N° C.23.0159.F
1. S. S., et
2. W. B.,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
D. D.,
défenderesse en cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu
le 15 décembre 2022 par le tribunal de première instance francophone de Bruxelles, statuant en degré d’appel.
Par ordonnance du 10 octobre 2023, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le 12 octobre 2023, l’avocat général Hugo Mormont a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Marie-Claire Ernotte a fait rapport et l’avocat général Hugo Mormont a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, les demandeurs présentent un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Aux termes de l’article 1022, alinéa 4, du Code judiciaire, si la partie succombante bénéficie de l’aide juridique de deuxième ligne, l’indemnité de procédure est fixée au minimum établi par le Roi, sauf en cas de situation manifestement déraisonnable, et, sur ce point, le juge motive spécialement sa décision.
Cette disposition autorise le juge à fixer l’indemnité de procédure à un montant plus ou moins élevé que le minimum établi par le Roi.
Dans la mesure où il soutient qu’elle n’autorise pas une augmentation de l’indemnité de procédure au-delà du minimum, le moyen, en cette branche, manque en droit.
Pour le surplus, en vertu de l’article 1022, alinéa 2, de ce code, le Roi établit les montants de base, minimal et maximal de l’indemnité de procédure, en fonction notamment de la nature de l’affaire et de l’importance du litige.
L’arrêté royal du 26 octobre 2007 fixant le tarif des indemnités de procédure visées à l’article 1022 du Code judiciaire et fixant la date d’entrée en vigueur des articles 1er à 13 de la loi du 21 avril 2007 relative à la répétibilité des honoraires et des frais d’avocat détermine, à l’article 2, pour les actions portant sur des demandes évaluables en argent, les montants de base, minimal et maximal pour chacune des tranches fixées en fonction de la valeur des demandes, et, à l’article 3, les montants de base, minimal et maximal pour les actions portant sur des affaires non évaluables en argent.
Il s’ensuit que, lorsque la partie succombante bénéficie de l’aide juridique de deuxième ligne, l’indemnité de procédure est fixée au montant minimal tel qu’il est déterminé en fonction de la nature de l’affaire et de l’importance du litige et, dès lors, s’agissant d’une action portant sur une demande évaluable en argent, au montant minimal déterminé par l’arrêté royal en fonction de la valeur du litige.
Dans la mesure où il soutient que le montant minimal visé par l’article 1022, alinéa 4, ne dépend pas, s’agissant des actions portant sur des demandes évaluables en argent, de la valeur du litige mais est fixé au montant prévu pour les litiges dont la valeur n’excède pas 250 euros, correspondant au montant minimal prévu pour les actions portant sur des demandes non évaluables en argent, le moyen, en cette branche, manque en droit.
Le moyen, en cette branche, fait valoir que l’article 1022, alinéa 4, du Code judiciaire crée une discrimination entre les justiciables bénéficiant de l’aide juridique de deuxième ligne se trouvant dans une situation comparable dès lors que l’indemnité de procédure pouvant être mise à leur charge varierait tant selon la valeur de l’affaire que selon qu’il s’agit d’une affaire évaluable en argent ou non, alors que l’aide juridique dont ils bénéficient implique qu’ils puissent se prévaloir des mêmes avantages afin de préserver leur droit de se défendre en justice.
La discrimination ainsi alléguée ne gît toutefois pas dans l’article 1022, alinéa 4, qui n’établit lui-même aucune distinction, mais dans l’article 1022, alinéa 2, dont la violation n’est pas alléguée.
Il n’y a dès lors pas lieu de poser à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle proposée par les demandeurs.
Quant à la seconde branche :
Le jugement attaqué, qui réduit le montant de la condamnation principale prononcée par le premier juge à 11 232 euros et met à charge des demandeurs l’entièreté des dépens de la procédure de première instance et « 80 p.c. des dépens d’appel », considère qu’ « il n’y a aucune raison de réduire l’indemnité de procédure alors que, par leur fait, le procès a pris des proportions qu’il ne méritait guère » et condamne dès lors les demandeurs, par confirmation de la décision du premier juge, à 812,50 euros à titre d’indemnité de procédure de première instance, et à 80 p.c. de 875 euros pour la procédure d’appel.
En fixant l’indemnité de procédure au montant minimal prévu pour des affaires évaluables en argent en fonction de la valeur du litige et en décidant ensuite qu’il n’y a pas lieu de réduire encore ce montant, le jugement attaqué répond, en leur opposant sa propre appréciation, aux conclusions des demandeurs qui soutenaient que l’indemnité de procédure minimale à laquelle ils pouvaient prétendre en raison du bénéfice de l’assistance judiciaire devait être fixée, selon
le barème légal, à 90 euros.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne les demandeurs aux dépens.
Les dépens taxés, en débet, à la somme de quatre cent nonante euros cinquante-six centimes envers les parties demanderesses, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section
Mireille Delange, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du treize novembre deux mille vingt-trois par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Hugo Mormont, avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.