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21/11/1975 | BéNIN | N°18

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre judiciaire, 21 novembre 1975, 18


Texte (pseudonymisé)
N° 18/CJC du Répertoire EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DE LA
COUR SUPREME DE LA REPUBLIQUE DU
N°s 74-3/CJC et 74-4/CJC du Greffe DAHOMEY SEANT A COTONOU

Arrêt du 21 novembre 1975 AU NOM DU PEUPLE DAHOMEEN

S. C

. O. A. ...

N° 18/CJC du Répertoire EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DE LA
COUR SUPREME DE LA REPUBLIQUE DU
N°s 74-3/CJC et 74-4/CJC du Greffe DAHOMEY SEANT A COTONOU

Arrêt du 21 novembre 1975 AU NOM DU PEUPLE DAHOMEEN

S. C. O. A. COUR SUPREME
C/
La Société de Panification du Bénin CHAMBRE JUDICIAIRE (Civil)


Vu la déclaration en date du 6 décembre 1973, au greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, par laquelle Maître FELIHO, avocat à la Cour conseil de la Société de Panification du Bénin (SPB) s'est pourvu en cassation contre l'arrêt n° 64 du 6 décembre 1973, rendu par la Chambre civile de la Cour d'Appel de Cotonou;

Vu la déclaration du 2 janvier 1974, au greffe de la Cour d'Appel de Cotonou par laquelle Maître AMORIN avocat conseil de la SCOA s'est pourvu en cassation au nom de sa cliente contre l'arrêt n° 64 du 6 décembre 1973 rendu par la Chambre civile de la Cour d'Appel de Cotonou;

Vu la transmission du dossier à la Cour Suprême;

Vu l'arrêt attaqué;

Ensemble les mémoires ampliatifs, en défense et en réplique des 3 mai et 20 octobre 1974, du 10 et 17 avril 1975 des Aa C et X conseils des parties en cause;

Vu toutes les nautres pièces produites et jointes au dossier;

Vu l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour Suprême;

Ouï à l'audience publique du vendredi vingt et un novembre mil neuf cent soixante quinze, Monsieur le Président Edmond MATHIEU en son rapport;

Monsieur le Procureur Général Ac Z en ses conclusions;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Attendu que par déclaration enregistrée le 6 décembre 1973 au greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, Maître FELIHO, avocat, conseil de la Société de Panification du Bénin (SPB), a élevé au nom de sa cliente un pourvoi en cassation contre de l'arrêt n° 64 du 6 décembre 1973 rendu par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Cotonou ;

Attendu que par déclaration enregistrée le 2 janvier 1974 au greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, Maître AMORIN, avocat, conseil de la Société Commerciale de l'Ouest Africain (SCOA), a élevé au nom de sa cliente un pourvoi en cassation contre de l'arrêt n° 64 du 6 décembre 1973 rendu par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Cotonou ;

Attendu que par bordereau n° 764/PG du 12 février 1974, le Procureur Général près la Cour d'Appel transmettait avec les deux pourvois le dossier de la procédure au Procureur Général près la Cour Suprême et qu'il était enregistré sous les numéros 74-3/CJC et 74-4/CJC, chaque recours devant constituer un dossier séparé;

Attendu en ce qui concerne le dossier 74-3/CJC: SPB contre SCOA que par lettre n° 206/GCS du 14 mars 1974 reçue le 5 en l'étude le greffier en chef près la Cour Suprême notifiait à Maître FELIHO, auteur du pourvoi d'avoir à déposer dans le délai de quinze jours la caution de 5.000 francs exigée à peine de déchéance par l'article 45 de l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 et qu'il accordait un délai de deux mois au conseil pour déposer le mémoire ampliatif de ses moyens de cassation;

Attendu que par lettre du 7 mars 1974 parvenue le même jour au greffe, Maître FELIHO faisait tenir un chèque de 5.000 francs;

Attendu que le mémoire n'ayant pas été déposé, par lettre n° 424/GCS du 16 mai 1974, le Greffier en Chef menaçait Me FELIHO de forclusion s'il ne déposait pas ses moyens dans le délai de quinze jours. Lettre reçue le 16 mai en l'étude qui provoqua une demande de délai supplémentaire de la part de Maître FELIHO, demande enregistrée arrivée au greffe le 21 mai 1974;

Que par lettre n° 544/GCS du 27 mai 1974, reçue le 29 mai en l'étude, sur instruction du rapporteur, le greffier en chef notifiait au conseil un ultime délai de un mois ferme;

Que sans réponse au 12 juillet, il apparut au rapporteur y avoir lieu d'enrôler l'affaire en vue du prononcé de la forclusion de la requérante qui par ailleurs se trouve défenderesse dans la même affaire, à la suite du recours visé plus haut;

Attendu cependant que depuis la clôture du rapport, le conseil de la requérante avait déposé par lettre du 12 septembre 1974, une nouvelle demande d'un mois et le 15 octobre une pièce intitulée: mémoire ampliatif et en défense constituant à la fois l'argumentation de la Société à l'appui de son pourvoi et l'encontre des moyens développés par la SCOA dans le recours qu'elle avait elle-même formulé;

Qu'étant apparu plus conforme à une bonne administration de la justice de prononcer la jonction des deux procédures, que la Cour renvoya le dossier n° 74-3/CJC au rôle général pour être joint au dossier n° 74-4/CJC en cours d'instruction;

Attendu qu'en ce qui concerne le dossier 74-4/CJC SCOA contre SPB que par lettre n° 208/GCSD du 4 mars 1974, reçue le 5 en l'étude, le greffier en chef près la Cour Suprême, avait notifié à Me AMORIN, auteur du pourvoi du 2 janvier 1974, d'avoir à se conformer aux stipulations des articles 45 et 51 de l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966, en conséquence à consigner la somme de 5.000 francs dans le délai de 15 jours et à déposer ses moyens de cassation dans les 2 mois;

