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07/12/2022 | BELGIQUE | N°P.22.1499.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 décembre 2022, P.22.1499.F


N° P.22.1499.F
K.G.,
condamné, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Nicolas Cohen et Stéphane Jans, avocats au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 7 novembre 2022 par le tribunal de l’application des peines de Bruxelles.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COU

R
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
1. Le moyen invoque la violation d...

N° P.22.1499.F
K.G.,
condamné, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Nicolas Cohen et Stéphane Jans, avocats au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 7 novembre 2022 par le tribunal de l’application des peines de Bruxelles.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L’avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
1. Le moyen invoque la violation des articles 22 et 47, § 1er, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté, et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il soutient qu’en refusant d’octroyer au demandeur la surveillance électronique au motif qu’il ne dispose à ce jour d’aucune perspective d’obtention d’un droit de séjour sur le territoire belge, le jugement se soustrait à l’enseignement de l’arrêt n° 148/2017 de la Cour constitutionnelle du 21 décembre 2017, dont il résulte que les tribunaux de l’application des peines doivent apprécier au cas par cas l’existence de contre-indications dans le chef du condamné étranger, au regard de sa situation administrative mais aussi familiale et sociale concrète.
2. En vertu de l’article 47, § 1er, de la loi précitée, les modalités d'exécution de la peine prévues au titre V de la loi, parmi lesquelles figure la surveillance électronique, peuvent, en règle, être accordées aux condamnés à une peine privative de liberté de plus de trois ans, pour autant qu'il n'existe pas dans leur chef de contre-indications auxquelles la fixation de conditions particulières ne puisse répondre. Ces contre-indications portent sur l'absence de perspectives de réinsertion sociale du condamné, le risque de perpétration de nouvelles infractions graves, le risque que le condamné importune les victimes, son attitude à l'égard des victimes des infractions qui ont donné lieu à sa condamnation et les efforts consentis pour indemniser la partie civile.

L’article 22 de la loi du 17 mai 2006 définit la surveillance électronique comme étant un mode d'exécution de la peine privative de liberté par lequel le condamné subit l'ensemble ou une partie de celle-ci en dehors de la prison selon un plan d'exécution déterminé, dont le respect est contrôlé notamment par des moyens électroniques.
3. Par l’arrêt susdit, la Cour constitutionnelle a statué sur la conformité des articles 148, 153 et 163 de la loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions diverses en matière de justice, aux articles 10 et 11 de la Constitution lus isolément ou en combinaison avec les articles 8 de la Convention et 22 de la Constitution. Ces articles de la loi du 5 février 2016 inséraient dans la loi du 17 mai 2006 des dispositions interdisant l’octroi à un condamné des modalités de la permission de sortie visée à l’article 4, § 3, de la loi, du congé pénitentiaire, de l’interruption de l’exécution de la peine, de la détention limitée, de la surveillance électronique et de la libération conditionnelle, s’il ressort d’un avis de l’Office des étrangers que le condamné n’est pas autorisé ou habilité à séjourner dans le Royaume.
La Cour constitutionnelle a annulé les articles précités de la loi du 5 février 2016, au motif que la différence de traitement qu’ils créent entre personnes condamnées à une peine privative de liberté sur la base de leur statut de séjour, n’est pas raisonnablement justifiée et entraîne des effets disproportionnés au regard des droits fondamentaux invoqués.
Cette décision est fondée notamment sur les considérations suivantes :
- les modalités d’exécution de la peine concernées ont pour objet de favoriser la réinsertion sociale du condamné, de lui permettre de maintenir, durant le temps de sa détention, des liens familiaux, affectifs et sociaux ou encore de lui permettre de faire face à une situation d’ordre familial grave et exceptionnelle,
- avant l’entrée en vigueur des dispositions attaquées, les autorités compétentes tenaient compte, dans cet examen, de la situation spécifique de séjour des étrangers demandeurs au regard tant des possibilités de réinsertion que du risque de soustraction à l’exécution de la peine,
- les dispositions attaquées excluent de la possibilité de demander et d’obtenir une modalité d’exécution de la peine tous les étrangers dont la présence sur le territoire n’est pas couverte par une autorisation de séjour au moment où ils en font la demande, quels que soient les faits qu’ils ont commis, la peine prononcée à leur égard, leur comportement depuis leur incarcération, l’historique de leur situation administrative de séjour, leurs attaches familiales en Belgique et la possibilité d’éloignement en ce qui les concerne ; par leur caractère absolu et automatique, elles font obstacle à ce que l’autorité compétente examine leur demande à bénéficier d’une mesure leur permettant de préparer leur réinsertion sociale ou de maintenir des liens familiaux, affectifs ou sociaux,
- en ne permettant pas aux autorités compétentes pour octroyer les modalités d’exécution de la peine d’examiner, au regard de la situation administrative, familiale et sociale concrète de l’étranger demandeur, s’il est justifié de lui refuser la modalité qu’il sollicite au motif qu’il ressort d’un avis de l’Office des étrangers qu’il n’est pas autorisé à séjourner sur le territoire, le législateur a pris une mesure disproportionnée.

