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03/06/2020 | BELGIQUE | N°P.20.0499.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 juin 2020, P.20.0499.F


N° P.20.0499.F
H.A.
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Philippe Charpentier, avocat au barreau de Huy,

contre

ETAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, et de l'Asile et la Migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, boulevard Pacheco, 44,
défendeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Cathy Piront, avocat au barreau de Liège, et Stamatina Arkoulis, avocat au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dir

igé contre un arrêt rendu le 28 avril 2020 par la cour d'appel de Liège, chambre des mises en accu...

N° P.20.0499.F
H.A.
étranger, privé de liberté,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Philippe Charpentier, avocat au barreau de Huy,

contre

ETAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, et de l'Asile et la Migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, boulevard Pacheco, 44,
défendeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Cathy Piront, avocat au barreau de Liège, et Stamatina Arkoulis, avocat au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 28 avril 2020 par la cour d'appel de Liège, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

Les articles 6.3, c, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 14.3, d, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que le principe général du droit relatif au respect des droits de la défense, consacrent le droit, pour toute personne dont la cause doit être examinée par un juge, de comparaître à l'audience, d'être entendue et de se défendre en personne devant lui.

Le droit de comparution personnelle est applicable aux étrangers qui, privés de liberté en vue d'éloignement, entendent soumettre au pouvoir judiciaire le contrôle de légalité institué par les articles 71 et 72 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers.

L'article 6 de la Convention ne prévoit pas que les Etats parties à celle-ci puissent restreindre les garanties inhérentes au procès équitable. En revanche, l'article 15.1 institue un droit de dérogation temporaire aux obligations prévues par la Convention, notamment en cas de danger vital pour la nation, dans la stricte mesure où la situation l'exige et à condition d'en informer le secrétaire général du Conseil de l'Europe.

Le principe de légalité et de prévisibilité de la procédure pénale et le principe général du droit précité commandent de subordonner ce droit de dérogation temporaire aux garanties du procès équitable, à l'adoption d'une norme de droit interne accessible aux personnes concernées et énoncée de manière précise.

La chambre des mises en accusation a statué en l'absence du demandeur, privé de liberté, alors qu'il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que son conseil avait sollicité la délivrance d'un ordre d'extraction.

L'arrêt s'en explique en citant une ordonnance du 16 mars 2020 du premier président de la cour d'appel, laquelle décide en considération de la pandémie actuelle, que « pour éviter la présence trop importante aux audiences et soulager le personnel de sécurité, il est [ ... ] mis fin aux transferts des détenus. Les avocats sont invités à représenter leurs clients ».

La chambre des mises en accusation n'a pas constaté qu'il avait été impossible d'extraire le demandeur en vue de lui permettre de se défendre personnellement devant elle. Par contre, elle a admis que le droit de comparution personnelle, garanti par l'article 6 de la Convention, puisse être suspendu par un acte qui, émanant d'une autorité judiciaire, ne constitue pas une loi ou une norme de droit interne présentant les mêmes qualités d'accessibilité et de précision.

L'arrêt attaqué méconnaît ainsi les dispositions conventionnelles et légales ainsi que le principe général du droit susvisés.

Le moyen est fondé.

Il n'y a pas lieu d'avoir égard au second moyen, qui ne saurait entraîner une cassation sans renvoi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;
Réserve les frais pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge de renvoi ;
Renvoie la cause à la cour d'appel de Liège, chambre des mises en accusation, autrement composée.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Eric de Formanoir, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du trois juin deux mille vingt par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.20.0499.F
Date de la décision : 03/06/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-06-03;p.20.0499.f ?

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