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28/11/2022 | BELGIQUE | N°C.21.0492.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 28 novembre 2022, C.21.0492.F


N° C.21.0492.F
M. C.,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,
contre
J. D.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 11 juin 2021 par la co

ur d’appel de Mons.
Le 31 octobre 2022, l’avocat général Hugo Mormont a déposé des conclusions au ...

N° C.21.0492.F
M. C.,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,
contre
J. D.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 11 juin 2021 par la cour d’appel de Mons.
Le 31 octobre 2022, l’avocat général Hugo Mormont a déposé des conclusions au greffe.
Par ordonnance du 3 novembre 2022, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport et l’avocat général
Hugo Mormont a été entendu en ses conclusions.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
L’article 2251 de l’ancien Code civil dispose que la prescription court contre toutes personnes, à moins qu’elles ne soient dans quelque exception établie par la loi.
Aux termes de l’article 718 du même code, les successions s’ouvrent par la mort.
L’article 724 de ce code précise que les héritiers sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt, sous l’obligation d’acquitter toutes les charges de la succession.
Il s’ensuit que, lorsque l’action est exercée en qualité d’héritier, l’existence d’une exception légale à la prescription s’apprécie dans le chef du de cujus jusqu’à son décès, et seulement ensuite dans le chef de l’héritier.
Dans la mesure où il repose sur le soutènement contraire, le moyen, en cette branche, manque en droit.
Pour le surplus, en vertu de l’article 2262bis, § 1er, alinéa 2, de l’ancien Code civil, toute action en réparation d’un dommage fondée sur une responsabilité extracontractuelle se prescrit par cinq ans à partir du jour qui suit celui où la personne lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l’identité de la personne responsable.
Il s’ensuit que la prescription prend cours lorsque la personne lésée dispose des éléments lui permettant de considérer que la personne pourrait être responsable du dommage en raison d’une faute ou d’un fait générateur de responsabilité.
Ayant constaté que « [la demanderesse] expose que des valeurs mobilières (titres au porteur) [ayant appartenu à sa mère, décédée en 2016], ont fait l’objet d’un vol survenu en ‘août ou septembre 2005’ […] et dont la responsabilité est imputée à la ‘famille […]’ dont fait partie [le défendeur] », qu’« elle déclare avoir été chargée par sa mère de déposer plainte de ce chef, ce qu’elle fit
le 1er octobre 2007 contre [la fille du défendeur et une autre personne] », que, « par la voie d’une audition faite le 14 novembre 2007, [la demanderesse] déclare étendre sa plainte contre différentes personnes dont [le défendeur] » et que « la plainte a fait l’objet d’un classement sans suite », l’arrêt a pu, par une appréciation qui gît en fait, légalement considérer que, « dans la thèse du vol ou du recel ainsi vantée, [la mère de la demanderesse, ainsi que cette dernière, a] eu connaissance […] de l’identité du responsable [au plus tard] en novembre 2007 » de sorte que, « la citation ayant été signifiée le 8 avril 2019, la demande est […] prescrite en ce qu’elle repose sur une base extracontractuelle ».
Et la violation prétendue des articles 870 du Code judiciaire et 8.4 du Code civil est entièrement déduite de celle, vainement alléguée, de l’article 2262bis précité.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant à la seconde branche :
La considération, vainement critiquée par la première branche du moyen, que « la demande est […] prescrite en ce qu’elle repose sur une base extracontractuelle » suffit à fonder le rejet de l’action en responsabilité extracontractuelle de la demanderesse.
Dans la mesure où il fait grief à l’arrêt de violer les articles 1382 et 1383 de l’ancien Code civil en excluant cette responsabilité, le moyen, en cette branche, qui ne saurait entraîner la cassation, est dénué d’intérêt, partant, irrecevable.
Pour le surplus, ayant ainsi décidé que cette demande est prescrite, l’arrêt n’était tenu ni de répondre aux conclusions de la demanderesse relatives à l’établissement de la responsabilité extracontractuelle du défendeur, que cette décision privait de pertinence, ni de motiver sa décision que cette responsabilité n’est pas établie.
Dans la mesure où il est recevable, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
D’une part, l’action en revendication trouve son fondement dans l’article 544 de l’ancien Code civil, applicable au litige.
L’article 2279 de ce code n’est pas applicable à l’action en revendication de la demanderesse et l’arrêt, qui limite l’application de la règle de fond de cette dernière disposition au conflit « entre un verus dominus prétendu (ou ses héritiers) et un tiers acquéreur a non domino » mais constate que le litige concerne « une acquisition a domino », ne l’y applique pas.
Le moyen, qui fait grief à l’arrêt de violer l’article 2279 précité, ne saurait entraîner la cassation.
D’autre part, l’examen du grief de contradiction dénoncé par le moyen suppose l’interprétation des dispositions légales dont la décision attaquée fait application.
Ce grief n’équivaut pas à une absence de motifs et est étranger à la règle de forme prescrite par l’article 149 de la Constitution.
Dans cette mesure, le moyen est irrecevable.
Pour le surplus, en vertu du principe général du droit dit principe dispositif, le juge ne peut élever une contestation dont l'accord des parties exclut l'existence.
Cet accord ne peut se déduire de la seule absence de contestation par une partie, dans ses conclusions, d'une prétention juridique invoquée par l'autre partie.
Dans la mesure où il est recevable, le moyen, qui repose sur le soutènement contraire, manque en droit.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de sept cent septante-deux euros nonante-deux centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Mireille Delange, président, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du vingt-huit novembre deux mille vingt-deux par le président de section Mireille Delange, en présence de l’avocat général Hugo Mormont, avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.21.0492.F
Date de la décision : 28/11/2022
Type d'affaire : Droit civil - Autres

