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15/12/2022 | BELGIQUE | N°C.21.0309.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 15 décembre 2022, C.21.0309.F


N° C.21.0309.F
AMMA ASSURANCES, société d’assurances mutuelles, dont le siège est établi à Bruxelles, avenue des Arts, 39, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0409.003.270,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,
contre
1. M. S.,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Gilles Genicot, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue

de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
2. J. S.,
défendeur en cassation...

N° C.21.0309.F
AMMA ASSURANCES, société d’assurances mutuelles, dont le siège est établi à Bruxelles, avenue des Arts, 39, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0409.003.270,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,
contre
1. M. S.,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Gilles Genicot, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
2. J. S.,
défendeur en cassation ou, à tout le moins, partie appelée en déclaration d’arrêt commun,
représenté par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 22 février 2021 par la cour d’appel de Bruxelles.
Le 18 novembre 2022, l’avocat général Thierry Werquin a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Marie-Claire Ernotte a fait rapport et l’avocat général
Thierry Werquin a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur la fin de non-recevoir opposée au pourvoi par la défenderesse et déduite de ce qu’il est dirigé contre des décisions d’avant dire droit :
Suivant l’article 19, alinéa 1er, du Code judiciaire, le jugement est définitif dans la mesure où il épuise la juridiction du juge sur une question litigieuse, sauf les recours prévus par la loi.
En vertu de l’article 19, alinéa 3, de ce code, le juge peut, avant dire droit, à tout stade de la procédure, ordonner une mesure préalable destinée, soit à instruire la demande ou à régler un incident portant sur une telle mesure, soit à régler provisoirement la situation des parties.
D’une part, le juge qui tranche la contestation relative à la validité du rapport final d’expertise ne règle pas un incident relatif à la mesure d’expertise mais, statuant sur la légalité de cette preuve, rend un jugement définitif.
Le pourvoi, qui fait grief à l’arrêt attaqué, constatant la violation du droit de défense de la demanderesse, de ne pas écarter le rapport final du collège d’experts et de ne lui conférer qu’un caractère provisoire tout en confiant à l’un des experts du collège un complément d’expertise fondé sur ce rapport, ne critique ni la désignation d’un expert en tant que telle ni la description ou la qualification de sa mission, mais la décision de l’arrêt statuant sur la légalité du rapport final du collège d’experts.
D’autre part, le juge qui condamne une partie au paiement d’un montant provisionnel tenu pour incontestablement dû prononce un jugement définitif.
L’arrêt attaqué, qui « confirme la condamnation de [la demanderesse] à payer à [la défenderesse] un montant provisionnel de 108 144,70 euros » au motif, d’une part, qu’« il est d’ores et déjà établi que [la défenderesse] a subi un dommage conséquent à la suite des manquements retenus à la charge de l’assuré [de la demanderesse] », d’autre part, qu’« il appartiendra à cette dernière de prendre en charge les frais d’expertise déjà avancés par [la défenderesse] et qui s’élèvent à 10 043 euros, à propos desquels [la demanderesse] émet une contestation, et à 48 101,70 euros pour la seconde expertise », considère que cette somme est définitivement allouée à la défenderesse au titre de montant incontestablement dû, partant, prononce un jugement définitif.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Et les dépens de la signification du mémoire en réponse seront délaissés à la défenderesse.
Sur la fin de non-recevoir opposée d’office au pourvoi par le ministère public conformément à l’article 1097 du Code judiciaire en tant qu’il est dirigé contre le défendeur et déduite de ce qu’il est dénué d’intérêt :
Le moyen ne critique pas la décision de dire les demandes dirigées contre le défendeur non fondées.
Même si le pourvoi dirigé contre la défenderesse était accueilli, il n’en résulterait aucun effet quant à cette décision.
Pour le surplus, la demande tendant à ce qu’une décision soit déclarée commune à une partie a pour seul objet d’empêcher que celle-ci puisse éventuellement, dans un litige subséquent l’opposant à la partie demanderesse, objecter que cette décision ne lui est pas opposable.
La demanderesse ne démontre pas l’intérêt qu’elle pourrait avoir à ce que l’arrêt fût déclaré commun à la partie appelée à la cause à cette fin.
La fin de non-recevoir est fondée.
Sur le moyen :
Dans la mesure où il fait grief à l’arrêt attaqué de confirmer la condamnation de la demanderesse au paiement d’un montant provisionnel, le moyen, qui, en aucune de ses branches, n’indique en quoi cette décision viole les dispositions légales invoquées, est imprécis, partant, irrecevable.
Quant à la seconde branche :
Quant au deuxième rameau :
Conformément à l’article 982, alinéa 1er, du Code judiciaire, lorsque le juge désigne plusieurs experts, ces derniers dressent un seul rapport ; ils forment un seul avis à la pluralité des voix ; ils indiquent néanmoins, en cas d’avis différents, les motifs des divers avis ; le rapport est signé par tous les experts judiciaires.
Il s’ensuit que la mission d’expertise confiée à un collège d’experts doit être poursuivie de manière collective jusqu’au dépôt du rapport final par ce collège.
Après avoir relevé, s’agissant de l’« évaluation des séquelles de [la défenderesse] », que le collège d’experts a « transmis ses conclusions […] sans soumettre au préalable aux parties un avis provisoire et en les privant ainsi de la possibilité de faire valoir leurs observations », en sorte que « le principe du contradictoire n’a […] pas été respecté sur cet aspect », l’arrêt attaqué considère que, « eu égard aux devoirs déjà réalisés dans le courant de l’expertise, il convient […] de conférer un caractère provisoire au rapport d’expertise en ce qui concerne l’évaluation du dommage et d’ordonner un complément d’expertise » qu’il confie à l’un des experts de ce collège, lequel doit « soumettre [le rapport d’expertise déposé le 28 janvier 2016] aux parties afin qu’elles fassent, à défaut de pouvoir les concilier, valoir leurs observations à propos de l’évaluation du dommage de [la défenderesse] qui y est contenue, […] déterminer ensuite le taux et la durée des incapacités […] temporaires, la date de consolidation et, le cas échéant, les incapacités permanentes en relation causale avec les manquements retenus à la charge [de l’assuré de la demanderesse], décrire également tous les autres aspects dudit préjudice, […] répondre à toutes questions utiles des parties [et] déposer son rapport affirmé sous serment ».
L’arrêt attaqué, qui, pour remédier à une violation du droit de défense de la demanderesse par le collège d’experts, considère que le rapport définitif n’a qu’un caractère provisoire et confie, non à ce collège d’experts, mais à un seul d’entre eux, la mission de recueillir les observations des parties sur ce rapport et de déposer un rapport final, viole la disposition légale précitée.
Dans cette mesure, le moyen, en ce rameau, est fondé.
Et il n’y a pas lieu d’examiner les autres griefs, qui ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué en tant qu’il ordonne une mesure d’expertise complémentaire et désigne à cette fin le docteur P. M. avec la mission qu’il précise ;
Rejette le pourvoi pour le surplus et la demande en déclaration d’arrêt commun ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Condamne la défenderesse aux dépens de la signification de son mémoire en réponse ; condamne la demanderesse à la moitié des dépens de son pourvoi ; réserve les autres dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond.
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d’appel de Liège.
Les dépens taxés à la somme de neuf cent septante euros quarante-deux centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle, et, pour la signification du mémoire en réponse, à la somme de quatre cent nonante-neuf euros trente et un centimes envers la défenderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Marie-Claire Ernotte et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du quinze décembre deux mille vingt-deux par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.21.0309.F
Date de la décision : 15/12/2022
Type d'affaire : Autres

