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01/04/2020 | BELGIQUE | N°P.20.0337.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 01 avril 2020, P.20.0337.F


N° P.20.0337.F
I. et II. A. D. S. C.,
prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Alexandre Chateau, avocat au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 20 mars 2020 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque cinq moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 30 mars 2020, l'avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe.
A l'audience du 1er av

ril 2020, le conseiller François Stévenart Meeûs a fait rapport et l'avocat général précité...

N° P.20.0337.F
I. et II. A. D. S. C.,
prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Alexandre Chateau, avocat au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 20 mars 2020 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque cinq moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 30 mars 2020, l'avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe.
A l'audience du 1er avril 2020, le conseiller François Stévenart Meeûs a fait rapport et l'avocat général précité a conclu.

II. LES FAITS

Le demandeur est placé le 12 novembre 2018 sous mandat d'arrêt du chef de tentative de meurtre.

Par un jugement rendu contradictoirement le 26 juin 2019, le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles déclare établies les préventions mises à sa charge du chef de tentative de meurtre et d'infractions relatives aux armes. Il condamne le demandeur à une peine unique d'emprisonnement de six ans.

Le demandeur et le ministère public interjettent appel de ce jugement.

La cause est introduite le 27 novembre 2019 à l'audience de la cour d'appel de Bruxelles où elle est remise au 17 mars 2020, en vue de permettre au prévenu et à la partie civile d'échanger leurs conclusions.

Le 17 mars 2020, la cause est remise à l'audience du lendemain.

Le 18 mars 2020, la cour d'appel remet la cause sine die « suite à la crise sanitaire mondiale et aux dispositions prises par les autorités et Madame le premier président ».

Le même jour, le demandeur dépose une requête de mise en liberté.

Par l'arrêt rendu le 20 mars 2020, cette demande est déclarée non fondée. Il s'agit de l'arrêt attaqué.

III. LA DÉCISION DE LA COUR

A. Sur le pourvoi formé le 20 mars 2020 :

Sur le premier moyen :

Pris de la violation des articles 5.3 et 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 149 de la Constitution, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense et de la violation de la foi due aux actes, le moyen reproche à l'arrêt de ne pas constater le dépassement du délai raisonnable pour être jugé.

Le demandeur soutient que la cour d'appel n'a pas répondu adéquatement aux critiques soulevées dans ses conclusions relatives à l'ordonnance de service modificative prise le 18 mars 2020 par le premier président de la cour d'appel de Bruxelles en ce que, d'une part, cette ordonnance limite ses effets au 30 avril 2020, alors que les mesures d'urgence pour limiter la propagation du coronavirus Covid-19 contenues dans l'arrêté ministériel du 18 mars 2020 sont d'application jusqu'au 5 avril inclus et que, d'autre part, elle méconnaît les recommandations du Collège des cours et tribunaux du 16 mars 2020 relatives aux dossiers qui concernent des détenus. Selon le demandeur, elle n'a pas davantage répondu à l'argument relatif à l'absence de garantie que sa cause sera traitée dans un délai raisonnable au-delà du 30 avril 2020.

L'obligation de motiver les jugements et arrêts et de répondre aux conclusions d'une partie est remplie lorsque la décision comporte l'énonciation des éléments de fait ou de droit à l'appui desquels une demande, une défense ou une exception sont accueillies ou rejetées. Le juge n'est pas tenu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation.

Par ailleurs, pour apprécier la durée de la détention préventive, le juge doit prendre en compte la procédure dans son ensemble, depuis la délivrance du mandat d'arrêt jusqu'au moment où il vérifie la compatibilité de la détention avec l'article 5.3 de la Convention. Il n'a pas à prendre en considération une hypothèse.

La cour d'appel a énoncé que
- les autorités judiciaires ont fait preuve de diligence dans l'instruction de la présente cause ;
- le délai pour fixer la cause devant le premier juge n'a pas été exagérément long ;
- le temps pris par le premier juge pour rendre sa décision n'est pas anormal ;
- même si l'examen de la cause fixée à l'audience du 18 mars 2020 de la cour a été ajourné sine die à la suite de la crise sanitaire mondiale et aux dispositions prises par les autorités et le premier président de la cour d'appel de Bruxelles, la procédure ne paraît actuellement pas souffrir d'un retard injustifié ;
- les ordonnances de service des 16 et 18 mars 2020 ont une durée limitée, le régime instauré prenant fin le 30 avril 2020.

