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15/03/2023 | BELGIQUE | N°P.23.0331.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 15 mars 2023, P.23.0331.F


N° P.23.0331.F
L. D., B., S.,
inculpé, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Damien Brotcorne, avocat au barreau de Tournai.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 2 mars 2023 par la cour d’appel de Mons, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Tamara Konsek a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le

premier moyen :
Le moyen est pris de la violation de l’article 149 de la Constitution.
Il repr...

N° P.23.0331.F
L. D., B., S.,
inculpé, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Damien Brotcorne, avocat au barreau de Tournai.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 2 mars 2023 par la cour d’appel de Mons, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Tamara Konsek a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation de l’article 149 de la Constitution.
Il reproche à l’arrêt de ne pas répondre aux conclusions dans lesquelles le demandeur faisait valoir la méconnaissance du droit à un procès équitable et, partant, l’irrégularité du mandat d’arrêt, dès lors que, convoqué en qualité de témoin, il n’avait pas été informé, préalablement à la discussion au cours de laquelle il a remis son téléphone portable au policier, des droits dont bénéficie le suspect. Selon le demandeur, l’exploitation des messages y stockés l’a conduit à s’incriminer au cours de l’audition qui s’en est suivie à 11.07 heures.
L’obligation faite à la juridiction d’instruction de motiver sa décision ne résulte pas de l’article 149 de la Constitution mais est énoncée aux articles 21, § 5, 23, 4°, et 30, § 3, alinéa 3, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive.
L’arrêt attaqué énonce qu’il ressort des pièces annexées au procès-verbal initial que le demandeur a consenti, par écrit, à 10.44 heures, à la remise et à l’exploitation de son téléphone portable par les services de police. L’arrêt en déduit que la remise et l’exploitation du téléphone portable sont régulières.
Il ressort de ces considérations que, selon la chambre des mises en accusation, le demandeur, qui avait la qualité de témoin, n’a pas dû être informé, préalablement à la remise du téléphone portable, des droits dont bénéficie le suspect.
Ainsi, l’arrêt répond à la défense qui soutenait le contraire.
L’arrêt constate également que, avant son audition en qualité de suspect au cours de laquelle il s’est auto-incriminé, le demandeur a signé une déclaration selon laquelle il renonce au droit à un entretien avec son avocat et à l’assistance de celui-ci durant son audition par la police, sans qu’il n’apparaisse qu’il ait fait l’objet de pressions.
Par ces considérations, l’arrêt motive régulièrement sa décision de dire le mandat d’arrêt régulier, sans que la chambre des mises en accusation ait été tenue de motiver le rejet du moyen relatif au respect du droit à un procès équitable, devenu sans pertinence en raison de sa décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :

Quant à la première branche :
Le demandeur reproche à l’arrêt attaqué de violer la foi due au procès-verbal initial et ses annexes en donnant l’impression que le demandeur a été auditionné une seule fois, soit à partir de 11.07 heures en qualité de suspect, après avoir renoncé à l’assistance d’un avocat, alors qu’il ressort des pièces susdites qu’il a d’abord été entendu en qualité de témoin, étant arrivé au commissariat à 10.04 heures et ayant signé le formulaire relatif à l’exploitation des données contenues dans son téléphone portable à 10.44 heures.
Le moyen soutient également que le demandeur devait être informé, conformément à l’article 47bis, § 6, 5), du Code d’instruction criminelle, des droits dont bénéficie le suspect avant la remise du téléphone, dès lors que les policiers ont souhaité avoir accès aux données stockées dans celui-ci, sachant que cet appareil pourrait contenir des éléments susceptibles d’être mis à sa charge.
Le droit au silence et celui de ne pas s’incriminer ne s’étendent pas à l’usage, dans une procédure pénale, de données qui existent indépendamment de la volonté de celui qui les détient, et le droit à une concertation préalable avec un avocat ou à l’assistance d’un avocat n’inclut pas le consentement donné par un témoin aux services de police en vue de la consultation de données dont il dispose.
En tant qu’il soutient le contraire, le moyen manque en droit.
Par ailleurs, en précisant que le demandeur a consenti à 10.44 heures à la remise et l’exploitation de son téléphone portable, l’arrêt indique qu’il y a eu une audition du demandeur antérieure à celle qu’il a faite en qualité de suspect.
Dans la mesure où il repose sur une autre lecture de l’arrêt, le moyen manque en fait.
Enfin, le moyen soutient qu’à défaut de procès-verbal relatif aux déclarations que le demandeur a faites en qualité de témoin, la Cour n’est pas en mesure de vérifier s’il a été informé conformément à l’article 47bis, § 1er, du Code d’instruction criminelle.
Le droit au silence invoqué par le demandeur ne concernant pas l’usage de données qui existent indépendamment de la volonté de celui qui les détient, le moyen est dénué d’intérêt et, partant, irrecevable à cet égard.
Quant à la seconde branche :
Le demandeur allègue que, sans la remise forcée de son téléphone au policier, l’enquête à sa charge n’aurait pas débuté et il n’aurait pas été amené à s’auto-incriminer.
Il soutient que, partant, il y a eu une atteinte irrémédiable au droit à un procès équitable et qu’il appartenait à la chambre des mises en accusation, conformément à l’article 32 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, d’écarter l’analyse des données stockées dans son téléphone et tous les éléments qui en découlent, telles ses propres déclarations aux policiers.
L’arrêt ayant légalement constaté que la remise et l’exploitation du téléphone portable, d’une part, et la déclaration faite par le demandeur en qualité de suspect sans l’assistance d’un avocat, d’autre part, sont régulières, la chambre des mises en accusation n’avait pas à examiner, en application de la disposition précitée, si l’usage de ces éléments de preuve était contraire au droit à un procès équitable.
A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
Dans la mesure où il réitère le grief vainement invoqué à la première branche, le moyen est irrecevable.
Et en tant qu’il requiert une vérification d’éléments de fait pour laquelle la Cour est sans pouvoir, le moyen est également irrecevable.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de nonante euros quatre-vingt-un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du quinze mars deux mille vingt-trois par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.23.0331.F
Date de la décision : 15/03/2023
Type d'affaire : Droit pénal

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2023-03-15;p.23.0331.f ?

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