La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/10/2020 | BELGIQUE | N°P.19.0838.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 28 octobre 2020, P.19.0838.F


N° P.19.0838.F - P.19.1309.F
I. et II. B. R.
partie civile,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Sandra Berbuto, avocat au barreau de Liège, et Steve Lambert, avocat au barreau de Bruxelles,

les pourvois contre

M. V.
personne à l'égard de laquelle l'action publique est engagée,
défenderesse en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi I est dirigé contre un arrêt rendu le 17 juin 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre des mises en accusation.
Le pourvoi II est dirigé contre un arrêt

rendu le 7 octobre 2019 par la même juridiction.
Le demandeur invoque trois moyens contre l'arrêt ...

N° P.19.0838.F - P.19.1309.F
I. et II. B. R.
partie civile,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Sandra Berbuto, avocat au barreau de Liège, et Steve Lambert, avocat au barreau de Bruxelles,

les pourvois contre

M. V.
personne à l'égard de laquelle l'action publique est engagée,
défenderesse en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi I est dirigé contre un arrêt rendu le 17 juin 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre des mises en accusation.
Le pourvoi II est dirigé contre un arrêt rendu le 7 octobre 2019 par la même juridiction.
Le demandeur invoque trois moyens contre l'arrêt du 17 juin 2019 et un moyen contre l'arrêt du 7 octobre 2019, respectivement dans deux mémoires annexés au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

L'arrêt attaqué du 17 juin 2019 a été rendu par défaut à l'égard du demandeur, et contradictoirement à l'égard de la défenderesse. Il réforme la décision de la chambre du conseil qui a ordonné la poursuite de l'instruction du chef des faits visés dans la plainte avec constitution de partie civile du demandeur et déclare cette plainte irrecevable. En outre, l'arrêt condamne le demandeur à payer à la défenderesse une indemnité de procédure par instance, ainsi que, envers l'Etat, aux frais des deux instances.

L'arrêt attaqué du 7 octobre 2019 statue sur l'opposition du demandeur contre l'arrêt précité. Il dit l'opposition irrecevable en ce qu'elle vise la déclaration d'irrecevabilité de la plainte avec constitution de partie civile du demandeur, reçoit l'opposition en tant qu'elle concerne la décision relative aux indemnités de procédure et réserve à statuer sur le surplus.

En raison de leur connexité, il y a lieu de joindre les causes inscrites sous les numéros P.19.0838.F et P.19.1309.F des notices de la Cour.

A. Sur le pourvoi I :

1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision disant irrecevable la plainte avec constitution de partie civile du demandeur :

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

Le moyen soutient qu'en considérant que le demandeur a été régulièrement convoqué à l'audience de la chambre des mises en accusation, l'arrêt viole la foi due à l'avis de fixation que les services de la poste ont renvoyé au greffe après y avoir apposé une mention selon laquelle le demandeur ne reçoit pas ou ne reçoit plus son courrier à l'adresse indiquée.

Un grief de violation de la foi due à un acte consiste à désigner une pièce à laquelle la décision attaquée se réfère expressément et à reprocher à celle-ci, soit d'attribuer à cette pièce une affirmation qu'elle ne comporte pas, soit de déclarer qu'elle ne contient pas une mention qui y figure, autrement dit de donner de cette pièce une interprétation inconciliable avec ses termes.

La considération critiquée ne se réfère pas au courrier précité.

Le moyen manque en fait.

Quant à la seconde branche :

Le moyen est pris de la violation des articles 135 du Code d'instruction criminelle et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense. L'arrêt déclare irrecevable la plainte avec constitution de partie civile du demandeur, alors que la lettre recommandée du greffe l'avisant de la date de l'audience n'a pas été effectivement distribuée par la poste à l'adresse de son domicile indiquée sur la lettre ou, à tout le moins, alors qu'il ne ressort pas des pièces de la procédure que cet avis a été distribué. Ainsi, le demandeur a été privé du droit à un débat contradictoire et de la possibilité d'exercer ses droits de la défense, dans le cadre d'une procédure qui a donné lieu à une décision de mettre fin à l'action publique engagée en raison de sa plainte avec constitution de partie civile. Le demandeur précise qu'il est domicilié à l'adresse indiquée depuis le 6 mai 2014, et que tant l'acte de signification de l'arrêt attaqué que la convocation à comparaître à l'audience fixée pour l'examen de l'opposition lui sont bien parvenus à cet endroit.

