N° C.22.0497.F
VILLE DE BRUXELLES, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, en l’hôtel de ville, Grand-Place, 1, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0207.373.429,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Woluwe-Saint-Pierre, avenue des Lauriers, 1, où il est fait élection de domicile,
contre
1. Y. B.,
2. S.-K. B.,
défendeurs en cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 31 mai 2021 par le tribunal de police francophone de Bruxelles, statuant en dernier ressort.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
L’article 6 de l’arrêté royal n° 1 du 6 avril 2020 portant sur la lutte contre le non-respect des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus covid-19 par la mise en place de sanctions administratives communales, confirmé par l’article 2 de la loi du 20 décembre 2020 portant confirmation des arrêtés royaux pris en application de la loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus covid-19 (II), dispose, au paragraphe 1er, que le fonctionnaire sanctionnateur fait part au contrevenant, dans les quinze jours à compter de la réception de la constatation de l’infraction, par envoi ordinaire, des données relatives aux faits constatés et à l’infraction commise ainsi que du montant de l’amende administrative, que l’amende administrative est payée par le contrevenant dans les trente jours de la notification de celle-ci, sauf s’il fait connaître par envoi ordinaire, dans ce délai, ses moyens de défense au fonctionnaire sanctionnateur et que le contrevenant peut être entendu à sa demande dans ce délai ; au paragraphe 2, que, si le fonctionnaire sanctionnateur déclare les moyens de défense non fondés, il en informe
le contrevenant, de manière motivée, avec renvoi au paiement de l’amende administrative qui doit être payée dans un nouveau délai de trente jours à compter de cette notification, et, au paragraphe 3, que, si l’amende administrative n’est pas payée dans le premier délai de trente jours, excepté en cas de moyens de défense, un rappel est envoyé avec une invitation à payer dans un nouveau délai de trente jours à compter de la notification de ce rappel.
Aux termes de l’article 7 du même arrêté royal, la décision du fonctionnaire sanctionnateur d’imposer une amende administrative peut être exécutée de manière forcée si cette amende administrative n’est pas payée dans le délai visé à l’article 6, § 3, à moins que le contrevenant ait introduit un recours dans ce délai.
L’article 8 de cet arrêté royal prévoit, au paragraphe 1er, que la commune ou le contrevenant, en cas d’amende administrative, peut introduire un recours par requête écrite auprès du tribunal de police, selon la procédure civile, dans le mois de la notification de la décision et, au paragraphe 2, que le tribunal de police statue dans le cadre d’un débat contradictoire et public sur le recours introduit contre la sanction administrative, qu’il juge de la légalité et de la proportionnalité de l’amende imposée et qu’il peut soit confirmer soit réformer la décision prise par le fonctionnaire sanctionnateur.
Il suit de ces dispositions que ce fonctionnaire n’est pas tenu de notifier une nouvelle décision au contrevenant lorsque celui-ci, plutôt que de lui faire connaître ses moyens de défense, forme un recours devant le tribunal de police contre sa décision notifiée conformément au paragraphe 1er de l’article 6 précité.
Ni les principes généraux de bonne administration ni le droit à un procès équitable n’imposent une solution contraire.
Le jugement attaqué constate que, « par lettres des 7 et 14 mai 2020, le fonctionnaire sanctionnateur de la [demanderesse] adresse aux [défendeurs] une copie des procès-verbaux les informant des faits [qui leur sont reprochés] et les invite à payer chacun une amende administrative », que « leur conseil [...] inform[e ce fonctionnaire] le 8 juin 2020 qu’un recours serait directement introduit auprès du tribunal de police » et que « les requêtes [adressées à ce tribunal sont] déposées dès le [...] 9 juin 2020 ».
En annulant les sanctions administratives infligées aux défendeurs pour le motif que, « trente jours après [la] première notification, l’administration se devait de notifier une décision motivée, répondant à la lettre qui lui avait été adressée le 8 juin 2020 par le conseil des [défendeurs] et confirmant la sanction administrative infligée à chacun », ce jugement viole ledit article 6.
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse le jugement attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant le tribunal de police du Brabant wallon.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Simon Claisse, et prononcé en audience publique du vingt octobre deux mille vingt-trois par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.