La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/01/2020 | BELGIQUE | N°C.18.0514.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 20 janvier 2020, C.18.0514.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.18.0514.F
J. M. R.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,

contre

S. G.,
défenderesse en cassation.




I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 25 juin 2018 par la cour d'appel de Liège.
Le 20 décembre 2019, l'avocat général Jean Marie Genicot a déposé des conclusio

ns au greffe.
Par ordonnance du 23 décembre 2019, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.18.0514.F
J. M. R.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,

contre

S. G.,
défenderesse en cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 25 juin 2018 par la cour d'appel de Liège.
Le 20 décembre 2019, l'avocat général Jean Marie Genicot a déposé des conclusions au greffe.
Par ordonnance du 23 décembre 2019, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le président de section Mireille Delange a fait rapport et l'avocat général Jean Marie Genicot a été entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.

III. La décision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la troisième branche :

L'arrêt constate que l'enfant est « âgé de 3,5 ans », que le demandeur « a 67 ans et est pensionné tout en continuant à exercer son activité d'avocat », que la défenderesse « a 36 ans et est actuellement en incapacité de travail », que « les parties n'ont pas pu épargner à leur enfant un hyper conflit parental en adoptant un comportement de disqualification réciproque sauvage », « que l'enfant ne pourra se construire que s'il peut évoluer dans une cohérence éducative qui repose nécessairement sur une collaboration respectueuse entre ses parents », que la défenderesse « a pris la décision de résider chez sa mère en s'éloignant du centre-ville d'environ 32 kilomètres », que la défenderesse « explique son opposition à l'organisation d'un hébergement égalitaire en raison des doutes [du demandeur] quant à sa paternité, du jeune âge de l'enfant, du manque de disponibilité du père et du manque d'intérêt du père pour l'enfant ».
Après avoir écarté les objections de la défenderesse relatives à la problématique de la paternité du demandeur et au manque d'intérêt de celui-ci pour l'enfant, l'arrêt considère que « la cour [d'appel] est attentive à l'organisation spécifique des modalités d'hébergement du jeune enfant ; en effet, de très nombreux auteurs, psychologues et pédopsychiatres, ont mis en évidence les difficultés auxquelles pouvaient être confrontés de très jeunes enfants alors qu'ils étaient privés de contacts prolongés avec leur mère » et cite à l'appui de cette opinion plusieurs écrits de psychologues et pédopsychiatres.
Il considère ensuite que, « par conséquent, un hébergement strictement égalitaire ne paraît pas adapté compte tenu de l'âge de l'enfant », que le demandeur « a expliqué à l'audience continuer à exercer sa profession d'avocat et être occupé uniquement en semaine de 8 heures 15 à 12 heures 30 puis de 13 heures 45 à 18 heures », que la défenderesse « n'a actuellement pas d'activité professionnelle », que, « par conséquent, compte tenu des contraintes de chacune des parties, de la situation d'éloignement créée par la décision unilatérale de la mère, la cour [d'appel] maintiendra le domicile et l'hébergement principal de l'enfant chez la mère, organisera les modalités d'hébergement de l'enfant chez le père afin que celui-ci puisse continuer à construire son lien parental en fonction de ses disponibilités ».
Il ressort de ces considérations que, contrairement à ce que suppose le moyen, en cette branche, l'arrêt détermine un hébergement non égalitaire de l'enfant, non au seul motif de son jeune âge, mais en tenant compte de l'ensemble des circonstances concrètes de la cause et de l'intérêt de l'enfant et des parents.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.

Quant à la première branche, en tous ses rameaux :

Dans ses conclusions de synthèse d'appel, le demandeur faisait valoir, se fondant essentiellement sur le rapport Warshak de 2014, que l'âge de l'enfant ne peut être un frein à la mise en place d'un hébergement alterné. Dans ses conclusions de synthèse d'appel, la défenderesse répondait qu'il existait de nombreuses contre-indications à l'hébergement égalitaire pour de jeunes enfants et faisait notamment référence à l'opinion de Gérard Poussin sur la question.
L'arrêt énonce que « de très nombreux auteurs, psychologues et pédopsychiatres, ont mis en évidence les difficultés auxquelles pouvaient être confrontés de très jeunes enfants alors qu'ils étaient privés de contacts prolongés avec leur mère » et cite à l'appui de cette opinion plusieurs écrits de psychologues et pédopsychiatres, dont Gérard Poussin.
En utilisant la littérature spécialisée pour apprécier la pertinence d'un hébergement égalitaire pour un jeune enfant, question qui était dans le débat, le juge ne fonde pas sa décision sur sa connaissance personnelle. Ce faisant, il ne méconnaît ni le principe général du droit relatif au respect des droits de la défense ni le principe général du droit dit principe du contradictoire, et il ne viole pas l'article 1138, 2° et 3°, du Code judiciaire.
Pour le surplus, ainsi que cela ressort de la réponse à la troisième branche du moyen, l'arrêt fixe les modalités d'hébergement non égalitaire de l'enfant en tenant compte de l'ensemble des circonstances concrètes de la cause et de l'intérêt de l'enfant et des parents, et non au seul motif de son jeune âge. Contrairement à ce que le moyen soutient, il ne statue pas par voie de disposition générale et permet à la Cour d'exercer son contrôle.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

Quant à la deuxième branche :

En vertu de l'article 374, § 2, du Code civil, à défaut d'accord des parents, en cas d'autorité parentale conjointe, le tribunal examine prioritairement, à la demande d'un des parents au moins, la possibilité de fixer l'hébergement de l'enfant de manière égalitaire entre ses parents ; toutefois, si le tribunal estime que l'hébergement égalitaire n'est pas la formule la plus appropriée, il peut décider de fixer un hébergement non égalitaire ; il statue en tout état de cause par un jugement spécialement motivé, en tenant compte des circonstances concrètes de la cause et de l'intérêt des enfants et des parents.
Conformément aux articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire, chacune des parties a la charge de prouver les faits qu'elle allègue.
Il s'ensuit que, si chacune des parties doit établir les faits allégués, c'est le juge qui doit apprécier si, sur la base de ces faits, l'hébergement égalitaire constitue la formule la plus appropriée.
Le moyen, qui, en cette branche, repose sur le soutènement qu'il appartient au parent qui refuse l'hébergement égalitaire d'établir que celui-ci n'est pas une solution adaptée à la situation, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de mille quatre cent cinquante-six euros onze centimes envers la partie demanderesse.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Mireille Delange, les conseillers Michel Lemal, Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du vingt janvier deux mille vingt par le président de section Mireille Delange, en présence de l'avocat général Jean Marie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.18.0514.F
Date de la décision : 20/01/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-01-20;c.18.0514.f ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award