N° F.21.0132.F
THOMAS ET PIRON HOME, société anonyme, dont le siège est établi à Paliseul (Our), rue de la Besace, 14, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0415.776.939,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Daniel Garabedian, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Bonté, 5, où il est fait élection de domicile,
contre
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le
25 septembre 2020 par la cour d’appel de Liège, inscrit sous le numéro 2018/RG/792 du rôle général.
Par ordonnance du 10 octobre 2024, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le 23 octobre 2024, l’avocat général Hugo Mormont a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Marielle Moris a fait rapport et l’avocat général Hugo Mormont a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Aux termes de l’article 31, alinéa 2, 1°, du Code des impôts sur les revenus 1992, les rémunérations des travailleurs comprennent notamment les traitements, salaires, commissions, gratifications, primes, indemnités et toutes autres rétributions analogues, y compris les pourboires et autres allocations même accidentelles, obtenues en raison ou à l’occasion de l’exercice de l’activité professionnelle à un titre quelconque, sauf en remboursement de dépenses propres à l’employeur.
La loi présume que les sommes payées par l’employeur au titre de remboursement de dépenses qui lui sont propres ne constituent pas des revenus professionnels imposables dans le chef du travailleur qui les perçoit, sans que celui-ci ait, à l’égard du fisc, à justifier de leur emploi.
Les dépenses couvertes par ces sommes constituent des dépenses professionnelles dans le chef de l’employeur qui les considère comme ayant été faites pour son compte et à son profit et à qui il appartient de justifier de leur réalité, de leur montant et de leur caractère professionnel.
L’administration peut prouver que tout ou partie des sommes allouées par l’employeur en remboursement de dépenses qui lui sont propres constitue une rémunération déguisée du travailleur et, lorsque cette preuve est fournie, seule la partie de ces sommes qui constitue une rémunération doit être ajoutée aux autres rémunérations du travailleur.
Il s’ensuit que la présomption légale que les sommes versées à titre de remboursement de dépenses propres à l’employeur ne sont pas imposables en tant que rémunération n’est pas renversée du seul fait que l’employeur ne justifie pas du caractère professionnel des dépenses couvertes par ces sommes.
Celles-ci ne peuvent dès lors être tenues pour des rémunérations que l’employeur pourrait déduire à ce titre.
Le moyen, qui, en cette branche, repose sur le soutènement contraire, manque en droit.
Quant à la deuxième branche :
Ainsi qu’il a été dit en réponse à la première branche du moyen, l’absence de preuve du caractère professionnel dans le chef de l’employeur des dépenses couvertes par les sommes versées aux travailleurs en remboursement de dépenses propres à l’employeur suffit à justifier le rejet de la déduction de ces sommes.
Dirigé contre la considération surabondante de l’arrêt que les sommes litigieuses, n’ayant pas été justifiées à titre de rémunérations dans les fiches individuelles et le relevé récapitulatif, ne sont pas, en vertu de l’article 57 du Code des impôts sur les revenus 1992, déductibles à ce titre, le moyen, en cette branche, ne saurait entraîner la cassation, et, dénué d’intérêt, est, partant, irrecevable.
Et le moyen, en cette branche, étant irrecevable pour un motif propre à la procédure en cassation, la question préjudicielle proposée par la demanderesse ne doit pas être posée à la Cour constitutionnelle.
Quant à la troisième branche :
L’arrêt ne considère pas que la réalité des prestations des travailleurs de la demanderesse n’est pas démontrée.
Le moyen, qui, en cette branche, repose sur une interprétation inexacte de l’arrêt, manque en fait.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de quatre cent soixante-deux euros six centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Mireille Delange, président, le président de section Michel Lemal, les conseillers Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt-quatre par le président de section Mireille Delange, en présence de l’avocat général Hugo Mormont, avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.