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16/09/2020 | BELGIQUE | N°P.20.0143.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 septembre 2020, P.20.0143.F


N° P.20.0143.F
I. J.Y.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Maxim Töller, avocat au barreau de Liège,
contre
ETAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, poursuites et diligences du conseiller général désigné pour l'administration en charge des contentieux, dont les bureaux sont établis à Liège, rue de Fragnée, 2/218,
partie poursuivante,
défendeur en cassation,
II. Z. G.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Maxim Töller, avocat au barreau de Liège,
contre
1. ETAT BELGE, r

eprésenté par le ministre des Finances, poursuites et diligences du conseiller général désigné pour l'ad...

N° P.20.0143.F
I. J.Y.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Maxim Töller, avocat au barreau de Liège,
contre
ETAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, poursuites et diligences du conseiller général désigné pour l'administration en charge des contentieux, dont les bureaux sont établis à Liège, rue de Fragnée, 2/218,
partie poursuivante,
défendeur en cassation,
II. Z. G.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Maxim Töller, avocat au barreau de Liège,
contre
1. ETAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, poursuites et diligences du conseiller général désigné pour l'administration en charge des contentieux, dont les bureaux sont établis à Liège, rue de Fragnée 2/218,
partie poursuivante,
2. SERVAUTO BELGIUM, société anonyme, dont le siège est établi à Bruxelles, rue du Commerce, 113,
partie civile,
défendeurs en cassation,
III. ETAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, poursuites et diligences du conseiller général désigné pour l'administration en charge des contentieux,
partie poursuivante,
demandeur en cassation,
représenté par Maître François T'Kint, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise 65/11, où il est fait élection de domicile,
contre
1. V. S.
2. Z. G.
3. J. Y.
4. TRANSPORTS BONESIRE CHARLES ET FILS, société à responsabilité limitée, dont le siège est établi à Chaudfontaine, rue de la Béôle, 61, ayant pour mandataire ad hoc Maître Isabelle Tasset, avocat au barreau de Liège, dont le cabinet est établi à Liège, quai Marcellis, 4/11,
5. B.Ch.
6. B. Ch.
7. Maître Sophie SEINLET, avocat au barreau de Huy, agissant en qualité de curateur à la faillite de la société à responsabilité limitée WSS INVEST, anciennement HEEMSKERK, dont le siège est établi à Amay, chaussée de Tongres, 254,
8. H. B.
9. K. K.
10. ALAIN DONNAY, société à responsabilité limitée, dont le siège est établi à Blegny, rue Troisfontaines 76, ayant pour mandataire ad hoc Maître Stéphane Gothot, avocat au barreau de Liège, dont le cabinet est établi à Liège, rue des Augustins, 32,
11. D. A.
prévenus,
défendeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 16 janvier 2020 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Chacun des demandeurs invoque deux moyens dans des mémoires annexés au présent arrêt, en copies certifiées conformes.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. Sur le pourvoi formé par Y. J. :
1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action publique :
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation de l'article 149 de la Constitution et des articles 66 et 67 du Code pénal.
Le demandeur fait grief à l'arrêt de ne pas préciser en quoi il aurait sciemment et volontairement participé au commerce illicite de carburant, à sa dissimulation au moyen d'une fausse facturation, et aux infractions qui en résultent en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée. Il reproche à la cour d'appel de ne pas avoir indiqué, pour chacune des infractions ayant constitué la fraude, selon quel mode de participation il aurait coopéré à son exécution.
Devant la cour d'appel, le demandeur a déposé des conclusions affirmant que, dans l'hypothèse où la cour d'appel considérerait qu'il a bien fourni du carburant à S.V., le fait qu'il se serait associé à cette fraude n'implique pas qu'il aurait eu connaissance des moyens mis en œuvre pour la dissimuler ou pour écouler le mazout qu'il aurait livré.
En réponse à ces conclusions, l'arrêt caractérise la participation du demandeur de la manière suivante :
- les observations des enquêteurs ont permis de relever que le camion piloté par Y. J. a été géo-localisé à plusieurs reprises sur des aires de stationnement en compagnie d'un autre véhicule impliqué dans le trafic ;
- les jours d'approvisionnement indiqués dans l'agenda de S. V. coïncident le plus souvent avec l'arrivée du camion d'Y. J. sur le site du dépôt essence de Sclessin, et les temps d'arrêt du véhicule sont notablement plus longs que ceux observés durant les jours où aucune entrée de produit n'est notée dans l'agenda susdit ;
- sur le camion d'Y. J., une vanne a été placée, destinée à permettre aux produits de sortir en évitant le passage par le compteur étalonné équipant la citerne, permettant que des volumes transportés soient déchargés en cours de route sans que ces opérations ne soient détectées ;
- la remorque Saris du prévenu S. V. a été découverte chez Y. J.
