La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/11/2019 | BELGIQUE | N°P.19.1134.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 27 novembre 2019, P.19.1134.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.1134.F
D.D. P.,
inculpé,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Olivia Venet et Alain Vergauwen, avocats au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 12 novembre 2019 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Michel Nol

et de Brauwere a conclu.


II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

1. Le moyen invoq...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.1134.F
D.D. P.,
inculpé,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Olivia Venet et Alain Vergauwen, avocats au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 12 novembre 2019 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

1. Le moyen invoque la violation des articles 36, § 1er, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive et 6.3, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : en considérant « que les droits de la défense n'ont pas été violés, l'instruction étant secrète et non contradictoire, et des devoirs d'instruction ayant été ordonnés par le juge d'instruction, les nécessités de l'instruction fondant l'accès limité [du demandeur] au dossier répressif à l'occasion du dépôt de la présente requête », l'arrêt attaqué viole les droits de la défense du demandeur, ne respecte pas l'égalité des armes et méconnaît le principe du contradictoire ; le dossier n'a pas été mis à la disposition du demandeur avant les audiences de la chambre du conseil et de la chambre des mises en accusation chargées de statuer sur sa demande de retrait de certaines conditions mentionnées dans l'ordonnance de prolongation de sa mise en liberté sous conditions, en l'occurrence l'interdiction d'entrer en contact avec les employés et la clientèle de son étude, d'y pénétrer, et de passer tout acte ; à cause du refus d'accès au dossier, le demandeur s'est trouvé dans l'impossibilité de vérifier la pertinence des arguments invoqués par le ministère public pour s'opposer au retrait desdites conditions, le privant ainsi d'une application effective du droit à un procès équitable.

2. L'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est, en règle, pas applicable à la procédure suivie devant les juridictions d'instruction en matière de détention préventive. En effet, ces juridictions ne statuent pas sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale.

Dans la mesure où il invoque la violation de cette disposition, le moyen manque en droit.

3. En vertu de l'article 57, § 1er, du Code d'instruction criminelle, sauf les exceptions prévues par la loi, l'instruction est secrète. Il en résulte que le caractère secret de l'instruction peut justifier qu'il soit statué sur la demande d'un inculpé mis en liberté qui a introduit en application de l'article 36, § 1er, alinéa 4, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive une requête aux fins d'obtenir le retrait ou la modification de tout ou partie des conditions imposées par le juge d'instruction, sans que le dossier complet ait été mis à la disposition de l'inculpé.

Le principe général du droit relatif au respect des droits de la défense ne prive pas le législateur du pouvoir d'assigner, à la contradiction organisée dans le cadre de l'instruction préparatoire, les limites qu'il estime inhérentes à la protection de la sécurité publique et à l'intérêt de l'enquête.

4. Le secret de l'instruction implique également que l'autorisation de consulter le dossier répressif ne peut, en règle, être donnée que lorsque la loi le prévoit expressément. Les articles 36 et 37 de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive n'accordent pas à l'inculpé mis en liberté sous conditions le droit de consulter le dossier répressif.

En tant qu'il soutient que dans le cadre de la procédure visée à l'article 36, § 1er, alinéa 4, de la loi précitée, l'inculpé doit se voir reconnaître un droit d'accès au dossier deux jours avant l'audience, le moyen manque en droit.

5. L'arrêt considère que l'instruction est secrète et non contradictoire, que des devoirs d'instruction ont été ordonnés par le juge d'instruction et que les nécessités de l'instruction fondent l'accès limité au dossier répressif.

Ainsi, les juges d'appel ont légalement justifié leur constat que les droits de défense du demandeur n'ont pas été violés.

A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.

6. Pour le surplus, dans la mesure où il allègue que les pièces que le ministère public lui a transmises moins de quarante-huit heures avant l'audience sont exclusivement à charge et ont été établies uniquement dans le but de réactiver les motifs déduits des risques de collusion ou de déperdition des preuves, ou que le mandat de perquisition exécuté le 12 novembre 2019 a été versé au dossier à l'insu du demandeur, le moyen requiert un examen en fait qui échappe au pouvoir de la Cour.

Dans cette mesure, le moyen est irrecevable.

Sur le deuxième moyen :

Selon le demandeur, l'arrêt ne motive le risque de récidive que d'une manière stéréotypée, sans répondre à ses conclusions.

Mais l'arrêt se fonde également sur le lien hiérarchique que le demandeur exerce sur les employés de son étude notariale, sur la probabilité que ceux-ci devront encore être entendus, sur la circonstance que l'expertise judiciaire est toujours en cours et suppose l'examen de documents dont la perte serait préjudiciable à la manifestation de la vérité, et enfin sur la considération d'après laquelle ces devoirs pourraient être compromis si les interdictions de contacts visées dans l'ordonnance entreprise devaient dès à présent prendre fin.

A le supposer fondé, le grief ne saurait entraîner la cassation de la décision, celle-ci prenant également appui sur la motivation du risque de déperdition des preuves et du risque de collusion avec des tiers, qui suffit à justifier légalement la décision.

Dénué d'intérêt, le moyen est irrecevable.

Sur le troisième moyen :

Le demandeur soutient que les conditions mises à sa libération constituent une interdiction professionnelle prohibée par la loi dans la mesure où, les devoirs utiles n'étant pas mis en œuvre avec la célérité requise, cette interdiction équivaut à une mesure de répression immédiate, portant atteinte à la présomption d'innocence.

L'arrêt ne constate pas que l'instruction marque le pas mais, au contraire, que l'enquête se poursuit sans désemparer.

Les mesures restreignant temporairement le libre accès du demandeur à son activité professionnelle ont été édictées en remplacement de la détention préventive et non pour se substituer à la liberté pure et simple.

La cour d'appel estime ces mesures nécessaires pour pallier les risques, qu'elle décrit, d'entrave au déroulement de l'enquête.

Ni de ces motifs de l'arrêt, ni du caractère d'alternative à la détention dont les conditions sont revêtues, il ne saurait se déduire que la cour d'appel, en les prolongeant, ait jugé le demandeur coupable et passible, à ce titre, d'une sanction immédiate.

Le moyen ne peut être accueilli.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de soixante-quatre euros quarante et un centimes dus.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir et Tamara Konsek, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.19.1134.F
Date de la décision : 27/11/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-11-27;p.19.1134.f ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award