Attendu que la caution fut déposée le 8 mars, mais le mémoire tarda à venir et que par lettre du 4 juin, enregistrée arrivée le 5 au greffe, Me AMORIN demanda à être relevé de la forclusion dans toutes ses affaires, en raison de ses charges de Gouverneur de District rotarien;

Que cependant il avait déposé le 6 mai son mémoire ampliatif donc dans les délais prescrits;

Attendu qu'après décision de remise au rôle général du dossier du pourvoi de la SPB, communication fut faite à Maître AMORIN du mémoire de son adversaire par lettre n° 10/GCS du 8 janvier 1975 reçue le même jour en l'étude;

Attendu qu'il fit parvenir le 14 avril un mémoire en réponse et le 18 avril un mémoire en réplique;

Attendu que par ailleurs, sur une demande du 4 mars 1974, le Procureur Général près la cour d'Appel a fait parvenir le 8 octobre 1974 une expédition du jugement n° 75 du 14 mars 1973 du Tribunal de 1ère Instance de Cotonou qui ne figurait pas au dossier;

Attendu que l'affaire est en état de recevoir règlement après le dépôt au dossier des conclusions d'instance et d'appel de la SPB le 26/5/75;

EN LA FORME: Attendu que cautions et mémoires ont été déposés: que les retards pour ces derniers ont été excusés en ce qui concerne la SPB par la Cour et que ceux de la SCOA ne sont pas considérables;

Attendu qu'il y aura lieu de joindre les deux procédures qui avaient été séparées pour permettre l'exigence d'une caution par requête;

AU FOND:

LES FAITS: La fermeté dans la défense de son droit devient de l'obstination si celui-ci n'est pas bien assis. C'est ce qui arrivé à la SCOA concessionnaire de marque qui a vendu le 10 juillet à la Société de Panification du Bénin un minicar Wolkswagen et qui le vit ramener après 4.000 km avec dégâts au moteur justifiant une facture de 125.118 francs de pièces de rechange et 36.000 francs de main-d'ouvre;

En fait une bielle s'était brisée et avait endommagé les organes annexes;

La SCOA, bien que le véhicule fut sous garantie, ne voulut pas consentir à la réparation et à la fourniture des pièces de tout gratuitement, et argua d'une part d'une faute dans un retard à la présentation à la visite des 1.000 km spécifiée par le constructeur et d'autre part à une mauvaise utilisation du véhicule. Il semble évident que l'affirmation de l'entière bonne volonté de SCOA puisse être rejetée quoi qu'elle en dise de son côté;

Puis les positions se durcissent et la SCOA se voyant citée pour se voir condamner au remplacement soit du véhicule, soit du moteur, en outre à des dommages-intérêts pour immobilisation et perte de jouissance, demanda la désignation d'un expert, ce qui fut accordé par jugement avant-dire-droit;

Mais l'expert AH désigné le 8 août par jugement déposa son rapport daté du 3 août et eut la loyauté d'exposer que cette expertise lui avait été demandée par la SCOA avant toute désignation;

Cette simple remarque en passant aurait pu dispenser le conseil de la SCOA, des outrances répandues à son égard dans ses conclusions et notes qui ont très certainement indisposé les juges;

L'expertise étant entachée de nullité, le tribunal à la demande de la SPB désigna le 22 novembre 1972 à titre d'expert le professeur technique adjoint de mécanique automobile au Lycée technique A, Ag AI qui déposa son rapport le 20 décembre;
Si le rapport AH concluait à une mauvaise utilisation du véhicule, celui-ci penchait à 80 % pour un vice de fabrication;

La SCOA soutenait toujours d'une part la faute de la SPB de n'avoir pas présenté son véhicule à la vérification lorsqu'il avait parcouru 1000 km, mais au 1800ème, d'autre part la théorie de la mauvaise utilisation du constructeur;

Elle ne prit pas la précaution de réclamer une contre expertise, s'appuyant sur la balance des deux opinions des techniciens;

Elle avait, en combat d'avant-garde, soulevé l'irrecevabilité de son assignation, du fait qu'elle n'était pas le constructeur du véhicule;

C'était déjà une maladresse, le concessionnaire vendeur, étant tenu sans discussion aux lieu et place du constructeur;

Comme les arguments très sérieusement avancés par AH sur la mauvaise utilisation du véhicule n'étaient étayés d'aucun autre élément qui aurait pu être tiré de la compétence du chauffeur, de témoignages recherchés, ect., le tribunal, lui préféra les conclusions de Ag AI qui supposa non pas un mais deux vices cachés; défaillance du circuit d'huile et faille dans l'acier de la bielle;

Le tribunal ne pouvait non plus ne pas être fâcheusement impressionné par la stupide argumentation de la SCOA portant sur le retard à la présentation à la révision des 1000 km puisqu'aussi bien les mécaniciens après cette vérification avaient remis le véhicule sans aucune remarque et étaient censés avoir renouvelé l'huile pour les 3000 km suivants;

Le tribunal acceptant la théorie du vice caché s'en tint aux stipulations de la garantie tirées du livret service après vente Wolkswagen et ordonna la réparation gratuite, plus une indemnité pour immobilisation;

Les deux parties firent appel, la SCOA s'en tenant pour l'essentiel à son argumentation de première instance et insistant sur sa critique du rapport Ag AI, d'autre part reprochant à son adversaire de poursuivre à la fois l'action en garantie et l'action en résolution qui pourtant s'excluent;

Si SPB s'éleva contre la décision du 1er juge qui, saisi avant la clôture des débats, d'une action en résolution de la vente, avait statué en ignorant cette nouvelle position et avait pris sa décision sur l'action en garantie préalablement lancée;
Elle sollicitait donc l'annulation partielle du jugement en conservant le bénéfice de l'admission du vice caché et concluait la résolution de la vente et à l'octroi de dommages-intérêts pour perte de jouissance de la chose à cause de la mauvaise foi de son adversaire;

La Cour se trouvant donc devant plusieurs problèmes. Le premier était de décider s'il y avait ou non vice caché? Dans l'affirmative devait-elle annuler le premier jugement qui avait négligé de répondre à la véritable demande de la SPB contenue dans ses dernières conclusions avant clôture des débats?

