N° C.21.0027.N
NEUTS WOONPROJECTEN, s.r.l.,
Me Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation,
contre
M. N.,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le
5 octobre 2020 par le tribunal de première instance d’Anvers, division de Turnhout, statuant en degré d’appel.
Le président de section Eric Dirix a fait rapport.
L’avocat général Els Herregodts a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
1. Il suit de l’article 661 de l’ancien Code civil, dans la version applicable au litige, que le propriétaire d’un mur de séparation privatif peut réclamer le prix de la mitoyenneté de ce mur à son voisin lorsque et dans la mesure où celui-ci l’utilise d’une manière telle qu’il en usurpe la copossession, violant ainsi le droit de propriété exclusif de son voisin, et qu’il ne peut raisonnablement poursuivre pareille utilisation sans avoir la volonté implicite de conserver la mitoyenneté du mur.
La seule circonstance que le voisin tire un avantage de l’existence d’un mur de séparation ne constitue pas cette usurpation de possession.
2. Le juge d’appel a constaté et considéré que :
- de nos jours, un mur ne peut être autonome que lorsqu’il satisfait à toutes les conditions imposées par les pouvoirs publics ;
- lors de la construction du nouveau mur, la demanderesse ne doit pas investir dans une étanchéité au vent et à l’eau propre au mur ou veiller à ce que celui-ci réponde en lui-même à certaines normes de bruit et d’isolation, précisément en raison de la présence du mur « à cheval » ;
- dans cette optique, il est faux de dire que le nouveau mur peut exister de manière autonome sans la présence du mur « à cheval » ;
- certes, le nouveau mur est stable en soi mais ne satisfait pas à diverses normes ;
- le nouveau mur utilise ainsi effectivement le mur « à cheval ».
3. Par ces motifs, le juge n’a pas légalement constaté que la demanderesse a commis, sur le mur de la défenderesse, une usurpation à laquelle cette dernière peut s’opposer.
4. En condamnant, sur la base de ces motifs, la demanderesse à payer le prix de cession du mur réclamé par la défenderesse, le juge d’appel n’a pas légalement justifié sa décision.
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse le jugement attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant le tribunal de première instance du Limbourg, siégeant en degré d’appel.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, les présidents de section Koen Mestdagh et Geert Jocqué, les conseillers Koenraad Moens et Sven Mosselmans, et prononcé en audience publique du neuf septembre deux mille vingt et un par le président de section Eric Dirix, en présence de l’avocat général Els Herregodts, avec l’assistance du greffier Vanity Vanden Hende.
Traduction établie sous le contrôle du président de section Christian Storck et transcrite avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.