Comme le mémoire du demandeur le relève, la poste a renvoyé la convocation à l'expéditeur et celle-ci porte la mention « ne reçoit pas/plus le courrier à l'adresse indiquée ».

Le moyen repose sur l'affirmation que, contrairement à ce qu'indique la mention précitée, le demandeur recevait le courrier à son domicile lorsque l'avis de fixation a été expédié.

Requérant une vérification en fait qui échappe au pouvoir de la Cour, le moyen est irrecevable.

Sur le deuxième moyen :

Quant aux deux branches réunies :

En sa première branche, le moyen reproche à l'arrêt de déclarer recevable l'appel de la défenderesse contre la décision de la chambre du conseil ordonnant la poursuite de l'instruction, sans énoncer les motifs de cette décision, alors que l'appel de l'inculpé doit satisfaire aux conditions de recevabilité de l'article 135, § 2, du Code d'instruction criminelle. La seconde branche soutient que le moyen invoqué par la défenderesse devant les juges d'appel est étranger aux irrégularités ou aux causes de nullité visées à la disposition précitée, de sorte que la chambre des mises en accusation ne pouvait pas légalement déclarer le recours de la défenderesse recevable.
D'une part, ainsi que le relève le demandeur, le ministère public a également interjeté appel de l'ordonnance de la chambre du conseil, et il ressort des pièces de la procédure que ce recours était dirigé contre toutes les dispositions de cette décision.

D'autre part, le moyen ne critique pas l'arrêt en ce qu'il déclare l'appel du ministère public recevable.

Partant, indépendamment de l'irrecevabilité alléguée du recours de la défenderesse, les juges d'appel avaient le pouvoir de dire irrecevable la plainte avec constitution de partie civile du demandeur.

Ne pouvant entraîner la cassation, le moyen est irrecevable à défaut d'intérêt.

Sur le troisième moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 63 du Code d'instruction criminelle et 271, § 1er, de la nouvelle loi communale.

Le demandeur soutient qu'il s'est constitué partie civile à titre personnel, en invoquant un dommage propre, et non pas au nom de la commune en application de l'article 271, § 1er, de la nouvelle loi communale. Par conséquent, la cour d'appel ne pouvait pas légalement déclarer irrecevable sa plainte du chef des inculpations A 1, B 3 et B 4, relatives à l'exercice par la défenderesse d'un emploi prétendument fictif à l'intercommunale Finimo, au motif qu'il ne démontrait pas l'intérêt à agir de la commune au sens de la disposition précitée.

Il ressort du procès-verbal de la constitution de partie civile du demandeur, auquel la Cour peut avoir égard, que le demandeur a déclaré au juge d'instruction qu'il se constituait partie civile contre la défenderesse. Cet acte précise que le demandeur se prétend lésé par ces infractions et qu'il demande réparation.

Il ne ressort pas de cet acte que le demandeur se soit constitué partie civile au nom de la commune de Saint-Nicolas ou qu'il y ait invoqué l'application des articles 271, § 1er, de la nouvelle loi communale et L1242-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation.

En ayant déclaré irrecevable la constitution de partie civile du demandeur du chef des inculpations précitées au seul motif que l'intérêt à agir de la commune n'était pas prouvé, alors que l'arrêt ne constate pas que le demandeur s'est constitué partie civile au nom de la commune et qu'il ne ressort pas des pièces de la procédure que tel serait le cas, les juges d'appel n'ont pas légalement justifié leur décision.

Le moyen est fondé.