Que devait-elle enfin décider au cas déjà indiqué d'acceptation de l'existence du vice caché?

La Cour dans une argumentation très fouillée a tout d'abord écarté le principe de l'irrecevabilité de l'action vis à vis du vendeur du véhicule, fait qui entre parenthèses avait échappé au premier juge, mais qui ne soulève de gros problèmes de droit;

La Cour a ensuite décidé l'annulation partielle du premier jugement pour n'avoir pas statué sur les conclusions nouvelles pour les rejeter et dit qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer à nouveau;

Au passage, remarquons que la Cour considère qu'elle jouit de l'alternative: soit d'accorder l'action en garantie dans les diverses formes que peut prendre cette réparation, soit l'action redhibitoire demandée en dernier lieu et qui sera poursuivie uniquement en cause d'appel;

C'est là à notre avis une erreur sur laquelle se fonde des moyens de cassation;

La Cour ensuite analyse très longuement l'un et l'autre des rapports d'expertise, tenant le premier comme simple renseignement, ce qu'elle a droit de faire, et à regret semble-t-il, s'en tient aux conclusions du second, car celles du premier devraient être étayées d'autres précisions que le dossier n'apporte pas;

Ceci étant, et le vice de fabrication étant admis la Cour d'Appel après avoir rappelé l'article 1641 stipulant la garantie du vendeur à raison des défauts cachés de la chose vendue retient la clause conventionnelle de restriction de la garantie insérée au livret du service après-vente Wolkswagen d'après laquelle «§ 3 un recours tendant à obtenir ne sera recevable que si Ae Ah est dans l'impossibilité de supprimer l'avarie»;

En reprenant l'examen des défauts relevés par le rapport d'expertise du 20 décembre qui «n'atteignent que des pièces du moteur du véhicule, que ces défauts réparables au dire de la SCOA dont la profession est celle d'un garagiste, dans un temps relativement court ne remplissent pas toutes les conditions prévues par l'article 1641, notamment qu'ils ne sont pas d'une gravité telle qu'ils rendent le véhicule impropre à l'usage auquel il est destiné ou diminuent tellement son usage que la SPB ne l'aurait pas acquis, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix si elle les avait connus», la Cour conclut que ces défauts ne sont pas efficaces à l'action en garantie tendant à la résolution de la vente et que de toutes les façons les stipulations du livret après-vente lient le SPB;

Et partant de ce livret la Cour rejoint le premier jugement et ordonne la réparation gratuite, que l'appelant n'avait jamais demandée;

Pour repousser une autre argumentation de la SPB qui a aussi invoqué, pour obtenir la résolution de la vente, l'article 1184 du code civil, la Cour d'Appel estime que la SPB n'a pas établi que la SCOA avait commis une faute dans l'exercice de son obligation ni qu'elle connaissait au moment de livrer le véhicule avarié les défauts dont il était atteint ce qui la constituerait de mauvaise foi;

Or, la jurisprudence est bien assise qui tient le vendeur professionnel pour présumé connaître les défauts de la chose vendue et l'assimile au contractant de mauvaise foi;

Là aussi, l'arrêt prête le flanc à un motif
de cassation qui vu plus loin;

Enfin dans la logique de son raisonnement, ayant admis la nécessité pour la SCOA de réparer gratuitement l'avarie, elle la rend responsable du retard apporté pour le faire, et fixe à 500.000 la perte de jouissance subie par la SPB à cause de ce retard, tout en réduisant considérablement la somme demandée à cet effet au motif que «tant la société de Panification du Bénin que la SCOA ont fait preuve d'une intransigeance sérieuse constituant un véritable obstacle la remise rapide du véhicule en état comme les y invitent les clauses mêmes du contrat;

Ce motif sera attaqué par l'un et l'autre des requérants en cassation, l'un estimant que l'arrêt se contredit en lui donnant à la fois raison et tort, l'autre estimant aussi qu'il se contredit pour l'avoir condamnée à des dommages-intérêts tout en reconnaissant sa bonne foi;

Enfin la Cour d'Appel est critiquée par la SCOA pour avoir mis tous les dépens à sa charge, alors qu'elle a triomphé sur l'essentiel, le rejet de la résolution de la vente réclamée par la SPB;

Aussi, tout comme la conquête de la Lune, cet arrêt pose autant de problèmes qu'il en résout, et si l'on a vu que les deux parties, déjà toutes deux appelantes du jugement de première instance, sont aussi toutes deux requérantes en cassation, si elles demandent toutes deux la réformation de l'arrêt elles ne s'accordent cependant sur aucun des moyens de cassation soulevés réciproquement, qui sont au nombre de dix au total et que chaque combat avec la même vigueur qu'elle met à soutenir les siens;

EXAMEN DES MOYENS DE LA SCOA:

PREMIER MOYEN: Violation de la loi. Violation des articles 1641 et suivants du code civil - violation des règles de preuve - violation de l'article 1134 du code civil - fausse interprétation des documents de la cause - violation de l'article 3 de la loi n° 64-26 du 9 décembre 1964; contradiction, défaut, insuffisance de motifs - motifs hypothétiques - Non réponse à conclusions - manque de base légale;

en ce que l'arrêt querellé décide qu'il y a vice caché suivant définition des articles 1641 et suivants du code civil;

alors que, reconnaissant le désaccord entre les conclusions des deux experts, et sans recourir à un tiers expert, l'arrêt décide qu'il y a vice caché, alors que celle des expertises sur laquelle est fondée la décision n'a à aucun moment affirmé absolument la réalité du vice caché, alors qu'aucune réponse n'a été faite aux conclusions critiques de la SCOA touchant notamment le caractère hypothétique des conclusions de ladite expertise et démontrant l'impossibilité matérielle de la simple déformation d'une bielle en acier forgé;