La participation à un délit collectif peut se déduire du concours prêté, en connaissance de cause, à l'auteur principal dans les faits qui consomment l'action, même si le coauteur n'a pas coopéré directement à chacun de ces faits. Lorsque les actes culpeux forment un tout, la participation à une partie d'entre eux peut être considérée comme une participation à l'ensemble de l'entreprise dans le chef de celui qui a souscrit à ses objectifs.
Partant, la cour d'appel a pu considérer que la part prise par le demandeur dans le commerce illicite de carburant le rend nécessairement coauteur des fausses factures qu'il a fallu émettre pour masquer ce commerce, ainsi que de leur usage et de la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée liée à ces opérations.
Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen est pris de la violation de l'article 211bis du Code d'instruction criminelle. Il est fait grief à l'arrêt de ne pas statuer à l'unanimité des membres du siège alors que la cour d'appel a aggravé la situation du demandeur.
La cour d'appel a exonéré deux autres prévenus de la condamnation à la reproduction, aux fins de confiscation, du gasoil fraudé, ou au payement de sa contre-valeur. Cette seule décision entraîne, d'après le demandeur, une aggravation de sa propre situation dès lors que, moins de personnes étant tenues de contribuer à la dette, l'obligation mise à sa charge s'en trouve alourdie à due concurrence.
La règle de l'unanimité édictée par l'article 211bis précité est applicable dans tous les cas où la condamnation pénale est aggravée en degré d'appel.
Ne rentre pas dans les prévisions de cet article la condamnation du prévenu à reproduire les biens confisqués non saisis et à en payer la contrevaleur s'il manque à cette obligation. Pareille condamnation, et la contribution à la dette qui en résulte, ne constituent pas une peine mais la conséquence civile de la condamnation pénale à la confiscation.
Le moyen manque en droit.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action en payement des droits éludés exercée par le défendeur :
Le demandeur ne fait valoir aucun moyen.
B. Sur le pourvoi formé par G.Z. :
1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action publique exercée à charge du demandeur :
Sur le premier moyen :
Le moyen est identique à celui invoqué par le premier demandeur et résumé ci-dessus.
Les conclusions déposées à la cour d'appel pour G. Z. contestaient sa participation sur la base, en substance, des éléments suivants :
- les observations effectuées par les enquêteurs ne l'ont pas identifié comme participant au trafic initié par S. V.;
- les informations contenues dans la dénonciation anonyme se sont avérées inexactes en ce qui le concerne ;
- aucune citerne contenant des produits pétroliers n'a été découverte chez lui, et la perquisition du 25 octobre 2010 n'a permis de retrouver aucun objet destiné au transport de tels produits ;
- l'enquête n'a pas établi que G. Z. aurait été propriétaire, conducteur ou passager d'un des véhicules ayant servi au trafic ;
- l'entreposage de l'un ou l'autre de ces véhicules chez lui, en son absence, est le fait de S.V. et non le sien ;
- la majorité des gérants de sociétés interrogés durant l'enquête ont indiqué que S. V. livrait seul ; celui-ci l'a confirmé ;
- G. Z. est étranger à la duplication frauduleuse des tickets d'approvisionnement et à la réalisation de la facturation arguée de faux, système mis au point par les caissiers de la station-essence Total à Barchon, où il n'entretenait aucun lien ;
- les auditions des clients des livraisons de mazout mises en cause démontrent que G. Z. n'était impliqué ni dans l'agenda des commandes, ni dans la gestion comptable, ni dans l'expédition des factures, ni dans les payements effectués en liquide ;
- il n'est pas démontré que G. Z. se soit enrichi.
