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04/12/2024 | BELGIQUE | N°P.22.0563.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 04 décembre 2024, P.22.0563.F


N° P.22.0563.F
I. O. C.,
prévenu,
II. SCHRÖDER RENÉ, société à responsabilité limitée, dont le siège est établi à Saint-Vith (Emmels), Steinborn, 6, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0429.037.631,
civilement responsable,
demandeurs en cassation,
ayant pour conseil Maître Judith Orban, avocat au barreau d’Eupen.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un jugement rendu le 23 mars 2022 par le tribunal correctionnel d’Eupen, statuant en degré d’appel.
Les demandeurs invoquent quatre moy

ens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Par un arrêt du 26 avri...

N° P.22.0563.F
I. O. C.,
prévenu,
II. SCHRÖDER RENÉ, société à responsabilité limitée, dont le siège est établi à Saint-Vith (Emmels), Steinborn, 6, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0429.037.631,
civilement responsable,
demandeurs en cassation,
ayant pour conseil Maître Judith Orban, avocat au barreau d’Eupen.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un jugement rendu le 23 mars 2022 par le tribunal correctionnel d’Eupen, statuant en degré d’appel.
Les demandeurs invoquent quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Par un arrêt du 26 avril 2023, la Cour a interrogé la Cour de justice de l’Union européenne sur l’application des articles 1, 2.3), et 3 de la directive 2014/31/UE du Parlement et du Conseil du 26 février 2014 relative à l’harmonisation sur le marché des instruments de pesage à fonctionnement non automatique, à l’utilisation, par les autorités judiciaires ou policières, d’instruments de pesage à fonctionnement non automatique aux fins de la détermination de la masse des véhicules pour l’application d’une législation ou d’une règlementation nationale sanctionnée pénalement.
Par un arrêt du 4 juillet 2024, la juridiction interrogée a dit pour droit que l’article 1er, § 1er, de la directive doit être interprété en ce sens que celle-ci s’applique aux instruments de pesage à fonctionnement non automatique lorsque ces instruments sont utilisés par les autorités judiciaires ou policières auxdites fins.
Le 12 septembre 2024, l’avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe.
A l’audience du 4 décembre 2024, le conseiller Tamara Konsek a fait rapport et l’avocat général précité a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Conformément à l’article 429, alinéa 2, du Code d’instruction criminelle, le demandeur en cassation ne peut produire de mémoires ou de pièces autre que les désistements, les actes de reprise d’instance, les actes qui révèlent que le pourvoi est devenu sans objet et les notes visées à l’article 1107 du Code judiciaire, après les deux mois qui suivent la déclaration de pourvoi.
Partant, il n’y a pas lieu d’avoir égard à la note des demandeurs, étrangère à l’enseignement de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 4 juillet 2024, reçue au greffe de la Cour le 23 août 2024.
A. Sur le pourvoi du demandeur :
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 41, § 3, et 43, § 3, de la loi du 15 juillet 2013 relative au transport de marchandises par route et portant exécution du règlement (CE) n°1071/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes sur les conditions à respecter pour exercer la profession de transporteur par route et abrogeant la Directive 96/26/CE du Conseil et portant exécution du Règlement (CE) n° 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché du transport international de marchandises par route, et 21, alinéa 1er, 5°, et 35, alinéa 1er, 4°, de l’arrêté royal du 22 mai 2014 relatif au transport de marchandises par route.
Le demandeur reproche au jugement attaqué de le condamner à une déchéance du droit de conduire tout véhicule à moteur pendant trois mois pour avoir utilisé une licence de transport pour un véhicule dont la masse totale en charge est supérieure aux normes autorisées pour ce véhicule (prévention A) et pour avoir, étant chargeur d’un transport de marchandises soumis à la règlementation communautaire, posé des actes ayant entraîné le dépassement de la masse maximale autorisée du véhicule (prévention B).
