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24/11/2022 | BELGIQUE | N°C.21.0197.F-C.21.0363.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 novembre 2022, C.21.0197.F-C.21.0363.F


N° C.21.0197.F
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires étrangères, des Affaires européennes et du Commerce extérieur, et des Institutions culturelles fédérales, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Petits Carmes, 15,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile,
contre
INTERNATIONAL HOTELS WORLDWIDE INC., société de droit étranger, dont le siège est établi à Tortola (Ã

Žles Vierges Britanniques), Akara Building, Road Town, Tortola De Castro Street,
défender...

N° C.21.0197.F
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires étrangères, des Affaires européennes et du Commerce extérieur, et des Institutions culturelles fédérales, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Petits Carmes, 15,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile,
contre
INTERNATIONAL HOTELS WORLDWIDE INC., société de droit étranger, dont le siège est établi à Tortola (Îles Vierges Britanniques), Akara Building, Road Town, Tortola De Castro Street,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
en présence de
AION BANK, anciennement dénommée Banca Monte Paschi Belgio, société anonyme, dont le siège est établi à Ixelles, avenue de la Toison d'Or, 26-28, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0403.199.306,
partie appelée en déclaration d’arrêt commun.
N° C.21.0363.F
INTERNATIONAL HOTELS WORLDWIDE INC., société de droit étranger, dont le siège est établi à Tortola (Îles Vierges Britanniques), Akara Building, Road Town, Tortola De Castro Street,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
1. ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires étrangères, des Affaires européennes et du Commerce extérieur, et des Institutions culturelles fédérales, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Petits Carmes, 15,
2. AION BANK, anciennement dénommée Banca Monte Paschi Belgio, société anonyme, dont le siège est établi à Ixelles, avenue de la Toison d'Or, 26-28, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0403.199.306,
défendeurs en cassation.
I. La procédure devant la Cour
Les pourvois en cassation sont dirigés contre l’arrêt rendu le 6 février 2018 par la cour d’appel de Liège, statuant comme juridiction de renvoi ensuite de l’arrêt de la Cour du 15 janvier 2016.
Le président de section Michel Lemal a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
À l’appui du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.21.0197.F, le demandeur présente un moyen dans la requête en cassation jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme.
À l’appui du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.21.0363.F, la demanderesse présente un moyen dans la requête en cassation jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme.
III. La décision de la Cour