Attendu que la Société de Panification du Bénin s'élève contre l'affirmation de la SCOA selon laquelle la Cour d'Appel reconnaissant le désaccord entre les deux experts aurait dû d'abord recourir à un tiers expert, et ceci parce qu'il est inexact qu'il y eut deux expertises, la première celle de AH étant juridiquement nulle;

Attendu que l'argument est de poids, encore que la Cour ait bien et régulièrement, tenu compte de l'expertise AH qu'elle pouvait retenir à titre de simple renseignement;

Attendu que la Cour Suprême inclinerait à suivre la SCOA quand elle estime que la Cour a conclu au vice caché sur des bases bien fragiles, alors que l'expert Ag AI n'avait émis que des hypothèses, car son raisonnement part du postulat non vérifié par lui d'une obturation du circuit de graissage - obturation qu'il n'a pas constatée en fait;

Attendu cependant qu'on ne peut dire qu'il y a violation de la loi ou des règles de preuve, pas plus qu'il n'y a insuffisance de motifs, la Cour ayant plutôt trop fait puisqu'elle a pris le soin de peser les constatations et déductions de AH dont elle aurait pû écarter purement et simplement le travail;

Attendu quant aux conclusions critiques de la SCOA et surtout celle répétée à satiété selon laquelle une bielle en acier forcé se rompt mais ne se déforme pas, qu'on se demande si elles sont très sérieuses surtout si l'on relit le rapport de son propre expert AH qui écrit: description des dégâts constatés: «2°- que le corps de ladite bielle est fortement déformé.»

Attendu que la Cour reprendra à l'examen du 1er moyen de la SPB la question de la validité du livret de service après-vente et qu'elle ne suit pas la SCOA lorsqu'elle écrit, au sujet de la révision des 1000 km prescrite par le livret: «le maintien du droit à garantie était subordonné à l'inspection des premiers mille kilomètres et plus loin «la garantie se donne, selon notre convenance, à l'échange ou à la réparation des pièces dont nous reconnaissons qu'elle présentent un défaut d'usinage ou de matière. Dans les rapports des parties, c'est cette clause conventionnelle qui doit jouer.»;

Attendu en conclusion de l'examen de ce premier moyen que la Cour Suprême estime que la Cour d'Appel a fondé sa décision quant à l'existence des vices cachés, sur l'analyse des éléments de fait et des explications qui lui ont été fournis au dossier;

Qu'il eut été possible et peut être souhaitable qu'elle eut ordonné un complément d'investigations, elle n'a violé en prenant sa décision aucun teste de loi, et légalement motivé sa décision;

Attendu que le moyen doit être rejeté;

DEUXIEME MOYEN: violation de la loi - violation des articles 1134, 1147, 1382, 1383, 1641 du code civil - violation de l'article 3 de la loi n° 64-26 du 9 décembre 1964, défaut, insuffisance, contradiction de motifs - Défaut de réponse à conclusions - contravention aux règles de preuve - Manque de bases légales - Deni de justice;

en ce que l'arrêt querellé a condamné la SCOA payer à la Société de Panification du Bénin, la somme de cinq cent mille francs en réparation de préjudice que celle-ci aurait subi du fait de la privation de jouissance résultant de l'immobilisation de son véhicule;

alors que le même arrêt, par motifs précédents, avait exclut toute mauvaise foi de la part de la SCOA, reconnu les diligences de cette dernière, le bien fondé de la résistance en rejetant la prétention de la demanderesse à obtenir la résolution ou un véhicule neuf;

Alors encore qu'aucune négligence ni faute délictuelle, quasi délictuelle ou contractuelle n'est portée à la charge de la SCOA, et que l'arrêt n'a par contradiction d'ailleurs avec des motifs précédents sus-rappelés - retenu qu'une résistance réciproque des parties dont les effets auraient normalement dû se compenser et d'annuler;

Attendu que la requérante sollicite le texte de l'arrêt dans lequel on peut lire: rôle 11 verso: «Attendu que la SCOA ayant démonté le moteur, a constaté que la bielle avait coulé, a procédé à l'établissement de la liste des pièces dont la panne a rendu le remplacement nécessaire; qu'à ce moment les parties n'ont pu se mettre d'accord sur la prise en charge de ces pièces et de la main-d'ouvre, que toutes les propositions de la SCOA, tendant à l'application des clauses de la garantie inscrite au «Livret du service après-vente Wolkswagen» ont été rejetées par la Société de Panification du Bénin; toutes ces propositions partant de ce qu'il y aurait eu selon la SCOA mauvaise utilisation du véhicule;

Attendu qu'il est donc manifeste que la SOCA ne voulant pas reconnaître sa responsabilité, et cette responsabilité étant en fin de compte mise à sa charge par l'arrêt que l'immobilisation du véhicule est don fait et qu'elle doit réparation pour la perte de jouissance;

Attendu que la Cour a d'ailleurs placé cette indemnisation sur la perte de jouissance du véhicule due au retard apporté aux réparations (article 1134) alors que la SPB prétend avoir droit à dommages-intérêts par application de l'article 1645 code civil du fait que le vendeur professionnel est présumé de mauvaise foi en cas d'existence de vices cachés dans la chose vendue;

Attendu qu'il eut été plus commode pour l'arrêt de s'en tenir à cette jurisprudence qui a l'avantage de supprimer toute investigation sur l'établissement de la bonne ou de la mauvaise foi des cocontractants;

Mais attendu que tel qu'il est, l'arrêt échappe à la censure, ayant pris soin d'établir que le retard à la réparation incombait au moins pour partie à la SCOA;

Attendu que le moyen est à rejeter d'autant qu'il est fallacieux au moins par un argument, celui faisant état de deni de justice, la matérialité de la décision rendue lui infligeant le démenti le plus formel;

