N° P.23.0217.F
B. Ch.
prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Harold Sax, avocat au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 18 janvier 2023 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
Le moyen est pris de la violation des articles 2 et 9, § 1er, de la loi du 5 mai 2014 relative à l’internement.
Le demandeur relève que, selon les juges d’appel, son état est stabilisé grâce à la prise en charge dont il bénéficie en prison, dans le cadre d’un système contraignant. Selon le moyen, cette constatation ne permet pas de retenir l’existence d’un trouble mental persistant au moment de la décision et altérant gravement les capacités de discernement du prévenu.
La persistance d’un tel trouble est, certes, une condition prévue par l’article 9, § 1er, 2°, de la loi du 5 mai 2014 pour pouvoir interner la personne qui en est affectée.
Mais contrairement à ce que le moyen soutient, la stabilisation d’une pathologie mentale grâce aux soins prodigués à la personne internée, n’implique pas nécessairement la disparition du trouble altérant gravement ses capacités, et n’exclut dès lors pas sa résurgence du fait de la cessation des soins.
L’arrêt considère que le demandeur est atteint d’une psychose toujours active et renforcée par la dépendance aux psychostimulants, qu’il y va d’un trouble mental confirmé par les violences commises au préjudice de ses parents âgés, que le prévenu n’a pas conscience de la gravité de ce trouble, que la schizophrénie paranoïde dont il souffre plus que probablement l’expose à porter de nouvelles atteintes à l’intégrité physique et psychique de ses père et mère, et que la récidive est d’autant plus à craindre si le demandeur cessait de prendre ses médicaments ou s’il renouait avec la consommation de cocaïne et d’alcool.
La stabilisation relative du trouble affectant le demandeur n’a pu empêcher les juges d’appel de considérer, précisément en raison de ce caractère relatif, que la psychose qui le touche est loin d’être guérie.
La motivation de l’arrêt ne viole dès lors pas les dispositions légales invoquées.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la seconde branche :
Le demandeur fait valoir qu’en jugeant stabilisé le trouble mental dont il souffrait, la cour d’appel n’a pas pu ordonner son internement aux fins prévues par la loi, soit avec l’objectif qu’il reçoive les soins requis par son état.
Mais l’arrêt n’encourt pas le reproche formulé par le moyen : en effet, les juges d’appel ont constaté, et ont pu constater, que le demandeur, nonobstant une stabilisation relative de son état, souffrait d’une psychose encore loin d’être éteinte ou guérie, laquelle reste associée au risque d’un nouveau passage à l’acte violent.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen est pris de la violation de l’article 1138, 4°, du Code judiciaire, disposition donnant ouverture à cassation contre les jugements contenant des dispositions, c’est-à-dire des décisions, contraires.
Selon le demandeur, les juges d’appel n’ont pu, sans se contredire, considérer que le trouble mental dont il souffre était stabilisé au jour de la décision, et ordonner son internement parce qu’il est atteint d’un trouble altérant toujours son discernement.
La disposition légale invoquée est étrangère à la contradiction entre les motifs et le dispositif d’une décision.
Dans cette mesure, le moyen manque en droit.
Il n’est pas contradictoire de considérer qu’une pathologie n’est stabilisée qu’à la faveur d’un traitement contraignant, de sorte que la cessation de celui-ci en entraînera immédiatement la résurgence.
A cet égard, le moyen manque en fait.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de six euros onze centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du sept juin deux mille vingt-trois par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.