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08/10/2020 | BELGIQUE | N°C.19.0407.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 08 octobre 2020, C.19.0407.F


N° C.19.0407.F
INSTITUT NATIONAL D'ASSURANCE MALADIE-INVALIDITÉ, établissement public, dont les bureaux sont établis à Woluwe-Saint-Pierre, avenue de Tervueren, 211, inscrit à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0206.653.946,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Gand, Drie Koningenstraat, 3, où il est fait élection de domicile,

contre

S. C.,
défenderesse en cassation.


I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est

dirigé contre l'arrêt rendu le 2 novembre 2018 par la cour d'appel de Liège.
Le 22 septem...

N° C.19.0407.F
INSTITUT NATIONAL D'ASSURANCE MALADIE-INVALIDITÉ, établissement public, dont les bureaux sont établis à Woluwe-Saint-Pierre, avenue de Tervueren, 211, inscrit à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0206.653.946,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Gand, Drie Koningenstraat, 3, où il est fait élection de domicile,

contre

S. C.,
défenderesse en cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 2 novembre 2018 par la cour d'appel de Liège.
Le 22 septembre 2020, l'avocat général Philippe de Koster a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport et l'avocat général Philippe de Koster a été entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente deux moyens.

III. La décision de la Cour

Sur le premier moyen :

L'article 2 de la loi du 31 mars 2010 relative à l'indemnisation des dommages résultant de soins de santé définit le dommage résultant de soins de santé comme étant celui qui trouve sa cause dans une prestation de soins de santé et qui découle, soit d'un fait engageant la responsabilité d'un prestataire de soins, soit d'un accident médical sans responsabilité.
En vertu de l'article 4 de la loi, le service spécial de l'Institut national d'assurance maladie invalidité visé à l'article 137ter de la loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994, indemnise la victime ou ses ayants droit conformément au droit commun lorsque le dommage trouve sa cause dans un accident médical sans responsabilité, pour autant que le dommage réponde à l'une des conditions de gravité prévues à l'article 5.
L'article 5, 2°, prévoit que le dommage est suffisamment grave lorsque le patient subit une incapacité temporaire de travail au moins durant six mois consécutifs ou six mois non consécutifs sur une période de douze mois.
Il suit de ces dispositions que le dommage est suffisamment grave si le patient subit, dans cette période, pendant au moins six mois une incapacité de travail qui, sans l'accident médical, ne se serait pas produite telle qu'elle s'est réalisée.
Le juge apprécie en fait si l'incapacité temporaire de travail subie par le patient trouve sa cause dans l'accident médical.
L'arrêt constate que l'expert désigné par le service spécial de l'Institut national d'assurance maladie invalidité précise que « la subluxation Cl-C2 est consécutive à l'intervention orthognatique » subie par la défenderesse, que « c'est une complication extrêmement rare [qui] n'était pas prévisible », que « la nature de l'accident médical incriminé correspond à la définition d'un aléa thérapeutique, complication connue mais par nature rare et imprévisible », que « le dommage correspond à la définition d'un accident médical sans responsabilité » et que cet expert retient diverses périodes d'incapacités temporaires de travail.
L'arrêt énonce que, « dans les circonstances de la cause et dès lors qu'il est admis que c'est la situation réelle rencontrée par la victime in concreto qui doit être appréhendée, et non une situation abstraite détachée de la réalité, il y a lieu de considérer que [la défenderesse] a souffert d'un dommage anormal dès après l'intervention chirurgicale » et qu'« elle a expliqué en effet que, dès son réveil à l'hôpital, elle a ressenti de fortes douleurs au niveau de la nuque, plus qu'à son visage ».
Après avoir relevé que l'expert « précise que l'intervention du type de celle réalisée chez la [défenderesse] nécessite normalement une hospitalisation [...] de deux ou trois jours, avec une incapacité temporaire de travail de trois semaines en l'absence de complications » et que la défenderesse « a été hospitalisée du 25 au 26 mars 2011 puis [...] a reçu trois semaines d'incapacité temporaire de travail », l'arrêt considère que la « complication de subluxation des vertèbres C1-C2 [...], rare et imprévisible [...], résulte bien de l'intervention chirurgicale et que [la défenderesse] en a immédiatement souffert, même si la nature exacte de cette complication n'a été diagnostiquée que 34 jours après l'intervention », et que, si « l'expert indique qu'une intervention de chirurgie maxillo-faciale entraîne généralement de l'inconfort, un gonflement du visage et des douleurs, les douleurs à la nuque n'étant pas rares du fait d'une immobilisation de longue durée et de la sensibilité de chacun », « en l'espèce, c'est bien un dommage anormal qui a été subi dans le décours immédiat de l'intervention chirurgicale, l'expert admettant du reste [...] un préjudice spécifique important du chef des douleurs subies (quantum doloris) qu'il évalue à 5 sur l'échelle de 7 [...], du 27 mars 2011 au 28 avril 2011 ».
Il en déduit que les deux jours d'hospitalisation et les trois premières semaines d'incapacité temporaire de travail sont en relation causale avec l'accident médical sans responsabilité, dès lors que, « sans les prestations de soins subies par [la défenderesse] le 25 mars 2011, son dommage ne se serait pas réalisé tel qu'il s'est produit in concreto » et décide que la défenderesse « a donc subi, suite à l'intervention chirurgicale du 25 mars 2011, une incapacité de travail au moins durant six mois consécutifs ou six mois non consécutifs sur une période de douze mois ».
Le moyen, qui, pour critiquer cette décision, soutient que l'incapacité de travail qui se serait produite en tout état de cause après la prestation de soins de santé, même en l'absence de l'accident médical, n'est pas en relation causale avec cet accident et que le seul fait qu'au cours de cette période d'incapacité, la victime ait souffert de douleurs inhabituelles ne suffit pas pour conclure que cette incapacité de travail a été causée par l'accident médical sans responsabilité, s'érige contre cette appréciation contraire de l'arrêt.
Le moyen est irrecevable.

Sur le second moyen :

L'article 5 de la loi prévoit que le dommage est suffisamment grave lorsque le patient subit une incapacité temporaire de travail au moins durant six mois consécutifs ou six mois non consécutifs sur une période de douze mois.
Il ne suit pas de cette disposition que l'incapacité temporaire de travail subie par la victime doit être une incapacité de travail totale.
Le moyen, qui soutient le contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de six cent trente et un euros trois centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l'État au titre de mise au rôle.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Mireille Delange, les conseillers Michel Lemal, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du huit octobre deux mille vingt par le président de section Mireille Delange, en présence de l'avocat général Philippe de Koster, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.19.0407.F
Date de la décision : 08/10/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-10-08;c.19.0407.f ?

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