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01/03/2023 | BELGIQUE | N°P.22.1463.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 01 mars 2023, P.22.1463.F


N° P.22.1463.F
LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D’APPEL DE MONS,
demandeur en cassation,
contre
1. W. V., C.,
2. W. M., C.,
prévenues,
défenderesses en cassation,
ayant pour conseil Maître Ricardo Bruno, avocat au barreau de Charleroi.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 12 octobre 2022 par la cour d’appel de Mons, chambre pénale sociale.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller François Stévenart Meeûs a

fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur ...

N° P.22.1463.F
LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D’APPEL DE MONS,
demandeur en cassation,
contre
1. W. V., C.,
2. W. M., C.,
prévenues,
défenderesses en cassation,
ayant pour conseil Maître Ricardo Bruno, avocat au barreau de Charleroi.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 12 octobre 2022 par la cour d’appel de Mons, chambre pénale sociale.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller François Stévenart Meeûs a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le second moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution, 780 du Code judiciaire, 127 du Code pénal social, 5 de la loi du 4 août 1996 sur le bien-être au travail et 13 de l’arrêté royal du 27 mars 1998 relatif à la politique de bien-être des travailleurs lors de l’exécution de leur travail.
Les défenderesses ont été déclarées coupables de ne pas avoir pris, en leur qualité d’employeur, toutes les mesures permettant au conducteur du camion d’exercer son travail en toute sécurité malgré un retard de douze heures quant à la prise en charge d’une livraison.
Le demandeur reproche à l’arrêt de ne pas répondre à ses conclusions en ce qu’il avait sollicité d’ajouter à cette prévention la circonstance aggravante prévue à l’article 127, alinéa 2, du Code de droit pénal social, à savoir que l’infraction a causé un accident de travail pour le conducteur.
Mais l’arrêt décide que l’accident ne trouve pas sa cause dans la gestion fautive, par les défenderesses, des temps de travail et de repos de leurs chauffeurs.
Cette décision explique pourquoi la circonstance aggravante invoquée n’a pas été ajoutée à la prévention.
Le moyen manque en fait.
Sur le moyen pris, d’office, de la violation de l’article 66 du Code pénal :
Seul un acte positif, préalable à l’exécution de l’infraction ou concomitant, peut fonder la participation à un crime ou à un délit. Toutefois, l’omission d’agir peut constituer un tel acte positif de participation lorsque, en raison de circonstances qui l’accompagnent, l’inaction consciente et volontaire constitue, sans équivoque, un encouragement à la perpétration de l’infraction suivant l’un des modes prévus aux articles 66 et 67 du Code pénal.
Les défenderesses ont été poursuivies notamment du chef d’avoir, comme auteur ou coauteur, commis des faux en écritures et en avoir fait usage, les faux consistant dans la mention, sur des tachygraphes analogiques, d’un nom qui n’est pas celui du chauffeur, de manière à lui permettre des dépassements du temps de conduite.
L’arrêt constate que le chauffeur du camion impliqué dans l’accident, ainsi que la société qui l’employait, ont été définitivement condamnés à raison de ces faux.
Pour en acquitter les deux défenderesses, cogérantes de ladite société, l’arrêt relève qu’elles ne sont pas les auteurs matériels des faux, qu’elles n’ont pas coopéré à leur réalisation ni incité le chauffeur à les commettre, qu’elles n’ont donné aucune instruction en ce sens à qui que ce soit, qu’elles n’ont pas eu connaissance de la manipulation incriminée de sorte qu’elles n’ont pas pu s’y associer de manière consciente et volontaire.
Toutefois, l’arrêt déclare les défenderesses coupables d’avoir, comme auteur ou coauteur, en infraction aux articles 32.3 et 34.1 du Règlement n° 165/2014 du Parlement européen et du Conseil concernant l’appareil de contrôle dans le domaine des transports par route, falsifié les feuilles d’enregistrement par la mention d’un autre nom que celui du conducteur, de manière à permettre à ce dernier d’éluder la limitation du temps de conduite.
Pour justifier cette condamnation, l’arrêt considère que
- les défenderesses sont les deux seules cogérantes de la société de transport employant le chauffeur du camion impliqué dans l’accident ;
- elles prenaient, en cette qualité, l’ensemble des décisions relatives au fonctionnement de la société ;
- il leur appartenait de faire appliquer la législation régissant leur secteur d’activité ;
- elles n’ont pris aucune mesure pour assurer le respect, par leurs salariés, des temps de conduite et de repos, pour veiller à la bonne utilisation des feuilles d’enregistrement, et pour adapter le parcours des chauffeurs en fonction de la durée de leurs prestations ;
- elles ont, au contraire, mis en œuvre une politique d’entreprise visant à encourager le non-respect de la réglementation ;
- toutes les heures prestées par les chauffeurs étaient rémunérées, même en cas de dépassement du temps de conduite ;
- pareil système est de nature à encourager les empiètements sur le temps de repos, puisqu’il implique, ainsi que V. W. l’a reconnu, « que toutes les heures prestées sont rémunérées, même en cas d’usage d’un disque au nom d’un autre ou d’une conduite sans disque ».
Par les considérations précitées, les juges d’appel n’ont pas exclu que les faux visés sous la prévention I, A et B, aient été commis à la faveur d’une participation par abstention qualifiée des défenderesses, dans le cadre d’une politique d’entreprise traduisant leur intention de couvrir les manipulations incriminées.
Les acquittements du chef de ladite prévention ne sont, dès lors, pas légalement justifiés.
Il n’y a pas lieu d’examiner le premier moyen qui ne saurait entraîner une cassation plus étendue.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est, sauf l’illégalité à censurer ci-après, conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l’arrêt attaqué, en tant qu’il acquitte les défenderesses de la prévention de faux et usage de faux libellée sub I, A et B, et en tant qu’il statue sur l’ensemble de la peine ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Laisse les deux tiers des frais du pourvoi à charge de l’Etat et réserve le tiers restant pour qu’il y soit statué par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d’appel de Mons, chambre pénale sociale, autrement composée.
Lesdits frais taxés à la somme de trois cent vingt et un euros vingt et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du premier mars deux mille vingt-trois par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.22.1463.F
Date de la décision : 01/03/2023
Type d'affaire : Droit pénal

Analyses

Seul un acte positif, préalable à l'exécution de l'infraction ou concomitant, peut fonder la participation à un crime ou à un délit; toutefois, l'omission d'agir peut constituer un tel acte positif de participation lorsque, en raison de circonstances qui l'accompagnent, l'inaction consciente et volontaire constitue, sans équivoque, un encouragement à la perpétration de l'infraction suivant l'un des modes prévus aux articles 66 et 67 du Code pénal (1). (1) Cass. 2 septembre 2009, RG P.09.0391.F, Pas. 2009, n° 467 ; Cass. 17 décembre 2008, RG P.08.1233.F, Pas. 2008, n° 737, avec concl. de M. VANDERMEERSCH, avocat général. Le moyen d'office n'a pas été suggéré par le MP, qui a conclu au rejet du pourvoi. (MNB)

INFRACTION - PARTICIPATION [notice1]


Références :

[notice1]

Code pénal - 08-06-1867 - Art. 66 et 67 - 01 / No pub 1867060850


Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2023-03-01;p.22.1463.f ?

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