TROISIEME MOYEN.- Violation de la loi, violation des articles 130 et 131 code procédure civile et commerciale. Violation de l'article 3 de la loi n° 64-26 du 9 décembre 1964 - Défaut, contradiction, insuffisance de motifs - manque de base légale.

en ce que la SCOA est condamnée à payer tous les frais et dépens tant de première instance que d'appel;

alors que sa défense a triomphé sur l'essentiel, la Société de Panification ayant été déboutée de sa demande en résolution de la vente et de sa prétention recevoir un véhicule neuf, et, que les parties ayant chacune partiellement succombé, les dépens devaient être partagés ou compensés;

Attendu que la SCOA ne peut contester qu'elle a été déboutée en première instance et en appel de sa demande reconventionnelle en 50.000 de dommages intérêts, donc qu'elle a formellement succombé, tandis que son adversaire qui a obtenu réparation gratuite de son véhicule et 500.000 de dommages-intérêts, ne peut bien qu'elle n'ait pas obtenu satisfaction dans sa demande principale être considérée comme ayant succombé;

Attendu par ailleurs que l'article 131 ne spécifie pas que les dépens doivent être compensés en tout ou en partie, si les parties succombent respectivement sur quelques chefs, mais que les juges pourront le faire. Requêtes 21 février 1899 DP 99-1-243: même dans les deux cas prévus par l'article 131, la compensation des dépens est facultative pour le juge qui jouit à cet égard d'un pouvoir discrétionnaire»;

Attendu que le moyen est irrecevable;

EXAMEN DES MOYENS DE LA SOCIETE DE PANIFICATION DU BENIN (SPB)

PREMIER MOYEN: violation des articles 1134, 1322 et 1347 du code civil, 3 de la loi du 9 décembre 1964, dénaturation de la convention des parties, insuffisance de motifs, manque de base légale.

en ce que l'arrêt entrepris déclare que les mentions du livre du service après vente VW lient la Société de panification du Bénin et en tire pour conséquence des restrictions à l'obligation de garantie à laquelle est tenu le vendeur,

alors que le livret dont il s'agit ne constitue pas une convention n'ayant pas été soumis à l'approbation de la concluante lors de la vente et que la Cour ne pouvait donc déclarer l'acheteur lié par un document et circonstances d'où il pouvait résulter que les énonciations dudit livret aient été expressément débattues et approuvées par parties et notamment la concluante;

Attendu que la requérante soulève là tout le problème de la validité des clauses limitatives de la garantie des vices cachés dans la vente;

Attendu que la Cour Suprême se réserve à l'occasion du 2ème moyen de revenir sur la détermination de la notion même de vice caché et de son influence sur l'étendue des mesures à ordonner pour sa couverture. Que dans le présent moyen il importe, le vice étant tenu pour réalité, de savoir si la garantie des articles 1641 et suivants, peut être restreinte par des clauses limitatives de responsabilité et d'autre part si ces clauses sont opposables à l'acquéreur du véhicule auprès d'un concessionnaire qui n'est pas lui-même l'auteur de cette convention;

Attendu sur la première question que doctrine et jurisprudence françaises ne sont pas toujours convergentes;

Qu'en effet on lit au Jurisclasseur civil art 1641-1649 vente fascicule x . 2.1971.

N° 234: si aux termes de l'article 1646, le vendeur qui a ignoré les vices de la chose n'est tenu qu'à la restitution du prix et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnées par la vente, il résulte des dispositions de l'article 1645 que le vendeur qui connaissait ces vices, auquel il convient d'assimiler celui qui par sa profession ne pouvait les ignorer, est tenu outre la restitution du prix qu'il a reçu, de tous dommages-intérêts envers l'acheteur en réparation du préjudice subi;

N° 23T: Ces dommages-intérêts comprennent la réparation de tous les chefs de préjudice causés à l'acheteur par la vente, «damnum emergens» et «lucrum cessans», ce dernier existant notamment lorsque l'acheteur est un commerçant, un artisan ou un industriel et que l'achat de la chose viciée a été fait en vue d'une utilisation professionnelle;

Et ces règles ne sauraient être modifiées par l'existence d'une clause de non garantie, laquelle est sans efficacité en cas de mauvaise foi du vendeur;

Attendu que cependant, plus loin dans le même code civil relatives à la garantie n'étant pas d'ordre public, les parties peuvent valablement déroger à la règle précédente, soit qu'elles restreignent ou même suppriment la garantie en raison des vices cachés susceptibles d'atteindre la chose vendue, soit au contraire qu'elles la rendent plus étendue;

N° 255: la convention peut prévoir l'exclusion de la garantie pour certains vices déterminés ou même pour tous les vices susceptibles d'exister, elle peut aussi la limiter dans le temps. Mais quelle que soit leur étendue ces clauses sont mal vues de la jurisprudence;

L'hostilité des tribunaux se manifeste tant en ce qui concerne leurs conditions de validité qu'en ce qui concerne leur interprétation;

Attendu qu'on le voit, d'après le jurisclasseur, si de nombreuses clauses limitatives de la garantie existent légalement, elles ne trouvent pas grâce quand leur application est portée devant les tribunaux;

Attendu que la Cour Suprême peut se confirmer dans cette opinion à la lecture de l'article du Professeur Ad AG, publié dans le n° 11 du 12 mars 1975 des la semaine juridique, qui tout en faisant des distinctions suivant qu'il s'agit de rapports entre vendeurs et acheteurs professionnels où des clauses peuvent parfois n'être pas rejetées, et de vendeurs professionnels à acheteurs particuliers où elles sont systématiquement rejetées déclare:

N° 4 on sait qu'en droit commun, au moins en matière contractuelle, le principe est que les clauses exonératoires ou limitatives de responsabilité sont valables et pleinement efficaces; on y voit généralement une conséquence du principe de la liberté des conventions. L'effet de telles clauses ne cesse que devant la preuve du dol ou de la faute lourde de l'auteur du dommage: on ne peut en effet en toute justice, s'exonérer des conséquences de sa faute volontaire ou présumée.

