N° P.22.0400.F
1. B. P.J.,
ayant pour conseil Maître Marie Sternon, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi à Schaerbeek, boulevard Lambermont, 376, où il est fait élection de domicile,
2. J. BAGOT ARQUEOLOGIA S.L., société de droit espagnol, faisant élection de domicile chez Maître Yves-Bernard Debie, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi à Schaerbeek, boulevard Lambermont, 376,
opposants à la transmission, à l’étranger, d’objets saisis en Belgique,
demandeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 16 mars 2022 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le premier demandeur invoque cinq moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
L’arrêt attaqué statue en application de l’article 6, § 5, de la loi du 9 décembre 2004 sur la transmission policière internationale de données à caractère personnel et d’informations à finalité judiciaire.
Dans le cadre de l’exécution d’une demande d’entraide judiciaire venant d’Egypte, des objets d’art funéraire ont été saisis en Belgique pour avoir été, d’après l’autorité judiciaire étrangère, extraits illégalement du site archéologique où ils ont été trouvés, et exportés frauduleusement en Europe.
Invoquant la qualité de tiers intéressés, les demandeurs ont saisi la chambre du conseil d’une requête d’opposition au transfert des biens susdits à l’autorité qui les réclame. La chambre du conseil a accueilli partiellement cette requête.
Sur l’appel du procureur du Roi, la chambre des mises en accusation a mis l’ordonnance entreprise à néant, sauf en tant qu’elle déclare la requête d’opposition irrecevable dans le chef de la demanderesse. Concernant le demandeur, les juges d’appel ont considéré qu’il n’établissait pas sa qualité de propriétaire ou de tiers intéressé, en conséquence de quoi ils ont déclaré sa requête également irrecevable, et ils ont maintenu la décision d’extradition mobilière.
Pareille décision n’est pas sujette à pourvoi en cassation, cette voie de recours étant expressément exclue par le sixième alinéa de l’article 6, § 5, de la loi du 9 décembre 2004.
Le premier demandeur sollicite que la Cour constitutionnelle soit interrogée, à titre préjudiciel, sur la compatibilité de cette exclusion avec les articles 10 et 11 de la Constitution. Il fait valoir que le pourvoi est admis à l’égard des arrêts statuant sur le recours formé contre les saisies pratiquées en exécution d’une décision étrangère d’enquête européenne ou de gel des avoirs, en manière telle que le principe de non-discrimination exigerait de l’admettre aussi dans la matière, comparable, régie par l’article 6, § 5, précité.
Il n’est pas au pouvoir de la Cour de faire dire, au dernier alinéa de l’article 6, § 5, le contraire de ce qu’il dit ni, partant, d’autoriser ce que la loi défend.
Il y a lieu, dès lors, de poser la question suivante, préjudicielle à la décision à rendre quant à la recevabilité des pourvois.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Sursoit à statuer jusqu’à ce que la Cour constitutionnelle ait répondu à la question préjudicielle suivante :
L’article 6, § 5, alinéa 6, de la loi du 9 décembre 2004 sur la transmission policière internationale de données à caractère personnel et d’informations à finalité judiciaire, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution ?
Réserve les frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt et un décembre deux mille vingt-deux par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.