Par ces considérations, la cour d'appel a régulièrement motivé et légalement justifié sa décision que le jugement de la cause n'a pas subi de retard anormal et que le délai raisonnable pour être jugé n'a pas été dépassé.

Le moyen ne peut être accueilli.

Sur le deuxième moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 149 de la Constitution.

Le demandeur reproche à l'arrêt de ne pas répondre de façon adéquate au moyen qui faisait valoir, d'une part, un risque d'exposition accru au coronavirus Covid-19 en prison et dénonçait la situation sanitaire critique des établissements pénitentiaires belges au terme d'un rapport de juillet 2017 du Comité européen pour la prévention de la torture et, d'autre part, des restrictions de visites de ses enfants en milieu carcéral suite à la remise de sa cause. Il fait aussi grief aux juges d'appel de ne pas avoir précisé les mesures aptes à garantir son accès à des conditions minimales de santé et d'hygiène en prison et le maintien de contacts avec ses proches.

L'obligation de répondre aux conclusions des parties est étrangère à la qualité de la réponse.

Dans cette mesure, le moyen manque en droit.

Les juges d'appel ont énoncé qu' « il n'apparait pas des éléments portés à la connaissance de la cour que cette détention ne permettrait pas au prévenu, vu la situation sanitaire, de bénéficier des conditions minimales de santé et d'hygiène ».

Par cette considération, ils ont régulièrement motivé et légalement justifié leur décision qu'au moment où ils ont statué, les conditions de détention du demandeur ne s'apparentaient ni à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.

Sur le troisième moyen :

Le moyen est pris de la méconnaissance de la présomption d'innocence.

Le demandeur fait grief aux juges d'appel d'avoir laissé apparaître une opinion ou une conviction sur les faits qui lui sont reprochés, alors que cette compétence appartient à la juridiction de jugement appelée à statuer au fond.

Les juges d'appel saisis d'une requête en vue de la mise en liberté du prévenu n'affirment pas sa culpabilité lorsqu'ils se réfèrent, pour rejeter cette demande, aux indices sérieux contenus dans le mandat d'arrêt et aux éléments repris dans le jugement attaqué, que n'infirment pas les éléments portés ensuite à leur connaissance.

L'arrêt énonce qu'« il subsiste des indices sérieux de culpabilité à charge [du demandeur]. Ceux-ci, notamment repris au mandat d'arrêt et au jugement prononcé le 26 juin 2019, ne sont pas infirmés par les éléments portés actuellement à la connaissance de la cour telles l'analyse des images de caméra de vidéo-surveillance, les déclarations des différents témoins identifiés au cours de l'instruction et les déclarations du prévenu qui admet avoir fait usage d'une arme ».

Ainsi, la cour d'appel ne s'est pas prononcée sur le fondement des poursuites.

Le moyen ne peut être accueilli.

Sur le quatrième moyen :

Le moyen est pris de la violation du principe dispositif.

Le demandeur fait grief aux juges d'appel d'avoir considéré qu'une détention exercée sous la modalité de la surveillance électronique ne présente aucune garantie pour la sécurité publique, alors qu'il avait précisé dans ses conclusions qu'il n'entendait plus revendiquer le bénéfice de cette modalité.

Le moyen ne saurait entraîner la cassation et est, partant, irrecevable à défaut d'intérêt.

Sur le cinquième moyen :

Le moyen est pris de la violation de l'article 149 de la Constitution et de la méconnaissance de la foi due aux actes.

Le demandeur reproche à l'arrêt d'énoncer qu'il sollicite sa libération moyennant le versement d'une caution de 800 euros, alors que ce montant ne ressort ni de ses conclusions, ni du procès-verbal d'audience. Il précise avoir proposé en plaidoiries le versement d'une caution « de l'ordre de 1.800 euros », ce qui aurait pu aboutir à lever les motifs du maintien de sa détention.

En tant qu'il exige pour son examen une vérification d'éléments de fait, pour laquelle la Cour est sans pouvoir, le moyen est irrecevable.

Par ailleurs, dans la mesure où il soutient que l'arrêt viole la foi due à ses conclusions, alors que l'affirmation critiquée ne s'y réfère pas, le moyen manque en fait.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

B. Sur le pourvoi formé le 23 mars 2020 :

Le demandeur se désiste de son pourvoi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Décrète le désistement du pourvoi formé le 23 mars 2020 ;
Rejette le pourvoi formé le 20 mars 2020 ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de soixante et un euros onze centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du premier avril deux mille vingt par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.20.0337.F
Date de la décision : 01/04/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-04-01;p.20.0337.f ?

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