N° 5 L'article 1643 du code civil constitue en fait une application de ce droit commun lorsqu'il déclare que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il «ne sera obligé à aucune garantie». Ce texte pose la règle que les clauses de non garantie des vices cachés sont valables, sauf si le vice était connu du vendeur, auquel cas il y aurait bien évidemment
dol ou faute lourde;

S'en tenant à la lettre de l'article 1643 du code civil fabricants et vendeurs, dont on se plaît à penser qu'ils ignorent les vices de leurs produits, insèrent systématiquement dans leurs conditions générales de vente des clause de non-garantie ou encore, sous les dehors d'une garantie contractuelle qui leur sert de support publicitaire, ils glissent une limitation de garantie dans le temps (1 ou 2 ans) ou dans le quantum (pièces et main d'ouvre, ou pièces seulement);

Cependant, la jurisprudence constante et unanime, prononce la nullité de ces clauses lorsqu'elles émanent d'un professionnel, fabricant ou distributeur, au motif que le professionnel est «présumé connaître» et même «tenu de connaître» les défauts des produits qu'il fabrique ou qu'il vend»;

Aucune clause n'a trouvé grâce devant cette jurisprudence qui annule sans distinction les clauses qui limitent la garantie dans sa durée comme dans son quantum. La Cour de Cassation ne sacrifie pas plus à la distinction jadis proposée par P. Af, et annule aussi les clauses qui limitent non pas la garantie mais les obligations du fabricant, spécialement celles du contrôle de qualité de sa production;

Attendu que c'est donc par insuffisance de motifs que la Cour a admis la validité des stipulations du livret après vente Wv selon lesquelles un recours tendant à obtenir une résiliation du contrat d'achat ou une réduction du prix ne sera recevable que si la Wolkswagen Work est dans l'impossibilité de supprimer l'avarie;

Attendu que l'arrêt encourt donc la cassation de ce chef, peu importe d'autre part que l'acheteur ait eu ou non connaissance ou bien ait eu ou non accepté les dites stipulations;

DEUXIEME MOYEN: Violation des articles 1134, 1165, 1627, 1641 etc, du code civil, 3 de la loi du 9 décembre 1964, violation de la loi, dénaturation de la convention des parties, insuffisance et contradiction de motifs.

en ce que l'arrêt entrepris déclare d'une part que l'article 1627 autorise les parties à diminuer par convention les faits de l'obligation de garantie du vendeur sans faire disparaître la garantie prévue par l'article 1641 et en déduit que les mentions du livret de service après vente Wv ont en cet effet en ne permettant la résiliation de la vente qu'en cas d'impossibilité pour Ae Ah de supprimer l'avarie et d'autre part que les vices relevés par l'expertise sont réparables aux pires de la SCOA, dans un temps relativement court et ne remplissant pas les conditions prévues par l'article 1641 d'où il s'ensuivrait que la demande en résiliation est irrecevable;

alors que d'autre part l'article 1627 du code civil ne concerne que la garantie en cas d'éviction, et que la garantie de l'article 1641 concerne le vendeur et non le fabricant tiers au contrat d'une part;
et que d'autre part l'acquéreur a le choix de l'action qu'il estime la plus convenable en raison du vice caché et que le juge ne peut se substituer à lui dans ce choix;

Attendu que ce second moyen s'il revient sur l'inapplicabilité des clauses restrictives de garantie insérées au livret après vente, question déjà réglée, critique l'arrêt pour avoir sous le visa de l'article 1627, estimé que l'avarie ne remplissait pas les conditions de gravité, de difficultés de remise en état, de durée des réparations, de nature à permettre la résolution de la vente, qu'une convention particulière n'aurait pu anéantir;

Attendu que si le visa de l'article 1627 est inadéquat en l'espèce, puisqu'il a trait à la garantie d'éviction, l'arrêt se réfère implicitement aux articles 1641 et suivants et particulièrement 1643 et n'est pas vicié par cette mention;

Quant à dire que le vice ou que le dommage découvert n'est pas d'une importance suffisante pour provoquer la résolution de la vente, que c'est une question de fond, laissée à l'appréciation souveraine des Tribunaux;

Attendu que dans l'arrêt critiqué, la Cour a estimé ce dommage réparable dans des conditions satisfaisantes et la remise en état possible et rapide par la SCOA;

Attendu qu'elle aurait dû s'en tenir là et rejeter alors purement et simplement l'action redhibitoire seule poursuivie par la SPB;

Qu'en effet, il est acquis que le premier jugement a été annulé pour n'avoir pas tenu compte de cette demande en résolution présentée avant la clôture des débats;

Attendu qu'il est constant qu'en cause d'appel la SPB s'est bornée à réclamer la résolution de la vente;

Or attendu qu'on peut lire: Encyclopédie Dalloz Répertoire Droit Civil titre Vente vices Redhibitoires N° 76 et suivants.

N° 76: L'acquéreur qui demande la garantie du vendeur pour les vices cachés de la chose exerce une action qui a en réalité, deux chefs, car d'après l'article 1644 du code civil, il peut demander que le prix lui soit rendu moyennant restitution de la chose ou que le prix soit réduit. Suivant une ancienne terminologie la première action est dite redhibitoire, la seconde estimatoire ou quanti minoris.

N° 77: Le droit de choisir entre ces demandes appartient à l'acquéreur mais la première n'est possible que s'il est en mesure de restituer la chose;
N° 79: L'acquéreur doit prendre l'initiative de l'action et non attendre d'être assigné en payement du prix. Il peut former à la fois l'une et d'autre demande. Le Tribunal a le droit dans ce cas de repousser l'action redhibitoire parce qu'il ne juge pas le vice caché assez important et de réduire le prix payé. Mais si le demandeur n'a demandé que la résolution, il paraît douteux que le Tribunal puisse, en repoussant la résolution lui accorder une réduction de prix.

