La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/03/1996 | BéNIN | N°2

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre judiciaire, 29 mars 1996, 2


N°2

Déni de justice.

Le déni de justice consistant en une absence de décision, celui qui s'est désisté de la demande en interprétation d'un arrêt qui lui paraissait ambigu, ne peut former pourvoi pour déni de justice contre l'arrêt de rejet d'interprétation.


Collectivité ANAVIENOU Représentée par ZANNOU EKPODE et autres C/ Collectivité HOUNHOUENOU Représentée par KOUTOME AGOSSOU et autres.

N°93-11/CJ-P 29/03/96
LA COUR,
Vu la déclaration enregistrée le 18 février 1992 au Greffe de la Cour d'Appel de Cotonou par laquelle Maître

KEKE Ernest, Substituant Maître KEKE Joseph, Conseil de la Collectivité ANANVIENOU, a élevé pourvoi en...

N°2

Déni de justice.

Le déni de justice consistant en une absence de décision, celui qui s'est désisté de la demande en interprétation d'un arrêt qui lui paraissait ambigu, ne peut former pourvoi pour déni de justice contre l'arrêt de rejet d'interprétation.

Collectivité ANAVIENOU Représentée par ZANNOU EKPODE et autres C/ Collectivité HOUNHOUENOU Représentée par KOUTOME AGOSSOU et autres.