Les pourvois sont dirigés contre le même arrêt. Il y a lieu de les joindre.
Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.21.0197.F :
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
L’arrêt attaqué énonce que « l’article V de la convention d’Ottawa [sur le statut de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, des représentants nationaux et du personnel international, conclue le 20 septembre 1951], prévoit [que] ‘l’organisation, ses biens et avoirs, quels que soient leur siège et leur détenteur, jouissent de l’immunité de juridiction, sauf dans la mesure où le président des suppléants du conseil, agissant au nom de l’Organisation, y a expressément renoncé dans un cas particulier’ », et que « la convention qui comprend la clause d’arbitrage contraignante est signée par l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord par l’intermédiaire de deux personnes, un financial controller et un chief purchasing and contracts, outre un […] head of trade & commerce du civil affairs office » ; il considère qu’« il appert de la résolution du 20 septembre 1951, publiée au Moniteur belge et intégrée dans le droit belge le
6 mars 1953, que le poste de président du conseil des suppléants a été supprimé le 4 avril 1952 et que, par conséquent, ‘lesdites fonctions seront exercées par le secrétaire général de l’Organisation ou, en son absence, par son représentant ou par toute autre personne désignée par le conseil de l’Atlantique Nord’ », que « la signature de l’exécutif du secrétaire général rencontre ce prescrit » et que « l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord n’a d’ailleurs jamais soutenu que les signataires n’avaient pas qualité pour l’engager ».
Il suit de ces motifs que l’arrêt attaqué considère qu’en tant que membres « de l’exécutif du secrétaire général », les signataires de la convention d’arbitrage ont agi en qualité de représentant dudit secrétaire général.
Le moyen, qui, en cette branche, procède d’une interprétation inexacte de cet arrêt, manque en fait.
Quant à la deuxième branche :
Le moyen, qui, en cette branche, repose sur la considération que les articles V et VI de la convention d’Ottawa excluent toute renonciation par l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord à son immunité d’exécution et qu’il n’y est pas dérogé par l’article III de cette convention mais ne critique pas les considérations de l’arrêt attaqué que « la finale de l’article V ne peut s’entendre comme une impossibilité pour l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord de renoncer à son immunité d’exécution », que « cela reviendrait à considérer l’immunité de l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord comme absolue, la plaçant en dehors de tout droit, rendrait inexécutable et inutile tout jugement à son encontre, bafouant de ce fait les droits de l’homme et la possibilité de recourir à un juge », qu’« en tout état de cause, les immunités ne se justifient que pour autant qu’elles garantissent la poursuite du but qui leur est assigné », que « tel n’est pas le cas d’espèce », et qu’« au surplus, le recours à l’arbitrage emporte une renonciation à l’immunité de juridiction et n’a de sens que si cela implique également une renonciation à l’immunité d’exécution pour avoir un effet utile », ne saurait entraîner la cassation, partant, dénué d’intérêt, est irrecevable.
Quant à la troisième et à la quatrième branche :
L’arrêt attaqué ne fonde pas sa décision qu’« en souscrivant à [la] clause d’arbitrage, l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord a renoncé non seulement à son immunité de juridiction mais également à son immunité d’exécution et ce, de manière expresse », sur la seule mention dans cette clause des termes « cette décision sera contraignante pour les autres parties » mais également sur les considérations que « cette lecture [de cette clause] est confortée par le fait que l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord ne s’est pas opposée à la saisie alors pourtant qu’elle lui avait été dénoncée par exploit d’huissier », qu’« en tout état de cause, les immunités ne se justifient que pour autant qu’elles garantissent la poursuite du but qui leur est assigné », que « tel n’est pas le cas d’espèce », et qu’« au surplus, le recours à l’arbitrage emporte une renonciation à l’immunité de juridiction et n’a de sens que si cela implique également une renonciation à l’immunité d’exécution pour avoir un effet utile ».
Le moyen, qui, en chacune de ces branches, procède d’une lecture incomplète de cet arrêt, manque en fait.
Et le rejet du pourvoi prive d’intérêt la demande en déclaration d’arrêt commun.
Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro C.21.0363.F :
Sur le moyen :
L’arrêt attaqué considère que « c’est de manière non fondée que [la demanderesse] soutient que l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 22 avril 2013 (en matière de saisie), qui se fonde sur l’arrêt cassé de la cour [d’appel] de Bruxelles du 26 juin 2012, est nul de plein droit et qu’ainsi, la cour [d’appel] de céans peut confirmer le jugement du 28 juillet 2011 prononcé par le juge des saisies près le tribunal de première instance de Bruxelles », qu’« un jugement ne peut être annulé qu’à la suite de l’exercice d’un recours (article 20 du Code judiciaire) », qu’« une décision ne peut être critiquée une fois que le délai pour ce faire a expiré », que « tel est le cas de cet arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 22 avril 2013 statuant sur une décision du juge des saisies de Bruxelles », que « la cassation d’un arrêt entraîne l’annulation de la décision qui en est la suite uniquement », que, « s’il ne peut être contesté qu’il existe un lien entre les arrêts de la cour d’appel de Bruxelles des 26 juin 2012 et 22 avril 2013, la demande faisant l’objet de l’arrêt du 22 avril 2013 se rapporte aux effets à accorder à l’ordonnance d’exequatur en attente de la décision à rendre sur le bien-fondé de la tierce opposition, la cour d’appel se prévalant des termes de l’arrêt du 26 juin 2012 pour déclarer la demande de suspension de l’exécution de cette ordonnance sans objet », que, « dans cet arrêt [du 22 avril 2013], la cour [d’appel de Bruxelles] a jugé en tant que juge des saisies saisi d’un appel à l’encontre d’une décision du juge des saisies [de première] instance et non en tant que juge d’appel d’une décision prononcée par le président du tribunal de première instance », qu’« il n’y a donc pas de lien procédural entre ces décisions même s’il va de soi que l’arrêt du 22 avril 2013 se rapporte à l’exécution de la même décision d’exequatur », qu’« il ne peut donc être considéré que la cassation prononcée le 4 octobre 2013 à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 26 juin 2012 emporte cassation de l’arrêt prononcé par la cour d’appel de Bruxelles le 22 avril 2013 » et que « la cour [d’appel] de céans n’est donc pas saisie des demandes qui ont été formulées dans le cadre de la procédure qui a débouché sur l’arrêt prononcé par la cour [d’appel] de Bruxelles le 22 avril 2013 ».
Quant à la première branche :
Par les considérations reproduites en tête de la réponse au moyen, l’arrêt attaqué répond, en les contredisant, aux conclusions de la demanderesse, qui, à l’appui de sa demande de confirmer le jugement rendu le 28 juillet 2011 par le juge des saisies du tribunal de première instance de Bruxelles, faisait valoir que la cassation prononcée le 4 octobre 2013 à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 26 juin 2012 emportait cassation de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 22 avril 2013 qui avait réformé ce jugement.
Il n’était pas tenu, en outre, de répondre à chacun des arguments de la demanderesse, qui ne constituaient pas de moyen distinct.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
Lorsqu'elle est prononcée, et dans la mesure où elle l'est, la cassation a pour effet de remettre les parties devant le juge de renvoi dans la situation où elles se trouvaient devant le juge dont la décision a été cassée.
La compétence du juge de renvoi s’étend à tout ce qui tombait sous la compétence du juge dessaisi.
Si la cassation entraîne, de plein droit, par voie de conséquence, l’annulation des actes et des jugements qui sont la suite de la décision cassée et, en cas de cassation partielle, l’annulation de toute la procédure et de tous les actes faits en vertu de la partie annulée de la décision, alors même que les actes et décisions ultérieurs n’auraient été l’objet d’aucun recours et alors même que l’arrêt de cassation n’a pas prononcé ou constaté cette annulation, la cassation ne s’étend pas aux décisions prononcées dans une cause dont le juge qui a rendu la décision cassée n’était pas saisi, ces décisions fussent-elles fondées sur la décision cassée, et n’a pas pour effet de saisir le juge de renvoi d’une telle cause.
L’arrêt attaqué, qui, sur la base des considérations reproduites en tête de la réponse au moyen, décide que la cassation de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 26 juin 2012, qui statue sur la tierce opposition formée à l’encontre de l’ordonnance d’exequatur de la sentence arbitrale, ne s’étend pas à l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 22 avril 2013, qui, en tant que juge d’appel du juge des saisies, statue sur une demande relative à l’exécution de la même décision d’exequatur, et que la cour d’appel de Liège n’est pas saisie de l’appel du jugement rendu le 28 juillet 2011 par le juge des saisies du tribunal de première instance de Bruxelles sur lequel statue l’arrêt du 22 avril 2013, ne viole aucune des dispositions légales visées au moyen en cette branche.
Celui-ci ne peut être accueilli.
Quant à la troisième branche :
Il résulte des motifs reproduits en tête de la réponse au moyen que l’arrêt attaqué considère que la cour d’appel de Liège n’était pas saisie d’une demande de la demanderesse de voir vider les mains du défendeur entre celles de l’huissier instrumentant distincte de celle que la demanderesse avait introduite devant le juge des saisies du tribunal de première instance de Bruxelles et que l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 22 avril 2013 dit non fondée.
Dès lors qu’il ne fait pas grief à l’arrêt attaqué d’ainsi déterminer la saisine de la cour d’appel de Liège, le moyen, en cette branche, qui ne saurait entraîner la cassation, est dénué d’intérêt, partant, irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Joint les pourvois inscrits au rôle général sous les numéros C.21.0197.F et C.21.0363.F ;
Rejette les pourvois et la demande en déclaration d’arrêt commun ;
Condamne chacun des demandeurs aux dépens de son pourvoi.
Les dépens taxés dans la cause C.21.0197.F à la somme de deux cent nonante-quatre euros soixante-six centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Les dépens taxés dans la cause C.21.0363.F à la somme de trois cent vingt-trois euros septante-neuf centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Ariane Jacquemin et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du vingt-quatre novembre deux mille vingt-deux par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.21.0197.F-C.21.0363.F
Date de la décision : 24/11/2022
Type d'affaire : Autres

