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13/09/2023 | BELGIQUE | N°P.23.0503.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 13 septembre 2023, P.23.0503.F


N° P.23.0503.F
LE PROCUREUR DU ROI DE BRUXELLES,
demandeur en cassation,
contre
A. R.,
prévenu,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 21 mars 2023 par le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, statuant en degré d’appel.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Su

r les deux moyens réunis :
1. Le défendeur est poursuivi notamment pour avoir, le 4 décembre 2020, en i...

N° P.23.0503.F
LE PROCUREUR DU ROI DE BRUXELLES,
demandeur en cassation,
contre
A. R.,
prévenu,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 21 mars 2023 par le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, statuant en degré d’appel.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur les deux moyens réunis :
1. Le défendeur est poursuivi notamment pour avoir, le 4 décembre 2020, en infraction à l’article 48, alinéa 1er, 2°, de la loi relative à la police de la circulation routière, « conduit, sur la voie publique, un véhicule à moteur de la catégorie visée dans la décision de déchéance, ou avoir accompagné un conducteur en vue de l’apprentissage, sans avoir réussi l’examen imposé en vertu de l’article 38, § 3, de la loi [précitée], prononcée contre lui par un jugement coulé en force de chose jugée du tribunal de police francophone de Bruxelles, rendu le 7 septembre 2018 » (prévention B).
Le jugement attaqué acquitte le défendeur du chef de cette prévention au motif que, au cours des débats, il est apparu qu’il a fait opposition à la décision de déchéance du 7 septembre 2018 et que ce recours a été déclaré recevable le 21 juin 2022, de sorte qu’il ne peut avoir méconnu l’interdiction de conduire sans avoir réussi les examens imposés par ladite décision, qui est censée ne jamais avoir existé.
2. Le demandeur reproche au tribunal correctionnel d’avoir refusé de requalifier la prévention B en remplaçant le jugement du 7 septembre 2018 par un autre jugement rendu le 26 mars 2019, qui a également condamné le défendeur à une déchéance du droit de conduire assortie de l’obligation de satisfaire à des examens de réintégration dans ce droit. Le demandeur précise qu’il a déposé devant les juges d’appel une copie certifiée conforme de cette décision, portant les mentions qu’elle est passée en force de chose jugée et que le défendeur n’a pas encore satisfait aux examens qu’elle impose.
Pris de la violation de l’article 48, alinéa 1er, 2°, de la loi relative à la police de la circulation routière, le premier moyen soutient que l’interdiction de conduire visée par cette disposition légale ne se rapporte pas à une décision déterminée de déchéance, mais bien à une interdiction qui découle, selon le cas, d’une ou de plusieurs décisions judiciaires. D’après le demandeur, à la différence de la déchéance du droit de conduire qui prend cours à une date déterminée et prend fin également à un moment précis, l’interdiction de conduire à défaut d’avoir réussi les examens imposés par la décision de déchéance n’est ni déterminée ni limitée dans le temps. Le moyen ajoute qu’il est possible que, comme en l’espèce, un prévenu se voie imposer des examens par une décision de déchéance du droit de conduire, alors qu’il fait déjà l’objet d’une autre décision de déchéance qui lui impose également de satisfaire aux examens de rétablissement dans ce droit. Selon le moyen, dans une telle situation, l’obligation de réussir les examens procède de plusieurs décisions judiciaires, et il importe peu de préciser ou de distinguer la décision de déchéance en vertu de laquelle les examens doivent être passés.
Le second moyen invoque les articles 145 et 182 du Code d’instruction criminelle, ainsi que l’article 6.3, a), de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il expose que ces dispositions n’exigent pas que l’information donnée au prévenu quant à l’infraction mise à sa charge provienne uniquement de la citation, que cette information peut également être donnée au moyen des pièces du dossier répressif, et que, le cas échéant, il appartient au juge de veiller à ce que la prévention soit précisée. Dès lors qu’il ressort à suffisance de l’ordre de citer et du dossier répressif que le défendeur est poursuivi pour avoir, à une date déterminée, conduit un véhicule à moteur sans avoir réussi les examens imposés et que la décision de déchéance du 26 mars 2019 était jointe au dossier, le défendeur connaissait l’objet de l’accusation portée contre lui. A tout le moins, il appartenait au tribunal de préciser la prévention, en tenant compte du deuxième jugement déposé par le ministère public. Selon le moyen, il s’ensuit que, en ayant refusé de prendre en considération un autre jugement que celui mentionné dans le libellé de la prévention, le jugement attaqué viole les dispositions invoquées.
