N° F.22.0069.F
VILLE DE CHARLEROI, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Charleroi, en l’hôtel de ville, place Charles II, 14-15,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
FORTIS LEASE - FORTIS LEASE BELGIUM, société anonyme, dont le siège est établi à Berchem-Sainte-Agathe, chaussée de Gand, 1440, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0403.269.481,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 15 septembre 2021 par la cour d’appel de Mons.
Le 25 octobre 2023, l’avocat général Bénédicte Inghels a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Simon Claisse a fait rapport et l’avocat général Bénédicte Inghels a été entendu en ses conclusions.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le second moyen :
Ni par ses motifs propres ni par ceux du jugement entrepris qu'il adopte, l'arrêt ne répond aux conclusions de la demanderesse faisant valoir que la différence de traitement prévue par le règlement entre les emplacements de parking mis à la disposition du public par une entreprise, soumis à la taxe, et ceux qui sont réservés et accessibles uniquement aux membres de son personnel, exonérés de la taxe, est justifiée par la volonté de désengorger le parking en voirie, dès lors que les travailleurs des entreprises laissent généralement leur voiture garée toute la journée, à l’inverse de la clientèle qui va et vient.
Dans cette mesure, le moyen est fondé.
Sur le premier moyen :
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par la défenderesse et déduite du défaut d’intérêt :
L'accueil du second moyen ôte aux considérations critiquées par le moyen tout caractère surabondant.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Sur le fondement du moyen :
Quant à la première branche :
En vertu de l’article L1133-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, les règlements du conseil communal sont publiés par le bourgmestre par la voie d’une affiche indiquant l’objet du règlement, la date de la décision par laquelle il a été adopté et, le cas échéant, la décision de l’autorité de tutelle ainsi que le ou les lieux où le texte du règlement peut être consulté par le public.
L’article L1133-2 du même code prévoit, en son alinéa 1er, que les règlements visés à l’article L1133-1 deviennent obligatoires le cinquième jour qui suit le jour de leur publication, sauf s’ils en disposent autrement, et, en son alinéa 2, que le fait et la date de la publication de ces règlements sont constatés par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet, dans la forme qui sera déterminée par arrêté du gouvernement.
L’article 1er de l’arrêté royal du 14 octobre 1991 relatif aux annotations dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales, applicable en l’espèce à défaut d’arrêté du gouvernement de la Région wallonne, dispose que le fait et la date des règlements visés à l’article L1133-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation sont constatés par une annotation dans un registre spécial tenu à cet effet par le secrétaire communal.
Conformément à l’article 2 de cet arrêté royal, l’annotation dans le registre est faite le premier jour de la publication du règlement et les annotations sont numérotées d’après l’ordre des publications successives.
L’annotation est, suivant l’article 3 du même arrêté royal, datée et signée par le bourgmestre et le secrétaire communal.
Il suit des articles L1133-2, alinéa 2, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation et des articles 1er à 3 de l’arrêté royal du 14 octobre 1991 que
le seul mode de preuve admissible de la publication d’une ordonnance ou
d’un règlement communal est l’annotation dans le registre spécial tenu par
le secrétaire communal.
L’arrêt relève que « la [demanderesse] produit, d'une part, un certificat de publication daté du 14 avril 2015 par lequel l’échevine déléguée, pour le bourgmestre empêché de [la demanderesse], certifie que le règlement relatif à la taxe communale sur les emplacements de parking mis gratuitement à disposition établi pour les exercices 2015 à 2019 a été publié conformément à l'article L1133-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation du 7 au 13 avril 2015 inclus et, d'autre part, un extrait du registre des publications daté du 14 avril 2015 selon lequel l'extrait du procès-verbal de la séance du conseil communal du 23 février 2015 relatif à la taxe communale sur les emplacements de parking mis gratuitement à disposition établi pour les exercices 2015 à 2019 a été publié conformément à l'article L1133-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation le 14 avril 2015 ».
L’arrêt, qui, pour décider que le règlement-taxe n’est pas opposable à la défenderesse, a égard à d’autres pièces que l’annotation dans le registre spécial, viole les dispositions légales précitées.
Quant à la deuxième branche :
Ni l’article L1133-1 ni l’article L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation n’imposent la publication intégrale des règlements communaux.
L’arrêt, qui, constatant que « l’extrait du registre des publications certifie que ‘l’extrait du procès-verbal de la séance du conseil communal du 23 février 2015’ a été publié », considère « que les articles L1133-1 et L1133-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation exige[nt] la publication du règlement-taxe lui-même », ne justifie pas légalement sa décision que celui-ci n’est pas opposable à la défenderesse.
Quant à la troisième branche :
Il suit de l’article L1133-2, alinéa 2, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation et des articles 1er à 3 de l’arrêté royal du 14 octobre 1991 qu’il n’est pas requis que le registre reprenant les annotations numérotées dans l’ordre des publications soit préalablement relié.
L’arrêt, qui considère que le registre des publications de la demanderesse « n’est pas conforme au prescrit légal », au motif qu’il « se compose de feuilles volantes tenues par ordre chronologique et reliées postérieurement, annuellement », viole les dispositions légales précitées.
Le moyen, en chacune de ses branches, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d’appel de Liège.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Michel Lemal, les conseillers Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Simon Claisse, et prononcé en audience publique du dix-sept novembre deux mille vingt-trois par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Hugo Mormont, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.