N°93-11/CJ-P 29/03/96
LA COUR,
Vu la déclaration enregistrée le 18 février 1992 au Greffe de la Cour d'Appel de Cotonou par laquelle Maître KEKE Ernest, Substituant Maître KEKE Joseph, Conseil de la Collectivité ANANVIENOU, a élevé pourvoi en cassation contre l'Arrêt N° 09 du 12 février 1992 de la Chambre de Droit Traditionnel de la Cour d'Appel de Cotonou;
Vu la transmission du dossier à la Cour Suprême;
Vu l'Arrêt attaqué;
Vu la Loi N° 81-004 du 23 mars 1981 portant Organisation judiciaire;
Vu la Loi 90-12 du 1er juin 1990 remettant en vigueur l'Ordonnance N° 21/PR du 26 avril portant Composition, Organisation, Attributions et Fonctionnement de la Cour Suprême;
Vu les pièces du dossier;
Ouï à l'audience publique du vendredi 22 mars 1996 le Conseiller Alexis NOUKOUMIANTAKIN en son rapport;
Ouï l'Avocat Général Samson DOSSOUMON en ses conclusions;
Et après en avoir délibéré conformément à la Loi;
Attendu que par Acte enregistré au Greffe de la Cour d'Appel le 18 février 1992, Maître KEKE Ernest, Substituant Maître KEKE Joseph, Conseil de la Collectivité ANAVIENOU, a élevé pourvoi en cassation contre l'arrêt N° 09 du 12 février 1992 de la Chambre de Droit Traditionnel de la Cour d'Appel de Cotonou dans l'affaire:
Collectivité ANAVIENOU représentée par ZANNOU Ekpodé et autres C/ Collectivité HOUNHOUENOU représentée par KOUTOME Agossou et autres;
Attendu que le dossier de la procédure transmis à la Cour Suprême par lettre N° 079/PG-CS du 22 décembre 1993 du Procureur Général près la Cour Suprême, a été inscrit au rôle général de la Cour s/n° 93-11/CJ-CT;
Attendu que par lettre N° 459/G-CS du 29 décembre 1993, dont notification a été faite le 30 décembre 1993, la Collectivité demanderesse a été invitée par l'intermédiaire de son Conseil maître KEKE Joseph, à consigner et à produire ses moyens de cassation, le tout dans les délais légaux;
Attendu que si le 6 janvier 1994, le montant de la consignation prescrite a été versé au Greffe de la Cour, par contre le mémoire ampliatif n'a pas été produit dans le délai imparti à cet effet à la Collectivité demanderesse;
Attendu que par lettre N° 134/G-CS du 29 avril 1994, prorogation de délai a été octroyée à la Collectivité demanderesse pour le dépôt du mémoire ampliatif parvenu au dossier le 30 mai 1994;
Attendu que par lettres N°s 239 et 240/G-CS du 20 juin 1994 notifiées les 22 et 23 juin 1994, copie du mémoire ampliatif a été communiquée à la Collectivité défenderesse avec octroi de délai pour la production des répliques;
Que par lettre en date du 28 juillet 1994, Maître François AMORIN sollicita prorogation du délai pour le dépôt du mémoire en réplique;
Que par lettre N° 404/G-CS du 16 août 1994, prorogation de délai fut accordée à Maître AMORIN et à maître Robert DOSSOU pour leur permettre de produire ses répliques;
Que par lettre du 16 septembre 1994, Maître François AMORIN faisait parvenir à la Cour le mémoire en défense;
Que le 8 décembre 1994, Maître DOSSOU Robert déposa également au dossier son mémoire en réplique;
Que dès lors, le présent dossier est en état d'être examiné en la forme et au fond;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi ayant été élevé dans les formes et délai de la Loi, il convient de l'accueillir favorablement.
AU FOND
FAITS ET PROCEDURE
Les parties étaient en litige au sujet d'un domaine de 80 ha 19 ares 81 ca, sis à SO-AVA, limité au Nord et au Nord-Est par la Collectivité HOUNHOUE, au Sud par Laly TOMAHOUAN, au Sud-Est par AGOSSOU Ahouadi, et à l'Ouest par la rivière SO-AVA.
Par jugement N° 19 en date du 18 février 1976 rendu par la Chambre de droit traditionnel du Tribunal de Première Instance de Cotonou, la propriété du domaine litigieux (80 ha 19 a 81 ca) a été reconnue à la Collectivité HOUNHOUENOU représentée par les sieurs KOUTOME AGOSSOU GBANNAN et HOUSSA KOUDENOUKPO.
La Collectivité ANAVIENOU fit appel dudit jugement.
Par arrêt N° 36 en date du 6 novembre 1985, la Chambre de Droit Traditionnel de la Cour d'Appel de Cotonou a confirmé le jugement du Tribunal de Première Instance de Cotonou. Le dispositif dudit arrêt est ainsi libellé:
Rejette la demande de transport sur les lieux formulée par les appelants;
Confirme le jugement N° 19 du 18 février 1976 en ce qu'il a dit et jugé que le terrain en litige de 80 ha 19 a 81 ca limité au Nord-Est par la Collectivité HOUNHOUENOU, au Sud par Laly TOMAHOUAN, au Sud-Est par AGOSSOU AHOUADI, et à l'Ouest par la rivière SO-AVA, matérialisé sur le plan dressé par le Géomètre ADA suivant jugement Avant-Dire-Droit N° 63 du 24 avril 1974, est et demeure la propriété exclusive de la Collectivité HOUNHOUENOU représentée par les défendeurs KOUTOME AGOSSOU, HOUENVOU GHAGBANNAN et HOUSSA KOUDENOUKPO, pour leur avoir été conféré conformément aux règles coutumières par les SOHOLOU;
Fait défense à la Collectivité ANAVIENOU, représentée par les demandeurs ZANNOU EKPODE et consorts d'aller troubler désormais la Collectivité HOUNHOUENOU dans la paisible jouissance de son bien;
Donne acte à la Collectivité HOUNHOUENOU de ce qu'elle ne conteste pas à la Collectivité ANAVIENOU la pleine propriété des emplacements qui avaient été régulièrement attribués par leurs ancêtres ainsi que par eux-mêmes à la Collectivité ANAVIENOU, à l'exception toutefois de la partie où la Collectivité ANAVIENOU a tenté d'ériger d'autres cases sans obtenir au préalable l'autorisation coutumière de la Collectivité HOUNHOUENOU;
Donne acte à la Collectivité HOUNHOUENOU de ce qu'elle se déclare disponible tout comme par le passé à attribuer à la Collectivité ANAVIENOU ou autres, d'autres parcelles de terres, chaque fois qu'ils en manifesteront le désir dans le respect des règles coutumières applicables en la matière.(