Analyses

Le juge qui tranche la contestation relative à la validité du rapport final d'expertise ne règle pas un incident relatif à la mesure d'expertise mais, statuant sur la légalité de cette preuve, rend un jugement définitif (1). (1) Voir les concl. du MP.

POURVOI EN CASSATION - MATIERE CIVILE - Délais dans lesquels il faut se pourvoir ou signifier le pourvoi - Décisions contre lesquelles on peut se pourvoir immédiatement - JUGEMENTS ET ARRETS - MATIERE CIVILE - Généralités [notice1]

Le juge qui condamne une partie au paiement d'un montant provisionnel tenu pour incontestablement dû prononce un jugement définitif (1). (1) Voir les concl. du MP.

POURVOI EN CASSATION - MATIERE CIVILE - Délais dans lesquels il faut se pourvoir ou signifier le pourvoi - Décisions contre lesquelles on peut se pourvoir immédiatement - JUGEMENTS ET ARRETS - MATIERE CIVILE - Généralités [notice3]

La mission d'expertise confiée à un collège d'experts doit être poursuivie de manière collective jusqu'au dépôt du rapport final par ce collège (1). (1) Voir les concl. du MP.

JUGEMENTS ET ARRETS - MATIERE CIVILE - Généralités - EXPERTISE [notice5]


Références :

[notice1]

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 19, al. 3 et 1077 - 01 / No pub 1967101052

[notice3]

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 19, al. 3 et 1077 - 01 / No pub 1967101052

[notice5]

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 982, al. ler - 01 / No pub 1967101052


Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-12-15;c.21.0309.f ?

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