N° P.22.0999.F
1. UNION NATIONALE DES MUTUALITES LIBRES,
2. UNION NATIONALE DES MUTUALITES LIBERALES,
3. UNION NATIONALE DES MUTUALITES NEUTRES,
4. ALLIANCE NATIONALE DES MUTUALITES CHRETIENNES,
5. UNION NATIONALE DES MUTUALITES SOCIALISTES,
6. CAISSE AUXILIAIRE D’ASSURANCE MALADIE-INVALIDITE,
parties civiles,
demanderesses en cassation,
ayant pour conseil Maître Philippe Culot, avocat au barreau de Liège-Huy,
contre
1. U. d.S. F., M., J., G., H., B.,
ayant pour conseil Maître Pierre Chomé, avocat au barreau de Bruxelles,
2. C. M., G., H., P., A.,
3. R. I., V., L.,
4. S. U. d. S.A.,
5. S. U. d. S. G., D.,
6. ORGANISATION DE PROMOTION TOURISTIQUE ET IMMOBILIERE, société anonyme en liquidation, représentée par son liquidateur, la société anonyme de droit luxembourgeois Rasa,
7. TEGUISE, société anonyme de droit luxembourgeois,
8. RASA, société anonyme de droit luxembourgeois,
prévenus,
défendeurs en cassation,
les 6ème, 7ème et 8ème défenderesses représentées par Maître Ann-Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250/10, où il est fait élection de domicile.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 28 juin 2022 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Les demanderesses invoquent un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que les pourvois sont dirigés contre les décisions rendues sur les actions civiles exercées par les demanderesses contre Y.R., et A. et G. S. U. d. S. :
Par un acte reçu au greffe le 12 septembre 2022, Maître Philippe Culot, avocat au barreau de Liège-Huy, s’est désisté des pourvois au nom des demanderesses.
La Cour n’a pas égard au désistement, fait par un avocat dont il n’apparaît pas qu’il soit porteur d’une procuration spéciale et qui n’est pas avocat à la Cour de cassation, d’un pourvoi formé par les parties civiles contre des décisions rejetant totalement ou partiellement leurs demandes, le désistement du pourvoi équivalant en pareil cas à un désistement de l’action.
Il n’apparaît pas, des pièces de la procédure, que les demanderesses aient fait signifier leur pourvoi aux défendeurs.
Les pourvois sont irrecevables.
B. En tant que les pourvois sont dirigés contre les décisions rendues sur les actions civiles exercées par les demanderesses contre les cinq autres défendeurs :
Les défendeurs se sont vu poursuivre du chef d’avoir, comme auteurs ou coauteurs, organisé frauduleusement l’insolvabilité de F. U. d. S. et Y.R., condamnés par un arrêt du 23 novembre 2005 de la cour d’appel de Mons à payer aux demanderesses une somme de 1.859.201,44 euros.
Selon l’ordonnance de renvoi, le délit instantané visé par les poursuites, et sanctionné par l’article 490bis du Code pénal, aurait été commis entre la date de la décision judiciaire susdite fixant la dette, soit le 23 novembre 2005, et la date de la plainte des créanciers lésés, soit le 1er février 2011.
Il est reproché aux juges d’appel d’avoir, sous prétexte de ne pas excéder les limites de leur saisine telle que définie par le renvoi, refusé de prendre en considération les actes matériels d’organisation de l’insolvabilité antérieurs à la décision judiciaire ayant fixé la somme due aux demanderesses.
La réalisation du délit ne requiert pas la simultanéité des comportements révélant, d’une part, la volonté de se rendre insolvable et, d’autre part, celle de ne pas exécuter ses obligations. Il suffit qu’à un moment donné coexistent l’état d’insolvabilité frauduleusement organisé et le fait, corrélatif, de ne pas exécuter ses obligations.
Partant, la saisine du chef d’une insolvabilité frauduleuse réputée acquise, selon la partie poursuivante, à dater de la décision judiciaire fixant la dette, englobe les agissements qui, quoiqu’antérieurs à cette décision, ont eu pour but et pour effet de rendre le débiteur insolvable.
Sans doute l’arrêt relève-t-il également que, selon l’ordonnance de renvoi, les actes visés par la poursuite ne consistent que dans l’organisation du patrimoine des débiteurs à travers un ensemble structuré de sociétés établies en Belgique et à l’étranger.
Mais en s’interdisant de vérifier si de tels agissements, quoiqu’antérieurs à l’arrêt du 23 novembre 2005, peuvent être mis en corrélation avec l’inexécution des obligations que cet arrêt consacre, la cour d’appel a indûment restreint la portée de l’acte qui l’a saisie et méconnu la notion légale d’insolvabilité frauduleuse.
Le moyen est fondé.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l’arrêt attaqué en tant qu’il statue sur les actions civiles exercées par les demanderesses contre F. U. d. S., M. C., la société anonyme en liquidation Organisation de promotion touristique et immobilière, la société anonyme de droit luxembourgeois Teguise et la société anonyme de droit luxembourgeois Rasa ;
Rejette les pourvois pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Condamne chacune des demanderesses à un trentième des frais de leur pourvoi et réserve les quatre cinquièmes restants pour qu’il y soit statué par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d’appel de Mons.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de mille trois cent dix-huit euros cinquante-deux centimes dont deux cent six euros nonante-sept centimes dus et mille cent onze euros cinquante-cinq centimes payés par ces demandeurs.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt et un décembre deux mille vingt-deux par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.