4. Il résulte des dispositions invoquées au moyen que l’absence de titre de séjour ne constitue pas une contre-indication à l’octroi à un condamné étranger d’une modalité d’exécution de la peine, et il ressort de l’arrêt précité de la Cour constitutionnelle qu’une disposition légale qui interdirait au juge d’accorder à un condamné une modalité d’exécution de la peine au seul motif qu’il ressort d’un avis de l’Office des étrangers qu’il n’est pas autorisé ou habilité à séjourner dans le Royaume, n’est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi que le jugement attaqué l’indique, il appartient au tribunal de l’application des peines d’examiner, de manière individuelle et en prenant en considération la situation administrative, familiale et sociale concrète du condamné, la possibilité de lui accorder une modalité d’exécution qui lui permet de préparer sa réinsertion sociale ou de maintenir des liens familiaux, affectifs et sociaux. Le tribunal doit procéder à cet examen tant dans le cas où le condamné est de nationalité belge ou est étranger et dispose d’un titre de séjour que dans le cas où le condamné étranger n’est pas autorisé à séjourner sur le territoire.
Il ne résulte toutefois pas des dispositions invoquées au moyen ou de l’arrêt de la Cour constitutionnelle que le tribunal de l’application des peines doit faire abstraction de la situation spécifique de séjour du condamné étranger lorsqu’il vérifie l’existence d’une ou de plusieurs des contre-indications légales à l’octroi de la modalité sollicitée, et qu’il lui est interdit d’évaluer l’impact de cette situation sur le caractère réaliste et praticable du plan de réinsertion présenté ainsi que sur les possibilités concrètes de respecter les conditions générales et particulières de la modalité envisagée.
En effet, lorsqu’il vérifie l’absence de contre-indications à l’octroi de la modalité demandée, et, le cas échéant, examine si des conditions particulières peuvent y répondre, le tribunal de l’application des peines tient compte de toutes les circonstances propres à la personne et à la situation administrative, familiale et sociale du condamné, en ce compris la situation administrative spécifique de séjour du condamné étranger et ses effets éventuels sur l’existence d’une ou de plusieurs contre-indications.