Les faits de la prévention A sont visés aux articles 21, alinéa 1er, 5°, et 35, 4°, de l’arrêté royal du 22 mai 2014 relatif au transport de marchandises par route. Celui-ci a été pris en exécution de la loi du 15 juillet 2013 précitée. Les faits de la prévention B sont visés à l’article 43, § 3, de cette loi, lequel renvoie aux peines prévues à l’article 41, § 3. Ni cette dernière disposition, ni aucune autre ne permettent au juge d’infliger une déchéance du droit de conduire pour les infractions déclarées établies.
Le moyen est fondé.
Sur le deuxième moyen :
Quant à la première branche :
Le moyen invoque la violation de l’arrêté royal du 12 avril 2016 relatif aux instruments de pesage à fonctionnement non automatique.
Devant le tribunal correctionnel, les demandeurs ont fait valoir que la balance utilisée par les verbalisateurs pour constater la surcharge du véhicule ne répondait pas aux conditions visées à l’arrêté royal du 12 octobre 2010 relatif à l’approbation, à la vérification et à l’installation des instruments de mesure utilisés pour surveiller l’application de la loi relative à la police de la circulation routière.
Le moyen reproche au jugement de considérer que cet instrument n’était pas soumis aux critères énoncés dans l’arrêté royal susdit mais devait répondre à ceux prévus à l’arrêté royal du 12 avril 2016 relatif aux instruments de pesage à fonctionnement non automatique. Selon les demandeurs, ce dernier arrêté royal transpose la directive 2014/31/UE du Parlement et du Conseil du 26 février 2014 concernant l’harmonisation des législations des Etats membres relative à la mise à disposition sur le marché des instruments de pesage à fonctionnement non automatique, qui a seulement vocation à s’appliquer en matière commerciale.
L’article 1er, § 1er, de la directive dispose qu’elle s’applique à tous les instruments de pesage à fonctionnement non automatique.
L’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne dit pour droit que cette disposition doit être interprétée en ce sens qu’elle s’applique aux instruments de pesage à fonctionnement non automatique lorsque ces instruments sont utilisés par les autorités judiciaires ou policières aux fins de la détermination de la masse des véhicules pour l’application d’une législation ou d’une règlementation nationale sanctionnée pénalement.
Dans la mesure où il repose sur la prémisse juridique contraire, le moyen manque en droit.
Le demandeur soutient également que l’arrêté royal du 12 octobre 2010 doit être appliqué dès lors qu’il prévoit des normes d’agréation plus spécifiques pour l’organisme de contrôle que celles exigées par l’arrêté royal du 12 avril 2016.
Conformément à l’article 12, § 1er, de la loi du 16 juin 1970 sur les unités, étalons et instruments de mesure et fixant des modalités d’application du chapitre II de cette loi, relatif aux instruments de mesure, les mesurages dans le circuit économique, qui ont pour but de déterminer la quantité de biens ou l’ampleur de services, doivent être effectués à l’aide d’instruments de mesure vérifiés.
En vertu de l’article 12, § 4, de ladite loi, remplacé par l’article VIII.43, § 4, du Code de droit économique, le Roi peut imposer l’emploi d’instruments de mesure vérifiés pour les mesurages en dehors du circuit économique.
L’arrêté royal du 12 octobre 2010 a été pris sous le visa de deux bases légales, à savoir la loi relative à la police de la circulation routière et la loi du 16 juin 1970 précitée.
Conformément à l’article 1er de ce dernier arrêté royal, celui-ci s’applique, en règle, aux instruments qui sont utilisés pour surveiller l’application de la loi relative à la police de la circulation routière et des arrêtés pris en exécution de celle-ci.
Ainsi qu’il est indiqué en réponse au premier moyen, les faits reprochés au demandeur sont visés aux articles 21, alinéa 1er, 5°, et 35, 4°, de l’arrêté royal du 22 mai 2014 relatif au transport de marchandises par route, pris en exécution de la loi du 15 juillet 2013, ainsi qu’à l’article 43, § 3, de cette loi.
Partant, l’instrument de pesage ayant déterminé la masse du véhicule chargé par le demandeur n’a pas été utilisé pour surveiller l’application de la loi relative à la police de la circulation routière et des arrêtés pris en exécution de celle-ci, étrangers à la loi du 15 juillet 2013 précitée.
Revenant à soutenir le contraire, le moyen manque également, à cet égard, en droit.
Quant à la seconde branche :
Le moyen est pris de la violation de l’article 14 de l’arrêté royal du 20 décembre 1972 portant mise en vigueur partielle de la loi du 16 juin 1970 précitée.
