La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/11/2022 | BELGIQUE | N°C.21.0407.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 novembre 2022, C.21.0407.F


N° C.21.0407.F
M. U.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Gilles Genicot et assisté par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocats à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
AG INSURANCE, société anonyme, dont le siège est établi à Bruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0404.494.849,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabin

et est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de...

N° C.21.0407.F
M. U.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Gilles Genicot et assisté par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocats à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
AG INSURANCE, société anonyme, dont le siège est établi à Bruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0404.494.849,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 11 janvier 2021 par la cour d’appel de Liège.
Le conseiller Marie-Claire Ernotte a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par la défenderesse et déduite de ce que la disposition légale dont la violation est invoquée n’est pas applicable au litige :
L’arrêt considère que « le sinistre intentionnel n’est pas défini par le contrat d’assurance » et qu’« il convient de se référer à la définition donnée à ce terme dans le cadre de l’application de l’article 62, alinéa 1er, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances ».
Le moyen invoque ainsi la violation d’une disposition légale dont le juge d’appel a fait application.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Sur le fondement du moyen :
Aux termes de l’article 62, alinéa 1er, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances, nonobstant toute convention contraire, l’assureur ne peut être tenu de fournir sa garantie à l’égard de quiconque a causé intentionnellement le sinistre.
La faute intentionnelle, qui suppose la volonté de causer un dommage résultant de la réalisation d’un risque couvert par le contrat d’assurance, autorise l’assureur à refuser sa garantie, non seulement pour ce dommage, mais aussi pour les dommages qui lui sont unis par un lien nécessaire.
Elle ne permet en revanche pas à l’assureur de refuser sa garantie lorsque le dommage résultant de la réalisation d’un risque couvert est distinct de celui que l’assuré a eu la volonté de causer.
L’arrêt énonce qu’« en date du 10 mai 2013, [le demandeur], alors âgé de dix-huit ans, blesse grièvement [la victime], née en septembre 1999, à l’œil droit, en jetant une pierre dans sa direction », que, « par un jugement du 25 mai 2016, le tribunal correctionnel du Luxembourg […] dit la prévention de coups ou blessures volontaires non établie et la prévention de coups et blessures par défaut de prévoyance et de précaution établie », que, « par une citation du 18 août 2017, [le demandeur] a assigné la [défenderesse en vue d’obtenir] sa condamnation à le garantir de toute condamnation mise à sa charge suite aux faits du 10 mai 2013 » et que la victime et sa mère demandent la condamnation de la défenderesse à un montant provisionnel ainsi que « la désignation d’un expert-médecin chargé d’établir le bilan séquellaire de [la victime] ».
Il relève que « l’absence d’intention [du demandeur] d’attenter à l’intégrité physique d’autrui, qui constitue le soutien nécessaire de la qualification pénale retenue, s’impose à la [défenderesse] » et que, dès lors, « la volonté d’attenter à l’intégrité physique d’autrui, [ainsi] exclue, […] ne peut […] fonder la faute intentionnelle ».
Il considère toutefois, « au vu des circonstances de la cause », qu’« un lancer de pierre avec une force telle qu’elle […] heurte [la personne] à hauteur d’homme à plus de vingt mètres est incontestablement un acte d’intimidation » et que « les conséquences dommageables de pareil acte d’intimidation [sont] de nature à fonder la responsabilité civile de son auteur » en sorte qu’est établie « la volonté [du demandeur] de causer un dommage couvert par la garantie responsabilité civile vie privée consentie par la [défenderesse] ».
En considérant que le demandeur a voulu le dommage résultant de son acte d’intimidation, à savoir effrayer les membres du groupe dont faisait partie la victime, qu’il a ainsi commis une faute intentionnelle et que les conséquences de celle-ci s’étendent à un dommage qui n’est pas en lien nécessaire avec cette frayeur, soit la perte d’un œil par la victime, l’arrêt ne justifie pas légalement sa décision de déclarer fondé le refus d’intervention de la défenderesse.
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué, sauf en tant qu’il dit irrecevable l’appel du demandeur contre la victime et sa mère ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d’appel de Mons.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Mireille Delange, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du trois novembre deux mille vingt-deux par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.21.0407.F
Date de la décision : 03/11/2022
Type d'affaire : Droit commercial

Composition du Tribunal
Président : STORCK CHRISTIAN
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : WERQUIN THIERRY
Assesseurs : DELANGE MIREILLE, ERNOTTE MARIE-CLAIRE, JACQUEMIN ARIANE, MORIS MARIELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-11-03;c.21.0407.f ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award