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24/12/2021 | BELGIQUE | N°C.21.0064.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 décembre 2021, C.21.0064.F


N° C.21.0064.F
E. J.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,
contre
1. Christian VAN BUGGENHOUT, avocat au barreau de Bruxelles,
dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue aux Laines, 70,
2. Ilse VAN DE MIEROP, avocat aux barreaux de Bruxelles et de
Louvain, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue aux Laines, 70,
3. Alain D’IETEREN, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet

est établi
à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 187,
agissant en qualité de curate...

N° C.21.0064.F
E. J.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,
contre
1. Christian VAN BUGGENHOUT, avocat au barreau de Bruxelles,
dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue aux Laines, 70,
2. Ilse VAN DE MIEROP, avocat aux barreaux de Bruxelles et de
Louvain, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue aux Laines, 70,
3. Alain D’IETEREN, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi
à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 187,
agissant en qualité de curateurs à la faillite de la société anonyme Sabena,
défendeurs en cassation,
représentés par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 453, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 29 octobre 2020 par la cour d’appel de Bruxelles.
Le président de section Michel Lemal a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Le moyen repose sur la considération que le fait que les défendeurs n’aient pas informé l’avocat congolais du demandeur de la signification du jugement rendu par défaut le 5 juin 2014 est constitutif d’un manquement aux obligations déontologiques résultant des articles 6.6 du code de déontologie de l'avocat, adopté par l'assemblée générale de l'Ordre des barreaux francophones et germanophone le 15 octobre 2012, applicable aux avocats investis d’un mandat de justice en vertu de l’article 2.7 de ce code, et 2 du règlement de l'Orde van Vlaamse Balies du 31 janvier 2007 relatif aux procédures en relation avec les règles de confraternité, applicable aux avocats investis d’un mandat de justice en vertu de l’article 2 du règlement concernant l’acceptation de mandats judiciaires, approuvé par l’assemblée générale de l'Orde van Vlaamse Balies du 21 novembre 2007.
Aux termes de l’article 496 du Code judiciaire, l’Ordre des barreaux francophones et germanophone et l'Orde van Vlaamse Balies arrêtent des règlements appropriés en ce qui concerne les compétences visées à l'article 495 et fixent, pour les relations entre les membres des différents barreaux qui en font partie, les règles et usages de la profession d'avocat et les unifient. À cette fin, ils arrêtent des règlements appropriés.
L’article 498 de ce code dispose que les règlements, adoptés conformément à l'article 496, s'appliquent à tous les avocats des barreaux faisant partie soit de l'Ordre des barreaux francophones et germanophone, soit de l'Orde van Vlaamse Balies, suivant que lesdits règlements ont été adoptés par l'un ou par l'autre ordre.
Le moyen, qui, à défaut d’indiquer à quel ordre appartient chacun des défendeurs, oblige la Cour à rechercher cet élément de fait pour déterminer les normes déontologiques qui leur sont respectivement applicables, est imprécis.
Et la prétendue violation des autres dispositions légales et la prétendue méconnaissance du principe général du droit visés au moyen sont entièrement déduites de la violation vainement alléguée des normes déontologiques précitées.
Le moyen est irrecevable.