A ces conclusions, l'arrêt oppose que
- les livraisons de carburant étaient réalisées notamment par un véhicule de marque VW Touareg immatriculé au nom de G Z alors que la facture d'achat de ce véhicule mentionne le nom de S V ; ce véhicule tractait une remorque de marque Saris aménagée pour transporter une citerne ;
- les agents des douanes ont constaté de nombreux mouvements depuis le domicile de G Z et ont retrouvé chez lui les documents relatifs à une remorque Saris ;
- des clients ont donné, de la personne qui accompagnait S V lors de certaines livraisons, une description correspondant à G Z ; un de ces clients a précisé avoir eu la visite de ce dernier, qu'il connaissait, et qui lui a demandé de ne rien dire à propos des livraisons de carburant car il y avait une enquête à leur encontre ;
- G Z et S V ont manifesté l'intention d'acheter une citerne d'une grande capacité, destinée à être transportée par camion ;
- l'absence d'enrichissement personnel du coauteur n'exclut pas qu'il a pu agir au seul profit de S V.
La participation à un délit collectif peut se déduire du concours prêté, en connaissance de cause, à l'auteur principal dans les faits qui consomment l'action, même si le coauteur n'a pas coopéré directement à chacun de ces faits. Lorsque les actes culpeux forment un tout, la participation à une partie d'entre eux peut être considérée comme une participation à l'ensemble de l'entreprise dans le chef de celui qui a souscrit à ses objectifs.
Partant, les juges d'appel ont pu, des éléments de fait souverainement constatés par l'arrêt, déduire que G Z avait participé, d'une part, à la réalisation du trafic frauduleux en apportant sciemment et volontairement à son initiateur une aide logistique indispensable et, d'autre part, à la confection des faux induits par la nécessité de masquer les ventes illicites, ainsi qu'à la fraude à la TVA qui en a résulté.
Les juges d'appel ont, ainsi, régulièrement motivé et légalement justifié leur décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
Pour les motifs indiqués en réponse au grief identique invoqué par le premier demandeur, le moyen manque en droit.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action en payement des droits éludés exercée par le défendeur :
Le demandeur ne fait valoir aucun moyen.
3. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action civile exercée par la société anonyme Servauto Belgium :
Il n'apparaît pas, des pièces de la procédure, que le pourvoi ait été signifié à la partie contre laquelle il est dirigé.
Le pourvoi est irrecevable.
C. Sur le pourvoi formé par l'Etat belge :
1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur les poursuites exercées par le demandeur à charge des cinquième, sixième, huitième, neuvième, dixième et onzième défendeurs :
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
Le moyen reproche à l'arrêt de constater la prescription de l'action publique exercée à charge des cinquième, sixième, huitième, neuvième, dixième et onzième défendeurs, sans tenir compte d'une cause de suspension liée au traitement, devant le tribunal correctionnel, d'une exception d'irrecevabilité des poursuites.
Le demandeur fait valoir qu'à l'audience du tribunal du 27 mars 2018, les débats n'ont porté que sur la régularité de la procédure et que, par jugement du 5 juin 2018, le tribunal a dit les poursuites recevables avant de mettre le dossier en continuation, notamment pour fixer le calendrier de dépôt des conclusions.
La prescription aurait donc pu voir son cours suspendu pendant soixante-dix jours en 2018.
L'arrêt décide que le point de départ de la prescription se situe le 11 mai 2010 pour les cinquième, sixième, dixième et onzième défendeurs, et le 15 août 2010 pour les huitième et neuvième. La cour d'appel a retenu, pour l'ensemble de ces prévenus, un seul acte interruptif, étant le procès-verbal initial du 11 juillet 2011, avec pour conséquence que la prescription était acquise le 10 juillet 2016.
La cause de suspension qu'il est reproché à l'arrêt de ne pas appliquer n'a pris cours qu'après le délai primaire de la prescription, de sorte qu'elle n'a pu allonger celui-ci ni permettre la recherche d'un acte interruptif plus récent. Et la suspension alléguée est également postérieure à l'expiration du délai secondaire, de sorte qu'elle est inapte à en reculer le terme.
Il s'ensuit que les juges d'appel n'avaient pas à attribuer un quelconque effet suspensif à la période qui s'est écoulée du 27 mars au 5 juin 2018.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
Le demandeur a poursuivi les cinquième, sixième, dixième et onzième défendeurs pour avoir, comme auteurs ou coauteurs, du 17 janvier 2009 au 15 août 2010, acquis, détenu et utilisé de façon irrégulière du diesel d'origine fiscale inconnue, non marqué, destiné à l'alimentation de moteurs à combustion, sous le couvert de documents faux.
