Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.1067.F
A. R.
prévenue,
demanderesse en cassation,
ayant pour conseil Maître Judith Orban, avocat au barreau d'Eupen.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 25 septembre 2019 par le tribunal correctionnel d'Eupen, siégeant en degré d'appel.
La demanderesse invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Le moyen est pris de la violation des articles 37quinquies, § 3, alinéa 2, du Code pénal, et 195 du Code d'instruction criminelle. Il est reproché au jugement de n'octroyer la peine de travail que pour la prévention de délit de fuite, sans dire pourquoi cette peine, sollicitée par la demanderesse, n'a pas été également prononcée pour l'infraction au code de la route.
Le jugement énonce qu'il y a lieu de faire partiellement droit à la demande subsidiaire d'une peine de travail et il s'en explique par référence à la situation financière précaire de la demanderesse.
Mais le tribunal a également décidé que la peine de travail ne devait pas exclure une amende, avec sursis partiel, pour la seconde prévention. Les juges d'appel s'en sont expliqués par une considération distincte portant sur la nécessité de faire prendre conscience à la demanderesse de son comportement routier inadéquat.
Les juges d'appel ont ainsi légalement justifié leur décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
Le moyen est pris de la violation des articles 195 du Code d'instruction criminelle et 3, alinéa 4, de la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation. Il est reproché au jugement de ne pas motiver le refus d'octroyer à la demanderesse la suspension du prononcé qu'elle avait sollicitée.
Le rejet d'une demande de suspension formulée par le prévenu sans motif propre ou spécifique, est régulièrement motivé et légalement justifié par la prononciation d'une peine dont la justification permet de comprendre pourquoi cette prononciation n'a pas été suspendue.
Dans les conclusions déposées pour elle à l'audience du 26 juin 2019, la demanderesse a invoqué en substance, à titre de circonstances qualifiées par elle d'atténuantes, son jeune âge, l'absence d'antécédent judiciaire alors qu'elle conduit depuis plus de sept ans, la modestie de ses revenus, la nécessité où elle se trouve d'utiliser son véhicule pour se rendre tous les jours à son travail et conduire ses enfants à l'école.
Sur la base de ces circonstances, la demanderesse ne s'est pas bornée à solliciter la suspension. Elle a postulé aussi, et pour les mêmes raisons quoiqu'à titre subsidiaire, un sursis le plus large possible, la possibilité de prester une éventuelle déchéance du droit de conduire en dehors des jours ouvrables, et la substitution de travaux d'intérêt général à l'amende si celle-ci devait être envisagée.
Le juge répond à ces conclusions en octroyant une peine de travail pour la première prévention, une amende avec sursis pour la moitié du chef de la seconde, une déchéance du droit de conduire avec sursis pour les deux tiers et l'autorisation de prester le solde les week-ends et jours fériés.
La demanderesse n'a pas mis les circonstances atténuantes qu'elle invoquait, en relation exclusive ou spécifique avec la suspension du prononcé, puisque ces circonstances pouvaient également justifier, à ses yeux, les autres modalités de la sanction que ses conclusions suggéraient.
Il en résulte que la décision de ne pas suspendre le prononcé est motivée à suffisance par les raisons mises en avant pour justifier le choix de ces autres modalités.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la troisième branche :
Le moyen est pris de la violation des articles 195 et 211bis du Code d'instruction criminelle. Il est reproché au jugement de ne pas justifier, de façon adéquate, la substitution d'un sursis partiel au sursis total dont le premier juge avait assorti l'amende infligée du chef d'infraction au code de la route.
L'article 211bis prévoit qu'en cas d'aggravation de la peine, les membres de la juridiction d'appel doivent se prononcer à l'unanimité, ce que le jugement attaqué dit être le cas. Même lue en combinaison avec l'article 195, cette disposition ne subordonne pas l'aggravation à la formulation d'une motivation « adéquate ».
Le motif énoncé dans la réponse à la première branche du moyen et qui, dans l'esprit des juges d'appel, fonde la prononciation d'une peine d'amende ferme à concurrence de la moitié de son montant, permet à la demanderesse de comprendre pourquoi le tribunal a substitué un sursis partiel au sursis total que le premier juge lui avait octroyé.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de septante et un euros un centime dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.