On lit par ailleurs au jurisclasseur civil art. 1641-1649 - Fascicule X: Vente 2.1971.

N° 138: En cas de découverte de vices cachés, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts.

N° 139: Cela ne signifie pas que l'acquéreur n'ait que ces deux moyens d'obtenir réparation du dommage que lui cause le vice de la chose, il pourrait également, conformément au droit commun, et en se fondant sur l'obligation de délivrance qui incombe au vendeur, exiger de celui-ci qu'il répare le vice ou remplace l'objet défectueux. Et comme il s'agit d'une obligation de faire, si ce vendeur se refuse à la réparation ou au remplacement, l'acheteur pourrait en vertu de l'article 1144 du code civil, les effectuer lui-même ou les faire effectuer par d'autres, quitte à s'en faire rembourser les frais par le vendeur; le montant de ce remboursement devrait cependant en cas de contestation, être déterminé par experts comme dans le cas de l'article 1644;

Attendu qu'on retrouve à ce sujet un des griefs de la SPB (confère des conclusions du 4 octobre 1972 page 15) qui se plaignait du fait que son adversaire concessionnaire exclusive de Wolkswagen du Dahomey savait que ce véhicule sous garantie, ne pouvait être réparé nulle part (ailleurs) que dans ses ateliers;

Mais attendu qu'il est un fait que la SPB qui demandait uniquement la résolution de la vente, n' a pas demandé, pas plus que la réduction du prix, la réparation de l'avarie;

Attendu que c'est donc d'une grande hardiesse qu'a fait preuve la Cour d'Appel, en condamnant la SCOA qui bien entendu n'avait pas offert de s'en charger, à effectuer cette réparation qui ne satisfait pas plus une partie que l'autre: la SCOA prétendant toujours à la panne à imputer à l'acheteur. La SPB au remboursement du prix de ce véhicule dont elle n'a plus l'usage puisqu'elle en a acquis un en remplacement et qu'elle ne veut plus apporter sa clientèle à l'atelier de la SCOA (cf conclusions Me FELIHO 4 octobre 1972 page 15 et 30 juin 1973 page 3);

Attendu par conséquent que le moyen est recevable dans sa deuxième branche pour violation de l'article 1644, et non réponse aux conclusions des parties, ou que l'arrêt en condamnant la SCOA à la réparation gratuite de l'avarie constatée a jugé «ultra petita» et qu'il encourt la cassation, le moyen d'ordre public pouvant être soulevé d'office par la Cour Suprême;

Attendu d'autre part, que s'il est possible de considérer que lorsque l'objet est divisible et décomposable en partie, l'article 1644 n'est pas applicable ainsi que le soutient la SCOA dans sa défense au moyen, il y a lieu de se demander où s'arrête l'application du texte, toute machine quelle qu'elle soit étant composée de parties; mais dans le cas d'espèce, ce n'est pas une partie du moteur qui lui-même n'est qu'une partie du véhicule qui est à remplacer mais 14 éléments différents dont certains sont en plusieurs exemplaires par exemple 4 si elles, des jeux de divers coussinets. Que pour autant qu'un non expert puisse s'en rendre compte une notable partie du moteur, dont même son carter étaient à changer. Qu'il est à craindre que ces opérations faites hors des conditions de montage à l'usine ne laissent quelque imperfection à l'organe remis en état;

Attendu en outre que le juge ne peut pas ne pas considérer les arguments relatifs à la répugnance de l'acheteur à avoir à faire à son adversaire pour la suite de l'usage du véhicule et enfin la perte d'intérêt pour lui à le reprendre après un si long délai pendant lequel il a organisé de façon différente son activité professionnelle. Que c'est ici la notion juridique du vice caché déjà subtile à appliquer en considération de faits assez flous et controversés, débouche sur une conséquence qui peut changer suivant des considérations objectives annexées. Quant à l'application son sujet du caractère redhibitoire;

Attendu que ces considérations sont relevées au jurisclasseur civil Art. 1641-1649 Fascicule X vente, 2, 1971.

Art. 33: s'il est relativement facile de déterminer si la chose vendue est totalement impropre à l'usage auquel elle est destinée, il est beaucoup plus délicat de fixer dans quelle mesure le vice donne lieu à garantie pour diminution de cet usage; quelle importance le vice constaté, l'absence de telle qualité ont-ils au regard de l'acheteur? Quelle influence son ignorance à ces divers sujets a-t-elle exercée sur sa détermination tant au point de vue de la formation du contrat qu'à celui de l'acceptation du prix? Ce sont là des questions de fait qui relèvent de l'appréciation souveraine des Tribunaux;

Art. 35: Compte tenu des termes de l'article 1641, on peut se demander si des défauts purement accidentels et facilement réparables ont un caractère de vice redhibitoire. Il ne le semble pas si la diminution de l'usage ne s'avère pas suffisamment grave pour avoir empêché l'acheteur de contracter; celui-ci pourrait seulement exiger la réparation, la remise en état du bien, à la condition toutefois que cette réparation ne lui cause aucun préjudice et permette de rendre le bien propre à l'usage auquel il était destiné et n'en diminue pas la valeur: bien entendu cette règle n'est valable que dans la mesure où, au jour de la vente, la chose était dans son ensemble propre à l'usage prévu, sauf à la remettre en état. Il en serait autrement et l'action redhibitoire serait recevable, si, dès le moment de la vente, la chose était foncièrement inutilisable pour l'emploi auquel on la destinait et qu'il s'agit dès lors, moins d'une réparation, que d'une réadaptation plus ou moins profonde;

En outre, des défauts quoique réparables, constitueraient quand même des vices cachés, s'ils devaient nécessiter des réparations importantes et priver l'acquéreur pendant un délai assez long de l'usage du bien acquis;