Analyses

Lorsqu'une action est exercée en qualité d'héritier, l'existence d'une exception légale à la prescription s'apprécie dans le chef du de cujus jusqu'à son décès, et seulement ensuite dans le chef de l'héritier (1). (1) Voir les concl. du MP.

PRESCRIPTION - MATIERE CIVILE - Généralités - DEMANDE EN JUSTICE - SUCCESSION [notice1]

La prescription de l'action en réparation d'un dommage fondée sur une responsabilité extracontractuelle prend cours lorsque la personne lésée dispose des éléments lui permettant de considérer que la personne pourrait être responsable du dommage en raison d'une faute ou d'un fait générateur de responsabilité (1). (1) Voir les concl. du MP.

PRESCRIPTION - MATIERE CIVILE - Délais (Nature. Durée. Point de départ. Fin) - RESPONSABILITE HORS CONTRAT - GENERALITES [notice4]

L'action en revendication trouve son fondement dans l'article 544 de l'ancien Code civil (1). (1) Voir les concl. du MP.

REVENDICATION [notice6]

Est non recevable, à l'appui d'un pourvoi en matière civile, le moyen qui invoque la violation d'une disposition légale qui n'est pas applicable au litige et dont le juge ne fait pas application (1). (1) Voir les concl. du MP.

MOYEN DE CASSATION - MATIERE CIVILE - Intérêt

En vertu du principe général du droit dit principe dispositif, le juge ne peut élever une contestation dont l'accord des parties exclut l'existence; cet accord ne peut se déduire de la seule absence de contestation par une partie, dans ses conclusions, d'une prétention juridique invoquée par l'autre partie (1). (1) Voir les concl. du MP.

PRINCIPES GENERAUX DU DROIT [notice8]


Références :

[notice1]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 718, 724 et 2251 - 30 / No pub 1804032150

[notice4]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 2262bis, § 1er, al. 2 - 30 / No pub 1804032150

[notice6]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 544 - 30 / No pub 1804032150

[notice8]

Principe général du droit dit principe dispositif


Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-11-28;c.21.0492.f ?

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