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10/10/2024 | BELGIQUE | N°C.23.0420.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 10 octobre 2024, C.23.0420.F


N° C.23.0420.F
ALLIANCE FRANÇAISE DE BRUXELLES – EUROPE, association sans but lucratif,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
COFINIMMO, société anonyme,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile.
I. La proc

édure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 22 mai 2023 ...

N° C.23.0420.F
ALLIANCE FRANÇAISE DE BRUXELLES – EUROPE, association sans but lucratif,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
COFINIMMO, société anonyme,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 22 mai 2023 par le tribunal de première instance francophone de Bruxelles, statuant en degré d’appel.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen, en cette branche, par la défenderesse et déduite de ce qu’il obligerait la Cour à une appréciation de fait :
L’examen de la fin de non-recevoir est indissociable de celui du moyen.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Sur le fondement du moyen :
En conclusions, la demanderesse soutenait, en s’appuyant sur l’article 16 du contrat de bail liant les parties, que les lieux loués étaient aménagés pour partie en espaces de bureaux et pour partie en salles de classe, dans lesquelles elle organisait un enseignement, ces dernières étant par conséquent accessibles au public, et qu’il résulte de l’arrêté ministériel du 23 mars 2020 portant des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus covid-19 que l’usage de ces salles selon leur destination a été interdit pendant certaines périodes de la location.
Le jugement attaqué relève que « l’article 16 du contrat de bail précise que le contrat est conclu sous la condition suspensive de l’obtention par [la demanderesse] ‘de toutes les autorisations nécessaires (notamment [...] urbanistiques) afin que les [lieux loués] puissent être occupés conformément à leur destination précisée ci-après et que [la demanderesse] puisse y exercer ses activités telles qu’elles résultent de son objet social ; que les [lieux loués] doivent en effet pouvoir être affectés aux activités de [la demanderesse] et notamment à des fonctions d’enseignement ; qu’à cet égard, [la demanderesse] confirme que les locaux objets de la présente convention seront affectés, en cas de prise d’effet du bail, à de telles fonctions d’enseignement et seront donc partiellement accessibles au public ; qu’une des conditions essentielles au consentement de [la demanderesse] sur la conclusion du bail consiste en l’exercice de telles activités dans les locaux moyennant la délivrance et dans le respect de toutes les autorisations nécessaires à cette fin’ ».
En considérant que « ce sont des espaces de bureaux que [la demanderesse] louait », les opposant ainsi à des salles de classe accessibles au public, pour en déduire que « la location de ces espaces n’était pas visée par les mesures gouvernementales pendant la crise [de la covid 19] », le jugement attaqué donne de cet article 16 une interprétation inconciliable avec ses termes, partant, viole la foi due à l’acte qui le contient.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Quant à la seconde branche :
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen, en cette branche, par la défenderesse et déduite du défaut d’intérêt :
Contrairement à ce que soutient la défenderesse, la demanderesse critique, par la première branche du moyen, le jugement attaqué en ce qu’il considère que les mesures gouvernementales prises pendant la crise précitée ne l’ont pas empêchée d’exploiter les lieux loués selon leur destination contractuelle.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Sur le fondement du moyen, en cette branche :
Aux termes de l’article 1719 de l’ancien Code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière : 1° de délivrer au preneur la chose louée, 2° d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée et 3° d’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.
Il suit de cette disposition que, lorsque le bail porte sur un bien spécialement destiné à une exploitation déterminée, le bailleur doit procurer au preneur une jouissance conforme à cette destination.
Le jugement attaqué considère que « les mesures gouvernementales prises [pour lutter contre la propagation de la covid 19] imposent à ceux qui exploitent les lieux aux fins précisées dans celles-ci d’en interdire l’accès au public » et que « c’est l’exploitant des lieux qui a été, le cas échéant, dans l’impossibilité totale ou partielle de pouvoir en jouir » mais que ces mesures n’ont pas empêché la défenderesse, bailleresse, « de fournir la jouissance paisible des lieux loués à [la demanderesse] conformément à [leur] destination ».
En donnant ainsi à connaître que, dans l’hypothèse où l’exploitation des lieux loués conformément à la destination convenue requerrait l’accès du public à ces lieux, la circonstance que des mesures réglementaires aient interdit cet accès n’a pas empêché la défenderesse de satisfaire à ses obligations, de sorte qu’il écarte l’application de la théorie des risques, le jugement attaqué viole l’article 1719 précité.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse le jugement attaqué, sauf en tant qu’il reçoit l’appel principal ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant le tribunal de première instance du Hainaut, siégeant en degré d’appel.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Marie-Claire Ernotte et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du dix octobre deux mille vingt-quatre par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.23.0420.F
Date de la décision : 10/10/2024
Type d'affaire : Droit civil

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2024
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2024-10-10;c.23.0420.f ?

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