Attendu que, la Cour de renvoi aura à décider en fonction de tous ces éléments, d'abord s'il y a vice caché ou panne banale, ensuite et le cas échéant, s'il y a lieu à accorder ou refuser la résolution de la vente;

TROISIEME MOYEN: violation des articles 1351, 1645, ou du code civil, 3 de la loi du 9 décembre 1964, violation de la loi; des règles de preuve, manque de base légale, contradiction de motifs,

en ce que l'arrêt critiqué déclare, d'une part, que les vices relevés sont réparables aux dires de la SCOA et que la Société de Panification du Bénin n'apporte pas la preuve contraire;

et d'autre part, que la concluante n'apporte pas la preuve de la faute commise par la SCOA et notamment qu'elle connaissait les vices dont le véhicule était atteint ce qui la constituerait de mauvaise foi ,

enfin que les parties ont fait preuve d'une intransigeance sérieuse constituant un véritable obstacle à la mise du véhicule en état d'où la Cour a tiré que si la demande relative au préjudice résultant de la privation de jouissance était recevable, elle était excessive compte tenu du comportement de la demanderesse;

alors que, d'une part, la SCOA demanderesse sur ce point avait la charge de prouver que les vices étaient réparables d'une manière définitive d'où il s'ensuit que la Cour a irrégulièrement renversé la charge de la preuve;

d'autre part que la Cour ayant constaté expressément dans ses motifs que la SCOA était un professionnel, la concluante n'avait pas à apporter la preuve de ce que son vendeur connaissait les vices cachés et était de mauvaise foi, cette connaissance et cette mauvaise foi étant présumées;

enfin, qu'en affirmant que la concluante a provoqué en partie, par son, intransigeance, la prolongation de l'immobilisation, la cour se met en contradiction avec elle même puisqu'elle a constaté que la SCOA était tenue de l'obligation de garantie d'où il s'ensuit que le refus de payer de la concluante était justifié et qu'en affirmant l'intransigeance de celle-ci, la Cour a omis de préciser les documents et circonstances d'où il résultait que, nonobstant l'obligation de garantie du vendeur, la concluante commettait une faute, ce qu'implique le motif visé - en refusant de payer ce qui était couvert par la garantie;

Attendu que c'est la SPB qui est demanderesse à l'action redhibitoire qui ne peut s'exercer dans l'optique de la Cour que si l'avarie n'est pas réparable. Or attendu que la SCOA affirme que cette réparation peut se faire dans ses ateliers. Que c'est donc à la SPB de prouver le contraire et l'arrêt est logique avec lui-même;

Attendu sur la seconde branche, présomption de connaissance des vices cachés par le vendeur professionnel, que la Cour a exposé sa critique de l'arrêt à l'absence de l'examen du premier moyen. Qu'il n'est pas besoin d'y revenir;

SUR LA TROISIEME BRANCHE:

Attendu que la SPB a toujours demandé plus qu'il ne lui a été accordé;

Que sans même tenir compte des «longs pourparlers avec les agents de la SCOA» rapportés par l'une et l'autre des parties dans leurs premières conclusions (Dans des sens naturellement opposés qu'il n'appartient pas aux Tribunaux de vérifier) il est acquis au dossier que la citation délivrée le 29 juillet à la SCOA tendait à la remise d'un autre véhicule ou à remettre dans le véhicule un moteur neuf;

Que la demande en résolution venue ensuite ne fit qu'accentuer cette exigence, qui n'a jamais été satisfaite et que la dernière décision judiciaire à laquelle la SPB résiste encore en venant en cassation, tend à montrer que la Cour ne s'est pas trompée en parlant
d'une intransigeance sérieuse ayant constitué un véritable obstacle à la remise rapide du véhicule en état. Comment la SOCA garagiste pouvait-elle prendre sur elle d'effectuer les réparations, comme Me FELIHO dans ses conclusions du 4 octobre 1972 (Page 15) déclare qu'elle eut dû y procéder, alors que 5 jours après avoir reçu le véhicule accidenté et sans avoir pû s'accorder pour le règlement, elle recevait une citation pour se voir condamner à changer le moteur ou le véhicule;

Attendu que si enfin de compte la SCOA se voit imputer à charge la réparation du dommage, par une décision ultra petita, la SPB se trouve encore plus déçue puisqu'elle voulait un autre moteur, ou à la réflexion la résolution de la vente. Qu'il est dans la logique du dossier que l'une et l'autre des parties aient résisté à une solution qui est la seule sur laquelle elles se rencontrent pour s'y opposer;

Et attendu que la Cour d'Appel a été sage de n'imputer qu'une partie de l'indemnité pour privation de jouissance à la SCOA;

Attendu que le moyen est irrecevable.

PAR CES MOTIFS

Reçoit les deux pourvois en la forme.

Prononce la jonction des deux procédures.

Rejette au fond le pourvoi de la SCOA.

Casse et renvoie sur les 1er et 2ème moyens de la Société de Panification du Bénin.

Ordonne la restitution de la caution à la SPB.

Condamne la SCOA aux dépens.

Ordonne la notification du présent arrêt au Procureur Général près la Cour d'Appel de Cotonou ainsi qu'aux parties.

Ordonne la transmission en retour du dossier au Parquet Général près la Cour d'Appel de Cotonou.

Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Judiciaire) composée de Messieurs:

Edmond MATHIEU, Président de la Chambre Judiciaire, PRESIDENT

Maurille CODJIA et Michel DASSI, CONSEILLERS

Et prononcé à l'audience publique du vendredi vingt et un novembre mil neuf cent soixante quinze, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de MonsieBr:

Ac Z, PROCUREUR GENERAL

Et de Maître Pierre Victor AHEHEHINNOU, GREFFIER

Et ont signé:

Le Président Le Greffier

E. MATHIEU P. Ab Y


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 18
Date de la décision : 21/11/1975
Civile moderne

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1975-11-21;18 ?
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