Cette illégalité entraîne la cassation de l'arrêt du 17 juin 2019 en tant qu'il déclare irrecevable la plainte avec constitution de partie civile du demandeur concernant les faits visés aux inculpations A 1, B 3 et B 4 et en tant qu'il condamne le demandeur, envers l'Etat, aux frais des deux instances. La cassation ne s'étend pas aux dispositions de l'arrêt relatives à la recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile quant aux inculpations A 2 et C 5.

2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision condamnant le demandeur au paiement à la défenderesse d'une indemnité de procédure par instance :

Le demandeur se désiste de son pourvoi.

Nonobstant ce désistement, la cassation de la décision disant irrecevable la plainte avec constitution de partie civile du demandeur concernant les faits visés aux inculpations A 1, B 3 et B 4, entraîne l'annulation de celle qui condamne le demandeur à payer des indemnités de procédure à la défenderesse, et qui est la conséquence de la première.

B. Sur le pourvoi II :

Il ressort de la déclaration de pourvoi que le recours du demandeur est limité aux dispositions pénales de l'arrêt attaqué.

Sur le moyen :

Pris de la violation des articles 416, 417, 423, 425 et 428 du Code d'instruction criminelle, et de la méconnaissance de l'effet dévolutif du pourvoi en cassation, le moyen critique le refus de l'arrêt attaqué de surseoir à statuer sur l'opposition du demandeur à l'arrêt du 17 juin 2019 en tant que ce recours vise la décision déclarant irrecevable sa plainte avec constitution de partie civile. Le moyen fait valoir que la Cour a été saisie en premier lieu d'un recours contre cet arrêt, en l'occurrence par la déclaration de pourvoi du 2 juillet 2019 (le pourvoi I), de sorte que la chambre des mises en accusation devait surseoir à statuer sur l'opposition du demandeur signifiée le 16 août 2019. En outre, les juges d'appel ne pouvaient pas, sans méconnaître l'effet suspensif du recours en cassation, donner d'effet à l'arrêt précité, ce qu'ils ont pourtant fait en ayant déclaré l'opposition irrecevable en tant qu'elle vise la décision relative à la plainte avec constitution de partie civile.

Aucune disposition légale n'empêche le juge saisi de l'opposition formée contre une décision rendue par défaut de statuer sur ce recours, lorsque cette décision fait l'objet d'un pourvoi en cassation.

Le moyen manque en droit.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Ordonne la jonction des causes inscrites sous les numéros P.19.0838.F et P.19.1309.F des notices de la Cour ;
Casse l'arrêt attaqué du 17 juin 2019 en ce qu'il déclare irrecevable la plainte avec constitution de partie civile du demandeur du chef des faits visés aux inculpations A 1, B 3 et B 4, en ce qu'il condamne le demandeur, envers l'Etat, aux frais des deux instances, et en ce qu'il condamne le demandeur à payer à la défenderesse une indemnité de procédure par instance ;
Rejette le pourvoi formé contre cet arrêt pour le surplus ;
Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt attaqué du 7 octobre 2019 ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé du 17 juin 2019 ;
Condamne le demandeur à la moitié des frais du pourvoi formé contre l'arrêt du 17 juin 2019 et réserve l'autre moitié pour qu'il soit statué sur celle-ci par la juridiction de renvoi ;
Condamne le demandeur aux frais du pourvoi formé contre l'arrêt du 7 octobre 2019.
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d'appel de Liège, chambre des mises en accusation, autrement composée.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de sept cent six euros cinquante-trois centimes dont I) sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 17 juin 2019 : quarante-neuf euros cinquante centimes dus et quatre cent euros trente-huit centimes payés par ce demandeur et II) sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 7 octobre 2019 : cinquante-six euros dix centimes dus et deux cent euros cinquante-cinq centimes payés par ce demandeur.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-huit octobre deux mille vingt par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.19.0838.F
Date de la décision : 28/10/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-10-28;p.19.0838.f ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award