Analyses

Lorsqu'elle est prononcée, et dans la mesure où elle l'est, la cassation a pour effet de remettre les parties devant le juge de renvoi dans la situation où elles se trouvaient devant le juge dont la décision a été cassée; La compétence du juge de renvoi s'étend ä tout ce qui tombait sous la compétence du juge dessaisi (1). (1) Cass. 8 mars 2019, RG C.16.0130.N, Pas. 2019, n° 146.

RENVOI APRES CASSATION - MATIERE CIVILE

Si la cassation entraîne, de plein droit, par voie de conséquence, l'annulation des actes et des jugements qui sont la suite de la décision cassée et, en cas de cassation partielle, l'annulation de toute la procédure et de tous les actes faits en vertu de la partie annulée de la décision, alors même que les actes et décisions ultérieurs n'auraient été l'objet d'aucun recours et alors même que l'arrêt de cassation n'a pas prononcé ou constaté cette annulation, la cassation ne s'étend pas aux décisions prononcées dans une cause dont le juge qui a rendu la décision cassée n'était pas saisi, ces décisions fussent-elles fondées sur la décision cassée, et n'a pas pour effet de saisir le juge de renvoi d'une telle cause (1). (1) Cass. 13 septembre 2012, RG C.11.0730.F, Pas. 2012, n° 465.

CASSATION - ETENDUE - Matière civile


Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-11-24;c.21.0197.f.c.21.0363.f ?

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