N° P.23.0748.F
L. F.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Adrien Masset, avocat au barreau de Verviers,
contre
D. E.
partie civile,
défenderesse en cassation,
ayant pour conseil Maître Sandra Berbuto, avocat au barreau de Liège-Huy.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 26 avril 2023 par la cour d’appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision de condamnation rendue sur l’action publique exercée à charge du demandeur :
Sur le moyen :
Le moyen est pris de la violation de l’article 507, alinéa 1er, du Code pénal. Il dénonce en outre un défaut de réponse aux conclusions du demandeur.
Quant à la première branche :
Il est reproché à l’arrêt de ne pas constater que le détournement faisant l’objet de l’unique prévention déclarée établie, a été réalisé dans l’intérêt du demandeur.
Le délit réprimé par l’article 507, alinéa 1er, du Code pénal requiert que le détournement ait été commis dans l’intérêt du saisi, celui-ci ne s’identifiant pas nécessairement avec l’auteur matériel de l’acte.
L’arrêt relève que l’avion saisi appartient à la société Biorem Engineering, que la défenderesse a honoré, au profit de cette société, deux factures relatives à la maintenance et à l’assurance de l’aéronef, qu’elle n’a pas pu obtenir le remboursement des fonds avancés, que la saisie a été pratiquée pour la sûreté de sa créance et que le prévenu a détourné l’appareil dans l’intérêt de la société débitrice dont il était le bénéficiaire économique.
Les juges d’appel ont donc constaté que l’atteinte au droit de gage de la créancière saisissante a été réalisée par le demandeur dans l’intérêt du saisi.
Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
Le demandeur reproche à l’arrêt de ne pas répondre à ses conclusions qui, pour contester l’intention frauduleuse, faisaient valoir qu’il n’a jamais voulu s’approprier l’avion saisi, celui-ci se trouvant toujours entreposé, en impossibilité de vol, dans le même hangar aéroportuaire suisse.
Selon le moyen, l’arrêt donne en outre, de l’intention frauduleuse requise, une définition illégale.
Le dol spécial constitutif de l’infraction est l’intention de procurer au débiteur saisi un avantage illicite. C’est l’intention de faire échec à la saisie, d’entraver la poursuite mue par le créancier, de porter atteinte à l’indisponibilité dont l’exploit de saisie a frappé le bien.
L’arrêt constate que le demandeur a agi dans le but de rendre impossible l’exercice par la partie civile de ses droits de créancier découlant de la saisie.
Ce but revient à vouloir procurer au débiteur un avantage illégitime.
C’est en déplaçant à l’étranger l’avion saisi à l’aéroport de Bierset, sans informer la plaignante de la nouvelle localisation du bien, que le demandeur a empêché la créancière, d’après les juges d’appel, d’exercer ses droits.
L’arrêt est ainsi régulièrement motivé et légalement justifié.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la troisième branche :
Le demandeur reproche à l’arrêt de ne pas caractériser l’acte matériel susceptible de constituer le détournement prohibé par la loi.
Il soutient que le seul fait de déplacer l’avion, de l’utiliser, de ne pas le ramener dans l’aéroport où il avait été saisi, ne constitue pas le détournement puni par la loi.
Peut constituer le détournement visé par l’article 507, alinéa 1er, du Code pénal le fait de déplacer un bien en laissant le créancier dans l’ignorance de sa nouvelle localisation, de manière à lui enlever la sûreté que la saisie lui procurait pour le recouvrement de sa créance.
L’arrêt constate l’existence d’un tel déplacement et de l’intention frauduleuse qui en a déterminé la réalisation.
Les juges d’appel ont, ainsi, répondu aux conclusions du demandeur et légalement justifié leur décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l’action civile exercée par la défenderesse :
Le demandeur n’invoque aucun moyen spécifique.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de cent treize euros nonante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.