3. Le juge correctionnel ne peut pas connaître d’autres faits que ceux dont il est régulièrement saisi par l’ordonnance de renvoi de la juridiction d’instruction ou par la citation directe du ministère public ou de la partie civile. Il ne peut se saisir lui-même d’un fait punissable qui n’est pas visé dans un de ces actes.
4. L’article 48, alinéa 1er, 2°, de la loi relative à la police de la circulation routière dispose :
« Est puni d'un emprisonnement de quinze jours à deux ans et d'une amende de 500 euros à 2.000 euros ou d'une de ces peines seulement et d'une déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur d'une durée de trois mois au moins et cinq ans au plus ou à titre définitif, quiconque conduit un véhicule à moteur de la catégorie visée dans la décision de déchéance ou accompagne un conducteur en vue de l'apprentissage sans avoir réussi l'examen imposé. »
Cette disposition punit la personne qui, après avoir subi une peine de déchéance temporaire du droit de conduire, conduit un véhicule à moteur de la catégorie visée par le jugement qui lui a infligé cette peine, sans avoir d’abord satisfait à l’obligation, imposée par cette décision, de réussir préalablement un ou plusieurs des examens prévus à l’article 38, § 3, de la loi relative à la police de la circulation routière.
L’infraction comprend donc, parmi ses éléments constitutifs, le fait de ne pas respecter une décision judiciaire déterminée, c’est-à-dire celle qui, outre la condamnation à une peine de déchéance temporaire du droit de conduire, subordonne la réintégration dans ce droit à la réussite d’un ou plusieurs des examens qu’elle impose.
L’interdiction de conduire sans avoir préalablement réussi l’examen ou les examens de réintégration dans le droit de conduire prend cours à l’expiration du délai de la déchéance fixé par la décision de déchéance.
La date de l’expiration du délai de la déchéance dépend, d’une part, de celle à laquelle le ministère public a notifié la déchéance du droit de conduire au condamné en application de l’article 40, alinéa 1er, de la loi relative à la police de la circulation routière, cet article disposant que la déchéance du droit de conduire prend cours le cinquième jour suivant cet avertissement, et, d’autre part, de la durée de la déchéance fixée par la décision de déchéance.
En outre, la décision de déchéance détermine quel est ou quels sont, parmi les quatre types d’examen mentionnés à l’article 38, § 3, de la loi, l’examen ou les examens qu’elle impose au condamné de réussir avant de pouvoir reprendre le volant à l’expiration du délai de la déchéance.
Il s’ensuit que, à moins qu’il corrige une erreur matérielle ou rectifie un libellé incomplet sur la base du dossier répressif, le juge qui, dans une prévention d’infraction à l’article 48, alinéa 1er, 2°, de la loi relative à la police de la circulation routière, remplace la décision de déchéance mentionnée dans cette prévention par une autre décision de déchéance, se saisit lui-même d’un autre fait punissable.
5. En ayant considéré que « la modification requise par le ministère public s’apparente en l’espèce à une substitution de l’objet de la poursuite et non à une requalification du même fait », et que « le tribunal ne peut y faire droit sans empiéter sur l’action publique », les juges d’appel ont légalement justifié leur décision.
Les moyens ne peuvent être accueillis.
Le contrôle d’office
6. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Laisse les frais à charge de l’Etat.
Lesdits frais taxés à la somme de quatre-vingt-six euros soixante-huit centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois par Eric de Formanoir, conseiller faisant fonction de président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.23.0503.F
Date de la décision : 13/09/2023
Type d'affaire : Droit pénal

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2023-09-13;p.23.0503.f ?

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