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29/01/2021 | BELGIQUE | N°F.19.0030.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 29 janvier 2021, F.19.0030.N


N° F.19.0030.N
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances,
contre
1. C.V.,
2. C.D.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 5 juin 2018 par la cour d’appel de Gand.
Le 14 mai 2020, l’avocat général Johan Van der Fraenen a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport et l’avocat général Johan Van der Fraenen a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en

cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La ...

N° F.19.0030.N
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances,
contre
1. C.V.,
2. C.D.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 5 juin 2018 par la cour d’appel de Gand.
Le 14 mai 2020, l’avocat général Johan Van der Fraenen a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport et l’avocat général Johan Van der Fraenen a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
1. Conformément à l’article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992, sont déductibles à titre de frais professionnels les frais que le contribuable a faits ou supportés pendant la période imposable en vue d’acquérir ou de conserver les revenus imposables et dont il justifie la réalité et le montant au moyen de documents probants ou, quand cela n’est pas possible, par tous autres moyens de preuve admis par le droit commun, sauf le serment.
Il suit de cette disposition légale que des dépenses peuvent être considérées comme des frais professionnels déductibles lorsqu’elles sont inhérentes à l’exercice de la profession. Il s’ensuit que les dépenses d’un dirigeant d’entreprise ne constituent des frais professionnels déductibles du dirigeant d’entreprise que lorsqu’elles sont inhérentes à ses activités de dirigeant d’entreprise au sein de la société, et non à l’activité sociale de la société.
À cet égard, il y a lieu de vérifier si les dépenses bénéficient principalement au dirigeant d’entreprise ou à la société.
2. Le juge d’appel a constaté que :
- les défendeurs sont tous deux notaires et exercent cette profession au sein d’une société dont ils assurent tous deux la direction ;
- l’étude notariale est établie dans des bâtiments appartenant en pleine propriété aux défendeurs ;
- les défendeurs ont qualifié, chacun pour la moitié, l’immeuble de bureaux de l’étude notariale d’actif professionnel et déduisent à l’impôt des personnes physiques les amortissements à titre de frais professionnels pour l’acquisition de leur rémunération de dirigeant d’entreprise ;
- le [demandeur] a rejeté intégralement les amortissements de l’étude notariale.
Il a considéré que :
- la condition fondamentale énoncée à l’article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992 consiste en ce que, pour être déductibles à titre de frais professionnels, les frais doivent avoir été faits en vue d’acquérir ou de conserver les revenus imposables ;
- il y a lieu de vérifier, sur la base des faits, si les frais ont été faits en vue d’acquérir ou de conserver la rémunération de dirigeant d’entreprise ou en vue d’acquérir ou de conserver les revenus de la société au sein de laquelle le contribuable exerce un mandat de dirigeant d’entreprise ;
- conformément à l’article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992, un dirigeant d’entreprise ne peut déduire, à titre de frais professionnels, les dépenses qu’il effectue que si elles contribuent à l’accomplissement des activités spécifiques de dirigeant d’entreprise dans l’exercice de son mandat ;
- le fait d’être dirigeant d’entreprise d’une société n’empêche pas que ce mandat ne consiste pas exclusivement à diriger la société, mais comprend également des tâches opérationnelles relevant du cœur des activités de la société ;
- une société notariale peut verser une rémunération de dirigeant d’entreprise visant à rétribuer tant les prestations de dirigeant de la société que celles de notaire ;
- il n’est pas contesté en l’espèce que les défendeurs fournissent également et principalement des prestations opérationnelles, puisqu’ils travaillent comme notaire, et qu’ils sont rémunérés en contrepartie au moyen de la rémunération de dirigeant d’entreprise ;
- la société ne pourrait acquérir aucun revenu sans les prestations opérationnelles de notaire des défendeurs ;
- les frais que le demandeur a rejetés sont réellement en lien avec l’accomplissement d’activités par les défendeurs en tant que notaire dès lors que, sans la disponibilité d’un bien immobilier pour la société notariale, il ne serait pas question de revenus, ni pour la société, ni pour les deux défendeurs ;
- la manière dont les défendeurs mettent le bien immobilier à la disposition de la société est sans influence sur le lien existant entre les frais du bien immobilier et la perception des rémunérations de dirigeant d’entreprise ;
- il faut également tenir compte du fait qu’en vertu de la loi, une société notariale ne peut posséder de bien immobilier ;
- en conséquence, le demandeur ne pouvait rejeter les frais en cause en se fondant sur la thèse qu’il ne s’agirait pas de frais que les défendeurs ont faits en vue d’acquérir ou de conserver leurs rémunérations de dirigeant d’entreprise.
3. En considérant, sur la base ces énonciations, que les défendeurs peuvent déduire les frais en cause à titre de frais professionnels, sans vérifier si les dépenses bénéficient principalement au dirigeant d’entreprise ou à la société, le juge d’appel n’a pas légalement justifié sa décision.
Dans cette mesure, le moyen est fondé.
Sur les autres griefs :
4. Les autres griefs ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué, sauf en tant qu’il reçoit l’appel ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d’appel d’Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, et les conseillers Filip Van Volsem, Bart Wylleman, Koenraad Moens et François Stévenart Meeûs, et prononcé en audience publique du vingt-neuf janvier deux mille vingt et un par le président de section Eric Dirix, en présence de l’avocat général Johan Van der Fraenen, avec l’assistance du greffier Vanity Vanden Hende.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Marie-Claire Ernotte et transcrite avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1n - eerste kamer
Numéro d'arrêt : F.19.0030.N
Date de la décision : 29/01/2021
Type d'affaire : Droit fiscal

Analyses

Les dépenses d'un dirigeant d'entreprise ne constituent des frais professionnels déductibles du dirigeant d'entreprise que lorsqu'elles sont inhérentes à ses activités de dirigeant d'entreprise au sein de la société, et non à l'activité sociale de la société; à cet égard, il y a lieu de vérifier si les dépenses bénéficient principalement au dirigeant d'entreprise ou à la société (1). (1) Voir les concl. du MP publiées à leur date dans AC.

IMPOTS SUR LES REVENUS - IMPOT DES PERSONNES PHYSIQUES - Revenus professionnels - Frais professionnels - Dirigeant d'entreprise - Amortissement du bâtiment - Conditions de déductibilité [notice1]


Références :

[notice1]

Côde des impôts sur les revenus 1992 - 12-06-1992 - Art. 49 - 30 / No pub 1992003455


Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-01-29;f.19.0030.n ?

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