Sur le second moyen :
L’arrêt attaqué relève que le demandeur « soutient […] que son opposition ‘est recevable en raison d'un cas de force majeure et en vertu du droit à une procédure équitable’ », que « ce moyen repose sur la prémisse factuelle selon laquelle la poste de Kinshasa ne lui a jamais transmis le pli recommandé contenant la signification du jugement du 5 juin 2014, mais ne lui a pas non plus laissé un quelconque avis de passage à son domicile », qu’il « affirme qu'à supposer qu'un agent de la poste se soit présenté à son domicile le 22 août 2014 comme l'affirment les [défendeurs] en se basant sur une mention apportée sur l'enveloppe adressée [au demandeur], - cet agent ‘n’aurait pas rencontré un préposé [du demandeur] (...) mais deux agents de la police nationale congolaise, ce qui reste à démontrer par les [défendeurs], nullement dûment préposés ou serviteurs [du demandeur], chargés de recevoir les plis et les courriers’, - les [défendeurs] ne démontrent pas qu'il aurait été informé par le gardien de son immeuble et par l'avis de passage et qu'il a négligé de se rendre à la poste, - ‘à l'époque’, la poste congolaise était en proie à des dysfonctionnements considérables, en conséquence, elle n'était pas en mesure d'assurer le fonctionnement des services postaux, - la poste congolaise ne dépose pas gratuitement des avis de passage, mais établit des avis d'arrivée qui invitent le destinataire à retirer le courrier au bureau indiqué, avis d'arrivée qui ne sont remis au destinataire que moyennant le paiement d'une taxe de 14.000 francs congolais (qui n'a pas pu être payée en l'occurrence vu l'absence [du demandeur] et à défaut d'un préposé apte à effectuer ce paiement), [et] - on ne peut considérer qu’il néglige de prendre connaissance de son courrier puisqu’il a rapidement réagi lorsque, le 27 février 2015, il a reçu pour la première fois un avis d’arrivée ».
Il considère que, « d'une part, on ne peut pas douter que le pli contenant la copie de l'exploit de signification du jugement du 5 juin 2014 a été présenté à son domicile pour la première fois le 22 août 2014, ce qui est corroboré par le timbre à date présent sur l'enveloppe et qui témoigne de l'arrivée du pli à la poste de Kinshasa le 21 août 2014 » et que « le même rythme est d'ailleurs observé pour plusieurs plis, environ deux mois s'écoulant entre leur expédition et leur arrivée à Kinshasa » puisque « le pli contenant copie de la citation introductive d'instance a été expédié le 10 janvier 2014 et présenté pour la première fois le 4 mars 2014 [et] le pli contenant copie de l'exploit de saisie-exécution immobilière a été expédié le 19 décembre 2014 et présenté (le pli ou à tout le moins son avis d'arrivée) au domicile [du demandeur] le 27 février 2015 selon sa propre affirmation ».
Il considère encore que, « d'autre part, la thèse [du demandeur] n'est pas crédible », qu’« en effet, l'essence de tout service postal est de remettre à son destinataire le courrier qui lui est destiné », qu’« or, [le demandeur] décrit une procédure qui, potentiellement, ne permettrait jamais à un destinataire absent lors du passage de l'agent de la poste d'être informé de l'existence d'un courrier qui lui est adressé, puisque ce destinataire ne paierait pas, dans ce cas, la taxe à acquitter pour obtenir l'avis d'arrivée » et que, « de plus, sa thèse est contredite par le courrier adressé par la poste congolaise au conseil congolais des [défendeurs], que [le demandeur] présente [dans] ses conclusions comme un courrier dans lequel la poste ‘rappelle la procédure à suivre en ce qui concerne les lettres recommandées’, dans lequel la cour [d’appel] ne lit pas que l'avis d'arrivée n'est remis que contre paiement d'une taxe : ‘à la réception d'un envoi recommandé au bureau, trois avis d'arrivée sont établis et envoyés au destinataire chacun dans l'intervalle d'un mois, soit par la boîte postale ou à un domicile (...). Comme la procédure l'exige, avant de retirer un recommandé il devrait remplir un avis d'arrivée’, [et par] l'avis d'arrivée, que [le demandeur] reconnaît avoir reçu le 27 février 2015 (…) et qui porte d'ailleurs cette date, [qui] mentionne une taxe ‘à payer’ de 14.000 francs, et non une taxe ‘payée’, la cour [d’appel] en déduisant que ce montant sera à payer pour retirer le pli, mais n'a pas dû être payé pour recevoir l'avis ; la cour [d’appel] constate en outre qu'à côté du cachet ‘payé merci’, se trouve la mention manuscrite ‘ok 02/03/15’, ce qui démontre que la taxe a été payée à la remise du pli à la poste le 2 mars 2015, et non lors de la remise de l'avis d'arrivée au domicile [du demandeur] ».
Il ajoute enfin que, « outre que [le demandeur] n'explique pas précisément dans quelles circonstances il ‘reçoit subitement à son domicile’ l'avis d'arrivée relatif au pli contenant la copie de l'exploit de saisie-exécution immobilière, il n'apporte aucun élément concret de nature à établir le dysfonctionnement généralisé de la poste congolaise qu'il allègue ».
Il en déduit que « le cas de force majeure allégué n’est pas établi et que le droit [du demandeur] à un procès équitable n’a pas été mis en péril ».
Quant à la première branche :
Il suit de ces énonciations que, par les motifs critiqués par le moyen, en cette branche, l’arrêt attaqué se borne à déterminer la date de la première présentation du pli contenant la copie de l'exploit de signification du jugement du 5 juin 2014 au domicile du demandeur et qu’il fonde par contre sa décision que « le cas de force majeure allégué n’est pas établi » sur les motifs par lesquels il rejette les allégations du demandeur que, lors de cette présentation, aucun avis de passage à son domicile n’aurait été déposé, que les avis d'arrivée ne sont remis au destinataire que moyennant le paiement d'une taxe de 14.000 francs congolais et qu’à l’époque, la poste congolaise était en proie à des dysfonctionnements considérables.
Reposant sur une interprétation inexacte de l’arrêt attaqué, le moyen, en cette branche, manque en fait.
Quant à la deuxième branche :
Il suit des énonciations précitées que l’arrêt attaqué tient, sur la base d’une appréciation qui gît en fait, pour certaine la date de la première présentation du pli contenant la copie de l'exploit de signification du jugement du 5 juin 2014.
Le moyen, qui, en cette branche, critique cette appréciation, est irrecevable.
Quant à la troisième branche :
Ainsi que cela résulte de la réponse à la première branche du moyen, il suit des énonciations précitées que, par les motifs que critique le moyen, en cette branche, l’arrêt attaqué n’impose pas au demandeur de prouver qu’il n’a pas reçu l’avis d’arrivée de l’acte de signification avant le 27 février 2015 mais considère que le demandeur ne prouve pas l’existence des dysfonctionnements au sein de la poste congolaise qu’il invoquait à titre de circonstance constitutive d’un cas de force majeure.
Reposant sur une interprétation inexacte de l’arrêt attaqué, le moyen, en cette branche, manque en fait.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de sept cent dix-neuf euros soixante-neuf centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section Mireille Delange et Michel Lemal, les conseillers Marie-Claire Ernotte et Ariane Jacquemin, et prononcé en audience publique du vingt-quatre décembre deux mille vingt et un par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.21.0064.F
Date de la décision : 24/12/2021
Type d'affaire : Autres

Analyses

Le moyen, qui, à défaut d’indiquer à quel ordre appartient chacun des avocats, oblige la Cour à rechercher cet élément de fait pour déterminer les normes déontologiques qui leur sont respectivement applicables, est imprécis.

MOYEN DE CASSATION - MATIERE CIVILE - Moyen imprécis


Composition du Tribunal
Président : STORCK CHRISTIAN
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : WERQUIN THIERRY
Assesseurs : DELANGE MIREILLE, LEMAL MICHEL, ERNOTTE MARIE-CLAIRE, JACQUEMIN ARIANE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-12-24;c.21.0064.f ?

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