Par une appréciation en fait qu'il n'appartient pas à la Cour de censurer et qui répond aux conclusions du demandeur, les juges du fond ont considéré que l'existence de la détention incriminée n'était pas démontrée au-delà de la date de la dernière facture litigieuse émise à l'égard des défendeurs.
Dans la mesure où, critiquant cette appréciation souveraine, il fait valoir que la dernière utilisation des produits soumis à accises est nécessairement postérieure à la date de facturation, le moyen, mélangé de fait, est irrecevable.
Les juges d'appel n'étaient pas tenus de rouvrir les débats pour permettre au demandeur de s'exprimer sur cette question, puisque l'énonciation critiquée répond, en la rejetant comme non prouvée, à l'affirmation contraire formulée par le demandeur lui-même dans ses conclusions.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la troisième branche :
Le demandeur reproche à l'arrêt d'élire, comme point de départ de la prescription de l'action publique, la date de la dernière facture émise à l'égard des cinquième, sixième, dixième et onzième défendeurs, alors que l'utilisation des faux documents se prolonge aussi longtemps qu'ils produisent un effet utile, notamment en permettant d'éluder les droits d'accise.
Le demandeur a déposé devant la cour d'appel des conclusions qui, en ce qui concerne la prescription, se bornent à renvoyer à l'analyse faite par le premier juge et à relever, pour le surplus, que la détention du carburant fraudé est largement plus récente que la date de facturation.
Le demandeur, qui avait cité lesdits prévenus du chef d'infractions commises du 17 janvier 2009 au 15 août 2010, n'a donc pas allégué l'existence, dans le chef de ces personnes, d'un bénéfice tiré de l'effet utile que la fausse facturation leur aurait valu et qui aurait porté sur leur obligation solidaire à la dette accisienne.
Invoqué pour la première fois devant la Cour, le moyen est irrecevable.
Quant à la quatrième branche :
Le demandeur soutient qu'en raison de l'unité d'intention, la cour d'appel n'a pu déclarer l'action publique prescrite à l'égard de Ch B. tout en décidant qu'elle ne l'est pas pour la société dont il est le gérant, ici la quatrième défenderesse.
Mais l'arrêt relève que la société a introduit un recours fiscal susceptible de mettre en œuvre des pièces qui tendraient à réaliser l'objet du faux fiscal. Les juges d'appel ont ainsi attribué à la société un acte d'usage de faux qu'ils n'ont pas relevé dans le chef de son gérant. L'unité d'intention n'empêche pas la persistance d'un usage de faux pour une seule de ces deux personnes distinctes. Cette différence justifie légalement la décision suivant laquelle la prescription est atteinte quant à l'infraction imputée au gérant alors qu'elle ne l'est pas pour celle mise à charge de la société.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la cinquième branche :
L'arrêt décide que la demande d'un bulletin de renseignements adressée le 1er juin 2015 par un expert fiscal à l'administration communale compétente, ne peut être considérée comme un acte interruptif de la prescription.
Le demandeur critique cette décision. Il fait valoir que l'administration des douanes et accises détient une compétence générale de recherche et de constatation des délits commis dans le domaine de ses attributions légales et que la demande de renseignements susdite constitue un acte qui, émanant de cette autorité qualifiée, a pour objet de mettre la cause en état d'être jugée.
Pour interrompre la prescription de l'action publique, l'acte d'instruction ou de poursuite doit émaner d'une autorité ayant qualité pour rassembler les preuves et les éléments nécessaires au jugement de ladite action et pour traduire en justice la personne qui en est l'objet.
L'arrêt ne dénie pas à l'administration des douanes et accises sa qualité de partie poursuivante habilitée à introduire l'action publique du chef des délits qu'il lui appartient de rechercher.
L'arrêt ne constate pas non plus que l'expert fiscal ayant signé la demande de renseignements est un agent de l'administration Enquête et Recherche ayant agi dans le cadre des compétences attribuées à cette administration pour la constatation des délits commis dans le domaine des attributions légales des douanes et accises.
L'arrêt relève, ce qui est différent, qu'en dépit du fait que le moyen était connu de l'administration des douanes et accises pour avoir été soulevé en termes de conclusions, la cour d'appel ne dispose pas des éléments lui permettant de déterminer si l'expert fiscal ayant signé les demandes de bulletins de renseignements était effectivement chargé par l'administration des douanes et accises, sur ordre ou par délégation, d'intervenir dans un dossier appelé à faire l'objet d'une poursuite pénale.
