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13/03/2024 | BELGIQUE | N°P.22.0958.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 13 mars 2024, P.22.0958.F


N° P.22.0958.F
D. C.
partie civile,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Frank Discepoli, avocat au barreau de Mons,
contre
P. J-J.
prévenu,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 24 juin 2022 par la cour d’appel de Mons, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur le princ...

N° P.22.0958.F
D. C.
partie civile,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Frank Discepoli, avocat au barreau de Mons,
contre
P. J-J.
prévenu,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 24 juin 2022 par la cour d’appel de Mons, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur le principe de la responsabilité :
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation de l’article 411 du Code pénal.
Quant à la première branche :
L’arrêt constate que le défendeur a eu le temps d’opter pour une autre solution que l’usage d’un fusil de chasse : il aurait pu, d’après les juges du fond, rappeler immédiatement son épouse à l’intérieur de la maison, plutôt que d’y aller, seul, chercher son fusil.
Le moyen en déduit que ce laps de temps, dont l’arrêt caractérise l’existence, aurait dû conduire la cour d’appel à exclure la provocation, faute d’immédiateté entre la violence provocatrice et la réaction qu’elle a entraînée.
Mais l’immédiateté requise par l’article 411 du Code pénal comme condition de la provocation, n’est pas synonyme de simultanéité.
L’état de provocation peut se poursuivre au-delà de la violence qui le crée, et persister aussi longtemps que subsiste, dans le chef d’un homme raisonnable, la colère que cette violence a causée.
L’arrêt relève que l’épouse du défendeur, rendue fragile par l’âge et la maladie, a fait l’objet, sans être touchée, d’un jet de pierres imposantes de la part du demandeur avec lequel les relations de voisinage étaient tendues. Selon les juges d’appel, le prévenu, voyant cela, a pris quarante secondes pour rentrer chez lui et en ressortir avec une arme, dont il a fait usage immédiatement en lâchant dans les jambes du demandeur une décharge de chevrotines.
De la circonstance que, d’après l’arrêt, le tireur aurait pu mettre ces quarante secondes à profit pour choisir de rappeler sa femme à la maison, il ne résulte pas qu’il ait dû nécessairement, à la faveur de ce délai, se ressaisir et récupérer l’intégralité de ses capacités volitives altérées par la provocation.
Les juges d’appel n’ont, dès lors, pas méconnu la condition d’immédiateté requise par la disposition légale invoquée.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la seconde branche :
Le demandeur reproche à l’arrêt de subordonner l’admission de la cause d’excuse à l’absence de disproportion manifeste entre l’infraction provoquée et la violence qui l’a causée.
En énonçant, par ordre de gravité décroissante, que l’homicide, les blessures et les coups sont « excusables », et non « excusés », l’article 411 du Code pénal établit un rapport de proportionnalité entre la gravité du crime ou du délit provoqué et celle de la violence qui en est à l’origine.
L’arrêt constate que l’acte culpeux, en l’espèce un tir d’arme à feu dans les jambes de l’agent provocant, n’est pas totalement disproportionné par rapport au comportement menaçant de cet agent et à l’impression qu’il a pu faire sur le tireur.
Cette appréciation revient à considérer que l’agression initiale est suffisamment grave pour, sinon justifier, du moins excuser la réaction immédiate qui s’en est suivie.
Sur le fondement de la comparaison ainsi effectuée entre le comportement de chacune des parties, les juges d’appel ont pu légalement admettre l’excuse tirée de la provocation.
Le moyen ne peut être accueilli.
B. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l’étendue du dommage :
L’arrêt alloue au demandeur une indemnité provisionnelle de quinze mille euros, à valoir sur la moitié de son dommage compte tenu du partage de responsabilité lié à l’admission de l’excuse, et il renvoie les suites de la cause au premier juge.
Pareille décision n’est pas définitive au sens de l’article 420, alinéa 1er, du Code d’instruction criminelle, et est étrangère aux cas visés par le second alinéa de cet article.
Prématuré, le pourvoi est irrecevable.
Il n’y a dès lors pas lieu d’avoir égard au second moyen, dirigé contre une décision non sujette au pourvoi immédiat.

PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de cent treize euros septante et un centimes dont septante-huit euros septante et un centimes dus et trente-cinq euros payés par ce demandeur.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du treize mars deux mille vingt-quatre par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.22.0958.F
Date de la décision : 13/03/2024
Type d'affaire : Droit pénal

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2024-03-13;p.22.0958.f ?

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