N° F.24.0019.F
1. C. B.,
2. M. L.,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Anvers, Amerikalei, 187/302, où il est fait élection de domicile,
contre
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 16 novembre 2023 par la cour d’appel de Bruxelles.
Le conseiller Simon Claisse a fait rapport.
L’avocat général Philippe de Koster a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, les demandeurs présentent un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par le défendeur et déduite de ce qu’il invite la Cour à rechercher des faits :
L’examen du moyen, qui se limite à faire grief à l’arrêt de considérer que des actes irréguliers en vertu des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, peuvent être remplacés par des traductions, ne requiert pas que la Cour recherche le centre de contrôle dont émanent ces actes.
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par le défendeur et déduite du défaut de précision :
Il suit de la réponse à la première fin de non-recevoir que le moyen, qui n’indique pas que le centre de contrôle dont émanent les actes litigieux est un service local de l’État dont l’activité s’étend à une seule commune, un service régional qui s’étend à plusieurs communes ou un service central dont l’activité s’étend à tout le pays, n’est pas imprécis.
Les fins de non-recevoir ne peuvent être accueillies.
Sur le fondement du moyen :
En vertu de l'article 58, alinéa 1er, des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, sont nuls tous actes et règlements administratifs contraires, quant à la forme ou quant au fond, aux dispositions desdites lois.
Cette disposition est d’ordre public et la sanction doit être appliquée par le juge, indépendamment d’une violation du droit de défense de leurs destinataires.
Aux termes de l'article 58, alinéa 3, de ces lois coordonnées, les actes ou règlements dont la nullité est constatée en raison d'irrégularités quant à la forme sont remplacés en forme régulière par l'autorité dont ils émanent : ce remplacement sortit ses effets à la date de l'acte ou du règlement remplacé.
Le dépôt d'une traduction de l’acte irrégulier ne constitue pas un remplacement en forme régulière au sens de cette disposition.
L’arrêt, qui constate que le défendeur « a déposé une traduction des différents actes de procédure rédigés erronément en néerlandais, à savoir : [l’avertissement-extrait de rôle] du 2 juillet 2002, la notification d’imposition d’office du 10 septembre 2002 et la notification de la décision de taxation du 5 novembre 2002 », et considère que « [les demandeurs] ne peuvent invoquer une prétendue violation des droits de la défense puisqu'ils ont répondu, de manière détaillée et précise, à la notification d’imposition d’office qui leur avait été adressée en néerlandais, sans d’ailleurs invoquer la question de la langue utilisée », viole l’article 58 des lois sur l'emploi des langues en matière administrative.
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d’appel de Liège.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le premier président Eric de Formanoir, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Maxime Marchandise et Simon Claisse, et prononcé en audience publique du neuf janvier deux mille vingt-cinq par le premier président Eric de Formanoir, en présence de l’avocat général Philippe de Koster, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.