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28/01/2022 | BELGIQUE | N°C.19.0345.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 28 janvier 2022, C.19.0345.F


N° C.19.0345.F
COMMUNE DE BERTRIX, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Bertrix, rue de la Gare, 38,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
TELENET GROUP, société anonyme, dont le siège est établi à Woluwe-Saint-Lambert, rue Neerveld, 107, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0462.925.669,
défenderesse en cassation,
représe

ntée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi ...

N° C.19.0345.F
COMMUNE DE BERTRIX, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Bertrix, rue de la Gare, 38,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
TELENET GROUP, société anonyme, dont le siège est établi à Woluwe-Saint-Lambert, rue Neerveld, 107, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0462.925.669,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 12 juin 2018 par la cour d’appel de Liège.
Le conseiller Sabine Geubel a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la seconde branche :
La règle de l'égalité des Belges devant la loi contenue dans l'article 10 de la Constitution, celle de la non-discrimination dans la jouissance des droits et libertés reconnus aux Belges inscrite dans l'article 11 de la Constitution ainsi que celle de l'égalité devant l'impôt exprimée dans l'article 172 de la Constitution impliquent que tous ceux qui se trouvent dans la même situation soient traités de la même manière mais n'excluent pas qu'une distinction soit faite entre différentes catégories de personnes pour autant que le critère de distinction soit susceptible de justification objective et raisonnable ; l'existence d'une telle justification doit s'apprécier par rapport au but et aux effets de la mesure prise ou de l'impôt instauré ; le principe d'égalité est également violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
L’existence d’une différence de traitement doit s’apprécier, non sur la base de faits certains et établis, mais de façon abstraite, en tenant compte des risques d’inégalité résultant du champ d’application du règlement litigieux.
L’arrêt constate que « la catégorie des propriétaires de pylônes visée par la taxe est restreinte ; loin de taxer les propriétaires de pylônes de télécommunication en général, le libellé de l’article 1er du règlement-taxe litigieux instaure une taxe limitée aux propriétaires de pylônes de diffusion pour GSM ou affectés à un tel système ».
Il considère que « les propriétaires de pylônes permettant la transmission de paroles ou de données par la voie des airs énumérés par [la défenderesse] », notamment « les pylônes accueillant des antennes ou relais de radiodiffusion ou de télédiffusion […], les pylônes, mâts et antennes des fournisseurs d’accès à internet par les ondes ou ceux qui sont nécessaires pour les réseaux wi-fi », d’une part, « les propriétaires de pylônes de diffusion pour GSM », d’autre part, « se trouvent dans des situations comparables au regard de l’activité exercée, des éventuels inconvénients générés et des moyens techniques mis en œuvre ».
Il énonce que le contrôle de la conformité du règlement aux principes constitutionnels d’égalité et de non-discrimination « a un caractère objectif et abstrait », de sorte qu’en présence, comme en l’espèce, « d’un règlement-taxe distinguant et traitant différemment deux catégories de personnes comparables sans qu’il existe une justification raisonnable, il ne peut être opposé à la catégorie discriminée le fait qu’aucune personne ne relève actuellement de celle qui est avantagée ».
Par ces énonciations, l’arrêt justifie légalement sa décision d’annuler la taxe litigieuse pour inconstitutionnalité du règlement-taxe.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant à la première branche :
D’une part, les considérations vainement critiquées par la seconde branche du moyen suffisent à fonder la décision de l’arrêt que « l’inconstitutionnalité du règlement-taxe est […] établie du fait qu’il crée une distinction entre contribuables comparables sans justification raisonnable ».
Dans la mesure où il est dirigé contre des considérations surabondantes relatives à la charge de la preuve, le moyen, qui, en cette branche, ne saurait entraîner la cassation, est dénué d’intérêt.
D’autre part, la prétendue violation des articles 10, 11, 172 et 159 de la Constitution est tout entière déduite de celle, vainement alléguée, des articles 1315 de l’ancien Code civil et 870 du Code judiciaire.
Enfin, le grief fait à l’arrêt, qui répond aux conclusions de la demanderesse sur l’absence d’autres pylônes de télécommunication sur le territoire communal en considérant que la preuve du fait ainsi allégué n’est pas faite, de ne pas indiquer en quoi les pièces produites ne l’ont pas conduit à la décision inverse, est étranger à la règle de forme de l’article 149 de la Constitution.
Le moyen, en cette branche, est irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de trois cent deux euros soixante et un centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Mireille Delange, les conseillers Sabine Geubel, Ariane Jacquemin et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du vingt-huit janvier deux mille vingt-deux par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.19.0345.F
Date de la décision : 28/01/2022
Type d'affaire : Droit fiscal - Droit constitutionnel

Analyses

La règle de l'égalité des Belges devant la loi contenue dans l'article 10 de la Constitution, celle de la non-discrimination dans la jouissance des droits et libertés reconnus aux Belges inscrite dans l'article 11 de la Constitution ainsi que celle de l'égalité devant l'impôt exprimée dans l'article 172 de la Constitution impliquent que tous ceux qui se trouvent dans la même situation soient traités de la même manière mais n'excluent pas qu'une distinction soit faite entre différentes catégories de personnes pour autant que le critère de distinction soit susceptible de justification objective et raisonnable; l'existence d'une telle justification doit s'apprécier par rapport au but et aux effets de la mesure prise ou de l'impôt instauré; le principe d'égalité est également violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé (1). (1) Cass. 1er octobre 2021, RG F.19.0012.F, Pas. 2021, n° 607.

TAXES COMMUNALES, PROVINCIALES ET LOCALES - TAXES COMMUNALES - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1831 (ART. 1 A 99) - Article 10 - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 11 - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 100 A FIN) - Article 172 [notice1]

L’existence d’une différence de traitement doit s’apprécier, non sur la base de faits certains et établis, mais de façon abstraite, en tenant compte des risques d’inégalité résultant du champ d’application du règlement litigieux.

TAXES COMMUNALES, PROVINCIALES ET LOCALES - TAXES COMMUNALES - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 10 - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 11 - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 100 A FIN) - Article 172 [notice5]


Références :

[notice1]

La Constitution coordonnée 1994 - 17-02-1994 - Art. 10, 11 et 172 - 30 / No pub 1994021048

[notice5]

La Constitution coordonnée 1994 - 17-02-1994 - Art. 10, 11 et 172 - 30 / No pub 1994021048


Composition du Tribunal
Président : STORCK CHRISTIAN
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : WERQUIN THIERRY
Assesseurs : DELANGE MIREILLE, GEUBEL SABINE, JACQUEMIN ARIANE, MORIS MARIELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-01-28;c.19.0345.f ?

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