5. Le jugement attaqué rejette la demande d’octroi de la surveillance électronique, essentiellement sur le fondement des considérations suivantes :
- le demandeur est né à Charleroi et est de nationalité turque ; il exécute plusieurs peines d’emprisonnement, dont une condamnation à trente ans de réclusion pour des faits de meurtre pour faciliter le vol et de participation à une association de malfaiteurs ; il est détenu depuis le 19 janvier 2008 et aura atteint la fin de ses peines le 26 novembre 2042,
- les faits pour lesquels il a été condamné sont d’une gravité extrême : le 3 décembre 2007, il a pris part à une tentative de vol avec violences dans une habitation ; les policiers appelés sur place ont subi des tirs à l’arme lourde ; une jeune femme, inspectrice de police, a perdu la vie, un autre policier a été gravement blessé, le propriétaire des lieux a été atteint par des tirs de revolver et toute la famille qui vivait dans l’habitation attaquée, dont deux jeunes enfants, a été profondément traumatisée,
- deux demandes de détention limitée ont déjà été introduites et refusées ; dans le deuxième cas, la demande a été rejetée en raison du risque de récidive découlant de la circonstance que les faits du 3 décembre 2007 ont été commis pendant que le demandeur était en liberté conditionnelle ; en outre, avant sa condamnation par la cour d’assises, le demandeur avait fait l’objet de quatre condamnations correctionnelles pour des faits l’impliquant dans le milieu du grand banditisme ; aux yeux du tribunal de l’application des peines qui a refusé cette demande, le risque de récidive ne pouvait être écarté que moyennant des perspectives de réinsertion stables et solides,
- le plan de reclassement présenté à l’appui de l’actuelle demande d’octroi de la surveillance électronique consiste en un logement chez un des frères du demandeur, une activité bénévole au sein de la Croix-Rouge à raison de quatre jours par semaine avec l’accord de cet organisme et la poursuite avec un psychologue indépendant d’un suivi entamé en détention,
- le demandeur ne dispose actuellement pas du droit de séjour sur le territoire ; les recours contre la décision de retrait de séjour sont épuisés ; une demande sur la base du regroupement familial a été introduite le 20 juillet 2022 mais la compagne du demandeur, avec qui il projetait de se marier, est inopinément décédée après le jugement du 15 juin 2022 qui lui accordait quatre congés pénitentiaires ; le 20 octobre 2022, une décision de refus de séjour en qualité de membre de la famille d’un ressortissant de l’Union européenne a été notifiée au demandeur,
- il résulte de l’arrêt précité de la Cour constitutionnelle que l’absence d’un titre de séjour n’empêche pas, par elle-même, l’octroi d’une modalité d’exécution de la peine à un étranger condamné ; le tribunal de l’application des peines doit examiner de manière individuelle la possibilité d’accorder une modalité à celui qui la demande,
- des modalités d’exécution de la peine peuvent être accordées à des condamnés sans titre de séjour lorsqu’ils présentent des perspectives d’obtention d’un tel titre, même si elles sont incertaines ; selon le tribunal, tel est notamment le cas lorsqu’une demande de régularisation de séjour est en cours de traitement, qu’un recours contre un retrait de séjour est pendant ou que l’octroi du titre de séjour dépend de l’accomplissement de démarches administratives, et à condition que l’intéressé dispose d’attaches en Belgique ; dans ces hypothèses, les perspectives de réinsertion sociale sur le territoire belge peuvent être considérées comme suffisantes, même si elles sont aléatoires,
- celles-ci sont par contre inexistantes lorsque, au moment de l’examen de la demande d’octroi de la modalité, aucune éventualité d’obtention d’un titre de séjour n’est présente ; dans ce cas, l’intéressé ne pourra proposer aucun projet de travail rémunéré ou de formation qualifiante puisque ces activités requièrent un titre de séjour ; même un travail bénévole dans l’attente d’une régularisation de sa situation administrative ne peut se concevoir dès lors qu’une telle régularisation n’est pas envisagée ; en outre, ne disposant d’aucun revenu professionnel, l’intéressé risque de se trouver en situation de précarité financière et donc de commettre des infractions pour assurer ses dépenses quotidiennes,
- le demandeur ne dispose à ce jour d’aucune perspective d’obtention d’un droit de séjour sur le territoire belge ; il a confirmé à l’audience qu’aucune demande n’était en cours ; l’autorisation de séjour envisagée sur la base de son lien avec la fille de sa compagne est purement hypothétique,
- il ne peut dès lors proposer aucun projet de réinsertion professionnelle ; le bénévolat proposé ne lui assure aucune ouverture vers le marché du travail, et aucune modification de sa situation sociale n’est envisagée,
- dans ces circonstances, les contre-indications relatives à l’absence de perspectives de réinsertion sociale et au risque de commission de nouvelles infractions graves sont présentes.

