêt n°40 dont e dispositif a été conçu comme suit :
"Reçoit l'appel en ce qu'il est régulier ;
" Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
" Déboute le sieur Z M. Ac de ses demandes en dommages- intérêts ";
Que c'est contre cet arrêt que Maître TOLI Simon, en appuyant le pourvoi qu'il introduit au profit de son client, a articulé un seul et unique moyen.
DISCUSSION DU MOYEN UNIQUE
UNIQUE MOYEN tiré de la violation des règles de compétence d'attribution.
Attendu que par ce moyen, le demandeur au pourvoi reproche aussi bien au Tribunal de Première Instance qu'à la Cour d'Appel de Cotonou de s'être déclaré compétents pour connaître du litige alors que celui- ci est né des travaux de lotissement de parcelles de terrain effectués par la Préfecture de l'Atlantique ;
Qu'il soutient alors que de ces deux juridictions en tout état de cause ne pouvaient que se déclarer incompétentes d'autant plus que le recasement est un acte administratif qui relève de la compétence du juge administratif ;
Qu'il s'agit là d'une incompétence d'ordre public qui doit être relevée d'office par le juge du fond et même pour la première fois par la Cour Suprême ;
Mais attendu que pour le conseil du défendeur au pourvoi, ce moyen ne saurait prospérer ;
Qu'en effet, " le jugement rendu par le premier juge et confirmé par le juge du second degré est un acte déclaratif qui vient constater l'existence d'un droit déjà reconnu.
Qu'il a précisé que son client, en saisissant le Tribunal de Première Instance de Cotonou, n'avait aucune raison de contester l'acte de recasement lui donnant droit sur la propriété de la parcelle de terrain, objet de litige ;
Que si le demandeur au pourvoi avait des griefs contre ledit acte, c'était à lui de se pourvoir en annulation devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême ;
Qu'il convient également de faire remarquer le Tribunal de Première Instance de Cotonou, en statuant sur le droit de propriété reconnu par l'acte de recasement ne s'est aucunement prononcé sur le validité dudit acte ;
Qu'en agissant ainsi, il ne peut se voir reprocher d'avoir violé les règles d'ordre public de compétence d'attribution ;
Attendu qu'il est peut-être opportun de souligner que le juge du fond, saisi d'un conflit, est tenu d'en déterminer au préalable l'objet afin de savoir si le règlement entre dans le cadre de ses attributions ;
Attendu que dans le cas de l'espèce, le conflit a pour objet le déguerpissement du demandeur au pourvoi de la parcelle H du lot 1528 de la tranche "O" du quartier Ab Ad attribuée au défendeur par l'Administration ;
Attendu qu'il ne fait l'ombre d'aucun doute que l'attribution de cette parcelle lotie est et demeure un acte administratif ;
Que l'on peut alors penser comme le fait d'ailleurs le conseil du demandeur que le règlement de tout conflit se rapportant à tout acte administratif relève non pas de la compétence du Juge Judiciaire mais exclusivement de celle du Juge Administratif ;
Mais attendu qu'il y a lieu de remarquer la compétence du Juge Administraif n'est pas exhaustive en ce qu'elle ne s'étend point à tous conflits nés à partir de l'acte administratif ;
Qu'en effet, cette compétence, conformément à la réglementation actuellement en vigueur au Bénin, se limite à la confirmation ou à l'annulation des décisions de l'Administration et à l'octroi de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par l'Administration et ses préposés sauf en cas d'accident de circulation ;
Attendu qu'il est alors manifeste que sur plusieurs aspects, cette compétence est en dehors du règlement du présent conflit ;
Qu'en effet, ce conflit ne met point sur la confirmation ou l'annulation de la parcelle en cause ;
Qu'en conséquence, l'on ne saurait valablement soutenir que le règlement rentre dans le cadre des attributions de Tribunal Administratif ;
Attendu qu'il y a lieu de relever que le même conflit, opposant AÏTCHEME Célestin à Z M. Ac, a pour nature d'être un conflit entre particuliers ;
Qu'enfin, il tend à faire donner le déguerpissement ou l'expulsion d'une parcelle ;
Attendu qu'il y a lieu de faire cesser les troubles à la vie privée et par voie de conséquence de régler un problème posé par toute activité de la vie courante ;
Qu'en définitive, il s'agit d'un différend de droit purement privé dont le règlement ne peut que relever de la compétence exclusive du Juge Judiciaire dont se prévaut le conseil du demandeur.
PAR CES MOTIFS
- Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
- Le rejette au fond ;
- Met les frais à la charge du demandeur ;
- Ordonne notification du présent arrêt au Procureur Général près la Cour d'Appel de Cotonou;
Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême, (Chambre Judiciaire) composée de :
Maxime-Philippe TCHEDJI, Président de la Chambre Judiciaire PRESIDENT
Georges Oduntan BADA et Fernande QUENUM
CONSEILLERS
Et prononcé à l'audience publique du Vendredi vingt sept Juin mil neuf quatre vingt dix sept, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Nestor DAKO
AG X

et de Af A épouse QUENUM Greffier


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 9
Date de la décision : 27/06/1997
Civile traditionnelle

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1997-06-27;9 ?
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