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22/05/2024 | BELGIQUE | N°P.24.0743.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 22 mai 2024, P.24.0743.F


N° P.24.0743.F
K. S.,
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Sibylle Gioe, avocat au barreau de Liège-Huy,
contre
ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d’Etat à l'Asile et la migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, rue Lambermont, 2,
défendeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Cathy Piront, avocat au barreau de Liège-Huy, et Stamatina Arkoulis, avocat au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 2 mai 2024 par la

cour d’appel de Liège, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un m...

N° P.24.0743.F
K. S.,
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Sibylle Gioe, avocat au barreau de Liège-Huy,
contre
ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d’Etat à l'Asile et la migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, rue Lambermont, 2,
défendeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Cathy Piront, avocat au barreau de Liège-Huy, et Stamatina Arkoulis, avocat au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 2 mai 2024 par la cour d’appel de Liège, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Le moyen est pris de la violation des articles 3, 5.1.f et 5.4 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et 27, 71 et 72 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers. Le demandeur reproche aux juges d’appel de ne pas avoir répondu à ses conclusions soutenant avoir été soumis à un traitement inhumain ou dégradant lors de la tentative de l’éloigner. Il en déduisait que la décision subséquente de le maintenir, prise en application de l’article 27 de la loi précitée, était illégale, dès lors que ce n’est pas son comportement qui avait empêché le retour, mais la violation, dont il dit avoir été la victime, par les policiers l’accompagnant, de l’article 3 susvisé.
D’une part, la juridiction d’instruction saisie en application de l’article 71 de la loi du 15 décembre 1980 n’est pas habilitée à décider si le requérant a été la victime de faits que la loi qualifie infraction, fût-ce à l’occasion d’une tentative de l’éloigner.
D’autre part, le contrôle de légalité déféré à la juridiction d’instruction en application de cette disposition porte seulement, lorsqu’il est allégué avec vraisemblance, sur le risque de voir l’étranger soumis à un traitement prohibé par l’article 3 de la Convention, en cas d’éloignement.
À cet égard, le moyen manque en droit.
Et les juges d’appel n’étaient dès lors pas tenus de répondre à un grief indifférent à la solution du litige.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
En vertu de l’article 27, § 3, de la loi du 15 décembre 1980, l’étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement et qui n'a pas obtempéré dans le délai imparti peut, en vue de son éloignement et à moins que d'autres mesures suffisantes mais moins coercitives puissent être appliquées efficacement, être détenu à cette fin, en particulier lorsque l’intéressé évite ou empêche la préparation du retour ou la procédure d'éloignement et ce, pendant le temps strictement nécessaire pour l'exécution de la mesure d'éloignement.
Aux conclusions du demandeur, qui faisaient valoir que c’est parce qu’il avait été soumis à un traitement contraire à l’article 3 de la Convention que son éloignement n’avait pu être mené à bien et que cette circonstance, imputable aux policiers l’accompagnant, excluait donc qu’il puisse être considéré comme ayant lui-même empêché la procédure visant à l’éloigner, l’arrêt, par renvoi à l’avis écrit du ministère public, oppose une appréciation contraire.
Ainsi, selon les juges d’appel, le rapport consécutif à la tentative d’éloignement du demandeur décrit les évènements ayant conduit à la décision d’interrompre cette procédure. L’arrêt relève d’abord le comportement, qualifié de violent, du demandeur tout au long du trajet vers Istanbul, à tel point qu’un renfort fut sollicité auprès de la police turque. Il ajoute que si le refus des policiers turcs d’apporter leur concours est l’un des motifs ayant déterminé les agents belges à annuler leur mission, c’est la violence du seul demandeur qui a justifié cette demande d’appui et la renonciation à la poursuite de la mission, faute d’en avoir bénéficié. L’arrêt en conclut que l’interruption de l’éloignement est la conséquence du comportement du demandeur, les juges d’appel disant en trouver également la preuve dans le fait qu’une fois avisé de son retour vers Bruxelles, l’intéressé s’est immédiatement calmé, plus aucun incident n’étant ensuite à signaler, tandis que les blessures qu’il présenta, dont une au moins serait « auto-infligée », ne permettent pas, selon l’arrêt, de décider autrement.
Ainsi, l’arrêt motive régulièrement et justifie légalement la décision que le maintien du demandeur, soit la mesure déférée au contrôle des juges d’appel, a été ordonné conformément à la loi, sans que ces derniers soient tenus, en outre, de répondre à des arguments qui ne constituaient pas des moyens distincts.
À cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
Le demandeur soutient enfin que les juges d’appel se sont soustraits à leur obligation de statuer sur sa requête en inscription de faux, contenue dans ses conclusions et dirigée contre le rapport de police relatant la manière dont la tentative d’éloignement s’était déroulée.
Les tribunaux ont un pouvoir discrétionnaire pour admettre ou rejeter d'emblée l'inscription en faux.
Après avoir énoncé les motifs rappelés ci-avant, relatifs aux circonstances qui ont mené les agents à renoncer à poursuivre l’éloignement du demandeur, les juges d’appel, par motifs propres, ont considéré « qu’il ne résulte pas des pièces auxquelles la cour a pu avoir accès que les policiers seraient à l’origine, par leur comportement, de l’échec du rapatriement du [demandeur] et que les affirmations contraires de celui-ci, selon lesquelles les constatations policières ne seraient pas conformes à la réalité, n’emportent pas la conviction de la cour ».
Contenant ainsi les motifs pour lesquels il a été décidé de ne pas instruire sur le faux, l'arrêt rejette régulièrement la défense invoquée.
À cet égard, le moyen manque en fait.
Et les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de septante-quatre euros trente et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Eric de Formanoir, premier président, Jean de Codt, président de section, Françoise Roggen, Frédéric Lugentz, conseillers, et Sidney Berneman, conseiller honoraire, magistrat suppléant, et prononcé en audience publique du vingt-deux mai deux mille vingt-quatre par Eric de Formanoir, premier président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.24.0743.F
Date de la décision : 22/05/2024
Type d'affaire : Droit administratif

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2024-05-22;p.24.0743.f ?

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