N° C.22.0369.F
SOCIÉTÉ WALLONNE DES EAUX, société coopérative, dont le siège est établi à Verviers, rue de la Concorde, 41, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0230.132.005,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
IMMOBILIÈRE SOCIALE ENTRE SAMBRE ET HAINE, société coopérative, dont le siège est établi à Binche, rue de Namur, 70, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0401.179.132,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 27 mai 2021 par le tribunal de première instance du Hainaut, statuant en degré d’appel.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Après avoir énoncé que « [la demanderesse] est intervenue le 25 juillet 2013 en l’absence de [l’usager], locataire [d’un immeuble appartenant à la défenderesse], suite à une fuite d’eau, le barillet du robinet situé dans le garage de l’habitation s’avérant défaillant », le jugement attaqué considère que, « si l’on peut raisonnablement supposer que l’importance de la facture litigieuse est la conséquence d’une surconsommation constatée par la fuite pour laquelle la [demanderesse] est intervenue en juillet 2013, les éléments soumis à l’appréciation du tribunal [d’appel] ne permettent pas de conclure avec la certitude requise que cette surconsommation serait imputable à l’état des installations privées dont l’abonné avait la charge, dès lors qu’aucun constat contradictoire opposable à [la défenderesse] n’a été établi [et] qu’à supposer que la surconsommation soit l’effet d’une défectuosité d’un robinet, rien ne démontre que cette défectuosité serait la conséquence d’un manquement de [la défenderesse] à ses obligations de propriétaire-bailleur ».
Par ces motifs, le jugement attaqué donne à connaître que, si un robinet de l’immeuble présentait bien un défaut le 25 juillet 2013, la circonstance que la surconsommation dont la demanderesse recherche le paiement soit la conséquence de cette défectuosité constitue une hypothèse mais non une certitude.
Le moyen, qui, en cette branche, repose sur l’allégation contraire, manque en fait.
Quant à la troisième branche :
Quant au premier rameau :
L’article D.é du décret wallon du 27 mai 2004 relatif au Code de l’environnement contenant le Code de l’eau, dans sa version applicable, dispose que, lorsque l’usager n’est pas titulaire d’un droit réel sur l’immeuble raccordé, l’abonné ne peut être solidairement et indivisiblement tenu envers le débiteur [lire : créancier] du paiement de toutes sommes impayées par l’usager après sa mise en demeure, pour autant qu’il apporte la preuve qu’il a avisé le distributeur, au plus tard dans un délai de trente jours de calendrier suivant le changement d’occupation du bien, de l’identité des usagers entrants et sortants, ainsi que de l’index du compteur, que l’immeuble ait été préalablement équipé par le distributeur d’un compteur par logement et qu’une forte consommation inhabituelle ne soit pas consécutive à l’état des installations privées.
L’article 44 du règlement général de distribution d’eau en Région wallonne à destination des abonnés et des usagers, dans sa version applicable, précise que, en cas de surconsommation, l’abonné restera solidairement et indivisiblement tenu envers le débiteur [lire : créancier] du paiement de toutes sommes impayées par l’usager si celui-ci démontre que la surconsommation est due à l’état des installations privées dont l’abonné avait la charge.
Il suit de ces dispositions et de leur genèse que, sauf les exceptions prévues, l’abonné n’est pas tenu envers le créancier distributeur des dettes de l’usager et qu’il appartient dès lors à ce créancier qui entend se prévaloir d’une obligation solidaire de l’abonné d’établir que la surconsommation est due à l’état des installations privées.
Le moyen, qui, en ce rameau, repose sur le soutènement contraire, manque en droit.
Quant au second rameau de la troisième branche et aux deuxième et quatrième branches :
La considération, vainement critiquée, que la demanderesse ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que la surconsommation est due à l’état des installations privées de la défenderesse, suffit à fonder la décision de rejeter la demande de la première contre la seconde.
Dirigé contre des considérations surabondantes, le moyen, en ce rameau et ces branches, qui ne saurait entraîner la cassation, est dénué d’intérêt, partant, irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de six cent deux euros trente-huit centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt-quatre euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Marie-Claire Ernotte et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du premier décembre deux mille vingt-trois par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.