La Collectivité ANAVIENOU forma un pourvoi en cassation le 27 novembre 1985 contre ledit arrêt.
Par lettres en date des 27 février et 25 avril 1986, Maître Joseph KEKE, Avocat de la Collectivité ANAVIENOU a sollicité la Cour d'Appel pour procéder à l'interprétation de l'arrêt N° 36 du 6 novembre 1985.
La Collectivité ANAVIENOU a adressé à la Cour Suprême deux (2) lettres de désistement en date des 12 mars 1989 et 17 avril 1989.
Par arrêt N° 8 du 21 juin 1991 la Cour Suprême aaccueilli le pourvoi en la forme;
- donné acte à la Collectivité ANAVIENOU prise en la personne de ADOUKONOU Daniel de son désistement.
La Chambre de Droit Traditionnel de la Cour d'Appel de Cotonou, statuant sur la demande d'interprétation de l'arrêt N° 36 du novembre 1985, a rendu le 12 février 1992, l'arrêt N° 09 dont le dispositif est ainsi conçu:
EN LA FORME
Reçoit la Collectivité ANAVIENOU en ses requêtes en interprétation;
AU FOND
Rejette la demande de transport sur les lieux litigieux faite à nouveau par la Collectivité ANAVIENOU;
Déboute la Collectivité ANAVIENOU de ses requêtes en interprétation de l'arrêt N° 36 rendu le 6 novembre 1985 par la Chambre de Droit Traditionnel de la Cour d'Appel de Cotonou;
Attendu que c'est contre cet arrêt en date du 12 février 1992 que la Collectivité demanderesse formule un grief contenu dans le mémoire ampliatif annexé au dossier.
Discussion du moyen tiré du déni de justice.
Attendu que la Collectivité ANAVIENOU soutient:
( En refusant d'interpréter sa propre décision, les juges d'appel commettent un déni de justice source de division et d'exploitation sociale à SO-AVA;
En effet dès 1804 l'article 4 du Code Civil, comme raison écrite fit l'obligation au Juge, à peine de déni de justice, de statuer même en cas de silence d'obscurité ou d'insuffisance de la loi, ce qui rend obligatoire l'interprétation judiciaire. (
Attendu qu'elle conclut qu'il échet de casser l'arrêt attaqué;
Attendu que la Collectivité HOUNHOUENOU affirme pour sa part qu'il n'y a pas déni de justice et sollicite le rejet du pourvoi;
Attendu que pour la Collectivité ANAVIENOU, l'arrêt attaqué refuse d'interpréter l'arrêt N° 36 du 6 novembre 1985.
Attendu que ladite Collectivité excipe même d'un prétendu déni de justice qu'auraient commis les Juges d'appel.
Attendu que ces allégations sont dénuées de tout fondement juridique;
Attendu en effet qu'en droit le déni de justice est le refus de la part d'un Tribunal d'examiner une affaire qui lui est soumise et de prononcer un jugement;
Attendu que le déni de justice consiste dans le refus de juger une affaire qui est en état d'être jugée, ou de rendre une décision, fut-ce en raison du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la Loi;
Attendu que l'article 506 du Code de Procédure Civile consacre les définitions sus-indiquées en disposant qu'il y a déni de justice, lorsque les Juges refusent de répondre aux requêtes, ou négligent de juger les affaires en état et en tour d'être jugées;
Qu'ainsi le déni de justice consiste en une absence de décision de justice;
Attendu qu'en l'espèce, les juges d'Appel ont rendu une décision de justice qui est l'arrêt N° 9 du 12 février 1992;
Qu'il convient d'ailleurs d'observer que s'il n'y avait pas eu d'arrêt, donc de décision, il n'y aurait pas eu de pourvoi en cassation émanant de la Collectivité ANAVIENOU;
Attendu qu'en statuant sur la demande d'interprétation faite par la Collectivité ANANVIENOU par lettres en date des 21 février et 25 avril 1986 de l'arrêt N° 36 du 6 novembre 1985, les Juges d'appel ont relevé que par lettres en date des 12 mars et 17 avril 1989, la Collectivité ANAVIENOU s'était désistée de son pouvoir en cassation formé contre l'arrêt N° 36 du 6 novembre 1985;
Attendu que ce désistement a donné lieu à l'arrêt N° 08/CJ-CT pris par la Cour Suprême le 21 juin 1991, arrêt qui a donné acte à la Collectivité ANAVIENOU de son désistement;
Attendu que ce désistement a valeur d'acquiescer à un arrêt dont on ne comprend par les termes ou dont on ignore la portée;
Attendu que par son acquiescement, la Collectivité ANAVIENOU a suffisamment démontré que l'arrêt concerné ne comporte à ses yeux de termes obscurs ou ambigus, seules circonstances pouvant justifier une demande en interprétation.
Attendu que dès lors les Juges d'appel étaient fondés à débouter ladite Collectivité de ses requêtes en interprétation de l'arrêt N° 36 rendu le 6 novembre 1985 par la Chambre de Droit traditionnel de la Cour d'Appel;
Attendu en conséquence que le moyen n'est pas fondé et mérite rejet.
PAR CES MOTIFS
- Accueille le pourvoi en la forme;
- Le rejette au fond;
- Met les frais à la charge de la Collectivité ANAVIENOU prise en la personne de ZANNOU EKPODE et consorts.
Ordonne notification du présent arrêt au Procureur Général près la Cour d'Appel de Cotonou ainsi qu'aux autres parties.
Ordonne transmission en retour du dossier au Procureur Général près la Cour d'Appel de Cotonou.
Ainsi fait délibéré par la Cour Suprême (Chambre Judiciaire) composée de:
TCHEDJI Maxime,
Conseiller à la Chambre Judiciaire,
PRESIDENT

NOUKOUMIANTAKIN Alexis et SOSSOUHOUNTO Basile
CONSEILLERS
Et prononcé à l'audience publique du vendredi vingt neuf mars mil neuf cent quatre vingt seize, la Chambre étant composée comme il est indiqué ci-dessus en présence de:
DOSSOUMON Samson
AVOCAT GENERAL
Et de Françoise TCHIBOZO épouse QUENUM
GREFFIER
ET ONT SIGNE:

LE PRESIDENT LE RAPPORTEUR
Maxime P. TCHEDJI. A. NOUKOUMIANTAKIN
LE GREFFIER F.TCHIBOZO-UENUM


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 2
Date de la décision : 29/03/1996
Pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1996-03-29;2 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award