Les demandeurs relèvent que la disposition invoquée prévoit une vérification périodique des instruments de pesage tous les quatre ans, sous réserve de l’application d’arrêtés spécifiques. Ils soutiennent que l’arrêté royal du 12 octobre 2010, qui impose une vérification périodique de deux ans, doit être considéré comme un tel arrêté spécifique. Selon le moyen, c’est donc à tort que le tribunal correctionnel a pris en considération le résultat émis par la balance soumise à une vérification périodique de quatre ans.
Entièrement déduit du grief vainement invoqué à la première branche, le moyen est irrecevable.
Sur le troisième moyen :
Pris de la violation de l’article 149 de la Constitution, le moyen soutient que le jugement attaqué ne répond pas aux conclusions dans lesquelles les demandeurs faisaient valoir l’absence de mention, par les verbalisateurs, de l’apposition de la vignette prévue à l’article 34bis, 16°, de l’arrêté royal du 20 décembre 1972 portant mise en vigueur partielle de la loi du 16 juin 1970 sur les unités, étalons et instruments de mesure et fixant des modalités d’application du chapitre II de cette loi, relatif aux instruments de mesure, ainsi que l’absence d’indication, sur les tickets de pesée, de la balance utilisée et de la personne ayant effectué le pesage.
Le jugement attaqué énonce que les verbalisateurs déclarent dans le procès-verbal initial que le mécanisme de pesée a été effectué avec une balance calibrée et que, dans le procès-verbal subséquent, ils détaillent le déroulement du pesage, la marque et le numéro de série de la balance, la date du dernier calibrage, ainsi que le rapport de l’inspection métrologique qui est joint au dossier. Il ajoute qu’il ressort des pièces du dossier que les ponts bascules utilisés ont subi une vérification périodique le 16 mai 2017 par l’organisme d’inspection agréé et que celle-ci est valable durant quatre ans.
Sur la base de ces éléments, les juges d’appel ont considéré que les infractions sont établies sans que ne subsiste le moindre doute, dès lors que l’appareil de pesage est déterminé de manière non équivoque, que celui-ci est calibré, que les données exactes relatives à l’appareil sont communiquées, et que le demandeur et le responsable de la demanderesse ont reconnu la surcharge mentionnée dans le procès-verbal.
Ainsi, par une appréciation en fait des éléments du dossier, les juges d’appel ont répondu aux conclusions du demandeur.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est, sauf l’illégalité à censurer ci-après, conforme à la loi.
L’illégalité relevée par le premier moyen n’affectant ni la déclaration de culpabilité ni la peine d’amende prononcée du chef des deux préventions déclarées établies, la cassation sera limitée à la décision prononçant la déchéance du droit de conduire.
Il n’y a pas lieu d’examiner le quatrième moyen qui ne saurait entrainer une cassation plus étendue.
B. Sur le pourvoi de la demanderesse :
En application de l’article 427 du Code d’instruction criminelle, le pourvoi formé par la partie civilement responsable contre la décision la déclarant tenue au paiement de l’amende et des frais de l’action publique auxquels le prévenu a été condamné, doit être signifié au ministère public près la juridiction d’appel ayant rendu la décision attaquée.
Il n’apparaît pas des pièces de la procédure que le pourvoi ait été signifié au procureur du Roi près le tribunal correctionnel d’Eupen.
Le pourvoi est irrecevable.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse le jugement attaqué en tant que, statuant sur l’action publique exercée à charge du demandeur, il le condamne à une déchéance du droit de conduire ;
Rejette les pourvois pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé ;
Laisse un dixième des frais du pourvoi du demandeur à charge de l’Etat et condamne le demandeur aux neuf dixièmes restants ;
Condamne la demanderesse aux frais de son pourvoi ;
Dit n’y avoir lieu à renvoi.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de deux cent vingt-cinq euros nonante-huit centimes dont I) sur le pourvoi d’O. C. : cent soixante-sept euros nonante-quatre centimes dus et II) sur le pourvoi de la société à responsabilité limitée Schröder René : cinquante-huit euros cinq centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du quatre décembre deux mille vingt-quatre par Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.22.0563.F
Date de la décision : 04/12/2024
Type d'affaire : Droit commercial

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2025
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2024-12-04;p.22.0563.f ?

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