Il ressort de ces motifs que les juges de l’application des peines n’ont pas refusé au demandeur le bénéfice de la surveillance électronique uniquement parce qu’il ne peut séjourner légalement sur le territoire, mais qu’ils ont pris cette décision en ayant pris en considération les circonstances propres à sa personne et à sa situation administrative, familiale et sociale, en ce compris la situation administrative spécifique de séjour et les effets de celle-ci sur l’existence des contre-indications à la modalité sollicitée, portant sur l’absence de perspectives de réinsertion sociale et le risque de commission de nouvelles infractions graves.
Ainsi, sans violer les dispositions légales invoquées, le tribunal a légalement justifié sa décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
6. Pris de la méconnaissance de la notion légale de présomption de fait, le moyen soutient que le jugement ne permet pas de savoir d’où le tribunal a déduit l’affirmation que le demandeur ne dispose à ce jour d’aucune perspective d’obtention d’un droit de séjour sur le territoire belge, alors que, par ailleurs, le procès-verbal de l’audience mentionne qu’une dernière possibilité de régularisation de sa situation administrative pourrait être envisagée au regard des liens avec la fille de sa compagne. En outre, le jugement contient des motifs qui se contredisent.
Il ressort du procès-verbal de l’audience du 25 octobre 2022 que ladite possibilité a été évoquée par le conseil du demandeur et non par le tribunal.
Ainsi qu’il est indiqué dans la réponse à la première branche du moyen, le jugement constate, sur la base des éléments énoncés, que les recours contre la décision de retrait de séjour sont épuisés, que la demande de séjour sur la base du regroupement familial introduite le 20 juillet 2022 prenait fin et que le demandeur s’est vu notifier une décision de refus de séjour en qualité de membre de la famille d’un ressortissant de l’Union européenne le 20 octobre 2022.
S’agissant de la possibilité de régularisation sur la base des liens avec la fille de la compagne du demandeur, le jugement considère que l’obtention d’un droit de séjour sur cette base est, à ce jour, purement hypothétique.
Ces motifs permettent de comprendre de quels éléments de fait les juges de l’application des peines ont tiré la conclusion que le demandeur ne disposait d’aucune perspective d’obtention d’un droit de séjour.
Par ailleurs, en énonçant ces motifs, ils n’ont pas déduit, de leurs constatations, des conséquences sans lien avec elles ou qui ne seraient susceptibles, sur leur fondement, d’aucune justification.
A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
Contrairement à ce que le moyen soutient, il n’est pas contradictoire d’énoncer, d’une part, qu’une modalité d’exécution de la peine peut être accordée lorsque le condamné étranger présente des perspectives d’obtention d’un tel titre et que, dans pareil cas, les perspectives de réinsertion sociale peuvent être considérées comme suffisantes même si elles sont aléatoires, et d’autre part, de constater, dans le cas du demandeur, que l’obtention d’un droit de séjour fondé sur son lien avec la fille de sa compagne est à ce jour purement hypothétique.
En effet, en ayant considéré que l’obtention d’une autorisation de séjour était « purement » hypothétique, le tribunal n’a pas considéré que celle-ci était aléatoire ou incertaine, mais bien que le conseil du demandeur avait soulevé une hypothèse dont rien ne permettait de croire qu’elle était susceptible de se réaliser.
Dans cette mesure également, le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la troisième branche :
7. Il ne ressort pas des pièces de la procédure que le demandeur ait invoqué devant le tribunal la possibilité d’obtenir une autorisation de séjour en application de l’article 9bis de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers.
Soutenant que le jugement ne pouvait, sans violer cette disposition légale, conclure à l’inexistence de toute perspective de régularisation de la situation de séjour du demandeur en raison des possibilités qu’il aurait de solliciter une autorisation en vertu de cet article, le moyen, nouveau, requiert pour son examen une vérification des éléments de fait de la cause qui échappe au pouvoir de la Cour.
Le moyen est irrecevable.
Sur le second moyen :
8. Pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 149 de la Constitution, et 22, 47, § 1er, et 56, § 2, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté, le moyen reproche au jugement de ne pas mentionner le caractère positif des avis du directeur et de ne pas indiquer les raisons particulières qui ont conduit le tribunal à s’en écarter.
9. L'article 56, § 2, précité, dispose : « Le tribunal de l'application des peines motive sa décision également avec des raisons particulières lorsque sa décision d'octroi ou de refus de la modalité d'exécution de la peine s'écarte de l'avis du directeur ou de l'avis du ministère public ou lorsque sa décision d'imposer ou non des conditions particulières conformément au paragraphe 1er, alinéa premier, s'écarte de l'avis du directeur ou de l'avis du ministère public ».

Il résulte de cette disposition légale que le jugement doit comporter une motivation qui laisse apparaître les raisons particulières qui ont conduit les juges de l’application des peines à s'écarter de l'avis du directeur de la prison ou de l'avis du ministère public. Il n'en résulte toutefois pas que le tribunal doive indiquer explicitement dans son jugement la teneur ou l’orientation de l’avis du directeur.
Dans la mesure où il est fondé sur une autre interprétation de cette disposition légale, le moyen manque en droit.
10. Le procès-verbal de l’audience du 25 octobre 2022 mentionne que la direction est entendue en son avis favorable quant à la mesure de surveillance électronique.
Les motifs énoncés dans la réponse à la première branche du premier moyen font apparaître les raisons particulières qui ont conduit les juges à s'écarter de l’avis du directeur.
En ayant fondé le refus de la mesure de surveillance électronique sur ces motifs, le tribunal de l'application des peines a régulièrement motivé et légalement justifié sa décision.
A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.

Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de six euros onze centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, Eric de Formanoir, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du sept décembre deux mille vingt-deux par Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.22.1499.F
Date de la décision : 07/12/2022
Type d'affaire : Droit pénal - Droit administratif - Droit constitutionnel - Autres

Analyses

L'absence de titre de séjour ne constitue pas une contre-indication à l'octroi à un condamné étranger d'une modalité d'exécution de la peine, et il ressort de l'arrêt n° 148/2017 du 21 décembre 2017 de la Cour constitutionnelle qu'une disposition légale qui interdirait au juge d'accorder à un condamné une modalité d'exécution de la peine au seul motif qu'il ressort d'un avis de l'Office des étrangers qu'il n'est pas autorisé ou habilité à séjourner dans le Royaume n'est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution (1). (1) Cet arrêt a annulé notamment l'article 153 de la loi la loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions diverses en matière de justice, dite « pot-pourri II », disposition insérant dans la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées (…) un nouvel article 25/2, qui disposait : « la détention limitée, la surveillance électronique et la libération conditionnelle ne sont pas accordées s'il ressort d'un avis de l'Office des étrangers que le condamné n'est pas autorisé ou habilité à séjourner dans le Royaume », cette circonstance ne faisant pas obstacle à l'octroi de la permission de sortie visée à l'article 4, § 2, de ladite loi du 17 mai 2006.

APPLICATION DES PEINES - ETRANGERS - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 10 - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 11 [notice1]

Il appartient au tribunal de l'application des peines d'examiner, de manière individuelle et en prenant en considération la situation administrative, familiale et sociale concrète du condamné, la possibilité de lui accorder une modalité d'exécution qui lui permet de préparer sa réinsertion sociale ou de maintenir des liens familiaux, affectifs et sociaux (1); le tribunal doit procéder à cet examen tant dans le cas où le condamné est de nationalité belge ou est étranger et dispose d'un titre de séjour que dans le cas où le condamné étranger n'est pas autorisé à séjourner sur le territoire ; mais le tribunal de l'application des peines ne doit pas faire abstraction de la situation spécifique de séjour du condamné étranger lorsqu'il vérifie l'existence d'une ou de plusieurs des contre-indications légales à l'octroi de la modalité sollicitée, et il ne lui est pas interdit d'évaluer l'impact de cette situation sur le caractère réaliste et praticable du plan de réinsertion présenté ainsi que sur les possibilités concrètes de respecter les conditions générales et particulières de la modalité envisagée. (1) Voir C. const. 21 décembre 2017, n° 148/2017, §§ B.90.1 et B.90.3 ; Ch. MACQ, « Réinsertion des étrangers condamnés ou internés sans droit de séjour : l'impossible équation ? », J.T., 2022, pp. 497-511.

APPLICATION DES PEINES - ETRANGERS [notice5]

Il résulte de l'article 56, § 2, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté que le jugement doit comporter une motivation qui laisse apparaître les raisons particulières qui ont conduit les juges de l'application des peines à s'écarter de l'avis du directeur de la prison ou de l'avis du ministère public ; il n'en résulte toutefois pas que le tribunal doive indiquer explicitement dans son jugement la teneur ou l'orientation de l'avis du directeur (1). (1) Voir Cass. 26 janvier 2022, RG P.21.1688.F, Pas. 2022, n° 71.

APPLICATION DES PEINES - MOTIFS DES JUGEMENTS ET ARRETS - PAS DE CONCLUSIONS - Matière répressive (y compris les boissons spiritueuses et les douanes et accises) [notice7]


Références :

[notice1]

L. du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine - 17-05-2006 - Art. 22 et 47 - 35 / No pub 2006009456 ;

La Constitution coordonnée 1994 - 17-02-1994 - Art. 10 et 11 - 30 / No pub 1994021048

[notice5]

L. du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine - 17-05-2006 - Art. 22 et 47 - 35 / No pub 2006009456

[notice7]

L. du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine - 17-05-2006 - Art. 56, § 2 - 35 / No pub 2006009456


Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-12-07;p.22.1499.f ?

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