Revenant à décider que la qualité requise n'est pas prouvée dans le chef de la personne physique ayant signé l'acte, d'où il suit que ce dernier n'interrompt pas la prescription, cette décision ne viole ni l'article 22 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, ni les articles 1, 2°, 186, 267, 272 et 281 de la loi générale du 18 juillet 1977 sur les douanes et accises.
La cour d'appel n'a pas non plus méconnu les droits de la défense du demandeur puisque l'exception qu'elle a accueillie avait été soulevée dans les conclusions communiquées par les huitième et neuvième défendeurs le 18 novembre 2019, conformément au calendrier établi de l'accord des parties, et que le conseil du demandeur a ensuite été entendu en ses moyens puis en sa réplique aux audiences des 5 et 12 décembre 2019.
Pour le surplus, l'affirmation, par le demandeur, que le signataire de la demande de renseignements a également signé le procès-verbal complémentaire du 16 novembre 2015, gît en fait.
Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur les poursuites exercées à charge des autres défendeurs :
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
3. En tant que le pourvoi est dirigé contre les décisions statuant sur les demandes de reproduction des marchandises fraudées :
Le demandeur ne fait valoir aucun moyen.
4. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action civile exercée contre les premier, deuxième, troisième, quatrième et septième défendeurs et tendant à la condamnation de ceux-ci au payement des droits éludés :
Sur le second moyen :
L'arrêt confirme la condamnation des défendeurs au payement des droits éludés. Toutefois, soulevant d'office le peu de diligence mise par l'administration des douanes et accises dans le traitement du litige, l'arrêt suspend le cours des intérêts moratoires au taux légal de 9,6 % depuis le 22 juillet 2012, date à laquelle la cour d'appel a estimé que l'action publique aurait dû être mise en mouvement, jusqu'au 23 février 2017, date à laquelle la cause fut soumise à la chambre des mises en accusation pour le contrôle des méthodes particulières de recherche.
Le demandeur fait valoir que cette décision viole l'article 311, § 1er, de la loi générale du 18 juillet 1977 sur les douanes et accises, ainsi que le principe de la séparation des pouvoirs, en ce qu'elle prive le demandeur du bénéfice d'un intérêt de retard légalement dû et qu'elle empiète sur les attributions de l'administration fiscale, seule habilitée à accorder, dans certains cas, une remise totale ou partielle de cet intérêt.
L'article 311, § 1er, précité, n'autorise pas le juge répressif, qui constate un retard dans l'exercice de l'action publique, à exonérer, pour ce motif, la dette accisienne de l'intérêt dont elle est grevée par la loi.
Dans cette mesure, le moyen est fondé.
5. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action civile exercée contre les cinquième, sixième, huitième, neuvième, dixième et onzième défendeurs et tendant à la condamnation de ceux-ci au payement des droits éludés :
L'arrêt réserve à statuer sur les éventuelles condamnations à prononcer contre ces défendeurs et pose une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle.
Pareille décision n'est pas définitive au sens de l'article 420, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle et est étrangère aux cas visés par le second alinéa de cet article.
Le pourvoi est irrecevable.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué en tant que, rendu sur l'action civile exercée par le troisième demandeur contre les premier, deuxième, troisième, quatrième et septième défendeurs, il dit que « le cours des intérêts moratoires au taux légal de 9,6 % est suspendu du 22 juillet 2012 au 23 février 2017 » ;
Rejette les pourvois pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Condamne le troisième demandeur aux quatre cinquièmes des frais de son pourvoi et réserve le surplus desdits frais pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge de renvoi ;
Condamne chacun des deux premiers demandeurs aux frais de son pourvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle, autrement composée.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de mille sept cent quarante-six euros quarante-huit centimes dont I) sur le pourvoi d'Y. J. : cent trois euros quarante centimes dus et cent septante-neuf euros quatre-vingt-neuf centimes payés par ce demandeur ; II) sur le pourvoi de G. Z. : cent trois euros quarante centimes dus et cent septante-neuf euros quatre-vingt-neuf centimes payés par ce demandeur et III) sur le pourvoi de l'Etat belge : soixante et un euros soixante centimes dus et mille cent dix-huit euros trente centimes payés par ce demandeur.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du seize septembre deux mille vingt par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.20.0143.F
Date de la décision : 16/09/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-09-16;p.20.0143.f ?

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